Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Dialogue avec mes camarades du PRCF par danielle Bleitrach

Je voudrais avant tout dialogue et donc expression de positions différentes, rendre hommage à mes camarades du PRCF. Bien sûr la grande figure de Léon Landini, qui fait songer à notre cher Henri Alleg, ce sont des gens d’un autre temps, ceux qui nous font souvenir de ce que fut le parti des 75.000 fusillés et celui des luttes anti-coloniales. Mais je veux plus particulièrement m’adresser à Georges Gastaud et Aymeric Monville, dire ce que nous les communistes nous leur devons. Ce sont des compagnons de toujours, Georges en particulier, des gens et ce n’est pas si fréquent qui n’ont jamais trahi leurs camarades, moi en particulier qui ne peut en dire autant de pas grand monde. Et ce quels que soient comme aujourd’hui nos désaccords tactiques. En outre ce sont des intellectuels marxistes d’un haut niveau, leur culture est immense et ils ne se sont pas contentés d’en faire l’étalage individuel dans leurs œuvres, mais ils ont travaillé à rassembler, promouvoir tout un ensemble de chercheurs et de textes. Les éditions Delga sont là pour prouver ce travail mené depuis des décennies. S’ils n’avaient pas été là, combien de chercheurs mais aussi combien de combats, de classiques auraient été détruits peut-être à jamais en France et en langue française.

Donc ceux à qui je m’adresse pour leur dire mes désaccords partiels sont des gens dont je respecte l’engagement communiste et la manière dont ils n’ont cessé d’en faire la preuve. J’ai lu et écouté la double proposition du PRCF à Jean-Luc Mélenchon et à Fabien Roussel. Déjà je ne partage pas cette double interpellation. Je ne comprends pas qu’étant communiste on mette sur le même plan Jean-Luc Mélenchon et Fabien Roussel. Que l’on ne se méprenne pas, je trouve d’une certaine vulgarité les attaques menées parfois contre J-L. Mélenchon. Celui-ci n’a jamais caché qui il était, son ascendance trotskiste, son adhésion au projet mitterrandien, le problème n’est pas lui mais bien ceux qui ont soumis le PCF à cette “direction”, en ont fait le porte-parole du PCF. Je conçois même que certains militants communistes écœurés par les attitudes de l’Humanité ou de Marie-Georges Buffet concernant Cuba et plus généralement la politique internationale du PCF à la remorque de l’atlantisme du PS, aient considéré que J.L. Mélenchon était parfois plus courageux que ces gens-là. Ils peuvent même avoir vu dans ce choix une manière d’échapper au dit PS et à sa collaboration du classe. Mais cela ne saurait être la position de quelqu’un d’aussi averti et aussi exigeant que Georges Gastaud et il n’a pas aidé loin de là à faire la clarté et il continue selon moi en mettant de fait sur le même plan le PCF et J.L. Mélenchon dans cette interpellation que le PRCF adresse aux deux potentiels candidats.

La confusion est entretenue sur deux points essentiels en débat et qui concernent l’Europe : le frexit et les liens avec les verts de Jadot. Il faudrait tout reprendre de cette “symétrie” artificielle destinée à démontrer qu’il n’y a pas de salut hors du PRCF mais qui aboutit à son contraire.

Mais je veux rester sur l’essentiel que semblent avoir oublié les camarades du PRCF et qui personnellement m’a toujours déterminée : JlMelenchon et Fabien Roussel ce n’est justement pas la même responsabilité envers les communistes qu’envers la base insoumise. JL Melenchon peut rencontrer n’importe qui sans contrainte de négociation, il a un mouvement derrière lui et un quarteron d’amis concurrents, conseillers auxquels il n’a pas de compte à rendre. Fabien Roussel c’est le contraire et c’est la démonstration qui est en train d’être faite à travers le processus de désignation de sa candidature. Il est le produit d’un parti différent de tous les autres qui est le nôtre et qui nous tient unis. Cher Georges, ce parti élabore une politique, un programme et il ne le négocie pas avec des alliances de sommet. Tout ce qu’il peut négocier avec d’autres leaders de la gauche c’est un désistement commun aux législatives pour empêcher le triomphe de la droite et de l’extrême-droite, ou des plateformes d’élections locales dans une commune ou une région dans lesquelles il conserve son autonomie.

