Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

COMAGUER : Ukraine : Ceux d’en haut et ceux d’en bas


Pour reprendre une notion rendue célèbre par un très grand auteur, il y a dans la société ukrainienne des classes sociales profondément séparées et antagoniques.
Pour sortir du discours propagandiste dont nous sommes abreuvés quotidiennement qui nous présente une « identité ukrainienne » qui serait soudainement mise en péril ce bulletin propose :
d’une part un portait d’oligarque et probablement l’un des plus actifs dans la mise en scène d’une Ukraine totalement intégrée dans l’espace du capital occidental impérialiste et en partageant tous les codes culturels,
d’autre part un témoignage sur la condition ouvrière et populaire émanant du journal du Parti Communiste bolchévique de toute l’Union Soviétique dont les militants étaient très actifs dans la nouvelle Ukraine indépendante.


Viktor Pinchuk : L’oligarque globaliste


Né en 1960 cet oligarque ukrainien a un parcours particulier. Pur produit de l’excellente formation scientifique et technologique de l’Ukraine socialiste, il bascule très vite et avec talent dans le nouveau système oligarchique et, fortune faite, il s’éloigne dés 2007 du marécage de la politique ukrainienne pour devenir un oligarque globaliste adoubé à Davos où il tient salon à chaque sommet. Ami et soutien financier du clan Clinton qui en même temps qu’il fait de son entreprise une internationale capitaliste globale intervient dans le champ idéologique global avec son initiative Yalta European Strategy (YES !). La première réunion de ce forum organisé à ses frais se déroule symboliquement à Yalta en 2004 pour annoncer un nouveau partage du monde où l’Ukraine est par le biais de l’Union Européenne totalement absorbée par l’Occident. Il aborde enfin le marché mondial étroit de l’art moderne à la fois très juteux et reposant comparé à la grande industrie. Ce passage au « capitalisme global sans usines » a déjà été tenté avec succès par quelques autres comme l’oligarque russe Abramovitch.

Quelques points de repère chronologiques
1-De l’ingénieur au patron
Bien formé dans la technologie de la métallurgie il est un ingénieur remarqué dés le début de sa carrière mais il va savoir immédiatement profiter des opportunités de la privatisation des entreprises publiques entamée dés l’indépendance de l’Ukraine. Sa métamorphose en oligarque : l’ingénieur salarié se transforme soudain en chef d’entreprise et en actionnaire majoritaire est grandement facilitée par son mariage avec la fille du second président de l’Ukraine nouvelle Leonid Kouchma. Il s’associe avec le plus riche des oligarques ukrainiens : Akhmetov pour racheter le joyau de la sidérurgie soviétique le complexe de Krivoy Rog bâti sur les plus importantes mines de fer du pays. Il ajoute à l’usine sidérurgique elle-même l’achat d’une mine de fer voisine mais cette opération supplémentaire va lui poser problème. En effet pour éviter d’apparaitre officiellement, il demande au plus dangereux des oligarques ukrainiens Igor Kolomoisky d’acheter lui-même la mine et de la lui revendre ensuite moyennant une commission de 10%. L’achat effectué Pinchuk verse ce qu’il doit, commission comprise, mais constate que K ne lui cède pas les actions de la mine. L’affaire était annoncée comme devant se résoudre devant une juridiction britannique mais s‘est conclue par un arbitrage privé sans sortir du monde clos des vautours oligarques.


