Histoire et société

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La colère de Trump plane sur l’accord secret sur les armes et le pétrole entre le Vietnam et la Russie

Trump cherchera-t-il à pénaliser le Vietnam comme il l’a fait pour l’Inde pour ses accords énergétiques détournés avec la Russie ? Nous avons ici un texte avec lequel notre désaccord idéologique est total mais qui révèle ce que nos illusions refusent d’envisager. Il y a là l’exemple du chantage que les Etats-Unis tentent d’exercer grâce à des anticommunistes stipendiés sur les pays comme le Vietnam ou d’autres qui ont prétendu exercer la stratégie du bambou mais qui sont restés communistes… Ce n’est pas encore de l’ordre de la menace militaire exercée sur le Venezuela ou les pays africains ayant choisi la rupture face à la vassalisation, mais c’est clairement la menace de l’étranglement économique et ce qui est visé clairement est « la camaraderie » qui unit non seulement le pays à la Chine communiste mais à la Russie restée dans sa politique étrangère héritière de l’URSS. Quand on a des références historiques on se dit que cela ressemble étrangement à la gymnastique qui a caractérisé les relations russes-allemandes sous Bismarck avant que ce crétin de Guillaume II en bouscule les subtilités et provoque la première guerre mondiale… Il est clair que comme nous l’analysons dans notre livre Primakov avait raison, les Etats-Unis veulent reprendre le Grand jeu mais ils n’ont pas les atouts politiques et économiques qu’avait la Grande Bretagne… Et ils n’avaient pas la Chine non plus en face… Mais ce qui est étonnant c’est la rapidité avec laquelle l’impérialisme retrouve l’adversaire réel : le socialisme dirigé par des partis communistes pour tenter d’enrayer la montée vers le développement et la souveraineté des pays du sud. (note et traduction de Danielle Bleitrach pour histoiretsociete)

par Nguyen Ngoc Nhu Quynh 22 septembre 2025

Le dirigeant vietnamien To Lam (à droite) et le président russe Vladimir Poutine. Image : VNA

Le Vietnam et la Russie ont secrètement utilisé un mécanisme de paiement détourné pour des contrats d’armement qui canalise les bénéfices d’une coentreprise pétrolière et gazière en Sibérie pour éviter le système bancaire mondial et ainsi échapper à d’éventuelles sanctions américaines et occidentales, selon un rapport exclusif de l’AP citant des documents internes vietnamiens.

Le système étant maintenant exposé publiquement, Hanoï fait maintenant face à des risques importants si Washington décide d’agir, y compris par l’imposition éventuelle de droits de douane punitifs sur les produits vietnamiens. Le Vietnam a acheté des avions de chasse, des chars et des navires de guerre à la Russie à crédit, puis a remboursé ces dettes avec les bénéfices de la coentreprise Rusvietpetro en Sibérie, selon le rapport de l’AP.

Les fonds circulaient strictement entre le Vietnam et la Russie, évitant ainsi le système de transaction SWIFT. PetroVietnam (PVN) a décrit cette méthode comme étant « confidentielle et appropriée » dans le contexte de l’exclusion de la Russie des réseaux financiers mondiaux en réponse punitive à son invasion de l’Ukraine.

Les États-Unis ont sanctionné divers pays qui continuent d’acheter du pétrole et des armes russes, comme en témoignent les droits de douane de 50 % récemment imposés à l’Inde. En vertu de la loi CAATSA (Countering America’s Adversaries Through Sanctions Act), Washington détient le pouvoir de pénaliser tout État s’engageant avec l’industrie de défense russe.