Ce que vous lui demandez chers camarades du PRCF c’est un changement de programme alors qu’il est dans un processus collectif de construction de ce programme. C’est le genre de chose que peut au détour d’une phrase accepter un J.L. Mélenchon mais pas Fabien Roussel, ce serait accepter qu’une faction externe interfère dans le processus, qu’il donne des gages. Ou alors c’est une manœuvre indigne de vous…

Donc comparer les tractions de sommet entre Jadot et Mélenchon pour savoir lequel s’assiéra sur le trône, avec le mandat collectif qu’à réussi et c’est son mérite à faire s’élaborer Fabien Roussel au sein du PCF, c’est confondre une tambouille social-démocrate qui ne mène nulle part avec un processus qui ouvre des perspectives et dont nous pensons qu’il faut pousser plus avant. C’est sembler ignorer qu’ils n’ont pas le même projet et que ce qui se joue au PCF et qui nous concerne tous c”est l’existence d’un parti révolutionnaire, notre parti cher Georges sans lequel aucun changement de société n’est possible, l’enseignement de la Commune de Paris, ce qui a été avancé au Congrès de Tours mais vraiment réalisé par Maurice Thorez. Ne manœuvrons pas, ne renvoyons pas dos à dos, mais saisissons ce qui est possible et qui est le sens de tous nos efforts.

Notre responsabilité à vous que je sais des communistes comme à moi c’est de réfléchir à notre apport et pas de faire la preuve qu’il n’y a rien à tirer de cet effort du parti.

Nous communistes, comme toi et moi mon cher Georges, qui ne sommes plus dans ce parti mais qui continue à être le nôtre nous avons perdu le droit de vote sur ces questions et c’est regrettable mais moi je sais que ce n’est que parce que je n’ai plus la force de continuer à subir ce que nous avons subi par ceux qui l’ont liquidé. Donc mon abandon m’a privé de droits, je ne me sens pas de vivre ce que je vis de diffamation, d’insultes imméritées et je dois faire confiance à ceux qui continuent à agir. Ceux qui ont la force de mener ce combat doivent retourner au parti en sachant qu’ils compteront pour un et rien de plus, soit aider à le faire avancer en nourrissant le débat (1).

Mais là, il s’agit peut-être encore d’autre chose, tu ne crois plus que ce parti puisse se régénérer et moi je ne crois pas que les groupuscules puissent être l’avenir quels que soient leurs mérites et la dérive de la maison mère. Ce n’est pas d’aujourd’hui et nous savons toi et moi que ce que nous poursuivons est de même nature même si nous n’empruntons pas les mêmes chemins.

Ce dialogue est simplement de ma part une interpellation dont nous avons coutume depuis tant d’années et que nous allons certainement poursuivre, en tous les cas je le souhaite et pas seulement avec toi, parce que ce parti est passé en quelques décennies de 700.000 à 50.000 adhérents et ce serait imbécile de ne pas en tenir compte.

Danielle Bleitrach

(1) Pour que nul ne se trompe sur la nature de ce qu’est le combat au sein du PCF, je dirai que la situation est sans doute bien meilleure que dans tous les partis existants, mais l’investissement des militants est tel que la souffrance, le sentiment d’être injustement traité y est plus fort qu’ailleurs. Et j’ajouterai que ce qui me fait dire que je n’ai plus la force de ce débat est justement qu’un certain respect, une écoute collective grâce à l’équipe de 38e congrès est de nouveau là, et il vaut mieux que ceux qui conservent amertume, irritabilité, laissent d’autres le mener.

Mais pour dire dans un genre mois onctueux que ce billet ce que je pense, vous tous qui me connaissez vous savez qu’il y a quelques individus si je les croise ils prendront une baffe… donc pour la sérénité des débats il vaut mieux éviter la tentation…

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7 Commentaires

  • LEGRAND Jean-Paul
    LEGRAND Jean-Paul

    Danielle

    Je ne retirerai pas une seule virgule dans cette adresse aux camarades du PRCF.

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  • Jean-Claude Delaunay
    Jean-Claude Delaunay

    Bonjour Danielle, je pense que ta lettre adressée au PRCF, le ton que tu utilises, l’argumentation que tu développes, les positions que tu défends sont profondément justes. Tu es particulièrement bien placée pour dialoguer avec Georges Gastaud, dont comme toi j’apprécie les travaux, comme je me réjouis infiniment de l’activité d’Aymeric Monville, ou des écrits et des combats menés par Annie Lacroix-Riz, ou des interventions de Fadi Kassem, etc… Ce sont des camarades, tout simplement. Le tropisme mélanchonien n’est pas nouveau de leur part. Mais je tends à croire que c’est plus une façon de préserver et d’affirmer leur identité dans un contexte de grande vacuité que d’exprimer leurs convictions profondes. C’est donc le succès de la ligne actuellement en cours au sein du PCF qui décidera ces camarades non pas à rejoindre organiquement le PCF (tant mieux s’ils le décident) mais à en rejoindre l’action et à contribuer à son élaboration, comme d’autres. La période d’errance du PCF laissera des traces, et cette période n’est pas close. Il faut donc entretenir le contact avec ces camarades, non pas de façon mondaine, mais avec la sincérité et la profondeur militantes dont ton courrier est l’expression.. Y aurait-il d’autres formes de maintien et de renforcement du dialogue à mettre en oeuvre? Je pense notamment à une aide à la connaissance générale plus systématique des publications des Editions Delga. Il y a certainement d’autres initiatives à entreprendre. Jlaude Delaunay.