2-Conflits entre clans d’oligarques

La prise du pouvoir par les petits oligarques de l’Ouest représentés par Yushchenko et Timoshenko à la suite du coup d’état « Orange » de 2004. L’arrivée à la présidence de Yushchenko est rendu possible par les manifestations organisées avec le soutien des Etats-Unis (Bush-Mac Cain- Kissinger et autres) qui conduisent Yanukovitch vainqueur au second tour à accepter un troisième tour non prévu par la constitution qu’il va perdre. Pinchuk qui, avec son allié Akhmetov, le plus riche de tous les oligarques, a soutenu Yanukovitch le candidat des oligarques de l’Est les plus riches est en difficulté. L’équipe « orange » met en cause son rachat à vil prix -pour 800 millions $ – de la principale entreprise sidérurgique et minière (pour le fer) du pays héritée de la période soviétique : Krivoy Rog. L’entreprise est mise aux enchères (à 2,4 milliards $ un prix plus conforme d’après les observateurs financiers à sa valeur réelle) par le nouveau gouvernement et après un pas deux pas forcément hostile avec Arcelor elle est revendue 4,8 milliards $ au groupe indien mondialisé Mittal qui acquiert 93% du capital. L’épisode Krivoy Rog n’a guère souri à Pinchuk puisque sur plainte du Président Yushchenko un tribunal ukrainien a annulé la vente. Il semble que Pinchuk ait réussi ensuite à se faire rembourser une partie des capitaux qu’il avait investis dans Krivoy Rog.


Malgré tout, cet accident de parcours le conduit lui qui a deux fois en 1997 et 2002 été élu député au nom du Parti du Travail à abandonner le champ de la politique politicienne en Ukraine ; Pinchuk va donc concentrer son activité de sidérurgiste sur la nouvelle entreprise qu’il a fondée en 1990 à l’aval de la sidérurgie de base : Interpipe. Spécialisée dans la fabrication des tuyaux de gros diamètre elle a dès l’origine une importante clientèle en Russie qui installe dans cet immense pays ou à partir de ce pays des milliers de kilomètres de gazoducs et d’oléoducs. Sa seconde spécialité est la fabrication des roues et essieux de wagons.


3-Passage au globalisme

Sa base industrielle établie il élargit son champ d’action en créant une banque, en investissant dans les médias et en regroupant le tout dans une holding installée à Chypre. C’est alors qu’il développe ses interventions dans le champ politique global où il se positionne en faveur de l’intégration de l’Ukraine dans le camp atlantique via l’Union européenne. Ses outils : une fondation Viktor Pinchuk qui finance un groupe de pression YES pour Yalta European Security qui tient régulièrement un stand au forum de Davos où se tiennent des débats publics très courus connus sous le nom « petits déjeuners de la Fondation Pinchuk ». Il s’affirme ainsi comme un des plus chauds partisans de l’intégration de l’Ukraine dans le bloc atlantique. Il noue des liens très étroits avec la fondation Clinton. En même temps il soigne son image médiatique avec l’aide de sa femme qui anime au sein de leur fondation un programme de lutte contre le sida.


4-Les incertitudes de l’après Maidan 2014


Le coup d’état de 2014 et le rattachement à la Russie de la Crimée contraignent l’équipe de YES à se replier sur Kiev où vont désormais se tenir les réunions annuelles de YES dont les objectifs généraux restent inchangés.


Mais l’arrivée des putschistes au pouvoir c’est-à-dire de ce mélange chimiquement instable d’oligarques (Poroshenko) et de fascistes organisés, la fuite de Yanukovitch mettent la Russie en état d’alerte renforcée.
Ses inquiétudes sont confirmées par la violence des attaques du gouvernement de Kiev sur la population ukrainienne de l’Est qui s’oppose à la très violente dérussification du Donbass


Elle utilisera tous les moyens pacifiques possibles au nombre desquels un abandon par les géants de l’industrie, pétrolière et gazière russe du fournisseur ukrainien de tuyaux Interpipe. Pinchuk va devoir mettre en œuvre son immense carnet d’adresses en occident capitaliste pour vendre ses tuyaux aux Etats-Unis, en Allemagne et dans les pays pétroliers du Golfe. Interpipe fait bien quelques avancées sur ces marchés mais la concurrence y est rude.


Qu’importe ! Pinchuk n’oublie jamais d’endosser son second costume celui de « philanthrope » – terme qu’il utilise lui-même – d’ami de l’art moderne et de la culture. On lui devait déjà en 2008 l’organisation du mémorable « concert de l’indépendance » de Paul McCartney sur le Maidan qui avait attiré 300 000 spectateurs, le financement d’un film de Spielberg sur les massacres de juifs ukrainiens – organisés, on le sait avec autant de sauvagerie par l’Allemagne occupante et par les nazis ukrainiens – et la promotion d’artistes contemporains transnationaux comme Jeff Koons, Takashi Murakami et Damien Hirst dont il fait monter la cote en même temps qu’il constitue sa collection personnelle.


