Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

LA CHINE DU 21ᵉ SIÈCLE : COMMENT UN PAYS HUMILIÉ EST DEVENU UNE PUISSANCE GLOBALE

Oui, ce texte hypostasie l’Afrique, un immense continent avec des nations différentes mais qui toutes ont vécu l’unité d’un traumatisme profond, comme la Chine et pire encore parce que l’unité de celle-ci n’a jamais été brisée par la violence coloniale. Mais la description qui est faite ici de l’Afrique par bien des côtés fait songer à la France dont on a sciemment détruit le savoir productif et qu’il s’agit effectivement de reconstituer. Le pire est sans doute le fait qu’il n’y a aucune volonté de donner une perspective, il n’y a que duperie et flatterie de la basse-cour électorale et dictature de fait. La situation est à bien des égards en France à peine meilleure qu’en Afrique, la veulerie de nos « élites politico-médiatiques » est telle que l’on n’ose plus y toucher de peur de détruire le peu qu’il reste. Les pays africains se conduisent parfois avec une dignité qui manque à la France et le chantage des USA y connait une limite qui n’existe plus en France tant le clochemerle électoral permanent leur a mangé le peu de dignité nationale qui pouvait leur rester, et là oui la Chine avec son Etat, ses grands commis de l’Etat, fait songer à des atouts français bradés par cette bande d’autogestionnaires supposés qui ne voient pas ce que l’histoire de France, autre que colonialiste, a comme ressemblance avec la Chine dans un Etat et des grands commis, une classe ouvrière, une paysannerie, le tout depuis des décennies sacrifiés par des gens qui n’ont plus de colonne vertébrale et ne savent que contribuer à la censure générale et à la petitesse xénophobe y compris dans ce qui fut j’ose le dire le parti de Maurice Thorez et Aragon et qui est devenu le terrain d’exercice des Boulet, des petits élus de la Seine Saint Denis, des Kamenka et autres et de ceux qui se sont partagé les dépouilles du parti des 75.000 fusillés dans leurs commissions pourries, dans le mépris des décisions de congrès. (note de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)

Habib Hountchegnon

Au début des années 2000, le monde regarde encore la Chine avec condescendance. On parle d’“usine du monde”, de pays copieur, de main-d’œuvre bon marché. L’Occident se rassure en se disant que la Chine fabrique, mais ne pense pas. Grave erreur.

Pendant que les caméras regardent les usines, la Chine regarde les cerveaux. Elle observe les erreurs des autres, étudie les crises, analyse les modèles économiques, décortique les échecs africains, latino-américains, soviétiques. Elle ne parle pas beaucoup, mais elle apprend vite. Très vite.

La Chine du XXIᵉ siècle n’est plus celle de Mao, ni même celle de Deng. C’est une Chine qui a compris que la puissance moderne ne se mesure plus seulement en soldats ou en idéologie, mais en technologie, en infrastructures, en données, en chaînes de valeur. Elle investit massivement dans l’éducation scientifique, dans l’ingénierie, dans les mathématiques, dans l’intelligence artificielle, dans les semi-conducteurs, dans l’énergie. Elle ne veut plus seulement produire pour les autres, elle veut produire pour elle-même, contrôler ses technologies, maîtriser ses dépendances. La stratégie est claire : ne plus jamais être vulnérable comme au XIXᵉ siècle.

Sous Xi Jinping, le pouvoir se recentralise. Beaucoup crient à la dictature, mais peu prennent le temps d’analyser la logique interne. La Chine considère que la fragmentation politique est un luxe que seuls les pays déjà riches peuvent se permettre. Pour elle, la stabilité est une arme stratégique. Le Parti communiste reste au cœur de tout : économie, armée, technologie, diplomatie. Ce n’est pas un hasard. La Chine a appris dans la douleur que chaque période de faiblesse politique a ouvert la porte aux humiliations étrangères. Elle a donc fait un choix assumé : contrôle interne fort, projection externe patiente.

C’est dans ce cadre qu’apparaît l’initiative des “Nouvelles Routes de la Soie”. Beaucoup y voient un simple projet économique. En réalité, c’est une vision géopolitique gigantesque. Routes, ports, chemins de fer, câbles numériques, investissements énergétiques : la Chine tisse une toile mondiale. Elle ne conquiert pas avec des tanks, mais avec des infrastructures. Elle ne plante pas des drapeaux, elle signe des contrats. Elle ne parle pas de morale universelle, elle parle de projets concrets. Et pendant que certains débattent de valeurs abstraites, la Chine construit.

