La plupart des observateurs (ici russes) ont tout à fait conscience du fait que l’hégémonie des USA est mise à mal et que l’équipe démocrate ne va pas renoncer à la pression au contraire mais elle va tenter de recourir à ses armes favorites sur d’autres pays en exagérant le sujet des droits de l’homme et la pression sur les alliés pour limiter les contacts avec leurs concurrents. Utiliser les “élites corrompues”. Mais l’originalité de l’analyse c’est de souligner qu’il est difficile voire impossible d’isoler la Chine sur le plan économique, la stratégie de Trump est un échec, en revanche l’obliger à ne plus être communiste et à devenir une pièce parmi d’autres de la domination capitaliste passe par la destruction de la Russie puissance militaire, nucléaire en utilisant à plein ses oligarques et libéraux déjà vendus. Cela rejoint pour une part l’analyse de Ziouganov mais sur le fond une conscience en train de se développer et qui oppose le patriotisme du peuple qui n’en peut plus des inégalités, du chômage, de la misère, à la corruption d’une élite de nantis prêts à s’associer à l’hypocrisie des démocrates. (note de Danielle Bleitrach traduction de Marianne Dunlop).
par Andrey Ivanov, avec les commentaires de Mikhaïl Alexandrov, pour Svobodnaya Pressa (SP)
Photo: Global Look Press
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La nouvelle administration de Washington entend faire de la confrontation avec la Chine l’une des principales directions de sa politique étrangère. Il est logique de supposer que la confrontation entre les deux puissances déterminera le sort de nombreux autres États, dont la Russie. Ainsi que les méthodes qui seront utilisées par les États-Unis et la Chine dans la lutte pour la domination mondiale.
Le secrétaire d’État américain Anthony Blinken dans un entretien avec son homologue chinois Yang Jieqi a déclaré que Washington essaierait de tenir Pékin pour responsable de la violation des normes internationales. «Le secrétaire Blinken a souligné que les États-Unis continueraient de défendre les droits de l’homme et les valeurs démocratiques, y compris au Xinjiang, au Tibet et à Hong Kong, et a appelé la Chine à se joindre à la communauté internationale pour condamner le coup d’État militaire en Birmanie. Le secrétaire d’État a réaffirmé que les États-Unis travailleront avec leurs alliés et partenaires pour défendre nos valeurs et intérêts communs afin de tenir la RPC responsable de ses efforts visant à menacer la stabilité dans la région indopacifique, y compris à travers le détroit de Taiwan, et saper la base des règles du système international “, – a déclaré dans un communiqué officiel du Département d’Etat.
A lire entre les lignes, l’équipe démocrate qui occupait la Maison Blanche va changer radicalement la tactique des relations avec le Céleste Empire. Ou plutôt, changer les méthodes de pression. L’administration de Donald Trump avait opté pour des mesures très concrètes. Trump a déclaré la “guerre commerciale”, limité les activités des organisations culturelles chinoises aux États-Unis, contraint les entreprises américaines à abandonner certains types de coopération technique avec les entreprises chinoises (par exemple, obligé Google à refuser d’installer le système d’exploitation Android sur les gadgets mobiles de Huawei).
Les associés de Joseph Biden ont apparemment décidé d’utiliser la méthode de pression préférée des démocrates sur d’autres pays en exagérant le sujet des droits de l’homme et la pression sur les alliés pour limiter les contacts avec leurs concurrents.
En ce qui concerne Pékin, Washington devrait avoir un plan plus sophistiqué pour saper la Chine de l’intérieur. Fin janvier, juste après l’entrée en fonction de Biden, le groupe de réflexion du Conseil de l’Atlantique a publié un document stratégique intitulé « The Longer Telegram: Towards a New American China Strategy », dont le titre peut être traduit par « Le plus long Télégramme: vers une nouvelle stratégie américaine pour la Chine ». Le titre du document tient au fait que l’auteur fait une référence historique au soi-disant “long télégramme” – une stratégie élaborée en 1946 par le diplomate américain George Kennan pour saper les fondements internes de l’Union soviétique.
Le document actuel suppose que d’ici 30 ans, Washington devra faciliter le remplacement de l’équipe de Xi Jinping par une direction plus fidèle aux États-Unis, et les États-Unis et leurs alliés devront maintenir leur domination en Asie du Sud-Est. La pierre angulaire de cette stratégie est de saper la croyance du peuple chinois dans la puissance de son pays.
Le choix de l’année 2050 figurant dans le rapport américain n’est sans doute pas dû au hasard. Récemment, la RPC s’est fixé pour but de faire de la Chine un État socialiste développé à cette époque, et de réaliser le «rêve chinois d’un grand rajeunissement de la nation chinoise».
Un article est paru dans le magazine économique américain Foreign Affairs dans lequel l’auteur écrit ouvertement que les années 2020 seront décisives dans la compétition entre la Chine et les États-Unis, et que la tension entre les deux États ne cessera d’augmenter.
Mais quels moyens les États-Unis choisiront-ils finalement pour maintenir leur domination mondiale? Si vous regardez la situation exclusivement à travers le prisme de l’économie, il y a peu de chances d’arrêter la Chine aujourd’hui. À la veille de la nouvelle année 2021, un accord a été signé pour créer une zone de libre-échange sans précédent entre la Chine, les pays de l’ASEAN et l’Australie, le Japon, la Corée du Sud et la Nouvelle-Zélande, qui ont toujours été considérés comme des alliés des États-Unis. Dans le contexte de la crise économique mondiale, la RPC est devenue presque la seule grande puissance capable d’être un moteur de l’économie mondiale.
