C’est désormais une tradition, grâce à mon amie Maria, ma salle de séjour devient un gigantesque sapin de Noël avec des décorations « maison » autour de branches d’arbres, des pommes de pins aux écailles peintes à la peinture blanche, des fleurs séchées, des fleurs artificielles et naturelles comme ces petits lampions oranges ou des cosses de marrons poilus, des oranges piquées de clous de girofle déposés chaque année dans de petits verres en cristal, les statues de mon décor ordinaire magnifiées par ces branches et des guirlandes lumineuses, un petit festin provençal que je prépare en mijotant de longues heures avec l’odeur des fumets.. L’après-midi nous sommes allées dans l’église de la place sur laquelle je vis pour y allumer des veilleuses au nom de tous les disparus… et le tout au son de la musique baroque et des Noël religieux mais la viande, une épaule d’agneau était hallal parce que tous ceux avec qui nous la partageons sont musulmans…
Nous avons pris l’habitude de cette fête solitaire avec Marianne et nos parties de carte et de scrabble jusqu’à des heures matinales, nos disputes d’écolières accusant l’autre de tricher et le lendemain, le surlendemain ça continue… De temps en temps, il vient quelqu’un pour apporter des chocolats ou manger les nôtres… et ils partent avec des morceaux de la viande hallal et des légumes comme le cèleri rave en purée, les champignons, le potiron cuits dans le jus… La salade d’endive est émaillée de grains de grenade, de kaki pommes et de cerneaux de noix, avec des dès de comté… je fais des tartes aux pommes à partir de ma célèbre compote au gingembre et à la badiane ou anis étoilé… Il y en toujours une au four…
L’autre tradition sera pour le premier de l’an : aller essayer de trouver un restaurant ouvert au bord de la mer pour tremper quel que soit le temps les pieds nus dans les petites vagues en respirant l’air du large… Jadis je me baignais à la plage des catalans, puis j’ai craint la bronchite et je me contente de marcher dans l’eau… Je cherche une sable qui reste ferme sous le pas, Il m’arrivait de partir seule en train pour atterrir aux Sablettes du côté de la Seyne du mer ou arriver à trouver un autre solitaire pour partager cette joie d’accueil de la lumière du Nouvel an . Le solstice est passé et les jours ne vont cesser de croître jusqu’à la splendeur de Pacques et de ce 17 avril 2026 où j’aurai 88 ans et une intense joie en moi que rien ne peut abolir…
Une année encore où je pourrai marcher, un sac à dos dans lequel il y a un livre et un cahier pour prendre des notes, un sandwich et une bouteille d’eau en m’arrêtant de temps en temps sur un banc puis l’après-midi se réfugier au cinéma… le véritable luxe est là *, je le salue le jour de la saint sylvestre… j’ai connu les grandes tablées maintenant il me reste la célébration de fantômes aimés avec de petites lanternes de chauffe plat.. et quelques amis en qui j’ai confiance c’est une immense richesse et le vrai sentiment d’éternité. Celui qui me pousse à écrire des livres, ces notes comme le témoignage des possibles…
Je vous souhaite la même chose, ces doux plaisirs de rites assumés et arrachés par notre courage à ceux qui ne cherchent qu’à nous gâcher la vie et qui fort heureusement n’y arrivent jamais tout à fait.
Danielle Bleitrach





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