Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Malgré l’arrivée au pouvoir des talibans, le dernier juif d’Afghanistan refuse toujours de partir

Le dernier juif d’Afghanistan, Zebulon Simentov, ne veut pas partir du pays malgré la prise de pouvoir des talibans.Cette histoire paraît sortir d’un roman de Isaac Bashevis Singer ou de Cholem Aleichem, est aussi une part de mon patrimoine… Comment se fait-il que cet homme qui pourrait être mon fils ait les moeurs et la manière d’être au monde de mon grand père? Mon grand père, qui croyait que la terre était plate, a erré sur plusieurs continents sans jamais en connaitre réellement autre chose que les synagogues. Il s’y enfermait non pour en apprécier la paix mais pour y développer d’invraisemblables conflits talmudiques avec ceux dont il partageait des rites bizarres et obsessionnnels. C’était là peut-être une manière de nier ce que les autres dehors inventaient. A la fin de ma vie, moi la communiste, qui croit toujours enla perfectibilité de l’humanité pour peu que l’on en supprime l’avidité de la propriété des grands moyens de production, une part de mon savoir néanmoins tient toujours à cette évidence patrimoniale : inutile de s’exiler, partout où tu iras tu trouveras les mêmes cons… et un juif restera un juif pour nombre d’entre eux… C’est pour cela que comme ce Zebulon, jen’ai jamais mis les pieds en Israël… ni d’ailleurs dans les synagogues où hommes et femmes n’ont pas droit aux mêmes bancs…

Les juifs ont vécu depuis plus de 2.500 ans en Afghanistan. Des dizaines de milliers d’entre eux ont habité à Hérat, où subsistent quatre synagogues témoignant de la présence ancienne de la communauté dans cette ville. Mais depuis le 19e siècle, les juifs ont peu à peu quitté le pays, beaucoup vivant désormais en Israël. Les journalistes ont découvert le dernier juif vivant en Afghanistan.Simintov est né et a grandi dans la ville occidentale de Herat. Il a ensuite déménagé à Kaboul. Il a brièvement vécu au Turkménistan mais est retourné à Kaboul en 1998, pendant la première période du régime taliban en se disant que partout c’était pareil alors autant valait rester chez soi ou ce qui en tenait lieu . Il a été arrêté et battu à plusieurs reprises par les Talibans, qui lui ont volé son entrepôt de tapis en 2001.

Il s’appelle Zebulon Simentov. Et aujourd’hui il refuse de partir malgré l’arrivée au pouvoir des talibans. “Je ne quitterai pas ma maison. Si je partais, il n’y aurait personne pour entretenir la synagogue [de Kaboul].. J’ai eu l’opportunité de partir pour les Etats-Unis mais j’ai refusé“, a-t-il déclaré le 17 août à la télévision indienne WION. En avril dernier Zebulon Simentov avait pourtant envisagé selon l’AFP de partir en Israël si les Talibans revenaient. Il aurait depuis lors changé d’avis. Cet obstiné a ce côté anarchiste ritualiste qui m’a toujours exaspéré et attendri chez nombre de membres de ma famille. Il doit pratiquer un laisser aller vestimentaire total mais ayant le souci par quelque détail proclamer qu’il est encore en mesure de corrompre un fonctionnaire et plus encore un fanatique religieux. Par exemple, je le vois bien laissant dépasser une chaîne d’or de montre de la poche de son veston élimé. S’il est tel que je l’imagine,il doit être convaincu qu’il existe un moyen quelconque de corrompre un président des Etats-Unis, sans cela comment expliquer que tant d’entre eux, si puissants soient-ils , se soient fourvoyés dans ce pays trou du cul du monde. Si l’on peut persuader le président du pays qui joue au bilboquet avec les peuples, d’aller se perdre avec arme et bagage àKaboul où les synagogues sont en ruine alors que celles de New York ruissellent d’or, alors imaginez ce qu’il est aisé de faire d’ un Taliban… Un type qui non seulement n’est jamais sorti de ce trou ducul du monde mais s’y attache avec une fureur incompréhensible… Il y a les purs, les sincères, les incorruptibles, mais les sanglantes guerres les ont éliminés, l’argent des USA a fait le reste… Quant aux Talibans, c’est simple,plus le turban sera grand, plus grandes seront les chances d’avoir affaire à un vaniteux à la sensualité exigeante. Alors pourquoi quitter le pays alors qu’ailleurs c’estpareil… et que l’on n’a pas les moyens d’acheter le moindre mercenaire… Ce que les occidentaux appellent unEtat démocratique est simplement le fait que seuls les milliardaires peuvent s’en payer les bonnes grâces…

