Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Journal d’un confinement : le 16 mars 2020

j’ai décidé de tenir mon journal d’épidémie, en mêlant comme il se doit dans ce type d’exercice les impressions, les faits et les commentaires, un pot pourri de ma prison et de la votre. C’est la fin semble-t-il de cette folie, ces élections municipales complètement oniriques par temps de choléra sans que personne ne semble croire qu’il puisse l’attraper. Je n’ai pas voté, ma manière de protester. J’ai même tenté de prévenir, j’ai écrit “si j’étais un maire communiste, je suspendrai d’office ces élections”, puis j”ai effacé le conseil. Pourquoi paraître incriminer les seuls élus communistes d’une folie française ? la responsabilité en incombe au plus haut niveau, celui de l’Etat, de ses médias et de toute une élite autoproclamée, qui n’a cessé de nous faire perdre un temps précieux.

Cette référence à ce que devrait faire un élu communiste ‘était encore et toujours une manière d’hommage au bon sens, à l’ancrage dans le réel, les conditions matérielles dont on ne peut faire abstractions qu’en imagination disait Marx. Désormais, souvent en vain. , je les interpelle quelquefois avec rudesse mais c’était là encore une manière de dire: mais si vous aussi… que reste-t-il à ce malheureux peuple français?

Cette folie-là de nous envoyer voter, s’est doublée d’une autre: les queues dans les magasins, pas moyen d’y échapper. Quand on se plaignait d’être serré par les clients derrière vous , ils vous insultaient, l’employé faisant chorus.. même la pharmacie était le dernier lieu où l’on papotait, un lieu d’intense sociabilité pour octogénaire faisant état de ses petits bobos. Cela a duré jusqu’au lundi 16 mars, quand je suis sortie acheter deux ou trois végétaux pour une grosse salade,.Les rues étaient désertes et la seule cliente du magasin était à deux mètres de moi.

Les flonflon de l’élection se sont peu à peu dissipés comme une ivresse tenace.. Il y avait eu le discours d’Edouard Philippe du vendredi, il nous avait annoncé le commencement de mesures drastiques, mais c’était seulement pour lundi, sous entendu “allez voter et profitez bien de votre week end… Et après on change d’attitude! ” Culpabilisant une fois de plus pour lui-même dégager en touche… Alors tout le monde a continué comme si de rien n’était mais dans un espèce de ralenti cinématographique de ceux où le héros prend peu à peu conscience du péril, mais poursuit sur sa lancée. Il faisait si beau, après avoir voté ils se sont entassés dans des barques pour aller visiter les îles à Marseille et à Paris sur les berges de la Seine.

Même les Polonais ont été, selon Courrier international, choqués par l’attitude irresponsable des Français! Même les Polonais c’est dire , ils y connaissent quelque chose en matière d’irresponsabilité ces gens-là… Encore aujourd’hui où leur gouvernement appuie les grandes manœuvres de l’OTAN à travers le continent. 30.000 soldats américains débarquent en ce moment. Une armée, cela fait penser au Candide de Voltaire, avec les épidémies et les reîtres de la guerre de sept ans en train de violer mademoiselle Cunégonde qu’il épousera quand toute l’armée bulgare lui sera passé dessus et qu’elle soit devenue fort laide… Tous plus fous les uns que les autres sous la conduite du maître du monde occidental, Trump dont on a appris qu’il cherche à acheter un vaccin allemand avec une clause d’exclusivité pour le peuple américain. Il connaît bien l’imbécile égoïsme de son peuple ce crétin, qui a la moitié du cerveau en tiroir caisse et l’autre habité par les théories du Klux Klux klan .

Ce vainqueur de la guerre froide, ce clown inquiétant, traîne comme une proie, à titre d’épouse, une splendide créature, une dépouille des peuples vaincus au-delà du rideau de fer. L’être le plus vulgaire, le plus barbare qui se puisse imaginer dans un monde où le titre est tellement disputé.