Arrive l’opération russe en février. INTERPIPE qui avait de bons renseignements a mis les bouchées doubles en décembre et janvier pour satisfaire ses clients, arrête et met en sécurité ses installations dans les premiers jours de l’opération. La production industrielle va reprendre assez vite fin mars et pas seulement chez Interpipe dès le moment où il sera clair que la Russie après avoir affaibli le système militaire ukrainien dans son ensemble ne mène pas une guerre contre l’Ukraine mais pour la défense des républiques du Donbass qu’elle vient de reconnaitre. En effet il n’y a pas d’affrontements militaires dans la région de Dniepropetrovsk et les usines peuvent fonctionner.

La contribution de Pinchuk à la globalisation capitaliste :

L’initiative « YES ». En 2004 Pinchuk comprend après la « révolution orange » et les attaques organisées contre lui par le nouveau pouvoir orange que les Etats-Unis veulent se débarrasser ou au moins affaiblir les oligarques de l’Est les plus riches et dont la puissance industrielle héritée de la période soviétique repose sur la sidérurgie et les mines locales de fer et de charbon qui l’alimentent. Il décide de prendre de la distance dans les luttes de clans inter-oligarques et de concentrer son activité industrielle chez Interpipe installée non pas dans le Donbass mais dans l’oblast de Dniepropetrovsk dont le nouveau gouverneur nommé par Kiev est le dangereux intrigant milliardaire Igor Kolomoisky. Il décide donc de se mettre directement au service du pouvoir et du projet étasunien en contournant les institutions politiques ukrainiennes.


En 2004 il organise la première conférence du lobby pro USA à Yalta YES (Yalta European Strategy). La symbolique est très forte puisqu’il s’agit de rien moins que d’organiser après YALTA 1 en 1945 un nouveau partage du monde une sorte de « YALTA 2 » dans lequel la frontière de l’empire occidental se déplacerait jusqu’à la frontière occidentale de la Fédération de Russie. C’est donc la confirmation et la validation dans le champ idéologico-politique du programme de la progression de l’Occident/Otan vers l’est qui vient de se concrétiser cette même année par l’entrée dans l’organisation de 7 nouveaux pays : les 3 républiques baltes, deux pays riverains de la Mer Noire : Roumanie et Bulgarie, la Slovaque et la Slovénie. Deux de ces pays : Roumaine et Slovaquie ont une frontière commune avec l’Ukraine. Les vagues du tsunami atlantique atteignent l’Est.


Deux noms à retenir parmi les participants à la première réunion de format modeste tenue à Yalta : Jean Chrétien premier ministre du Canada et Dominique Strauss Kahn donné comme possible vainqueur de la présidentielle de 2007. Il sera remplacé à la réunion de 2005 par Michel Rocard mais restera un des fidèles des sommets du YES. Les intérêts français seront représentés régulièrement à toutes les réunions annuelles de YES par les groupes de relations publique EURO RSGCcom puis Havas, par la fondation Rothschild et côté politique par la Fondation Jean Jaurès proche du PS. Un autre fidèle est le constitutionnaliste Guy Carcassonne. Coté étasunien le plus fidèle est le « tank de la pensée » Brookings Institution. De 2004 à 2014 les réunions de YES deviennent de plus en plus courues. Y assistent des présidents ou anciens président des Etats-Unis Obama et Clinton, des secrétaires généraux ou ex secrétaires généraux de l’OTAN, trois premiers ministres britanniques Tony Blair, Gordon Brown David Cameron, le président turc Erdogan. Quelques noms encore dans ce gratin de l’occident globaliste impérialiste : l’ancien président géorgien Saakashvili, Shimon Peres à plusieurs reprises, Greenspan le président de la Banque fédérale, Kofi Annan, secrétaire générale de l’ONU en exercice, Barroso pour la commission européenne qu’il préside, Zoellick Président de la banque mondiale, Condoleeza Rice. Tous les grands médias atlantiques sont présents qu’ils soient étasuniens, britanniques ou français (Le Monde). Pinchuk a également inclus dans le Conseil directeur de YES l’ancien premier ministre polonais Kwasniewski.