L’Afrique devient alors un terrain stratégique majeur. Non pas par amour romantique, mais par logique froide. Ressources naturelles, marchés en croissance, besoin massif d’infrastructures, faible concurrence occidentale : tous les indicateurs sont au vert. La Chine arrive avec des routes, des ponts, des barrages, des hôpitaux, des ports. Elle prête de l’argent, envoie ses entreprises, forme des ingénieurs, installe ses standards. Elle ne pose pas de conditions politiques, ne donne pas de leçons publiques, ne parle pas de démocratie. Elle fait ce que l’Occident a longtemps refusé de faire : investir lourdement.

Mais attention, et c’est ici que le discours doit devenir adulte. La Chine n’est ni un sauveur, ni un colonisateur classique. Elle est un acteur stratégique. Elle défend ses intérêts, pas ceux de l’Afrique.

Les pays africains qui négocient mal s’endettent, cèdent des actifs, perdent de la marge de manœuvre. Ceux qui négocient bien gagnent des infrastructures, des transferts de compétences, des opportunités industrielles. La Chine respecte une seule chose : la force stratégique de son partenaire. Elle ne respecte pas la naïveté. Elle ne respecte pas l’improvisation. Elle ne respecte pas les discours creux.

Et c’est là que la leçon chinoise devient centrale pour nous. La Chine ne s’est pas développée parce qu’elle était gentille. Elle s’est développée parce qu’elle avait une vision longue, une discipline collective et une capacité à apprendre de ses erreurs. Elle a copié quand il fallait copier. Elle a protégé quand il fallait protéger. Elle a ouvert quand il fallait ouvrir. Elle a fermé quand il fallait fermer. Toujours avec un objectif clair : ne plus jamais subir l’histoire, mais l’écrire.

Aujourd’hui, la Chine est contestée, critiquée, redoutée. Mais elle est surtout respectée. Parce qu’elle planifie sur trente ans quand d’autres pensent à cinq. Parce qu’elle forme des ingénieurs quand d’autres forment des polémistes. Parce qu’elle investit dans les routes quand d’autres investissent dans les discours. Elle n’est pas parfaite, loin de là. Elle est autoritaire, inégalitaire, parfois brutale. Mais elle est cohérente. Et en géopolitique, la cohérence est une arme redoutable.

Pour l’Afrique, la question n’est donc pas “faut-il copier la Chine ?”. La vraie question est : avons-nous le courage de penser comme un État stratégique ? Avons-nous une vision longue ? Avons-nous une discipline collective ? Avons-nous le courage de privilégier la compétence sur l’émotion, la planification sur l’improvisation, l’intérêt national sur les querelles personnelles ? La Chine nous montre une chose essentielle : le développement n’est pas un slogan, c’est une méthode. Et cette méthode peut être adaptée, critiquée, améliorée mais jamais ignorée.

CE QUE L’AFRIQUE PEUT (ET NE DOIT SURTOUT PAS) REPRODUIRE DU MODÈLE CHINOIS

Après avoir parcouru plus de quatre mille ans d’histoire chinoise, une chose devient évidente : la Chine ne s’est jamais développée par hasard. Ni par chance. Ni par miracle. Elle s’est développée par une succession de choix douloureux, parfois brutaux, souvent impopulaires, mais toujours guidés par une obsession : survivre, puis dominer. Et c’est là que beaucoup se trompent en Afrique. Ils regardent la Chine avec admiration, parfois avec fascination, mais sans faire l’effort intellectuel de distinguer ce qui est reproductible de ce qui est culturellement ou historiquement intransposable.

La première chose que l’Afrique peut apprendre de la Chine, c’est la vision longue. La Chine pense en décennies, parfois en siècles. Elle accepte de sacrifier le confort immédiat pour un avantage futur.

Elle construit aujourd’hui ce qui rapportera dans vingt ans. Elle investit dans les routes, les ports, les écoles, les usines, même quand ce n’est pas rentable à court terme. En Afrique, on pense souvent en mandats, en élections, en urgences émotionnelles. Résultat : on inaugure plus qu’on ne construit, on promet plus qu’on ne planifie, on improvise plus qu’on ne structure. Sans vision longue, aucun développement durable n’est possible. Aucun.

La deuxième leçon chinoise, souvent mal comprise, c’est la centralité de l’État stratège. La Chine ne laisse pas son développement au hasard du marché ou aux ONG. L’État décide, oriente, planifie, corrige. Il choisit ses secteurs prioritaires, protège ses industries naissantes, contrôle ses ressources clés, impose des objectifs clairs. Cela ne signifie pas absence totale de marché, mais marché encadré. En Afrique, l’État est trop souvent soit absent, soit prédateur. Soit il laisse tout faire, soit il bloque tout. La Chine montre qu’un État fort n’est pas un État bavard, mais un État compétent, discipliné et obsédé par les résultats.