Dans un premier temps, il s’est obstiné à nier l’épidémie comme s’il se fut s’agi d’un réchauffement climatique. Les deux moitiés de son cerveau unifiées dans le déni :l’ignorance des suprématistes blancs en accord parfait avec son oeil fixé sur les profits boursiers qui ne cessaient de croître au fur et à mesure que la Chine s’enfonçait dans le bourbier épidémique… Et puis il y a eu le krach, et là ce cinglé a basculé de l’autre côté…

Peut-être y a-t-il eu des aspects plus personnels de cette prise de conscience du danger: il venait de passer une charmant week end à peloter les menottes de son alter ego brésilien qui s’est avéré positif au virus… et qui en proie aux fièvres évangélistes continue à nier et à prendre des bains de foule… Ce sont de grands tactiles jusque dans les salles de torture… Donc Trump, tout à coup a eu les deux hémisphères de ce qui lui tient lieu de cerveau qui ont viré au rouge… là il a pété les plombs… Non seulement il a voulu acheter le vaccin et l’interdire aux autres… Mais il a bloqué les contacts avec l’Europe, tout seul sans la moindre concertation… Bon! c’était pas sympa, mais ça a déclenché une ruée d’américains revenant chez eux et qui pendant des heures ont pratiqué le corps à corps dans les aéroports.

Là nous sommes apparemment devant le cas extrême, mais n’est-il pas aussi notre miroir?

Depuis que l’épidémie s’est déclanchée je m’obstine à refuser de serrer les mains, embrasser, au grand étonnement de ceux qui me rendent visiste comme mon ami Gilbert rémond. Tout cela n’a rien de miraculeux dans la prescience, simplement je n’ai pas la haine primaire des Chinois, je leur fais confiance et je suis avec sympathie leurs efforts désespérés pour vaincre ce foutu virus. Cela rend raisonnable de concevoir l’humanité comme une et de refuser de la confondre avec un bilan comptable.

L’ennui c’est que ça me marginalise : un peu en avance sur l’événement je suis accusée d’être atrabilaire… et de surcroît, Je suis effrayée par le racisme ordinaire des Français, les gens de droite comme de gauche,. Les gens de gauche et la plupartdes communistes à de rares exceptions n’y échappent pas, is baptisent ça simplement amour de la démocratie. Le confinement de Wu han leur apparaissait alors comme la preuve du totalitarisme, ça s’est atténué aujourd’hui mais ça demeure. Sur les plateaux de télévision, à l’admiration pour ce qu’a fait la Chine se mêle encore et toujours le constat “Eux ils peuvent, mais pas nous” et on ajoute invariablement “fort heureusement!”, jusqu’au bout ces cocoricos xénophobes. Quand l’arrogance devient à ce point criminelle à force d’être imbécile les bras vous en tombent.

Hier, j’ai appris une nouvelle dont je n’imaginais pas qu’elle puisse me faire tant de peine, mon ami Jean Dufour est mort. Mon camarade, côtoyé à l’université et au Conseil régional, le moins que l’on puisse dire est pourtant que ces dernières années, en particulier dans les années quatre vingt, nous n’avions pas les mêmes opinions politiques. Pourtant, nous n’avons jamais cessé d’échanger et de prendre plaisir à ces échanges, une opinion assez unanime… Quelles que soient les moqueries auxquelles j’avais droit à cause de mon côté “fifi brin d’Acier”, il conservait son charme. On ne peut pas dire qu’il ait été beau, certains diront même qu’il avait un physique ingrat mais il avait ce charme des hommes qui aiment réellement les femmes et les contemplent avec amitié. ce n’est pas le sujet d’aujourd’hui mais cette montée en apothéose du virus s’est accompagnée d’une querelle sur le viol. Alors je tenais à réaffirmer à quel point tous les hommes épris des femmes ne sont pas des violeurs. j’apprécie les hommes respectueusement admiratifs tout autant que je conçois qu’il y ait dans ce domaine beaucoup de combinaisons possibles et licites à l’attirance entre adultes libres et consentants. Je n’ai pas eu l’occasion d’user de cette séduction de mon ami Jean, mais elle teintait d’agrément toutes les relations d’amitié, de militantisme, les échanges intellectuels.