Le mécanisme « pétrole contre armes » du Vietnam sape directement la stratégie de sanctions américaines et place donc potentiellement Hanoï dans la ligne de mire punitive de Washington. Les risques pour le Vietnam comprennent :

  • Sanctions secondaires sur l’énergie et la finance : PVN et d’autres entreprises publiques pourraient être mises sur liste noire, perdant ainsi l’accès au dollar américain et aux marchés de capitaux occidentaux.
  • Perturbations des exportations : Les États-Unis sont le plus grand marché d’exportation du Vietnam. Les restrictions dévasteraient les industries du textile, de l’électronique et des fruits de mer.
  • Les investisseurs américains et européens pourraient geler ou retirer des capitaux, ce qui compromettrait la tentative du Vietnam d’ancrer les chaînes d’approvisionnement de haute technologie.
  • Retombées diplomatiques et de défense : Depuis 2016, les États-Unis ont fourni des équipements de défense au Vietnam. Les sanctions pourraient mettre fin à cette coopération, affaiblissant l’influence de Hanoï vis-à-vis de la Chine.
  • Atteinte à la réputation : Être qualifié de violateur des sanctions risque d’éroder la crédibilité du Vietnam en tant que partenaire fiable dans l’Indo-Pacifique.

Les dirigeants vietnamiens ont longtemps vanté leur « diplomatie du bambou » comme étant résiliente et flexible, se pliant souvent aux vents géopolitiques mais ne se brisant pas.

Sous Trump, où les relations internationales sont traitées comme des transactions, le maintien d’accords détournés avec la Russie pourrait entraîner non seulement des sanctions économiques, mais aussi une méfiance stratégique. Dans un tel climat, le bambou peut ne plus symboliser l’équilibre habile mais l’indécision dangereuse.

Pendant des années, le Vietnam s’est engagé à entrer dans une « nouvelle ère » centrée sur la croissance économique et une intégration plus profonde dans les chaînes d’approvisionnement mondiales. Si c’est là la véritable priorité, la diplomatie doit prouver que le « bambou » n’est pas seulement un slogan, mais une stratégie visant à préserver l’accès aux importants marchés américains et européens.

Dans les environnements géostratégiques et géoéconomiques actuels, les demi-mesures et les couvertures peuvent ne plus suffire.

Alternativement, Hanoï pourrait s’appuyer davantage sur le bloc émergent Chine-Russie-Corée du Nord au nom de la multipolarité. Mais l’histoire d’avant 1986 reste un récit édifiant accompagné de pénuries, de rationnement, de dépendance à l’égard de l’aide et de slogans creux de « progrès rapides » qui se sont terminés par une stagnation. Une fois de plus, la « camaraderie » risque de devenir une camisole de force.

Alors que le secrétaire général du Parti communiste vietnamien, To Lam, a déclaré que la nation était « en marche vers une nouvelle ère », les coûts de chaque voie sont élevés :

  • Pour donner la priorité à l’économie, il faut réduire progressivement la dépendance vis-à-vis de la Russie afin de protéger le marché américain.
  • Embrasser « l’axe des camarades » signifie reconnaître à la fois aux élites et aux citoyens la probabilité de plus grandes difficultés et d’opportunités perdues.

Si Washington applique le CAATSA ou élargit les sanctions contre les partenaires de défense de la Russie, le Vietnam pourrait faire face à de graves conséquences économiques, diplomatiques et stratégiques. Le programme « pétrole contre armes » a peut-être fourni une couverture temporaire, mais maintenant exposé, il risque de transformer la « diplomatie du bambou » de longue date de Hanoï en un handicap.

Si le bambou n’est pas résilient, il pourrait se briser dans la tempête de Trump – et le coût ne sera pas seulement économique, mais aussi la position internationale du Vietnam lui-même.

Nguyen Ngoc Nhu Quynh, plus connue sous le nom de Mère Champignon, est une blogueuse, défenseure des droits humains et ancienne prisonnière d’opinion vietnamienne. Elle est la fondatrice et directrice exécutive de WEHEAR, une organisation caritative publique 501(c)(3) dédiée à l’autonomisation des femmes, au soutien aux activistes en exil et à la promotion du journalisme indépendant sur les droits de l’homme.

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