La troisième leçon, probablement la plus importante, c’est l’investissement massif dans le capital humain utile. La Chine ne forme pas des diplômés pour le prestige. Elle forme des ingénieurs, des techniciens, des scientifiques, des planificateurs, des industriels. Elle aligne l’éducation sur les besoins réels du pays. En Afrique, on produit trop souvent des diplômés sans débouchés, des intellectuels sans industrie, des élites déconnectées du réel. La Chine a compris que le développement ne se fait pas avec des discours brillants, mais avec des compétences solides. Le savoir doit servir la production, pas seulement l’ego.

Mais maintenant, il faut être honnête. Tout n’est pas à copier.

Et c’est ici que beaucoup d’africains se trompent lourdement. Le modèle politique chinois, autoritaire et centralisé, est le produit d’une histoire spécifique, marquée par des guerres civiles, des famines géantes, des humiliations coloniales répétées. Copier aveuglément ce modèle sans institutions solides, sans discipline administrative, sans culture de l’intérêt collectif, serait une catastrophe. En Afrique, l’autoritarisme sans compétence devient dictature, et la centralisation sans vision devient prédation. La Chine a un État fort parce qu’elle a une bureaucratie compétente et une culture de l’obéissance institutionnelle. Sans cela, le modèle s’effondre.

Autre erreur fréquente : croire que la Chine s’est développée sans coût humain. C’est faux. La Chine a payé son développement par des famines, des répressions, des générations sacrifiées. Elle a accepté des souffrances immenses pour atteindre ses objectifs. L’Afrique doit tirer une leçon différente : le développement ne doit pas forcément passer par la brutalité, mais il exige toujours des sacrifices, des choix difficiles, des renoncements. La question n’est pas “souffrir ou pas”, mais “souffrir pour quoi, et pour qui”.

Enfin, la leçon la plus subtile, et peut-être la plus dérangeante, c’est la discipline mentale collective. La Chine valorise l’effort, la patience, la hiérarchie, le travail silencieux. Elle méprise profondément l’improvisation permanente. En Afrique, on confond trop souvent liberté et désordre, créativité et improvisation, expression et efficacité. La Chine montre qu’un peuple discipliné peut rattraper un retard colossal en une génération. Mais cette discipline ne se décrète pas : elle se construit par l’éducation, l’exemplarité des dirigeants, et la sanction réelle de l’incompétence.

Alors non, l’Afrique ne doit pas devenir la Chine. Elle ne le peut pas, et ce ne serait pas souhaitable. Mais elle peut apprendre de la Chine à penser stratégiquement, à planifier sérieusement, à investir intelligemment, à protéger ses intérêts, à former utile, à négocier dur. Le vrai problème africain n’est pas le manque de modèles, mais le refus de regarder les modèles avec lucidité. Copier sans comprendre mène à l’échec. Rejeter sans analyser mène à la stagnation.

La Chine n’est pas un exemple moral. Elle est un cas d’école stratégique. Et l’Afrique, si elle veut se développer, doit cesser de chercher des sauveurs extérieurs ou des slogans magiques. Elle doit apprendre à penser comme un État adulte, responsable, conscient de ses forces, de ses faiblesses, et surtout de son temps historique. Le développement n’est pas une émotion. C’est une discipline.

Ainsi s’achève cette grande série sur l’histoire de la Chine.

Du berceau des premières dynasties jusqu’à la puissance du XXIᵉ siècle, nous avons parcouru des siècles de guerres, de génie, d’erreurs, de chutes, de renaissances et de stratégies froides. Rien de romancé, rien de fantaisiste. Juste une réalité historique souvent absente des manuels classiques, mais essentielle pour comprendre le monde d’aujourd’hui.

Si cette série t’a fait réfléchir, si elle t’a parfois dérangé, surpris ou même provoqué, alors elle a rempli sa mission. L’objectif n’était pas d’admirer la Chine aveuglément, encore moins de la copier bêtement, mais de comprendre comment une civilisation pense le pouvoir, le temps, la discipline et le développement.

Pour celles et ceux qui veulent aller plus loin, approfondir chaque période, relire l’histoire de manière structurée et continuer à nourrir leur pensée stratégique, toute l’histoire complète est disponible sur le site ecole69 : le lien est volontairement laissé en commentaire pour que chacun fasse la démarche consciente d’aller chercher le savoir.

L’histoire n’est pas faite pour être consommée.

Elle est faite pour être comprise.

À toi maintenant d’en tirer tes propres leçons.

Fin de la série, je vous reviens avec le cas l’Allemagne.

PS : Lorsque j’utilise le mot « Afrique » dans certaines comparaisons, il s’agit d’une figure de style. Je ne parle évidemment pas du continent comme d’un bloc homogène, mais de réalités nationales africaines, pays par pays, avec leurs trajectoires, leurs choix politiques et leurs histoires propres.

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