Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Les BRICS incarnent la fin de l’ordre libéral

Les BRICS incarnent la transition d’un ordre néolibéral vers un système international plus multipolaire et pragmatique… Les BRICS sont en effet l’incarnation mais pas la totalité du système, c’est ce sur quoi nous insistons, ni même sa véritable dynamique. Nous sommes devant un processus qui en priorité relève d’une contradiction fondamentale, celle du rapport des êtres humains à la nature dans lequel le développement scientifique et technique est le moteur de l’ébranlement. Or ce qui caractérise cette contradiction est la manière dont les pays occidentaux, les USA en particulier qui jouissaient d’un quasi monopole dans ce domaine n’ont cessé de délocaliser leur production matérielle, l’industrie vers les pays du tiers monde qui ont connu de ce fait un essor, et le terme d’émergent définit cette transformation. Mais la plupart de ces pays n’ont pas développé à un niveau suffisant l’innovation et la formation de la population en regard de tout ce qui surgissait, ils sont restés au stade de la fabrication et de la sous-traitance. Seule la Chine, dans un partenariat avec la Russie a joué une autre stratégie, celle d’un socialisme de marché. L’occident découvre en matière d’innovation scientifique et technique, qu’il s’agisse des produits commerciaux ou même de la guerre, qu’ils sont désormais à la traîne parce qu’ils n’ont pas la production matérielle, si en outre comme le veut la politique de Trump pour tenter de se réindustrialiser et de conserver leur suprématie scientifique et technique, ils combinent la guerre tarifaire avec le renvoi des étudiants étrangers et une innovation « gadget » à finalité boursière, ils asphyxient certes les pays fabricants mais font monter leur inflation et celle des pays qui sont pris dans le dollar, comme ils n’arrivent ni à produire en nombre suffisant, ni à faire réellement pression sur la Chine qui elle a désormais franchi un seuil et qui offre une alternative en ayant partiellement réorienté ses circuits d’abord dans le continent eurasiatique ensuite vers les pays du sud en proposant avec le partenariat de la Russie un véritable transfert technologique et un marché plus intégré. On conçoit qu’un tel processus incroyablement accéléré ne saurait se limiter à une institution même si celle-ci est le symbole de la transformation. Dans un tel processus, les protagonistes de la transformation ne sont pas les gouvernants, les représentants, ceux-ci au contraire donnent souvent le sentiment d’être incohérents, incapables et ne retrouvent leur poids de leader qu’en s’identifiant au processus. Il n’y a d’élan politique, de mouvement profond que si les masses qui sont les véritables acteurs interviennent de manière révolutionnaire, parce que déjà l’essentiel réside dans la formation des jeunes générations, la transformation révolutionnaire n’est pas la violence au contraire. Il n’y a de révolution que s’il y a perception d’un destin humain combiné à la nécessité, c’est ce qui nourrit cette profonde aspiration en acte au changement, ce que le mouvement multipolaire représente c’est la paix, la justice face au chaos. Cette fin d’un ordre libéral que la classe encore dominante tente de présenter comme le chaos et l’inscrit comme une fatalité, le monde multipolaire avec pour leader la Chine communiste en crée les conditions de la détente et du développement. La réflexion sur le passé, sur l’apport réel des communistes à la tête des progressistes, n’a de sens que pour ce challenge du présent et de l’avenir. (note et traduction d’histoireetsociete)

par Jan Krikke 16 septembre 2025

Les BRICS présentent une alternative à l’ordre néolibéral dirigé par l’Occident. Image : X Capture d’écran

L’émergence des BRICS – Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud – ainsi que son cercle croissant de nouveaux membres et de partenaires, représentent l’un des développements les plus importants de la gouvernance mondiale depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Ce qui a commencé comme une coalition informelle pour la réforme des institutions multilatérales a évolué vers un bloc plus affirmé, faisant progresser la souveraineté économique et des modèles de gouvernance alternatifs. Ce faisant, les BRICS remettent en question l’héritage intellectuel et institutionnel du néolibéralisme, successeur idéologique des structures néocoloniales d’après-guerre.00:0000:00

Fig. 1. Le néolibéralisme a transformé le néocolonialisme d’après-guerre en une idéologie politique.

