Les experts chinois expliquent que Trump doit faire des compromis dans les négociations commerciales, sinon le soja américain sera sacrifié. « D’un point de vue pragmatique, les États-Unis devraient être le dernier pays à se replier sur eux-mêmes, car ils bénéficient depuis longtemps de leur capacité à émettre de la monnaie et à importer des biens abordables du monde entier. Ces importations soutiennent son système de protection sociale, apaisent les tensions sociales et dissimulent la nature fragmentée de sa politique. Comme l’UE et en particulier l’Allemagne auraient dû se garder de rompre avec la Russie mais il est clair que les divisions internes et surtout la nécessité de tenir les mécontentements internes ont entraîné et pas seulement à travers Trump une politique suicidaire. (note et traduction de danielle Bleitrach pour histoireetsociete)
La Chine a cessé ses achats de soja aux États-Unis ces derniers mois, une décision considérée comme un effort calculé pour faire pression sur l’administration Trump dans un contexte d’intensification des tensions commerciales.
La suspension de Pékin marque un net déclin des relations commerciales agricoles entre les États-Unis et la Chine et a ébranlé le cœur de la communauté agricole américaine. Le gel survient alors que les deux parties se préparent à une éventuelle rencontre entre le président américain Donald Trump et le président chinois Xi Jinping plus tard ce mois-ci. Pour l’instant, les plans de rencontre Trump-Xi n’ont pas été finalisés.
« Les producteurs de soja de notre pays sont touchés parce que la Chine, uniquement pour faire pression dans la « négociation » , n’achète pas », a déclaré Trump dans un message sur les réseaux sociaux le 1er octobre. « Nous avons gagné tellement d’argent grâce aux tarifs douaniers que nous allons en prendre une petite partie et aider nos agriculteurs. »
Pendant des décennies, le commerce du soja a été la pierre angulaire de la coopération agricole sino-américaine. Dans le cadre de son adhésion à l’Organisation mondiale du commerce en 2001, la Chine a supprimé les quotas d’importation et imposé un droit de douane uniforme de 3 %, ce qui a entraîné une augmentation des importations de soja américain.
En 2017, la Chine a importé 32,58 millions de tonnes de soja américain, mais le volume est tombé à 16,64 millions de tonnes en 2018 en raison de la guerre commerciale de l’administration Trump, selon les douanes chinoises. Les importations se sont ensuite stabilisées à environ 20 millions de tonnes par an jusqu’à ce que la pandémie de 2022 perturbe l’approvisionnement et pousse la Chine à diversifier son approvisionnement vers le Brésil et l’Argentine.
L’année dernière, les États-Unis ont expédié 985 millions de boisseaux de soja à la Chine, ce qui représente 51 % des exportations totales de soja du pays. En revanche, de janvier à août 2025, les exportations de soja américain vers la Chine sont tombées à seulement 218 millions de boisseaux, aucune livraison n’ayant été enregistrée en juin, juillet et août.
Le Brésil, premier producteur mondial, devrait récolter 169 millions de tonnes métriques au cours de la campagne agricole 2024/25, ce qui représente environ 40 % de la production mondiale. La récolte américaine de 119 millions de tonnes représente 28 %, ce qui signifie que les deux pays fournissent ensemble 68 % du soja mondial.
Un chroniqueur écrivant sous le pseudonyme de « Old Farmer » pour Guancha.cn a présenté une critique sévère de l’impasse commerciale
« Les producteurs de soja américains sont devenus les victimes sacrificielles de leur propre lutte politique intérieure », écrit-il. « La soi-disant guerre tarifaire a une signification économique limitée, mais une signification politique infinie, reflétant le profond fossé idéologique qui divise les États-Unis. »
« D’un point de vue pragmatique, les États-Unis devraient être le dernier pays à se replier sur eux-mêmes, car ils bénéficient depuis longtemps de leur capacité à émettre de la monnaie et à importer des biens abordables du monde entier. Ces importations soutiennent son système de protection sociale, apaisent les tensions sociales et dissimulent la nature fragmentée de sa politique.
Il dit que comme les entreprises multinationales qui ont bénéficié de la tendance à la mondialisation n’ont pas réussi à améliorer les moyens de subsistance du peuple américain, il est normal que la société américaine soit devenue extrêmement divisée.
Cependant, l’auteur note que la perte de producteurs de soja n’ébranlera guère le soutien de base de Trump, car il s’agit simplement d’un coût nécessaire à la poursuite du rêve de « Make America Great Again (MAGA) ».
« Les producteurs de soja sont principalement concentrés dans des États comme l’Illinois, l’Iowa et le Minnesota, qui sont tous des bastions du mouvement MAGA de Trump », explique Wang Chong, directeur du Centre d’études américaines de l’Université d’études internationales du Zhejiang.
