Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Xi Jinping : Promouvons les échanges, l’intégration, l’apprentissage réciproque et l’inspiration mutuelle entre civilisations (1)

J’ai plusieurs lectures que j’alterne au cours de la journée. L’une d’entre elles est le livre de Xi jinping “construisons une communauté de destin pour l’humanité“. Il rassemble une série d’interventions du leader chinois. Dernièrement, je me suis intéressée à propos de la Chine et de la Corée du sud à leur commune relation au confucianisme, dans à la fois la prise en compte du collectif dans l’épidémie et dans leur possible ou non relation au marxisme, j’ai été très intéressée par ce texte de référence (p.184 à 188). Ce style, dont la progression est lente, peut irriter un Français dont Marx notait à quel point il veut toujours sauter aux conclusions. C’est pourtant celui de bien des discours de Xi tout au long de l’ouvrage. Il s’agit de poser les cadres d’une pensée et d’une action potentielle dans le temps et dans l’espace, un espèce de cérémonial. Mais chez notre dirigeant marxiste confucéen le dernier paragraphe laisse pointer Mao et Deng, ce qu’il dit dans ce paragraphe me paraît juste pour l’homme d’action mais beaucoup moins pour le chercheur, historien ou autre… En tous les cas le propos qui est pourtant à usage interne entre connaisseurs de la pensée de Confucius ne peut que séduire ceux qui sont épris de la diversité des cultures humaines. Et surtout de leur respect, quelle que soit la taille ou la puissance du groupe humain. De ce point de vue le lien avec le marxisme et ce que le communisme a développé en matière linguistique, historique est aisé, mais cette démarche est aux antipodes de la mondialisation telle qu’elle se développe sous sa forme capitaliste et impérialiste (note de Danielle Bleitrach pour histoire et société).

Ce que Xi dit sur l’affiche : étudier sans réfléchir, cela ne sert à rien. Réfléchir sans étudier, c’est périlleux. Maximes confucéennes traduites par Marianne pour les lecteurs d’histoire et société.

(24 septembre 2014)

L’histoire de l’humanité s’étend sur des milliers d’années. Tous les pays et tous les peuples sont parvenus à leur stade actuel en héritant de leur passé et poursuivent aujourd’hui la marche leur ouvrant la voie de l’avenir. Le monde est devenu ce qu’il est aujourd’hui grâce aux échanges et à l’intégration entre les différentes civilisations. promouvoir les échanges, l’intégration, l’apprentissage réciproque et l’inspiration mutuelle entre les civilisations mutuelles constitue la seule voie possible vers un monde plus beau et une vie meilleure pour les peuples du monde entier.

Comment analyser correctement les civilisations des différents pays et des divers peuples, ainsi que les cultures traditionnelles et contemporaines? C’est un sujet majeur que nous devons bien comprendre. Je pense que nous devons accorder une importance particulière aux principes suivants:

Premièrement, préserver la diversité des civilisations du monde. “Il est dans la nature des choses qu’elles soient différentes. (2)” L’harmonie respectueuse de la diversité est une loi naturelle du développement de toutes choses. Le monde est rempli de choses et de couleurs différentes. Si tout devenait uniforme et monotone, le développement des choses et le progrès du monde seraient paralysés. La civilisation d’un pays ou d’un peuple est profondément enraciné dans son sol et possède sa propre nature, ses propres caractéristiques et ses propres qualités. Nous devons préserver la diversité des civilisations, renforcer les échanges, l’apprentissage mutuel et l’inspiration réciproque, et ne pas élever des murs, exclure les autres ou nous substituer à eux. C’est ainsi seulement que le jardin des civilisations du monde gardera sa vitalité et ses couleurs chatoyantes.

Chaque civilisation a sa valeur. Nous devons analyser rationnellement les différences entre notre propre civilisation et celle des autres, et reconnaitre que chaque civilisation est unique. Nous devons rechercher un terrain d’entente en laissant de côté nos différences, apprendre des autres pour combler nos lacunes et ne pas attaquer ou dénigrer les autres civilisations. En remarquant les différences entre la civilisation d’un autre pays et la nôtre, nous ne devons pas décider qu’elle n’est pas à notre goût et penser à tous les moyens possibles pour la transformer, l’assimiler ou même la remplacer par la nôtre. L’histoire a prouvé à maintes reprises que toute tentative visant à résoudre les différends entre civilisations à l’aide de moyens coercitifs est condamnée à l’échec à cause des ravages pour les civilisations du monde.

Deuxièmement respecter les civilisations de tous les pays et de tous les peuples. Une civilisation, en particulier sa pensée et sa culture, est l’âme d’un pays ou d’un peuple. Si un pays ou un peuple ne chérit pas sa pensée ou sa culture, soit sa propre âme, il sera incapable de se tenir debout. Nous devons chérir et préserver la pensée et la culture de notre pays ou de notre peuple, tout en reconnaissant et en respectant celles des autres. Les différences de pensée et de culture sont toutes précieuses à leur manière. Aucune n’est supérieure ou inférieure ; il n’ y a que la beauté de la diversité. Tous les pays et tous les peuples, quelles que soient leur taille et leur puissance, doivent voir leur pensée et leur culture reconnues et respectées.

Mettre l’accent sur la reconnaissance et le respect des réalisations de sa propre civilisation n’a pas pour but de s’isoler, de faire étalage de sa force ou de se considérer comme le seul détenteur de la sagesse. Tous les pays et tous les peuples doivent s’inspirer avec modestie des qualités et de la beauté des autres civilisations. C’est une condition importante à remplir pour renforcer le respect de soi, la confiance en soi et l’indépendance dans le domaine de la pensée et de la culture.

