Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Se suicider est une pure hypothèse d’école… mais le voisinage est pénible…

Le voisin délinquant et le prof autoritaire…

Il m’est arrivé une drôle d’histoire. Jeudi je fais mon marché et je rentre chargée comme un baudet. Changer les chaussures, nettoyer les mains, ôter le masque, renettoyer les mains, sortir les courses, les ranger. Faire tout ça dans l’ordre alors que j’ai tendance depuis toujours à me ruer sur une lecture quelconque parce que j’ai passé le temps de marche obsédée par un problème quelconque… Le cerveau a besoin de glucide et d’oxygène donc quand vous revenez des courses dans un périmètre relativement large vous bouillonnez d’idées qui n’ont rien à voir avec le quotidien…

Donc ce cérémonial du coronavirus est déjà concurrent de mes intérêts intellectuels, de ce qui m’intéresse et avec l’âge cela ne s’arrange pas…

Le lendemain vendredi je reste chez moi et je prépare les repas pour la semaine. Le samedi il vient ma femme de ménage, une perle et une amie, nous déjeunons ensemble. Je veux aller acheter du pain, mais je m’aperçois que je n’ai pas mes clés. je cherche partout et après avoir fouillé, épuisé les possibles, je me convainc les avoir laissées sur la porte jeudi. Mais entre temps, elles ont disparu.

L’immeuble est correct, sans grands rapports de voisinage mais correct, il y a simplement un couple, le mari surtout, un grand rouquin au physique de Chéri bibi sortant du bagne, je ne les sens pas. Cette disparition du trousseau de clé n’est pas la première, la serrure de ma boite aux lettres a été forcée et ma carte bleue envoyée par la poste a disparu (heureusement j’avais le code, il a fallu en recommander une autre). Un livre envoyé par colissimo avait disparu de la même manière.

J’ai déjà mis une pancarte : “rendez-moi mon livre ou je préviens la police” et le livre était revenu dans la boite. Mais j’avais dû changer la serrure.

Là c’était plus grave, il me fallait changer la serrure blindée et dormir sans être assurée de ne pas voir ma porte forcée. Le serrurier était ouvert le lundi.

J’ai donc mis une pancarte dans le hall : “j’ai laissé les clés sur ma porte, elles n’y sont plus, quelqu’un de l’immeuble les a pris, je sais qui c’est. Non seulement c’est méchant et stupide, mais c’est lâche de harceler une vieille dame. Lundi je vais vous dénoncer à la police”.

Le couple avec l’époux Chéri bibi était en train de déménager, dans l’escalier alors qu’il montait au 3e étage je l’ai interpellé dans la cage d’escalier “rendez-moi mes clés!Je ne les ai pas” m’a-t-il crié d’une voix embarrassée. Je ne vous crois pas lui ai-je répondu avec mon ton de prof, irrésistible. Celui qui me conférait une autorité telle que des collègues m’appelaient au moment des examens pour que je mette en ordre leur amphi… ça ne s’invente pas mais je dirais qu’on n’affronte pas un amphi de 300 à 500 personnes bardé d’incertitude…

Trois heures après alors que j’ai placé dans la serrure la clé de biais pour empêcher que l’on puisse utiliser une autre clé, on a sonné, c’est Chéri bibi qui a un sourire sournois comme s’il m’avait fait une blague. Je prends les clés qu’il me tend et je lui dis “merci” sans plus épiloguer.

Voilà c’est tout.. j’ai eu de la chance dans le quartier il y a une vieille dame qui s’est pris un coquard par deux jeunes qui sont entrés avec elle dans l’immeuble et l’ont frappée pour prendre son sac, elle n’ose plus sortir.

Cela dit, comme d’habitude je n’ai pas la moindre peur, simplement tout cela m’ennuie… Je ne comprends rien à ce garçon… pourquoi est-ce qu’il me prend des objets puis à la moindre menace me les restitue avec un sourire de gamin vicieux…

Et il n’est pas le seul à me paraitre totalement incompréhensible…

Hier sur le fil d’un site dans les réseaux sociaux des gens sympathiques discutent de l’un de mes textes, une femme intervient et m’accuse d’avoir été contre la Yougoslavie… pas la moindre preuve, de la diffamation pure et simple, heureusement Stephen Chalk a récemment exhumé un de mes textes dans la revue la pensée intitulé “la troisième guerre a commencé à Sarajevo”, cette femme est simplement proche de Soral et Dieudonné, de Bricmont dont je me suis opposée à l’antisémitisme ordinaire… Parce que non seulement on a ici une gauche massivement pro-CIA et impérialiste, des communistes qui la suivent pour un poste de conseiller régional, mais on a également des néo-nazis et fascistes avérés qui s’affirment anti-impérialistes… Le bordel…

Et tous ces gens gauche, droite, fasciste, bons ou mauvais camarades peuvent me diffamer pour cause de chloroquine comme celui qui a fini par m’écœurer au point de quitter le parti… Non seulement on me censure mais on pratique la diffamation… Plus on est de fous à faire la peau à la vieille dame plus on rit… En général le seul argument qui m’est opposé est effectivement mon âge, ça donne tous les droits comme à mon crétin de voisin…

