Histoire et société

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La manœuvre de guerre de Trump au Nigeria

Trump devrait laisser les Nigérians résoudre les problèmes nigérians et concentrer les ressources militaires sur les menaces réelles pour la sécurité américaine… Il est vrai que l’absurdité des accusations de Trump pour qui connaît un peu l’Afrique et ce colosse au bord de l’implosion qu’est le Nigéria est simplement l’annonce d’une intervention qui ne débouchera ici comme ailleurs que sur une catastrophe, celle d’un système qui s’est donné l’illusion de pouvoir remodeler des sociétés complexes y compris de manière interne. Ce qui donne le résultat déjà les plus catastrophique dans les sociétés occidentales en matière de cohésion interne. L’opération est à la fois puérilement grotesque et effrayante vu les capacités de nuisance de l’ignare, sa mauvaise foi, le tout largement partagé par une population aliénée. Croire que le peuple Français n’est pas aussi stupide que les Américains comme le proclame souchon c’est ignorer ce en quoi on a soi-même contribué à l’anticommunisme antichambre du fascisme comme phénomène de « mode ». (note et traduction de danielle Bleitrach pour histoireetsociete)i

par Leon Hadar11 novembre 2025

Donald Trump se prépare à combattre Boko Haram au Nigeria. Il devrait y réfléchir à deux fois. Image : Capture d’écran YouTube / Al Jazeera

C’est reparti. La dernière menace du président Trump de déployer une force militaire contre le Nigeria représente un nouveau chapitre de l’illusion perpétuelle de Washington selon laquelle la puissance américaine peut remodeler des sociétés complexes à l’autre bout du monde. La seule surprise, c’est que tout le monde est encore surpris.

La justification proposée – qu’elle s’articule autour de la lutte contre le terrorisme, de la protection des intérêts américains ou de la promotion de la démocratie – suit un scénario familier. Nous avons déjà vu ce film en Irak, en Libye, en Syrie et en Afghanistan. L’intrigue ne change jamais : succès militaire initial, dérive de la mission, conséquences imprévues et retraite finale, laissant le chaos dans le sillage de l’Amérique.

Le Nigeria, avec ses 220 millions d’habitants, représente la plus grande économie et la nation la plus peuplée d’Afrique. C’est un pays déchiré par des tensions ethniques entre un nord majoritairement musulman et un sud chrétien, confronté à une insurrection islamiste dans le nord-est, à des mouvements séparatistes dans le sud-est et à une corruption endémique partout. Dans ce mélange volatile, Trump propose d’injecter la force militaire américaine. Qu’est-ce qui pourrait mal tourner ?

L’évaluation réaliste est simple : le Nigeria ne représente aucune menace directe pour la sécurité américaine. Quels que soient les problèmes que Washington y perçoit – terrorisme, violations des droits de l’homme ou échecs de gouvernance – ne justifient pas une intervention militaire. L’insurrection de Boko Haram, aussi tragique soit-elle, reste un défi régional et non américain.

De plus, les obstacles pratiques sont stupéfiants. La géographie, la densité de population et la complexité politique du Nigeria en font un théâtre beaucoup plus difficile que l’Irak ou l’Afghanistan. L’armée nigériane, malgré ses défauts, résisterait probablement à une intervention étrangère. Des puissances régionales comme l’Afrique du Sud s’y opposeraient. L’Union africaine le condamnerait. Et pour quel gain stratégique ?

La logique habituelle de Washington s’applique : si nous n’agissons pas, quelqu’un d’autre remplira le vide, probablement la Chine ou la Russie. Cette pensée à somme nulle ignore la réalité que tous les problèmes mondiaux n’ont pas besoin d’une solution américaine. Les défis nigérians nécessitent des solutions nigérianes, peut-être avec un soutien régional africain.

Les coûts économiques seraient astronomiques à un moment où l’Amérique est confrontée à ses propres défis budgétaires. Le coût humain, tant américain que nigérian, serait immense. Et les retombées politiques éroderont davantage la crédibilité américaine en Afrique et dans les pays du Sud, déjà endommagée par des décennies d’hypocrisie perçue.

La menace de Trump révèle également la persistance de la pensée magique bipartisane dans la politique étrangère américaine. Les républicains comme les démocrates semblent incapables d’apprendre que la force militaire ne peut pas résoudre des problèmes fondamentalement politiques. La construction d’une nation ne fonctionne pas lorsque la nation en question ne veut pas être construite par des étrangers.

L’ironie est riche : un président qui a fait campagne pour mettre fin aux « guerres éternelles » envisage maintenant d’en lancer une nouvelle en Afrique de l’Ouest. Il s’agit moins du Nigeria que du théâtre politique intérieur – projeter sa force, détourner l’attention des problèmes intérieurs, satisfaire certains électeurs.

Ce dont le Nigeria a besoin de la part de l’Amérique, ce n’est pas d’une intervention militaire, mais d’un commerce, d’un investissement et d’un engagement diplomatique qui respecte la souveraineté nigériane. Washington devrait travailler avec ses partenaires régionaux, soutenir les solutions dirigées par l’Afrique et reconnaître les limites de la puissance américaine.

Le plus grand service que Trump pourrait rendre serait de résister à la tentation d’ajouter le Nigeria à la longue liste d’aventures militaires ratées de l’Amérique. Mais cela exigerait de la sagesse, de la retenue et une évaluation réaliste des intérêts et des capacités américains – des qualités qui font constamment défaut à l’establishment de la politique étrangère de Washington.

La position réaliste est claire : restez à l’écart. Que les Nigérians résolvent les problèmes nigérians. Concentrer les ressources américaines sur les menaces réelles à la sécurité américaine. Abandonnez l’illusion que chaque crise mondiale exige une réponse militaire américaine.

Si Trump met à exécution cette menace malavisée, il rejoindra la longue lignée de présidents qui ont appris – trop tard et à un coût trop élevé – que la puissance militaire américaine a des limites et que ces limites sont atteintes beaucoup plus rapidement que l’establishment de la politique étrangère ne l’admet jamais.

Cet article a été publié à l’origine dans le Global Zeitgeist de Leon Hadar et est republié avec l’aimable autorisation. Devenez abonné ici.

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