Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Antisémitisme, que dit réellement le scandale à la documenta de Kassel

L’installation du collectif d’artistes indonésiens Taring Padi ne fait plus partie de l’exposition d’art en Allemagne. Le scandale a pris une énorme ampleur et il est à la mesure de l’exposition. Documenta est la plus importante série d’expositions d’art contemporain au monde. Elle a lieu tous les cinq ans et dure 100 jours chacun. Elle est également connu sous le nom de Musée des 100 jours. La première documenta a eu lieu en 1955 et remonte à l’initiative du professeur d’art et designer de Kassel Arnold Bode. L’exposition documenta présente un échantillon représentatif de l’art contemporain et les oeuvres sont sensées passer par divers responsables avant l’accrochage, de surcroît la fresque avait été choisie pour symboliser à l’entrée l’esprit de l’art contemporain et une lutte contre la marchandisation. 

Que s’est-il passé ?

Pourquoi y a-t-il scandale , à cause de la fresque d’accueil (voit photo ci-dessous et les commentaires de la revue des juifs allemands sur cette affaire de fresque) mais aussi parce que le collectif d’artistes indonésiens Ruangrupa, fondé en 2000 à Jakarta et chargé cette année de la direction artistique, n’a invité aucun Israélien parmi les 1 500 artistes qui exposeront jusqu’au 26 septembre. Il ne s’agit pas là d’une omission involontaire mais d’un boycott décidé en toute conscience, puisque , plusieurs OEuvres palestiniennes exposées à la Documenta condamnent sans équivoque l’occupation israélienne des territoires palestiniens. Le collage « Gaza-Guernica » de l’artiste palestinien Mohammed Al Hawajri établit un parallèle entre la Luftwaffe qui, en 1937, bombarda la petite ville espagnole et les unités anti-terreur de l’armée israélienne aujourd’hui. Parallèle qui ne mêle nulle part et qu’il faut condamner. Un autre tableau montre Les Moissonneurs de Van Gogh sur le point d’être attaqués par une unité de combat de l’armée israélienne.

Ein Ausschnitt des umstrittenen Großgemäldes des indonesischen Künstlerkollektivs Taring Padi auf dem Friedrichsplatz.

Nous sommes non devant un soutien au peuples palestinien et une critique radicale de la politique israélienne mais devant autre chose que nous devons analyser : Un boycott, celui-ci expliquent la plupart des commentateurs été condamné par le gouvernement allemand, qui l’a défini comme ‘antisémite”. Si cela provoque l’embarras des officiels, je n’en suis pas touchée parce que cette position du gouvernement allemand n’est en rien une référence ni venant de lui, ni du Français. La manière dont on a laissé se développer la situation en Israël et en Palestine relève de la complicité des grandes puissances avec l’impérialisme américain, comme d’ailleurs la complicité avec le développement parallèle des forces d’extrême-droite le tout dans la lutte impérialiste contre l’alternative socialiste donne peu de crédibilité aux vertus effarouchées qu’il s’agisse de l’antisémitisme, du racisme et des droits des individus, des femmes, des homosexuels et de tous ceux qui sont les victimes de la brutalité et des forces conservatrices alliées du capital. Donc passons outre l’embarras officiel, beaucoup plus pertinent est la question de l’état réel du monde de l’art et ce qu’il cherche à dire.

Donc pour revenir à l’exposition, elle est centrée sur le boycott, l’exclusion des juifs devenus les “sionstes”, disons que nous nous sommes toujours interrogé sur un boycott non des produits des territoires occupés mais des échanges culturels avec des artistes israéliens et juifs qui peuvent jouer y compris un autre rôle dans la dénonciation de la politique israélienne, ce qu’a très bien conçu la lutte contre l’apartheid. A ce titre, on retrouve la même démarche que celle qui aujourd’hui brûle les livres russes en Ukraine et interdit les prestations des artistes russes. D’ailleurs si l’on regarde la fresque objet du scandale on s’aperçoit qu’il y a dans la mêmes “armée” non seulement le juif mais le KGB. Ce qui a ma connaissance n’a été souligné par personne alors que l’antisémitisme de gauche est parfaitement toléré s’il accompagne un anticommunisme, un “antitotalitarisme”, antisoviétisme de bon aloi comme en Ukraine.

il faut repenser les alliances et les luttes communes et ne pas se contenter des confusions identitaires.

Parce que si l’on veut aboutir à une autre politique, il faut peut-être dénoncer toutes les tartufferies qui sont derrière les “bonnes consciences” utilisant des conflits, des oppressions, des injustices pour couvrir du manteau des droits de l’homme de véritables avancées fascisantes. Nos sociétés occidentales et leurs “élites” sont passées maîtres dans l’art des fausses indignations et exploitation des haines racistes et identitaires en choisissant leurs exutoires.

Simplement que cela soit en Ukraine, au Moyen Orient, en Afrique, en Amérique latine, partout on voit désormais une résurgence de l’appel aux forces fascistes que l’on blanchit quand cela vous arrange. je signale que la fresque avait déjà été exposée en 2002 et que c’était en Australie. Ce qui n’est pas indifférent parce que nous avons-là un pays qui s’est construit comme les Etats-unis et peut-être pire sur le massacre des indigènes et qui depuis oscille entre servilité à son origines de suprématie blanche représentée par une allégeance totale aux USA et à l’empire britannique. Un pays dont le contingent s’est illustré en Afghanistan par des crimes contre des habitants désarmés. Un pays partagé entre la mauvaise conscience et la haine suprématiste et qu’il croit vider en menant une croisade suicidaire contre la Chine. Enfin un pays, comme nous le montrons dans un autre article, qui aujourd’hui est obligé de légiférer contre la montée du nazisme alors que de fait racisme et antisémitisme sont inscrit dans un ADN de ses dirigeants, de sa classe politique.