Mais il semble que les États-Unis aient décidé d’abandonner l’idée de concurrencer le Céleste Empire dans le domaine économique.
Mikhaïl Aleksandrov, un expert de premier plan au Centre MGIMO d’études militaro-politiques, estime que la nouvelle administration à Washington est prête à entreprendre des actions sans précédent pour contenir la Chine:
– Les États-Unis n’accepteront pas l’existence d’un concurrent. Biden aurait pu mener une politique plus pacifique, mais récemment son fils a été accusé de faire des affaires avec les Chinois. Trump a récemment révélé les liens du Parti démocrate avec la RPC et une attaque a commencé contre la Chine. En fait, un puissant lobby chinois opère réellement aux États-Unis; de nombreuses structures américaines sont liées à la coopération économique avec la RPC. Dans cette situation, il est bénéfique pour Pékin que Washington dirige le feu de ses critiques sur la Russie ou l’Iran, mais pas sur la Chine.
Maintenant, il est difficile pour Biden de se positionner en faveur d’un assouplissement de sa politique envers la Chine, sinon il s’avérera que Trump avait raison de qualifier Biden de “marionnette chinoise”.
L’establishment américain comprend que la Chine est un concurrent sérieux et une menace majeure. Mais ils pensent qu’il est possible d’écraser la RPC en faisant pression sur la Russie. Si la Fédération de Russie est détruite, alors la Chine sera laissée seule et acceptera les règles du jeu occidental.
La Russie et la Chine ont été déclarées les principaux opposants. Mais dans l’espoir que la Russie pourrait s’effondrer à cause de la trahison de ses élites, comme ce fut le cas en 1610, 1917, 1991.
Peut-être que Moscou et Pékin doivent d’une manière ou d’une autre coordonner leurs actions afin de repousser une attaque de l’Occident. Malheureusement, notre côté n’est pas très actif à cet égard.
“SP”: – Que peut-on attendre de Washington concernant la Chine?
– L’utilisation des contradictions nationales est une mesure de pression plus dure que la «guerre commerciale» proclamée par Trump. Le soutien aux séparatistes et aux terroristes dans la région autonome ouïgoure du Xinjiang, au Tibet et à Hong Kong est très sérieux. Les États-Unis ont également utilisé de telles techniques contre notre pays. Ils ont soutenu les “frères de la forêt” en Ukraine après la guerre, les mouvements nationaux, les séparatistes des pays baltes.
Tant que la Chine est forte, les États-Unis ne peuvent rien faire. De telles mesures ne peuvent être efficaces que s’il y a un affaiblissement du régime au centre. En tous les cas, les problèmes à la périphérie fragilisent la RPC et distraient le gouvernement de la résolution des problèmes internes. De plus, toutes ces histoires seront à l’origine de l’introduction de nouvelles sanctions contre la Chine. Pour violation des droits des Ouïghours, pour la répression des manifestants à Hong Kong.
Dans le même temps, les États-Unis construisent un bloc militaire autour de la Chine, qui comprendra le Japon et la Corée du Sud. Le fait est que certains de ces pays ont établi des relations économiques avec la RPC, mais les États-Unis vont resserrer les vis. Il en va de même pour l’Australie, qui souffre désormais de la fermeture des marchés chinois.
La Chine sera “encerclée”. Il y aura des provocations militaires. Les îles contestées auront des groupes de porte-avions américains et ainsi de suite.
La RPC peut se défendre efficacement si elle passe à l’offensive. Et ici, il est important qu’il y ait une coordination des efforts entre Moscou et Pékin. Par exemple, nous pouvons créer un Internet alternatif, une alternative au système de règlement bancaire SWIFT.
En principe, je n’exclus pas des conflits militaires régionaux. Cela ne mènera pas nécessairement à une guerre nucléaire mondiale, mais cela pourrait bloquer le commerce extérieur chinois.
“SP”: – Quelle sera l’importance de la lutte des États-Unis et de la Chine pour l’influence économique en Asie du Sud-Est?
– La Chine est en train de gagner ce combat jusqu’à présent. L’économie chinoise est déjà plus forte que l’économie américaine; les États-Unis n’ont aucune chance de gagner dans un combat loyal. Par conséquent, Washington utilisera des méthodes politiques.
L’Amérique n’agira pas par des méthodes économiques, mais par des méthodes différentes. Ils essaieront de détériorer les relations de la Chine avec les États d’Asie du Sud-Est. Si cela ne fonctionne pas, ils essaieront de créer des conflits. D’un autre côté, des pays comme le Vietnam et l’Indonésie ne veulent pas jouer selon les règles américaines.
“SP”: – Quel rôle la Russie peut-elle jouer dans la confrontation entre la Chine et les États-Unis?
– Une politique intelligente de Moscou devrait être de soutenir le côté le plus faible. La Chine est maintenant militairement plus faible. La Russie doit aider à renforcer la puissance militaire de la Chine pour briser l’hégémonie occidentale dans le monde. Ensuite, il faudra voir le comportement de Pékin. Aujourd’hui, il ne faut pas laisser l’Occident écraser la Chine. Et pour cela, nous devons coordonner nos actions avec Pékin. Mais ce nous ne voulons pas c’est que nous soutenions la RPC en Asie, et que nous ne soyons pas soutenus en Europe.
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