Donc Simintov reste à Kaboul malgré qu’il ait eu la chance de partir, y compris quand l’homme d’affaires Mordechai Kahana, lui a offert de payer pour un avion privé pour l’emmener en Israël. C’est toujours comme ça, il y a toujours un richissime pour vouloir acheter cequi ne peut se monnayer. Il a refusé, en s’inquiétant de savoir qui s’occuperait alors de la synagogue de Kaboul? Simintov a conquis cette charge de haute lutte dans un enfer quotidien, celui vécu dans cette synagogue aux côtés du seul autre homme juif restant en Afghanistan, Ishaq (Isaac) Levin,et ce jusqu’à la mort de Levin le 26 janvier 2005 vers l’âge de 80 ans. L’histoire de Simintov et Levin a servi de base à une pièce de théâtre britannique dans un des ces festivals où des juifs s’interrogent sans fin sur la manière dont on peut se pourrir la vie sans même que les pogromes soient àl’ordre dujour, une spécialité du yiddishland. L’absurdité des comportements sont avec le nombre de morts à Auschwitz ce qui leur tient lieu de quartiers de noblesse face aux sépharades.

Né dans les années 1950 à Hérat, dans l’ouest de l’Afghanistan, autrefois refuge de riches familles commerçantes juives, Zebulon Simentov est venu à Kaboul au début des années 1980. Il ne restait que deux juifs à Kaboul, et Il avait une relation notoirement mauvaise avec l’autre juif , Ishaq Levin, qui est mort en 2005. Ces deux pieuses mais vindicatives personnes campaient aux deux extrémités de la synagogues et n’échangeaient que des insultes.Levin avait initialement accueilli Simintov, mais leur confiance mutuelle s’est transformé en suspîcion quand Simintov a offert d’aider Levin à émigrer en Israël pour rejoindre le reste de l’ancienne communauté juive de Kaboul. Simintov a prétendu que cette suggestion était inspirée par la crainte que Kaboul soit trop froide pour le vieil homme, mais Levin a pris ombrage, affirmant que Simintov par cette mauvaise fable essayait de prendre le contrôle de la synagogue. Une querelle s’en est ensuivit, Zebulon Simentov a raconté aux journalistes que les deux hommes se rendaient chacun de leur côté chez les talibans pour s’accuser mutuellement de comportements criminels allant de la gestion d’un bordel clandestin au détournement d’objets religieux. Les Talibans excédés avaient fini par les emprisonner ensemble mais selon lui, ils se disputaient aussi tellement en prison que les talibans ont décidé de les libérer tous les deux mais non sans leur avoir dérobé une richissime thora qu’ils ont vendu en contrebande? Après la mort de Levin en 2005, Simintov a déclaré qu’il n’était pas triste et qu’il ne leregrettait pas.

Ce qui est sur est qu’ il n’est pas bon pour deux hommes de rester seuls, sans la moindre femme, leur virilité mal apaisée quelque soit leur âge se combine avec d’autres maux l’estomac et surtout les dents alors tout est prétexte à querelles, on imagine à l’autre quelques menus bonheurs dont on est dépourvu et la jalousie génère l’angoisse, l’angoisse le conflit.

Simintov dit néanmoins que même s’’il ne regrette pas Levin, il n’est pas facile de pratiquer sa religion seul. Il a dû obtenir un heter, ou une autorisation spéciale, du rabbin le plus proche (situé à Tachkent, Ouzbékistan)pour abattre sa propre viande selon la kashrut, car cela ne peut normalement être fait que par un boucher juif spécialement formé,et il reçoit des envois de fournitures casher spéciales à la Pâque de juifs dela part d’Afghans vivant à New York et qui visiblement ne s’y font pas. Il ne porte sa kippa qu’en privé et hésite à permettre aux visiteurs d’entrer dans la synagogue qu’il appelle son chez lui. Il aurait déclaré : « Je ne veux pas que mon héritage juif soit effacé. Mon père était rabbin, mon grand-père était rabbin. Nous étions une grande famille religieuse… ». Simintov vit seul dans une petite pièce à côté de l’ancienne synagogue de Flower Street à Kaboul. En novembre 2013, Simintov a annoncé qu’il fermerait son restaurant de kebab en mars 2014 en raison de la baisse de l’activité après la réduction des forces de l’OTAN. et depuis il reçoit des dons de groupes juifs à l’étranger et d’habitants musulmans qui lui font la charité. Lorsqu’on lui a demandé lors d’une interview s’il émigrerait en Israël, Simintov a rétorqué: « Allez en Israël? Quelle entreprise ai-je là-bas? Pourquoi devrais-je partir? et « Je ne parle pas hébreu. Je suis afghan”.