Mais il y a plus et c’est ce qui nous avait toujours rapprochés malgré nos divergences stratégiques, il était totalement communiste. Pour lui comme pour moi, le communisme était une civilisation qui avait approché de près ce que nous cherchions lui et moi: le lien entre l’intellectuel et la classe ouvrière. C’était une manière d’unifier nos goûts, notre profession universitaire avec nos origines. Il était resté ce communiste-là contre vent et marée et récemment nous nous étions retrouvés sur le bilan nécessaire de l’URSS et sur ce que représentait la Chine. Ils étaient venus Nicette et lui à mon débat sur mes mémoires à Avignon. Je n’ai pas cru et compris qu’il puisse ne plus être vivant. Il a eu la courtoisie de laisser le souvenir d’ultimes plaisanteries à ses interlocuteurs…

Voilà, il faisait partie de ceux parmi les communistes qui refusaient les idées non pas communes mais pleines d’a-priori imbéciles qui me rendaient si pénibles les discussions avec mes camarades, comment en étaient-ils arrivés là? Ils étaient si peu différents de ces gens qui sur les plateaux de télévision venaient déverser leur haine contre la Chine en proie à l’épidémie. Cette abominable Valérie Niquet dont les regards chaque mots disaient la haine raciste, l’anticommunisme comme expertise… Je me souviens encore de ce cri poussé par un responsable chinois “mais est-ce qu’il vous reste une once d’humanité? ” Ne voyait-il pas que la Chine avait tout à coup interrompu son enrichissement pour non seulement arrêter de sortir de chez soi, mais tout à coup tout réorganiser collectivement dans une lutte contre le mal. Même les restaurant encore ouverts pour nourrir la population, les ouvriers de la construction des hôpitaux, les personnels de santé fonctionnaient à perte, tous en proie à la même abnégation. Cela ne s’est pas arrêté là, est-ce que l’on mesure que les chaines de productions se sont transformées et se sont mises à sortir du matériel médical et ces masques que nous n’avons plus et qu’ils déversent actuellement sur l’Europe, sur l’Iran partout.

Hier il y a eu le discours du président de la République, comme le précédent il a pris de la hauteur, et cette hauteur que l’on peut lui reconnaître tient simplement au fait qu’il s’est dépouillé de l’âpreté de la classe qui l’a mis là. Il est allé jusqu’à suspendre le vote des retraites, jusqu’à affirmer que chaque Français aurait de quoi vivre, bref pour être grand il a du représenter un collectif, se rapprocher du communisme. Oui et on doit le dire, ne pas mégoter sur les mots, mais ma seule crainte est que comme en ce qui concerne le précédent discours qui nous avait déjà étonné par son abandon du “libéralisme”, il échoue sur tous les compromis dont se nourrit notre société française. Le précédent discours est devenu lettre morte à cause des pressions politiciennes de la droite en particulier, on sait le rôle joué par Larcher, le président du sénat, mais il a vite cédé parce que c’est son dernier point d’appui. Mais il n’y pas eu que la droite pour ne pas s’opposer à ces foutus élections… Le premier discours de macon avais-je remarqué suintait la peur et pourtant il a cédé. A quoi cédera-t-il demain? Mais malheureusement les Français tels qu’ils sont devenus n’ont pas de leçons à lui donner.

Macron,oserai-je le dire, me faisait songer au “soviétisme le plus radical même pas la NEP ,le communisme de guerre : La France assume les crédits et suspend le paiement des loyers, taxes et factures d’électricité, de gaz et d’eau et le débat sur les retraites qui provoque hostilité, répression est arrêté. Staline face à la guerre : quand non seulement vous avez devant vous la guerre civile, 14 armées étrangères qui déferlent sur vous, que des famines périodiques épuisent la population, que vous n’avez pas d’industrie lourde, qu’il faut alphabétiser, former des médecins, “l’homme ce capital le plus précieux”! qui pourrait l’entretenir dans une telle vision du monde ? Et osera -t-il aller jusqu’à son corollaire l’appropriation collective des grands moyens de production, d’échange et de consommation? Au moins comme la Chine les volants financiers et une planification ? Qui défendra pareil programme? Qui ceux qui pensent et disent que la fin de l’URSS a été un “air de liberté”… que l’on puisse penser pareille ânerie en 1991 ce n’est déjà pas très glorieux mais en 2020…

