Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Konstantin Bondarenko : Les États-Unis ont troqué la « solidarité de l’OTAN » contre les ours blancs et un tunnel entre la Tchoukotka et l’Alaska

Cette analyse que nous devons à la traduction de Marianne Dunlop apporte encore une mise en perspective de la guerre en Ukraine dans des enjeux géopolitiques pas nécessairement si complexes que ça mais qui témoignent de la manière dont les camps paraissent avoir perdu leur dimension de bipolarité non seulement parce que le monde multipolaire est déjà là mais parce que d’une part ce que hier Ziouganov décrivait comme en son sein l’affermissement derrière la Chine de ce qu’il définissait comme la gauche l’emportait et avec elle une propension à la paix, au développement et à la sécurité. Face à cette « orientation » qui selon la Chine ne peut pas être remise en cause, le camp impérialiste lui se divise entre bellicistes et « négociateurs » tentant de créer les conditions les plus favorables à la négociation, alors que les bellicistes imbéciles comme notre Macron accentuent la débâcle et la guerre civile. (note d’histoireetsociete traduction de Marianne Dunlop)

Свободная Пресса

Texte : Alexeï Peskov (à ne pas confondre avec le conseiller de Poutine 🙂

Le célèbre politologue Konstantin Bondarenko répond aux questions sur les problèmes les plus actuels de l’Ukraine

Le célèbre historien ukrainien et politologue influent Konstantin Bondarenko est devenu populaire ces dernières années grâce aux interviews qu’il a accordées à différentes chaînes YouTube ukrainiennes. Cependant, il a récemment élargi le format de communication avec ses « téléspectateurs » et a commencé à répondre aux questions qui lui sont envoyées sur sa chaîne vidéo.

Au début, il a essayé de le faire en direct, mais il a ensuite décidé de le faire en différé. Voici l’un de ces enregistrements, non pas une transcription, mais un résumé de ses réponses aux questions. Nous avons sélectionné deux questions, mais il y en avait bien sûr davantage dans cette émission de plus d’une heure. Cependant, notre format est différent.

Voici donc Konstantin Bondarenko à l’antenne.

La Grande-Bretagne a besoin de la guerre, et les États-Unis ont besoin de l’Arctique

Question : Quelles forces ont intérêt à ce que le conflit russo-ukrainien se poursuive ? Et, à l’inverse, quelles forces ont intérêt à ce qu’il cesse ?

— Le conflit n’oppose pas uniquement la Russie et l’Ukraine. Un nombre beaucoup plus important d’États sont impliqués dans ce conflit militaire. Et l’Ukraine sert d’appât et, en même temps, de champ de bataille.

Mais derrière l’Ukraine se cachent des forces occidentales influentes, que certains appellent les mondialistes, d’autres la coalition anti-Trump. Cette coalition est apparue après que les États-Unis ont commencé à prendre leurs distances par rapport au conflit. Mais sans les États-Unis, le conflit armé n’aurait pas éclaté.

Aujourd’hui, c’est la Grande-Bretagne qui manifeste le plus grand intérêt pour la poursuite des hostilités. C’est elle qui insiste sur la création d’une « coalition des volontaires », qui exige que davantage d’armes soient fournies à l’Ukraine, qui appelle l’Europe à se serrer la ceinture, mais à donner plus d’argent à l’Ukraine, afin qu’elle puisse mener la guerre.

La Grande-Bretagne espère qu’à terme, la Russie s’affaiblira et cessera de représenter une menace pour les États européens. En effet, les Européens croient sincèrement qu’une guerre entre la partie européenne de l’OTAN et la Russie pourrait éclater dans les années à venir. Ils ont donc besoin d’affaiblir la Russie afin qu’elle ne soit pas prête à mener une telle guerre.

La Grande-Bretagne considère la Russie comme son principal rival et tente de convaincre d’autres États, en premier lieu les pays baltes et les pays scandinaves, qu’ils devront entrer en guerre. Mais ils défendront les intérêts de la Grande-Bretagne.

La Grande-Bretagne dispose d’une armée très réduite, forte de 70 000 hommes. Les armes nucléaires dont dispose la Grande-Bretagne ne peuvent être utilisées sans l’accord des États-Unis, car elles sont déployées sur des plateformes américaines. Ainsi, dans l’ensemble, la Grande-Bretagne est le principal instigateur de ce processus, mais elle n’est pas une puissance capable de s’opposer seule à la Russie.