mais ce n’est pas seulement par patriotisme afghan que Zebulon Simentov veut rester à Kaboul mais pour rendre la vie impossible à son épouse… encore un point d’entente avec les Talibans…

Selon les médias israéliens, le refus de partir de Zebulon Simentov, 61 ans, pourrait s’expliquer par le fait que celui-ci ne souhaite pas accorder un divorce religieux à sa femme. Dans la religion juive, en cas de divorce, seul le mari peut accorder un “get“, document juridique qui libère la femme du mariage et peut lui permettre de se remarier religieusement. Or, en Israël, les maris récalcitrants, qui refusent de divorcer religieusement de leur femme, peuvent être emprisonnés.Pas question de changer la loi puisque c’est Dieu qui l’a donnée comme la charia mais on peut par dévoiement moderniste rendre son exercice compliqué, les femmes secrétement prennent le pouvoir . La femme de Zebulon Simentov, qui demande le divorce religieux depuis des années, et ses deux filles sont parties depuis 1998 en Israël . Zebulon est-il amoureux à la manière du chien du voisin, ce qu’il ne peut avoir il n’y a aucune raison pour qu’un autre s’en empare… Amoureux tout en n’ayant jamais supporté son épouse, tout en elle l’irritait et plus encore le sentiment qu’à cause d’elle et de sa fille il avait raté son grand projet de faire le tour du monde, d’éprouver une folle passion pour une écuyère comme celle dont il avait vu l’affiche dans un cirque de passage mais j’extrapole,et ces dernières lignes sont le seul fruit de mon imagination et de quelques réminiscence de l’oeuvre de BrunoSchulz. j’ignore ce que Zebulon eprouve pour sa femme mais le fait est que vingt ans après il reste prêt à affronter les Talibans plutôt que de lui accorder le divorce…

En fait, quelle que soit mon antipathie pour les Talibans, osons même ma répugnance pour leurs moeurs, comme mon incompréhension face à la capacité générale des Afghans à se disputer, j’ai éprouvé en ce mois d’aout 2021 une intense joie face à la raclée qu’ont prise les USA… Mais en tant que féministe, rationnelle, communiste, je considère que ce n’est quejustice si tous ces gens là trouvent encore plus insupportable qu’eux à une échelle microscopique- celle des romans d’Isaac Bashevis Singer- en la personne d’un obstiné qui refuse comme eux de quitter les temps archaïques.

C’est fou le nombre de gens qui en sont là ces derniers temps et se revendiquent identitaires de leur propres fantasmes … Zebulon doit se dire que là où il y a un antisémite, il doit rester un juif… pour entretenir la synagogue, je ne suis pas loin de penser la même chose , être là, ne pas accepter quand je contemple stupéfaite des pseudo-anti-impérialistes défilant derrière tous les samedi (une manière d’hommage au shabbat?) l’extrême-droite trumpiste bien de chez nous pour dire sa haine des vaccins et quelques uns proclamant le complot juif … le tout suivi par des gens qui se revendiquent syndicalistes ou mêmes communistes – Politzer, encore un juif! Reviens- et hier encore j’ai du supprimer un con qui se plaignait que je ne comprenne pas son obscurantisme si proche de celui des talibans en m’accusant d’appeler à son enfermement comme au Vel d’hiv… Décidemment ” Animum debes mutarenon caelum” ai-je alors murmuré dans mon latin de cuisine… (il faut changer d’âme non de ciel).

Danielle Bleitrach

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1 Commentaire

  • DRON
    DRON

    J’adore l’humour yiddish. J’avais été voir, avec mon beau frère à l’époque “Grand père Shlomo et ça m’avait beaucoup plu

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