Il y avait d’autres choix possibles, nous aurions préféré celui de tenir bon devant les liquidateurs. Ce qui se passait à l’Humanité, comme dans la fête de ce journal et dans le groupe qui n’était même plus communiste disait clairement l’ampleur de la destruction « à la découpe » de ce parti. Il n’y a rien de nouveau, simplement dans le parti comme au plan de la situation française, les masques tombent parce que la situation géopolitique les lézarde et qu’ils sont contraints, de plus en plus minoritaires, de montrer ce qu’ils sont. Le problème n’est donc pas seulement eux mais la faiblesse de la majorité et sa désorganisation théorique, politique qui freine l’intervention populaire. Il faut construire et faire la clarté …
La censure indécente, provocatrice organisée autour de notre livre était un signal parmi d’autres, mineur certes, mais qui éclairait sur les forces et les faiblesses, les ombres et les lumières de la situation dans le PCF. Cette petite bataille que nous avons dû livrer autour de la diffusion de ce livre et de sa proposition d’adhérer au monde multipolaire, m’a aidé à tenter un diagnostic beaucoup plus intéressant. Si nous avons constaté qu’il y avait une mobilisation à la base autour de ce livre, là où le parti tentait de reprendre pied à partir de la mise en oeuvre des précédents congrès, on ne pouvait que mesurer le fond et les limites de notre action. Ce qui nous apparaissait dans les débats, comme d’ailleurs dans la censure de l’Humanité, de pratiquement toute la presse liée au parti, la manière dont Roussel lui-même n’avait jamais défendu sa préface, était négatif. A partir de notre expérience était amplifiée la faiblesse de l’exécutif. Je résume alors la description de cette carence de l’exécutif et de la direction de l’appareil: une incapacité à agir au niveau où cela s’imposait. Une absence de volonté concernant la manière de tracer des lignes rouges en s’appuyant sur les décisions de congrès et surtout l’incapacité à s’opposer aux manœuvres de ceux qui au sein de l’exécutif poursuivaient une politique de fractions avec des relais dans les commissions à leur dévotion, des groupes tampons et surtout le pire : le peu d’initiatives et d’appui dans la reconstruction d’un parti.
Pourtant ce serait une erreur que d’en rester là: Si notre livre a connu une diffusion totalement exceptionnelle dans la guerre de basse intensité qu’est la propagande en France, il le doit à ce qu’il reste de combattivité dans le parti mais au-delà dans notre peuple. C’est vrai pour le parti mais plus encore pour la France et il faut arrêter le catastrophisme et mettre en avant les possibles.
On peut interpréter ce qui surgit aujourd’hui dans la Seine saint Denis dans les anciens bastions est aussi la preuve que dans le parti comme dans la société française, dans le monde, les masques tombent et les illusions avec, ce peut être une bonne chose.
Il y a eu pour moi deux expériences de débats récents, qui m’ont aidée à percevoir la réalité. Le débat de Lyon qui a été une réussite malgré le boycott organisé au sein du parti sous diverses influences: l’ouvriérisme étroit comme réponse au sentiment de trahison, la fatigue de ceux qui s’épuisaient dans le combat autour de la défense de nos municipalités attaquées de toutes part derrière LFI qui menait la danse, et qui le nez sur le guidon ne voyaient plus l’horizon international ou le limitaient à ce qui paraissait concerner la population de leur territoire. Puis il y a eu le débat de Marseille, dans une des fédérations les plus « claniques » qui se puisse imaginer avec l’enchevêtrement inextricable de la combativité ouvrière et des petits compromis. Là encore si j’en reste à moi et à ce que je subis depuis des années, je ne peux qu’envoyer au diable tous ces médiocres qui s’entendent sur la censure exercée contre moi, ce qui fait partie des mœurs du sérail local et de l’art et la manière d’organiser les « élections » à partir de ce niveau politicien. Ce que m’a confirmé ce débat c’était que le choix de Fabien Roussel d’un tel panier de crabes était celui de céder au courant liquidateur ou du moins de tous les groupes tampon qu’il avait construit en évitant tout ce qui pouvait fâcher, en particulier la situation internationale.
Naïvement Fabien Roussel comme d’autres avaient choisi de rassembler et pas de marquer les camps alors qu’il ne pouvait ignorer que les couteaux étaient sortis de leur gaine. Mais le vrai problème était de ne pas mesurer à quel point les « liquidateurs » en minorité dans le parti étaient alors obligés de profiter de l’avantage que leur conférait un discours qui transformait leur fractionnisme en « démocratie » à l’intérieur du parti, étaient désormais contraints de tomber le masque.
Il y avait selon moi une stratégie erronée mais nul ne pouvait réellement s’y opposer puisqu’elle était menée par celui qui symbolisait aussi le renouveau des derniers congrès. Non seulement le compromis mais surtout ne pas tenir compte du contexte géopolitique de basculement historique qui oblige à ouvrir l’angle de toutes les solutions.