Après 1945, le système international s’est structuré autour d’institutions dirigées par l’Occident : le Fonds monétaire international, la Banque mondiale, la Banque des règlements internationaux, la Cour internationale de justice et les Nations Unies, entre autres. Leur gouvernance reflète les conditions géopolitiques du milieu du XXe siècle.

Le Conseil de sécurité de l’ONU, par exemple, accorde toujours un droit de veto permanent à la Grande-Bretagne et à la France (population combinée inférieure à 150 millions d’habitants), tandis que des puissances peuplées comme l’Inde (1,45 milliard d’habitants) et l’Indonésie (283 millions) restent exclues de l’adhésion permanente.

Les propositions répétées de réforme de ces institutions sont au point mort. En réponse, les BRICS ont créé la Nouvelle Banque de développement (NDB) et l’Arrangement de réserve d’urgence (CRA), dont le siège est à Shanghai, comme alternatives au FMI et à la Banque mondiale.

En 2025, la NDB avait approuvé plus de 30 milliards de dollars de projets, principalement dans les infrastructures et le développement durable, soulignant la capacité des BRICS à agir comme une architecture financière parallèle.

Le choc de Trump

Les progrès vers une intégration plus poussée des BRICS ont été inégaux jusqu’à ce que des chocs externes donnent un nouvel élan. La réélection du président américain Donald Trump a revigoré le bloc de plusieurs manières :

– Politique commerciale : les droits de douane de Trump, y compris des droits de douane de 50 % sur les produits indiens, ont signalé à New Delhi la fragilité du partenariat américain. Le Premier ministre indien Narendra Modi a réagi en intensifiant ses contacts diplomatiques avec Pékin et Moscou tout en promouvant le commerce Sud-Sud. Ce repositionnement a renforcé le rôle des BRICS en tant que plaque tournante de la coopération économique et sécuritaire non occidentale.

– Politique de sécurité : Trump a ouvertement remis en question l’expansion de l’OTAN en Ukraine, s’alignant partiellement sur les préoccupations russes et déstabilisant les alliés européens. Ses déclarations répétées – « Cette guerre n’aurait jamais dû avoir lieu » – ont mis en évidence la divergence par rapport au consensus transatlantique.

– Politique commerciale : les droits de douane de Trump, y compris des droits de douane de 50 % sur les produits indiens, ont signalé à New Delhi la fragilité du partenariat américain. Le Premier ministre indien Narendra Modi a réagi en intensifiant ses contacts diplomatiques avec Pékin et Moscou tout en promouvant le commerce Sud-Sud. Ce repositionnement a renforcé le rôle des BRICS en tant que plaque tournante de la coopération économique et sécuritaire non occidentale.

– Politique de sécurité : Trump a ouvertement remis en question l’expansion de l’OTAN en Ukraine, s’alignant partiellement sur les préoccupations russes et déstabilisant les alliés européens. Ses déclarations répétées – « Cette guerre n’aurait jamais dû avoir lieu » – ont mis en évidence la divergence par rapport au consensus transatlantique.

Le président russe Vladimir Poutine, de gauche à droite, le Premier ministre indien Narendra Modi et le président chinois Xi Jinping s’entretiennent avant le sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) à Tianjin, en Chine. Photo : Capture d’écran X

Expansion de l’OTAN

La guerre en Ukraine a marqué un tournant dans les relations internationales et dans le destin des BRICS. Les décideurs politiques occidentaux ont présenté la guerre comme une défense de « l’ordre international fondé sur des règles », mais du point de vue des BRICS, la guerre reflète la stratégie néolibérale classique d’expansion économique et financière.