Chaque réunion annuelle se fait autour d’un thème mais la stratégie conçue au plus haut niveau de la direction atlantique (Maison Blanche-Département d’Etat-Pentagone-CIA) est claire et n’a pas bougé d’un pouce malgré les péripéties politiques locales : intégrer l’Ukraine et à l’origine toute l’Ukraine : Donbass minier et industriel compris, Crimée comprise en chassant la flotte russe qui n’y est que locataire, dans le bloc occidental. La procédure de cette intégration que ce soit par le biais de l’UE ou/et celui de l’OTAN bien qu’affichée pour l’opinion publique est secondaire et variera selon les circonstances.


Les célèbres propos téléphoniques de Victoria Nuland « Fuck the EU » démontrent que l’opération est anglo saxonne dans ses visées et ses méthodes et qu’il s’agit bien de tirer un nouveau rideau de fer à la frontière occidentale de la Russie, d’isoler la Russie pour l’affaiblir.


Chacun sait à Washington et à Londres que l’Ukraine indépendante est en déconfiture démographique, politique, économique et morale et qu’elle constituera un véritable boulet pour les institutions qu’elle pourrait rejoindre. (Voir à ce sujet l’article extrait des Nouvelles d’URSS organe du PCB t US publié en 2006 qui suit)


La France ne participera pas aux sommets de YES à un très haut niveau politique : Chirac envoie à Yalta un député fidèle Pierre Lellouche et Sarkozy son conseiller Alain Bauer et il est manifeste que l’implication française est celui de la « gauche américaine » l’expression étant, dans ce cas, particulièrement adaptée. Hollande se contentera de ne rien faire pour faire respecter les accords de Minsk dont la France est garante.
Au fil des années la liste des participants ukrainiens aux sommets de YES est une fidèle représentation des convulsions politiques ininterrompues du pays et, à part Koutchma qui parraine et cautionne par sa présence régulière l’opération montée par son gendre Viktor Pinchuk et sa fille Elena, participeront successivement tous les leaders de Kiev qu’ils soient de la mouvance orangeo-bandériste ou donbasso-sidérurgiste.
Mais malgré ces inflexions tactiques la stratégie n’a jamais été modifiée et il n’y a que Kissinger véritable sismographe de l’impérialisme pour avoir dit récemment que sans changer le but séculaire : découper la Russie en plusieurs principautés capitalistes il faut tenir compte depuis le 24 Février 2022 d’une résistance inattendue de l’adversaire et que l’échéance ultime doit être reportée compte tenu d’un nouvel état des rapports internationaux.


«Nouvelles d’U.R.S.S.», no 80, juillet août 2006


L’anéantissement de l’Ukraine sous les louanges du Président


Le 9 février, le Président de l’Ukraine V. Youchtchenko a prononcé un manifeste à la Rada supérieure en relation avec son message « De la situation intérieure et extérieure de l’Ukraine en 2005 ».


Nous n’avons pas l’intention de faire une analyse de ce discours populiste totalement coupé de la vie réelle du peuple d’Ukraine, nous allons seulement nous arrêter sur certains moments.


« A la place de l’ancienne république soviétique, de cet État au visage politique inexpressif et à l’avenir incertain, est apparue une nation politiquement mûre capable de croire par elle-même à son avenir historique sans que quiconque ne le lui souffle », a déclaré V. Youchtchenko.


Le mensonge de cette phrase saute aux yeux et est destiné aux gens qui ne connaissent pas ou ont oublié notre histoire toute récente.


En 1990, la République socialiste soviétique ukrainienne faisait encore partie de la dizaine de pays au monde les plus hautement développés. L’Ukraine occupait les 1re et 3e places en Europe pour sa production par habitant des principaux types de produits industriels et agricoles. La population de l’Ukraine croissait en permanence et dépassait les 52 millions d’habitants à l’orée de 1993. Une industrie et une agriculture hautement développées, une instruction publique et des services de santé de haute qualité, gratuits et accessibles à tous, une science d’avant-garde et une culture développée, des services communaux d’habitation, des transports et des télécommunications extrêmement bon marché et de qualité, voilà en quoi se caractérisait l’Ukraine soviétique, socialiste. Cette Ukraine qui était l’un des pays fondateurs de l’Organisation des Nations unies.