Cependant, elle a tout intérêt à ce que le conflit en Ukraine mobilise les principales forces russes. Elle a également tout intérêt à ce que le conflit actuel entre la Russie et l’Azerbaïdjan se poursuive. D’une manière générale, nous constatons l’influence ouverte des services secrets britanniques sur la situation dans le Caucase du Sud, ainsi que leurs tentatives d’influencer le Caucase du Nord, la Turquie, le Proche-Orient et l’Asie centrale.

En revanche, parmi les acteurs extérieurs, ce sont aujourd’hui les États-Unis qui sont les premiers intéressés par la fin des combats. Et ce n’est pas parce qu’ils ont pitié de l’Ukraine, ni parce qu’ils ont pitié des Ukrainiens ou qu’ils n’ont pas envie de donner de l’argent à Kiev. Non, ce qui est en jeu aujourd’hui, ce sont des intérêts économiques colossaux, qui se chiffrent en milliers de milliards de dollars.

Il s’agit de l’exploitation conjointe avec la Russie du plateau continental arctique. Il s’agit du contrôle des voies logistiques dans l’Arctique. Il s’agit de l’exploitation conjointe des ressources minérales, principalement du pétrole et du gaz, en Sibérie et en Alaska. Il s’agit de la construction d’un grand nombre de projets logistiques, dont, par exemple, un tunnel sous le détroit de Béring. Il s’agit d’un projet très ambitieux : un tunnel de 86 km de long qui reliera l’Amérique du Nord et l’Eurasie.

Nous voyons donc un grand nombre de questions qu’il est aujourd’hui avantageux pour les États-Unis de résoudre conjointement avec la Russie, mais pour cela, il faut que la paix règne en Ukraine.

Une grande garantie de paix pour l’Ukraine

Question : Cher Konstantin Petrovitch, veuillez commenter les propos de Nikolai Azarov : « Séparée de la Russie, l’Ukraine périra ».

— Je vais probablement reformuler légèrement les propos de Nikolai Yanovich Azarov, car il y a deux aspects à prendre en compte. Le premier est d’ordre civilisationnel. L’Ukraine, tout comme la Russie, appartient à une civilisation unique, à un espace civilisationnel unique. Et en effet, les expériences visant à reprogrammer le code civilisationnel, qui tentent de détacher l’Ukraine de la civilisation orthodoxe et de l’intégrer d’une manière ou d’une autre à la civilisation occidentale, risquent d’entraîner de graves pertes. Tout d’abord, la perte d’identité, la perte de son propre visage, de son propre moi.

Et puis, deuxième aspect, quand on parle aujourd’hui de certaines garanties de sécurité pour l’Ukraine, reconnaissons honnêtement que la seule garantie de sécurité pour l’Ukraine, ce sont les relations de bon voisinage avec la Russie. Dès que l’Ukraine cesse de vivre en bon voisinage avec la Russie, elle commence à connaître de très graves problèmes. Car la Russie est un État qui revendique le statut de puissance hégémonique, et elle ne tolérera certainement pas qu’une menace quelconque se crée à ses frontières. C’est pourquoi la question des garanties se pose.

Et si l’Ukraine souhaite continuer à être en confrontation avec la Russie, alors elle a besoin de garanties supplémentaires. Elle doit faire entrer des troupes étrangères, acceptant en fait une intervention, et déployer un grand nombre de missiles sur son territoire. Mais cela ne signifiera qu’une seule chose : tôt ou tard, un conflit armé reprendra de plus belle.

Si l’Ukraine a l’intention de construire à l’avenir des relations de bon voisinage avec la Russie, alors de quelles autres garanties a-t-elle besoin ? Quelles garanties ont été données à la Finlande en 1944 ? Avant cela, la Finlande était en état de guerre avec l’Union soviétique. Mais après la Seconde Guerre mondiale, l’ère du président Kekkonen a montré que la Finlande, même en tant qu’État capitaliste, pouvait devenir le plus proche ami, allié et partenaire de l’Union soviétique, et que rien ne menaçait sa sécurité à cette époque.

Aujourd’hui, je pense que l’adhésion de la Finlande à l’OTAN représente une menace bien plus grande pour sa sécurité que la politique d’Urho Kaleva Kekkonen, dont nous avons vu les résultats jusqu’aux années 2010.

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