Troisièmement, effectuer un apprentissage mutuel et s’inspirer des autres civilisations. Les civilisations deviennent plus riches grâce aux échanges, elles s’enrichissent mutuellement en s’inspirant les unes des autres. Chaque civilisation, quel que soit le pays ou le terreau qui l’a produite, doit rester dynamique et ouverte. C’est une loi importante de la diffusion et du développement des civilisations. Au cours de sa longue évolution, la civilisation chinoise s’est enrichie par ses échanges avec les autres et a largement contribué au progrès de la civilisation humaine. Le développement de la Route de la soie, les missions japonaises sous la Chine des Sui et des Tang, les pérégrinations vers l’ouest de Faxian (3) et Xuanzang pour les soutras bouddhiques et les sept voyages en mer de Zheng He sont des exemples éloquents des échanges entre la civilisation chinoise et les autres civilisations. Le confucianisme est originaire de Chine, mais s’est depuis longtemps étendu au monde entier et fait aujourd’hui partie du patrimoine mondial.

“Celui qui étudie seul sans compagnons n’a personne pour l’aider ; son intelligence ne se développe pas, et il n’acquiert pas d’érudition (4)” Nous devons tous nous inspirer de toutes les civilisations humaines, avec la volonté d’apprendre, qu’il s’agisse de la civilisation chinoise, grecque, romaine, égyptienne, mésopotamienne ou indienne de l’Antiquité, ou encore de la civilisation asiatique, africaine, européenne, américaine et océanienne d’aujourd’hui. Nous devons tous chercher activement à absorber leurs aspects bénéfiques et permettre aux bons éléments culturels de toutes les civilisations humaines de s’adapter aux cultures contemporaines et de s’harmoniser avec les sociétés modernes. Il faut aussi faire rayonner un esprit culturel raffiné conforme aux valeurs d’aujourd’hui et avec un charme éternel qui transcende le temps, l’espace et les frontières nationales. En apprenant les uns des autres et en nous inspirant les uns des autres, nous devons, à partir de la réalité de notre pays ou de notre peuple, remédier à nos faiblesses en nous inspirant des points forts des autres et choisir un bel exemple à suivre. Nous devons avoir une approche inclusive, mais cela ne veut pas dire que nous devons prendre les choses sans les trier au préalable, ou que nous ne devons pas discerner ce qui est bon ou pas pour nous. Cela signifie que nous devons séparer le bon grain de l’ivraie et écarter ce qui est fallacieux pour ne garder que le vrai.

Quatrièmement, adopter la bonne approche vis à vis des traditions culturelles. Il n’y a que si nous nous souvenons de notre histoire que nous pourrons ouvrir la voie vers l’avenir. Il n’y a que si nous savons bien tirer des leçons de ce dont nous héritons que nous pourrons innover. Les richesses des cultures traditionnelles sont essentielles pour la transmission et le développement d’un pays ou d’une nation. Nous devons savoir combiner la mise en valeur d’une culture traditionnelle brillante avec le développement de la culture d’aujourd’hui, en les combinant de telle sorte que l’héritage s’accompagne du développement et que le développement perpétue l’héritage.

A mesure que la culture traditionnelle se forme et se développe, elle est inévitablement contrainte et influencée par les connaissances, les conditions et les institutions sociales limitées de l’époque. Il est également inévitable qu’il y ait des choses qui deviennent obsolètes ou qui doivent être abandonnées. Il faut donc que, lorsque […] étudient et appliquent la culture traditionnelle ou font de la recherche sur celle-ci, ils mettent la tradition au service du présent et qu’ils créent du nouveau en rejetant ce qui est révolu. Nous devons faire des choix judicieux en répondant aux demandes liées aux nouvelles pratiques et à la nouvelle époque, et ne pas transplanter inconsciemment le passé dans le présent. Nous devons favoriser la transmission en défendant le principe selon lequel l’ancien doit être au service du présent et selon lequel il faut tirer les leçons du passé pour vivre le présent. Nous devons discerner le vrai du faux, et non simplement vanter le passé au détriment du présent, ou dénigrer le présent en embellissant le passé. Nous devons travailler sans relâche pour que la culture traditionnelle connaisse un développement innovant, qu’elle soit transformée de manière créative, afin qu’elle se marie avec la culture contemporaine et réponde à la tâche de notre époque consistant à ce que les êtres humains possèdent une grande culture.

Notes

(1) Extrait du discours prononcé lors de l’ouverture du séminaire international marquant le 2 565 anniversaire de la naissance de Confucius et le Vème congrès de l’Association internationale du confucianisme.

(2) Voir “Teng Wen Gong”, Meng Zi (Mencius). Il s’agit d’un recueil d’anecdotes et de conversations du penseur et philosophe confucéen Mencius qui a vécu durant la période des Royaumes combattants. Ce livre qui fait partie des Quatre livres du confucianisme, est un classique confucéen compilé par Mencius et ses disciples. Les trois autres livres sont Da Xue (La grande Etude), Zhong Yong (L’Invariable milieu) et Lun Yu (Entretiens de Confucius).

3) Faxian (env-337 env422) était un moine bouddhiste de la dynastie des Jin de l’Est. Il fut le premier moine chinois à voyager en Inde et à rapporter des soutras bouddhiques en Chine.
4) Voir “Xue Ji” Li Ji (Livre des rites)

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