Pour Youchtchenko, c’était un État à l’avenir incertain et au visage politique inexpressif.


Par contre, maintenant, après 15 ans de pillage ininterrompu et d’anéantissement de l’économie socialiste, de l’instruction et de la santé publiques, de la science et de la culture, l’Ukraine est devenue « une nation politiquement mûre et capable de croire par elle-même à son avenir historique ».


Avant de « croire à leur avenir historique », le Président, son gouvernement et son parlement, ainsi que ses organes locaux du pouvoir, feraient bien de prendre soin des gens et des conditions normales de leur vie. Des 800 personnes qui se sont gelées durant cet hiver glacial sans chauffage. Des gens jetés à la rue par le pouvoir bourgeois, privés de leur logement et abandonnés à leur sort. Et de ceux des dizaines de villes gelées du Donbass, de la Crimée. Pourtant, le Donbass est assis sur du charbon avec lequel on aurait pu chauffer toute l’Ukraine et assurer la chaleur dans les quartiers, comme du temps de l’Union soviétique. Mais l’industrie houillère a été ruinée à dessein et aujourd’hui on achève sa destruction. La gestion communale des immeubles d’habitation a été mise hors d’état, la population en voie d’extinction parachevée par le régime de L. Koutchma en 10 ans de son gouvernement. Mais l’opposant orange de N. Choufritch passe « modestement » sous silence que V. Youchtchenko, V. Pinzénik et de nombreux autres représentants de l’actuel pouvoir orange de la bourgeoisie ont allègrement pillé l’Ukraine et son peuple sous Koutchma et Cie.

V. Youchtchenko a été durant de nombreuses années sous Koutchma le président de la Banque nationale d’Ukraine, durant un an et demi Premier ministre, c’est-à-dire qu’il a fait partie de la direction suprême du pays. V. Pinzénik a, à partir de 1992, fait partie de toute une série de gouvernements, y occupant différents postes élevés : Premier vice-premier ministre, Vice-premier ministre, ministre de l’Économie, ministre des Finances. B. Tarassyouk, l’actuel ministre des Affaires étrangères et leader de l’un des trois ROUKIls2 qui a fait partie du bloc électoral « Notre Ukraine » youchtchenkiste, a été, durant les années koutchmiennes, le premier adjoint du ministre des Affaires étrangères, Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire d’Ukraine, le chef de la mission de l’Ukraine auprès de l’OTAN, et, dans les années 1998 à 2000, il a été ministre des Affaires étrangères. Et ainsi de suite.


Messieurs les bourgeois, c’est ensemble que vous avez pillé l’Ukraine et son peuple laborieux et à présent, vous tentez de vous en rejeter la responsabilité les uns sur les autres.


V. Youchtchenko se vante d’avoir, au cours de l’année passée, assuré des « indices records de croissance du bien-être des gens », d’avoir augmenté les revenus réels de la population. En quoi consiste la « croissance » de ces indices records, chaque habitant peut le voir lorsqu’il va au magasin ou au marché. Et effectivement, il y a bien eu croissance record l’année dernière et il y a croissance encore plus rapide cette année des prix du sucre, des pommes de terre et des autres produits alimentaires les plus indispensables. Les tarifs de la Direction communale des immeubles d’habitation ont augmenté partout de 2 à 4 fois, tandis qu’en ce qui concerne la qualité de ces services, les habitants des villes gelées s’en sont convaincus. Et à présent, le gouvernement prévoit à nouveau d’augmenter les tarifs du gaz, aussi bien pour les consommateurs industriels que pour la population.