Remarquez que l’on parle de vous comme d’un objet scandaleux alors que vous êtes octogénaire, c’est plutôt flatteur…

“Débiles, Bordel” a dit Lavrov en parlant des occidentaux en croyant ou en feignant de croire que son micro était fermé… En russe ça fait DB… je veux bien adopter un tel sigle… Micro ouvert ou fermé, censurée ou non…

Récemment France inculture a dit pour une fois quelque chose qui n’était pas tout à fait faux et qui est simplement un élargissement du concept d’anomie : “Les relations intimes reflètent les ébranlements du monde : quand le voisinage devient insupportable, c’est autant dans notre quartier qu’à l’échelle mondiale. .” Le suicide comme l’a décrit Durkheim peut avoir cette dimension anomique, celle de l’individu qui n’a plus sa place dans les rapports sociaux… Il y a un seul remède…

Oui ça s’appelle le socialisme… mais c’est mal barré dans ma douce France… Ou faire sortir le simple mot des lèvres gercées des dirigeants du PCF est devenu un enjeu de Congrès… de l’art de perdre son temps alors que tout se délite… Je trouve l’impossibilité à sortir “le mot” en soi parfaitement onirique… Je me demande ce qui s’est passé pour qu’il en soit ainsi… nous n’en sommes pas à la stratégie, non au mot… Et ceux qui comme moi osent sont des individus suspects de projets dictatoriaux… Moi une pauvre vieille dame de 82 ans, faudrait savoir? Rendez-moi mes clés!

Je n’ai ni peur, ni même de la colère… j’éprouve simplement de l’ennui à vivre au milieu de tout ça… Cela doit être cela vieillir dans une société sénile, se sentir la proie de l’arbitraire de votre fragilité et des imbéciles qui tentent d’exercer sur vous leur médiocrité… je m’en moque mais je me dis qu’est-ce que je fous là… le suicide m’est venu à l’esprit non par tristesse mais comme une hypothèse d’école à l’idée d’un tel entourage, des ennuis minables de voisinage… Jusqu’où faut-il aller pour ne plus les supporter ? Existe-t-il encore un monde qui ne soit pas aussi stupidement incongru qu’il faille s’en abstraire par instinct de survie…

Puis je me suis dis que se suicider à 82 ans serait manifester une impatience ridicule… Mais franchement est-ce que vous ne pourriez pas faire un effort de dignité pas pour moi, pour vous…

Danielle Bleitrach

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2 Commentaires

  • Jeanne Labaigt
    Jeanne Labaigt

    Quand j’ai vu DB (дб) sur la photo du T-shirt avec Lavrov, j’ai cru que c’était un T-shirt de fan : “Tous avec Danielle Bleitrach (DB) et Lavrov c’est le même combat !”…
    Je n’avais pas compris l’allusion.
    Ceci pour dire chère Danielle que l’un et l’autre (Lavrov et toi,au même niveau) êtes aussi indispensables l’un que l’autre.
    Et rappelle toi l’argumentation de Lucrèce contre le suicide …
    Bises…

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    • Danielle Bleitrach

      mais il n’est pas question que je me suicide… c’est une hypothèse d’école… ce matin je suis partie marcher, j’avais deux thèmes de réflexion. Le premier était la peur qui s’empare des faibles et qui les contraint à chasser en bande plus faible qu’eux,nous sommes dans une société où règne la peur et mon problème est comment m’en abstraire ?
      Le second thème de réflexion concernait la relation que j’avais à moi même… Paradoxalement j’ai toujours été extérieure à moi, je me suis regardée comme un individu avec qui je devais vivre, enfant, adolescente, femme, vieille femme, jeune, vieille, belle, moche peu m’importe j’éprouve une sorte de sympathie pour cet individu avec lequel je cohabite qui est moi et n’est pas moi.Moi c’est d’abord un élan vital venu du fond des ages(toujours ces mains sur les parois des grottes que j’ai besoin de toucher, de serrer) , jack London a décrit très bien cela, il a montré comment le rêve de la chute devait correspondre à la manière dont nous sommes tombés des arbres… Cette vie a besoin des êtres humains parce que tout ce qui a du prix à mes yeux passe par l’existence d’êtres humains… Mais je n’ai pas la chance d’être Aragon ou Brecht, ces gens qui refondent le monde en le formulant
      mais je connais ce qui les anime … Il y a quelque chose de destructeur canalisé ou espérant être canalisé … Reconfiguré autour de ce besoin de justice et il me pousse à dire à la petite fille, à la femme, à la vieille femme : “allons tu ne vas pas tolérer ça ?” et la prendre par la main pour que nous partions ensemble … Je ne suis ni vieille, ni jeune, ni belle, ni laide, mais je suis et c’est cet être là qui me pousse dans mes choix… Cet êtrelà cherche à s’échapper en ce moment… mais il est plein de pitié pour ceux-là qui ont peur…
      Simplement il est à deux doigts de se laisser gagner par la panique générale et il n’arrête pas de tenter de les calmer mais en vain…le suicide n’est qu’une allégorie du départ dans le bateau ivre… que j’ai cru être la Révolution, et qui l’a été parfois, je ne me plains pas.

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