Aujourd’hui le signal vient non des Bouches du Rhône, mais de Sofia Boutrih directrice de la Fête de l’Huma, le parcours de cette responsable est apparu évident à qui voulait bien voir qu’elle agissait au profit de LFI en transformant le PCF en simple invité de la fête tout en exigeant de lui financement, efforts militants. Un jour on découvrira peut-être que les appels périodiques à contribution militante pour que le journal et sa fête survivent sont une manière de masquer d’autres sources de financement qui peuvent parler en maître. Ce ne serait pas seulement au profit de LFI que ces gens-là sont susceptibles d’agir comme en témoigne l’appel systématique de Kamenka à des forces liées à l’OTAN. Dans ce cas pourrait être utilisée l’absence totale de contrôle, la pétaudière que devenait le groupe communiste, les commissions internationales, la presse. Tout cela formait système, un brouillard interdisant l’intervention des militants dépossédés. Puisque tout ce beau monde paraissait agir avec l’assentiment de l’exécutif du parti, dans des activités et propagandes qui était la négation pure et simple des résolutions des deux derniers congrès et de la décision de la très large majorité de sortir des impasses, du tunnel construit depuis plus de trente ans. Il ne suffit pas de proclamer une rupture il faut que les actes correspondent aux paroles et que ne soit pas systématiquement sacrifiés ceux sur qui on pourrait s’appuyer pour ce faire. C’est le grand acquis des liquidateurs mais pour le reste leur mise en minorité se confirme et s’accroit.
Si ces manoeuvres tombent le masque c’est parce qu’il est impossible pour cette faction de continuer à feindre d’agir dans le parti qui les met de fait en minorité, en jouant simplement sur l’inertie, le découragement des camarades, la désorganisation, l’absence de « centralité » politique qui est le résultat de plus de trente ans de destruction d’un parti révolutionnaire sous tous les modes possibles et imaginables en particulier en favorisant l’ignorance théorique et la destruction des cellules d’entreprise..
On tente d’attribuer à LFI ce qui est bien né dans le parti et pas ailleurs. Tout le monde savait qui était Jean-Luc Mélenchon, un proche de Mitterrand, un lambertiste, le pire des courants trotskistes celui qui avait donné prise aux accusation d’Hitlero-trotskisme, qu’il s’agisse de Mitterrand ou des lambertistes, la volonté de s’attaquer en priorité aux communistes, les liens avec l’atlantisme étaient patents. Certes les secrétaires du PCF qui se sont succédé étaient catastrophiques et avaient, ont probablement un fil à la patte ou étaient d’une sottise incroyable mais ils ne pouvaient pas ignorer à qui ils livraient le PCF. On peut même considérer qu’avec un tel passé Mélenchon s’est avéré moins pire que ce que l’on pouvait imaginer tout en confirmant ce qu’il représentait d’ambition personnelle et de destruction systématique du PCF, toujours défini comme stalinien alors que ses militants sa direction ne cessaient de donner des preuves de traque et de négationnisme.
Dénoncer Mélenchon comme l’auteur de tous les maux, découvrir que la ceinture rouge, l’Humanité, Ivry, tous les symboles du parti sont livrés par les liquidateurs à la LFI et aux ambitions dérisoires et sordides d’une « organisation » qui est la proie de divisions entre les chefs et qui participe aujourd’hui puissamment de la crise de la gauche, voire au triomphe du rassemblement national, dit à quel point les militants sont en pleine contradiction, on ne peut pas poursuivre la politique de l’Autruche et même celle de l’Autriche qui préside à tous les Anschluss, en évitant une autocritique qui déboucherait sur des actions efficaces.
C’est ce que j’ai compris lors du récent rassemblement marseillais en novembre 2025 et qui a emporté ma décision, le choix restait celui du compromis du moins jusqu’aux élections municipales, et la question du Congrès n’était pas réglée. En attendant, il était continué de sacrifier des gens comme nous sur l’autel du compromis électoral. Si les militants du parti sont prêts à une telle confusion et croient qu’ils en sortiront sans affaiblissement voire destruction du parti, c’est leur choix, ce n’est pas le mien. Mais le dernier respect que je leur dois au nom de ce qu’ils ont été c’est de leur accorder le pouvoir d’agir qui n’est pas le mien.
Chacun de nous doit intervenir là où il peut FAIRE. Poursuivre tout ce que je pouvais faire en matière d’information sur le plan géopolitique en particulier parce qu’il y a là le contexte qui peut bousculer toutes les manœuvres politiciennes d’un monde qui perd pied. Mon livre que je viens de terminer commence par la description de la figure d’échec et comment préserver tout ce qui avait été construit dans ce domaine autour d’Histoire et societe, de notre livre, ne pas m’attribuer ni à moi, ni à ceux qui continuaient à agir en ce sens un pouvoir qui n’était pas le nôtre et qui restait celui des congrès des communistes. De ce point de vue, ne pas en rester à l’amertume de ne pas avoir été entendue mais dépasser ce qui relève des passions individuelles et m’appuyer seulement sur ce qui peut encore unir, la politique au sens le plus noble du terme et mon enfantin désir de Révolution.
Danielle Bleitrach
A propos de la diffusion de notre livre petit rappel de la réunion de lundi à Grenoble

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