Le voilà bien le prix de la possibilité de décider de son sort « sans que quiconque ne vous le souffle ». Monsieur le Président biaise. Tout ce qu’il fait, il le fait suivant ce qu’on lui a soufflé, plus précisément, suivant les instructions directes de Washington et de Bruxelles. Et il n’y a en cela rien d’étonnant. Youchtchenko est tenu d’acquitter sa dette envers ses patrons américano-otaniens occidentaux pour la fonction de président de l’Ukraine qu’il en a obtenue avec leur argent et à l’aide des manipulations de la conscience des masses. Le montant de cet « acquittement » est extraordinairement élevé : il doit opposer l’Ukraine à la Russie, opposer deux peuples frères l’un à l’autre, il doit entraîner l’Ukraine dans l’OTAN et ensuite l’utiliser comme tête de pont pour l’assujettissement de la Russie. Et qu’il en est bien ainsi, c’est ce que nous montrent les relations de plus en plus tendues entre l’Ukraine et la Russie. C’est ce que nous montre le conflit à propos du gaz, et ensuite à propos de la Flotte russe de la mer Noire basée à Sébastopol, et ensuite à propos des livraisons de produits carnés et laitiers d’Ukraine à la Russie…


A qui tout cela est-il profitable? Il est clair que ce n’est ni au peuple d’Ukraine, ni au peuple de Russie qui vit, lui aussi, dans un État bourgeois ayant atteint son stade impérialiste de développement et qui est également en voie d’extinction à raison d’un million et demi de personnes par an. Je rappellerai qu’en Ukraine, la population se réduit d’un demi-million par an, mais que la population de la Russie est à peu près trois fois plus élevée que celle de l’Ukraine. Les Soviétiques meurent, désunis qu’ils sont, partagés en fragments bourgeois « indépendants », en dépit de leur volonté (rappelons qu’au référendum du 17 mars 1991, l’écrasante majorité des Soviétiques, dont les habitants de l’Ukraine, s’est prononcée pour le maintien de l’U.R.S.S.).


Cela n’est profitable qu’à l’impérialisme des États-Unis qui mènent la lutte pour la domination mondiale, qui pratiquent la politique de globalisation à la mode impérialiste.


Le Président de l’Ukraine a plus d’une fois parlé, notamment dans son manifeste, de la nécessité de manifester du souci pour « la santé de la nation ». Mais toute personne à qui il est arrivé d’avoir affaire à la médecine sait que ce sont également, là aussi, des paroles creuses, que la vie réelle ne correspond pas aux proclamations et déclarations du Président comme du Gouvernement.


Les services de santé publique sont devenus payants et ne sont tout simplement plus accessibles à beaucoup de travailleurs. Tandis, qu’en plus de cela, le meilleur de ce qui restait encore à la médecine a été anéanti. A l’époque socialiste, la médecine militaire était une des plus qualifiée Des dizaines de milliers de militaires du service actif et de la réserve, ainsi que les membres de leurs familles, ont reçu des soins médicaux de qualité dans les hôpitaux militaires, tout en soulageant en même temps la charge des établissements hospitaliers civils. Il ne reste plus à présent en tout et pour tout en Ukraine que quatre hôpitaux militaires centraux : à Kiev, Odessa, Vinnitsa et Lvov. Et encore, le nombre de lits y est-il réduit. Ainsi, les médecins militaires font-il savoir qu’à l’Hôpital de Lvov, sur 1200 lits, il n’en reste plus que 450. Cette année, l’Hôpital militaire de Moukatchévo a été soumis à une réduction draconienne. Sur 400 places d’hospitalisation, il n’en reste plus que 150. Depuis le 1er janvier, le personnel médical et le personnel de service y a été réduit de 91 personnes. Une autre réduction de 110 personnes s’y profile pour le 1er mai. Tandis qu’il n’est pas exclu que cet hôpital cesse totalement d’exister l’année prochaine. C’est sans doute ce que Youchtchenko appelle le souci pour « la santé de la nation ».