« Il ne fait aucun doute que l’arrêt des importations de soja par la Chine a profondément affecté les moyens de subsistance de ces agriculteurs », dit-il. « De nombreux producteurs et distributeurs ont déjà exprimé une forte insatisfaction à l’égard de la Maison Blanche. »
Il a déclaré que la Chine pouvait utiliser les importations de soja comme monnaie d’échange dans ses négociations commerciales avec les États-Unis, en cherchant à obtenir des concessions telles que l’assouplissement des restrictions sur les contrôles à l’exportation de puces ou l’ouverture du marché américain aux véhicules électriques chinois et à d’autres produits de haute technologie.
Bras de fer commercial entre les États-Unis et la Chine
Le 2 avril, Trump a annoncé un vaste plan visant à imposer des droits de douane réciproques à tous les pays, avertissant que toute nation qui exercerait des représailles contre les États-Unis serait confrontée à des droits de douane encore plus lourds. Alors que les tensions s’intensifiaient, Washington a imposé des droits de douane allant jusqu’à 145 % sur les importations chinoises, ce qui a incité Pékin à répondre avec ses propres droits de douane de 125 % sur les produits américains.
Bien que les deux parties se soient mises d’accord le 12 mai pour apaiser la confrontation, les produits chinois continuent d’être soumis à des droits de douane allant de 30 % à 50 % aux États-Unis, tandis que les exportateurs américains n’ont à payer que des droits de douane de 10 % pour expédier leurs marchandises vers la Chine. Les deux parties se sont ensuite concentrées sur d’autres questions commerciales, telles que les terres rares et les semi-conducteurs.
La trêve commerciale actuelle doit expirer le 10 novembre si les négociations entre les deux parties ne progressent pas. Pendant ce temps, Pékin a ordonné à ses importateurs de ne pas acheter de soja aux États-Unis depuis mai.
« La guerre tarifaire et la guerre commerciale ne servent l’intérêt de personne. Les deux parties doivent aborder les questions pertinentes par le biais de consultations fondées sur l’égalité, le respect et le bénéfice mutuel », a déclaré le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Guo Jiakun, lors d’un point de presse régulier le 23 septembre.
« Si les États-Unis veulent que la Chine reprenne ses achats de soja, la seule façon est de revenir à la table des négociations », a déclaré un chroniqueur basé dans le Zhejiang sous le nom de plume de Linglingniang. « Cela doit être basé sur l’égalité, le respect et le bénéfice mutuel. »
« Supprimez d’abord tous ces tarifs et restrictions désordonnés, laissez le commerce bilatéral revenir à la normale, et ce n’est qu’alors que nous pourrons à nouveau parler de soja », dit-il. « Trump manque de temps. Les commandes de la Chine sont déjà prévues jusqu’en novembre. S’il tarde davantage, la saison des récoltes américaines se terminera et ces montagnes de soja pourraient être laissées à pourrir dans les entrepôts.
Dans l’hémisphère nord, la plantation a généralement lieu de mai à juillet, la récolte ayant lieu de septembre à novembre.
Selon les directives de l’Université d’État de l’Iowa, le soja peut être stocké en toute sécurité jusqu’à un an si sa teneur en humidité est maintenue à 13 % ou moins, et pendant des périodes plus longues à 12 % ou moins.
Certains observateurs affirment que la longue durée de conservation du soja pourrait aider à atténuer l’impact immédiat du gel des importations de la Chine. Avec un stockage approprié, les agriculteurs américains peuvent conserver leurs récoltes pendant des années sans pertes importantes, en les vendant à d’autres marchés lorsque l’occasion se présente, tout en bénéficiant des programmes de subventions fédéraux.
Plan de sauvetage
En réponse à la pression croissante des circonscriptions rurales, l’administration Trump préparerait un plan de sauvetage de 10 milliards de dollars pour soutenir les agriculteurs qui ont été les plus durement touchés par l’arrêt des importations de soja en Chine.
Le plan s’appuiera sur les recettes tarifaires et les fonds du ministère américain de l’Agriculture pour compenser les pertes sur les marchés d’exportation.
Le secrétaire américain au Trésor, Scott Bessent, a déclaré aux médias qu’il était regrettable que les dirigeants chinois aient décidé d’utiliser les producteurs de soja américains comme otage ou pion dans les négociations commerciales.
L’arrêt des achats de soja américain par la Chine a nui aux exportations totales des États-Unis vers la Chine, qui ont chuté de 16,8 % au cours des trois mois entre juin et août 2025 par rapport à la même période l’année dernière. Ce chiffre n’a diminué que de 7,4 % d’une année sur l’autre au cours des cinq premiers mois de cette année.
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