Ce qui se passe en France est tout aussi inquiétant quand on voit à quel point les garde-fou sont en train de tomber. IL y a eu le cas Zemmour, des juifs prêts à le soutenir par haine des arabes, non pas à cause de la Palestine mais surtout à la fois par souvenirs colonialistes et privilèges de classe sur l’état des couches populaires, l’insécurité dont elles seraient l’origine en blanchissant là encore le rôle du capital. Il y a eu d’autre confusions venues de gauche cette fois, tout aussi inquiétantes, l’appel aux communautarismes et la tolérance désormais à l’extrême-droite pour se libérer de la concurrence du proche. L’antisémitisme ne peut pas être isolé du racisme, des haines de division, c’est la vieille mouture millénaire, multi et protéiforme.

L’antisémitisme n’est pas contradictoire avec l’état réel d’un tel pouvoir politique, celui qui sur des bases de classe considérées comme intangibles prétend rester démocratique, il n’est que leur forme de démocratie poussée jusqu’au bout, il n’aide pas plus le peuple palestinien qu’il n’a aidé le peuple afghan, syrien ou américain.

C’est pourquoi nous devons aller jusqu’au bout de la dénonciation de tous les racismes, xénophobies et montrer qu’aucune autodafé d’un peuple devenu “le mal” absolu n’est tolérable. J’approuve la position de l’article qui suit : il faut aller au delà des indignations de surface et entamer un dialogue de fond sur ce qui a été exprimé et pourquoi ça l’a été, non pour hypostasier le peuple juif qui a lui aussi ses fascistes contre lesquels il doit lutter, mais pour que les leçons de l’histoire ne soit pas oubliées.

Ces leçons de l’histoire sont en train de s’effacer et la génération qui les a vécues en tant qu’adultes est en train de disparaitre, il reste encore nous qui avons vécu l’horreur en tant qu’enfants-gibier pour dire l’intolérable…

DANIELLE BLEITRACH

L’article de juedishe allgemeine sur l’exposition antisémite

traduit par danielle BLEITRACH POUR HISTOIRE ET SOCIETE

Antisemitisches Wandgemälde wird abgehängt

 21/06/2022 16:43

Ein Ausschnitt des umstrittenen Großgemäldes des indonesischen Künstlerkollektivs Taring Padi auf dem Friedrichsplatz.
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L’œuvre n’est plus visible, mais le débat n’est donc pas clos : l’installation très critiquée de la documenta quinze de Kassel a d’abord été voilée et doit être démontée mardi. Maintenant, les appels à une réévaluation du scandale deviennent de plus en plus forts.

L’installation de bannières à grande échelle « People’s Justice » du collectif d’artistes indonésiens Taring Padi montre, entre autres, un soldat au visage de cochon. Il porte une écharpe avec une étoile de David et un casque avec l’inscription « Mossad ». Après de vives critiques publiques, il a d’abord été imposé lundi avec un tissu noir. Mardi, le maire de Kassel, Christian Geselle (SPD), a annoncé que la bannière serait retirée.

« Je suis en colère, je suis déçu. Parce que la ville de Kassel et moi-même en tant que maire, nous avons honte », a déclaré Geselle. Il s’est passé quelque chose qui n’aurait pas dû se produire. » L’installation a un lien antisémite clair. Le collectif organisateur Ruangrupa était accusé d’antisémitisme depuis des mois. Depuis le début du débat, cependant, le groupe a toujours assuré que l’antisémitisme, le racisme ou la violence n’auront pas leur place à la documenta, a souligné Geselle. « Dans ce cas,ils n’ont clairement pas été à la hauteur de leurs responsabilités. »

Le Comité international d’Auschwitz a appelé au dialogue avec les artistes. « Il est grand temps d’entamer une conversation dans le cadre de cette documenta, d’entendre les artistes à partir de quelle vision du monde ces images ont été créées et d’expliquer publiquement de la part de la documenta pourquoi ces images rencontrent ici résistance et rejet », a déclaré mardi Christoph Heubner, vice-président exécutif du Comité international d’Auschwitz.

SCANDALE La ministre de l’Art de Hesse, Angela Dorn (Verts), voit de graves conséquences au scandale. « L’œuvre contient des chiffrements antisémites qui, à juste titre, font que les Juifs se sentent blessés », a expliqué Dorn. « Les dommages déjà causés ne peuvent pas être relativisés », a déclaré Dorn mardi. « Au contraire, nous devons accepter comment il aurait pu arriver à la documenta qu’un tel langage visuel ait été montré publiquement. »

La bannière n’avait été installée qu’après que de nombreux journalistes et visiteurs professionnels aient déjà prévisualisé la documenta – selon les organisateurs vendredi après-midi. La raison indiquée du retard: les mesures de restauration nécessaires en raison de dommages aux roulements. L’œuvre n’a pas été réalisée pour la documenta quinze, mais a été présentée pour la première fois au South Australia Art Festival à Adélaïde en 2002. Dpa

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