Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

ANALYSE – L’Europe en état de guerre permanente

Par Giuseppe Gagliano / 12 septembre 2025

La thématique de cette journée, pour nous Français dans l’attente de la grande mobilisation de demain, est le syndrome du sable mouvant : plus l’occident se débat pour résister à son propre effondrement, plus il l’accélère et tente de nous saisir pour nous entraîner dans sa chute. La soi-disant UE se révèle dans le contexte de la guerre contre la Russie dans sa vacuité croissante. Communiquer pour masquer l’incapacité à agir, se présenter comme un pouvoir réel alors qu’elle n’est partout qu’un pouvoir fictif, suspendu en l’air, mais toujours au plus haut degré d’auto-satisfaction. L’épisode des « drones » n’a abouti à rien, si ce n’est à montrer à chaque pays concerné qu’il devait compter d’abord sur ses propres forces pour assurer sa sécurité, ce dont personne n’a réellement les moyens puisque tous ont adopté la doctrine de l’OTAN : compter sur les autres. Le summum a été atteint en Roumanie, dans laquelle un de ces fameux drones a longé la frontière et a été escorté par les chasseurs de l’OTAN jusqu’à ce qu’il retourne en Ukraine. On avance le coût des missiles, pour justifier de n’avoir pas tiré, le missile coûtant beaucoup beaucoup plus cher que le drone. Il faut surtout prendre en compte le nombre de missiles disponibles : les pays européens disposent de missiles, mais en petit nombre et avec une faible capacité industrielle pour les remplacer. De même, l’envoi de troupes pour soutenir un cessez-le-feu et la mobilisation des hôpitaux : la mobilisation prévue est basée sur 30 000 soldats et on nous annonce déjà 60 000 blessés à prendre en charge dans les hôpitaux. Ce qui est réel, c’est la croissance des dépenses militaires et la conversion de l’industrie civile (exsangue du fait de la perte de compétitivité liée à l’arrêt des fournitures énergétiques russes à bon marché) en industrie militaire sans plan et sans prise en compte des réalités de la guerre telle qu’elle se développe rapidement : guerre de drones, d’usure, sur front long qui doit être tenu par des centaines de milliers de soldats. Surtout, les conditions politiques de l’entrée en guerre ne sont pas remplies. Même le premier ministre polonais pro-UE, Donald Tusk a dû reconnaître que son opinion publique est de plus en plus opposée au régime de Kiev, contre la guerre et se rapproche de la Russie. Il a fallu déjà truquer les élections en Moldavie (et on se prépare avec fébrilité à le faire à nouveau, sans savoir si cela peut réussir), les annuler et interdire les candidats désagréables en Roumanie. La Slovaquie et la Hongrie ont déjà un pied dehors et la Tchéquie ne tient qu’à un fil, il a fallu y interdire le communisme qui prenait une belle ampleur. C’est l’ensemble de « l’Est Global » de l’UE, celui qui produit mais reste en seconde zone depuis des décennies, qui pourrait finalement se fédérer au « Sud global », aux BRICS et à l’OCS. (note de Franck Marsal pour Histoire&société)

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Europe en état de guerre permanente

Par Giuseppe Gagliano, Président du Centro Studi Strategici Carlo De Cristoforis (Côme, Italie) 

L’Union européenne ne se limite plus à anticiper des crises, elle les inscrit désormais dans ses institutions et dans la vie quotidienne des citoyens. Avec la Preparedness Union Strategy, Bruxelles a posé les bases d’une société en mobilisation permanente. Derrière l’anecdote embarrassante de la commissaire Hadja Lahbib présentant un kit de survie maladroit, se cache une transformation profonde : l’Europe se prépare à la guerre comme si elle faisait déjà partie de son avenir immédiat.

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La France et l’Allemagne en première ligne

À Paris, une circulaire du ministère de la Santé a ordonné aux hôpitaux de se préparer à accueillir entre 10 000 et 15 000 soldats blessés en l’espace de quelques mois. Des structures provisoires sont envisagées près des gares, aéroports et ports afin d’assurer le rapatriement médical de militaires étrangers. L’hôpital civil redevient ainsi un maillon de l’arrière-front.

Berlin va encore plus loin. Son plan-cadre de défense civile prévoit des scénarios extrêmes : combats urbains dans la capitale, destruction d’infrastructures, voire évacuation complète de la ville. Les hôpitaux allemands seraient transformés en centres militaires, dotés de personnel formé aux blessures de guerre, amputations et traumatismes causés par les explosions. À cela s’ajoute la réintroduction d’un service national obligatoire sous forme de questionnaires imposés aux jeunes hommes et facultatifs pour les femmes, afin de constituer un vivier de 100 000 recrues d’ici 2030.

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Une économie qui bascule vers le militaire

Ces évolutions trouvent leur traduction dans les budgets. Selon le Sipri, l’Allemagne est devenue en 2024 le premier pays européen en matière de dépenses militaires avec 88,5 milliards de dollars, dépassant le Royaume-Uni. La frontière entre industrie civile et industrie militaire s’efface progressivement, grâce à l’essor des investissements dual use. C’est le signe d’une bascule vers une véritable économie de guerre, sur le modèle du complexe militaro-industriel américain.

Les grandes manœuvres de l’OTAN, telles que Griffin Lightning ou Hedgehog, en sont l’illustration opérationnelle. Des dizaines de milliers de soldats polonais, baltes et alliés y simulent une invasion russe, habituant les sociétés européennes à concevoir l’affrontement comme inévitable.

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La stratégie de la peur

Le signal envoyé est clair. À Moscou, il s’agit de montrer que l’Europe devient le bouclier avancé de l’OTAN. À Washington, il s’agit de prouver que les Européens sont prêts à assumer le poids du front oriental. Mais ce calcul crée un cercle vicieux : plus on prépare la guerre, plus on rend probable sa concrétisation. La Preparedness Union Strategy n’est pas seulement un plan de protection, elle est aussi un cadre politique qui installe la guerre comme horizon.

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Le coût social et politique

Derrière cette logique, le prix à payer est immense. Une société en état d’alerte permanent voit ses institutions civiles absorbées dans la logique de sécurité. Les hôpitaux deviennent militaires, les jeunes citoyens des recrues potentielles, les services publics des relais de mobilisation. La démocratie se réduit à un silence imposé par l’urgence.

C’est sans doute là le véritable legs d’Ursula von der Leyen et de dirigeantes comme Kaja Kallas : avoir façonné une société de guerre, où la peur et la mobilisation constante deviennent des instruments de gouvernance. L’Europe ne se prépare pas seulement à défendre son territoire, elle apprend à vivre dans un état de siège mental et politique qui risque de durer plus longtemps qu’un conflit réel.


Europe en état de guerre permanente

Giuseppe Gagliano

Giuseppe Gagliano a fondé en 2011 le réseau international Cestudec (Centre d’études stratégiques Carlo de Cristoforis), basé à Côme (Italie), dans le but d’étudier, dans une perspective réaliste, les dynamiques conflictuelles des relations internationales. Ce réseau met l’accent sur la dimension de l’intelligence et de la géopolitique, en s’inspirant des réflexions de Christian Harbulot, fondateur et directeur de l’École de Guerre Économique (EGE)

Il collabore avec le Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R) (Lien),https://cf2r.org/le-cf2r/gouvernance-du-cf2r/

avec l’Université de Calabre dans le cadre du Master en Intelligence, et avec l’Iassp de Milan (Lien).https://www.iassp.org/team_master/giuseppe-gagliano/

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