C’est comme les résultats de ces élections tels que les analysaient les militants communistes. Faute d’une sttatégie de passage au socialisme, révolutionnaire au sens positif du terme, celui d’un nécessaire changement de pouvoir et de société ils ont tendance à confondre leurs buts avec les tendances électorale, que l’électorat veuille une retour de la gauche plurielle n’est pas nécessairement le meilleur pour ce changement. Pas plus qu’en matière de lutte contre l’épidémie, les Français n’ont une vision spontanément adéquate, nous avons besoin de comprendre de vaincre nos méfiance, de perdre le peu que nous avons.

Bref qui Macron a-t-il pour rectifier ce qui risque de nous ramener à la catastrophe qu’il prétend éviter…

Fera-t-il comme Trump qui dans son dernier discours de vendredi s’était entouré de toutes les multinationales du pays pour les vanter comme le destin de l’Amérique, déjà Bruno Lemaire a été pas mal dans le genre, entouré de tous les magnats de la grande distribution pour leur remettre les clés de notre approvisionnement.

Mais peut-être la France est-ce autre chose, peut-être que la belle endormi que représente le parti communiste va enfin se réveiller pour son centenaire et pour retrouver l’amour au temps du choléra… L’amour de plein de chose de la patrie, des travailleurs, de la classe ouvrière, de ces fantassins du social, de son vrai passé et pas celui que l’on invente…

Pourtant je n’ai vraiment pas à me plaindre, je suis entourée aidée, j’ai des amis et surtout des amies qui me téléphonent, nous rions, nous refaisons le monde en rêvant du temps où l’on enverra au goulag tous les profiteurs. j’ai une masse de livres à lire. Mon frère est passé me porter des masques de son cabinet dentaire, nous nous tenions à plus d’un mètre l’un de l’autre sur le pas de ma porte et rarement j’ai eu autant envie de l’embrasser tendrement tandis que mon petit frère qui a 23 ans de moins que moi me recommandait :” si tu as le moindre symptôme, téléphone, je me débrouillerai”. Hamid me téléphone deux fois par jour, mon seul problème est de l’empêcher de sortir, lui et de venir m’apporter comme il le fait des fruits, de la nourriture et de la litière pour le chat.

j’allais oublier au titre de mes colères… Il ne s’agit même plus de mes colères, les bras m’en tombent… Mon petit voisin qui organise pour la paroisse tous les dimanche un goûter sur la place de l’église m’a annoncé qu’il partait lui et sa petite famille à la campagne… Comment leur dire que c’est encore une folie de bobo… Qu’ils risquent de charrier le virus dans des déserts médicaux et d’y faire un carnage. Encore un qui croît sans doute aux vertus du retour à la nature…

Danielle Bleitrach

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2 Commentaires

  • Gregorio Martinez-Diaz
    Gregorio Martinez-Diaz

    Chere Danielle, comme toujours, depuis que l’ouvrier communiste que je suis, a eu la chance de te renconter par hasard sur FB, j’aime toujours autant te lire. Aujourd’hui, j’ai particulierement apprécié tes mots pour le camarade Jean Dufour. Je ne l’ai pas connu, bien que grâce à toi, puis à wikipedia, il m’est apparu. Tu as bien fait de rendre hommage à l’homme et au militant qu’il était. Un communiste de la tête aux pieds, mêmes si ses pieds l’ont amené à prendre, à une époque historique particulierment troublée, un sentier different du nôtre, ou d’autres encore. Mon souhait le plus cher, en tant que militant, est que tous les communistes dispersés suite au cataclysme provoqué par, notamment, la fin de l’Union Soviétique, retrouvent le chemin de l’unité, au sein de notre vieux mais bon parti. Quelque part tes mots pour Jean ont ressuscité cet espoir✊

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  • Daniel Arias
    Daniel Arias

    Petite récréation un jeune guitariste Russe reprenant un thème musical du compositeur soviétique Eduard Artémiev.
    https://youtu.be/rpdt7urH_Jk

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