Après l’effondrement de l’Union soviétique, la Russie de Boris Eltsine a poursuivi une « thérapie de choc », libéralisant les marchés de capitaux sur les conseils d’économistes occidentaux. Les résultats ont été catastrophiques : les privatisations rapides ont créé des richesses oligarchiques, le PIB s’est contracté de près de 40 % entre 1991 et 1998 et les taux de pauvreté ont explosé. En 1998, la Russie avait besoin d’un renflouement de 22,6 milliards de dollars par le FMI.

Fig. 3. Le renversement par Poutine de la politique néolibérale d’Eltsine a changé l’histoire.

Poutine a annulé bon nombre de ces réformes néolibérales, réaffirmant le contrôle de l’État sur les industries stratégiques et limitant l’influence politique oligarchique. Ce virage vers la souveraineté économique le place en opposition avec l’ordre néolibéral.

L’expansion de l’OTAN vers l’Est, en particulier la décision de 2008 d’ouvrir la porte à l’Ukraine et à la Géorgie, a intensifié cette confrontation. Les stratégies occidentales visant à sanctionner et à isoler la Russie – décrites par les responsables américains comme des « sanctions de l’enfer » – visaient à provoquer un changement de régime. Au lieu de cela, la Russie a résisté aux sanctions et a approfondi son intégration économique avec la Chine, l’Inde et d’autres partenaires non occidentaux.

L’Europe, qui a longtemps dépendu du leadership américain au sein de l’alliance atlantique, est maintenant confrontée aux limites de sa politique vis-à-vis de la Russie. En soutenant fermement l’Ukraine tout en s’abstenant d’une intervention directe, les États européens se retrouvent engagés dans une guerre d’usure coûteuse.

La Russie contrôle la Crimée et une grande partie du Donbass, tandis que l’Ukraine est confrontée à de graves pénuries de main-d’œuvre. Si un règlement reflète ces réalités sur le champ de bataille, l’Europe pourrait faire l’objet d’un examen interne en raison de ses politiques, de ses récits médiatiques et de controverses non résolues telles que le sabotage du gazoduc Nord Stream.

L’Europe est en train de se réarmer et d’envisager le retour de la conscription. Cette transition de « l’aide sociale à la guerre » reflète une réorientation des ressources conforme à l’orthodoxie budgétaire néolibérale : contraction des dépenses sociales associée à une expansion militaire.

Refusant d’admettre sa défaite en Ukraine, l’Europe redouble d’efforts dans sa politique ratée et est maintenant seule au monde en tant que dernier défenseur du projet néolibéral.

Le déclin du néolibéralisme coïncide avec la montée des dirigeants nationalistes – Trump et Poutine – dont les politiques, bien que relevant de traditions différentes, convergent avec les priorités des BRICS.

  • Souveraineté économique : Trump promeut la relocalisation et les tarifs douaniers ; Poutine défend l’autosuffisance ; Les membres des BRICS soutiennent la politique industrielle et l’orientation étatique des secteurs stratégiques.
  • Scepticisme à l’égard de la mondialisation : Trump critique l’OMC et les chaînes d’approvisionnement mondiales ; Poutine présente la mondialisation comme une domination occidentale ; Les BRICS recherchent la multipolarité et des réformes des règles du commerce mondial.
  • Légitimité populiste : Trump fait appel à « l’Américain oublié » ; Poutine à la fierté nationale ; Les dirigeants des BRICS tels que Lula, Modi, Xi et Ramaphosa emploient des discours nationalistes-populistes similaires pour justifier des institutions alternatives.

Les BRICS ne cessent de remodeler leurs relations internationales. En créant de nouvelles institutions financières, en promouvant le commerce en monnaie locale et en plaidant pour une gouvernance multipolaire, les BRICS offrent une alternative aux systèmes occidentaux.

L’impact des BRICS ne réside pas dans le remplacement du G7 ou de l’OTAN, mais dans la pluralisation de la gouvernance mondiale, en créant un espace où les voix des pays du Sud façonnent les règles et les institutions. En ce sens, les BRICS incarnent la transition d’un ordre néolibéral vers un système international plus multipolaire et pragmatique.

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