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    • KALDOR François
      KALDOR François

      Je pense que l’un des enjeux sinon le principal est l’existence d’une force communiste organisée.L’évolution de la discussion véritable et fondamentale ldes normes juridiques pour employer un vocabulaire général, echappe aux élus qui n’ont pas comme interlocuteurs les personnes du peuple mais des groupements d’intérêts La preuve en est l’après Martigues où l’on a décidé la suppression des cellules d’entreprises au profit subsidiaire d’autres expressions comme lieux de travail qui ne mettent pas en cause la domination du capital. Il fallait pour certains que l’expression communiste ne soit plus qu’une discipline universitaire ou culturelle et non politique de chaque instant.
      Aujourd’hui malgré les développements théoriques sur l’humain et le commun, il faut sortir un livre pour être audible. La discussion est mesurée sauf pour les les prophètes..
      L’ existence d’un candidat communiste à l’élection présidentielle est la façon institutionnelle de pouvoir développer face directe à la France et au peuple français les aspirations populaires et sociales dont il aura été l’incarnation à un moment de la vie politique de la France.
      François KALDOR.

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      • KALDOR François
        KALDOR François

        Je rajouterai que l’évacuation des discussions nationales où l’on dégage en touche vers les institutions européennes est problématique sur la question des mobisations populaires.
        La question de la résolution du 19 septembre 2019 du Parlement européen reste entière. L’existence d’un développement sur Staline dans les statuts du PGE (2014)alors qu’il n’y en a pas sur la lutte contre les survivances et résurgences du national socialisme,
        (NSDAP, lire le développement et non se contenter du mot Nazi), nécessite une certaine vigilence et c’ est un euphémisme…
        L’intervention de l’Etat aujourd’hui dans le droit de la crise sanitaire n’est plus libéral et profite de la situation pour sauver d’abord les éléments qui font la propriété privée. La fine hiérarchie des aides fait passer les salariés après….

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  • MICHEL Michel
    MICHEL Michel

    Je cherche à comprendre les raisons de la recherche d’alliance avec les insoumis et leur leader Jean Luc Mélenchon par une fraction de notre parti. Je me suis éloigné de cette stratégie après 2012 au constat du mépris que JLM affichait (à juste titre ?) pour notre parti. Alors je cherche à comprendre. Je viens d’écouter sa rencontre avec les étudiants de H.E.C. Sur le développement économique pour notre pays j’ai entendu des propositions effarantes d’irresponsabilité. Il déclare : j’étais pour le nucléaire, cela me posait comme étant de gauche et d’ajouter « je me trompais ! » Et à partir de là un développement du genre « je prends mes responsabilités. Je décide l’arrêt du nucléaire en 2030. Il évoque vaguement l’éolien puis les moulins à eau d’autrefois énergie qu’il qualifie d’énergie d’hydrolienne !!! A l’attention des jeunes présents il lance : je vous donne l’objectif pour 2030, respectez les accords sur le climat, vous devez nous tirer d’affaire. Ou encore : je trace l’objectif et vous nous direz comment faire ça c’est magique.
    De son côté notre parti, à l’inverse, se prononce pour le développement du nucléaire, EPR, puis continuation des recherches (ASTRID) pour assoir une base énergétique qui nous permette de rapatrier des productions, développer l’industrie, répondre aux urgences climatiques. Il va être nécessaire de tailler notre chemin comme l’envisageait Fabien Roussel lors d’une interview récente (à écouter sur mosaïk radio) Pour écouter la séquence évoquée ci dessus à HEC en prenant pour faire court la 35ème minute https://www.youtube.com/watch?v=2vzNruUdeVI

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    • etoilerouge commune
      etoilerouge commune

      bien d’accord avec vs. De plus allez à HEC (commercial ) pour parler de connaissances en physique nucléaire et expliquer que monsieur tt le monde s’il ne dépasse pas 28 ans a le devoir de la solution ce n’est plus du populisme mais de la connerie. Le communisme , le socialisme à la française voilà ce qu’il ns faut en se disant comment lui faire passer un cap sans l’affirmation de l’existence des communistes, du parti, de la classe ouvrière. Et un journal HUMANITE qui redevienne communiste nécessite de se séparer de la direction anticubaine donc anticommuniste actuelle.

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  • Papadopoulos G
    Papadopoulos G

    Ce texte me touche enormement, transparait le respect,l’estime porte a l’autre. Meme si une analyse peut differer dans certains points. Je recois dans mon courrier electronique des textes et des analyses du PRCF. J’y trouve un interret certain, et en meme temps je suis en accord avec Danielle. Que diable, nous sommes si proches les uns des autres,et j’ai le souvenir a Lilles pendant une manif en decembre 2019 d’avoir eu le reel plaisir de saluer Georges Gastaud, en sachant bien que mon parti dans le pays ou je demeure,est en relation avec le PRCF. Enfin le vent de l’histoire, je le pense, nous rassamblera bien un jour.

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