Il en est en même temps de même du « souci » de l’armée ukrainienne avec ses « militaires socialement protégés ». (Ce que sont les forces armées, ce sont des troupes qui ne savent que tirer sur les maisons d’habitation, abattre des avions de transports de passagers, exterminer des dizaines de personnes au cours d’un show aérien, tuer des soldats au cours de manœuvres… et d’autres actes que l’on ne peut même pas citer ici.) Monsieur le Président prêche pour la création d’une armée professionnelle avec passage à la forme contractuelle de service à partir de 2010. On a envie de lui rappeler à ce propos que l’Armée soviétique, armée qui servait son peuple, qui défendait la Patrie socialiste, qui a vaincu le fascisme, qui a assuré la paix dans le monde entier, que cette armée était une véritable armée professionnelle.
Elle a été détruite par les traîtres et les parjures à notre Patrie, par la haute direction gorbatchévienne du parti, de l’État et de l’armée de l’U.R.S.S. et, en Ukraine, par Kravtchouk et ses démolisseurs-compagnons d’armes. Une armée basée sur le contrat, cela s’appelle une armée de mercenaires. L’Armée d’Ukraine est déjà utilisée par la Direction de l’OTAN sur les points les plus chauds de la planète dans de prétendues « opérations de maintien de la paix » où elle remplit des fonctions étrangères aux intérêts du peuple ukrainien et de la nation ukrainienne. Les militaires d’Ukraine tombent sous les balles au nom des intérêts de l’impérialisme des U.S.A. dans la lutte qu’ils mènent contre les autres peuples de la planète pour sa domination mondiale et la possession des ressources de matières premières.

La voilà toute la tache de l’armée « professionnelle » d’Ukraine : mourir pour des intérêts étrangers au peuple ukrainien.
C’est le même caractère d’hypocrisie et de spectacle que représente le souci du Président de l’Ukraine à propos de sa lutte contre la corruption, de la création d’une structure concurrentielle et de renaissance des campagnes, de développement des techniques de pointe…


Dans la première moitié de février, nous avons assisté à la télévision à un « affrontement » de représentants de partis qui se battaient pour leur mandat de député au prochain parlement d’Ukraine: I. Bogoslavskaya (du «Vétché»3) et N. Roudkovski (représentant de la fraction du P.S.U.4). I. Bogoslavskaya a ouvertement exposé les principaux buts et intérêts de sa force politique : la création de conditions permettant le développement sans entraves du grand, moyen et petit business. Ce parti ne manifeste aucun souci des travailleurs. Et ce n’est pas étonnant. Le business n’a besoin des travailleurs que dans un seul et unique but : les exploiter impitoyablement et en pressurer le maximum de profits. A quoi bon parler de cela ouvertement? Le représentant du P.S.U. a bien tenté de dire quelque chose à propos du souci des gens et a reproché à son opposante de n’exposer que les intérêts des milliardaires. Mais celle-ci a paré le coup en lui demandant de quels milliardaires il parle, si ce ne serait pas de lui-même?! Ensuite, ils se sont disputés pour savoir au juste qui est arrivé aux studios de télé au volant de quelle marque étrangère de voiture…


Les « défenseurs » du peuple n’ont besoin de lui qu’une fois toutes les quelques années pour se faire élire au pouvoir et continuer de l’opprimer.


Les élections législatives qui approchent sont des élections typiquement bourgeoises au cours desquelles les différents clans de la bourgeoisie rivalisent entre eux. Mais, pour former leur majorité parlementaire et désigner leur Premier ministre, ces clans bourgeois s’entendront parfaitement entre eux et régleront leurs petites affaires à nos frais et dans le dos du peuple.


Les résultats de ces élections n’ont aucune signification pour les travailleurs d’Ukraine. La situation du peuple laborieux continuera inévitablement de se dégrader. Il ne resta à la classe ouvrière, aux travailleurs d’Ukraine, qu’une seule et unique voie : la voie de la lutte révolutionnaire pour le Pouvoir soviétique, le socialisme, la renaissance de l’U.R.S.S.

  1. 2. ROUKH, — ce mot ukrainien signifie “mouvement ” et c’est par ce mot que les Ukrainiens désignent en abrégé le «Mouvement populaire d’Ukraine» qui est une organisation ultranationaliste de type ouvertement fasciste. Le ROUKH est aujourd’hui divisé en trois courants. (N.d.T.)

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