une analyse du « mouvement » qui a poussé toute une partie sud est de l’Amérique latine vers le fascisme. En fait, les « mouvements » qui avaient poussé les foules vers la rue et qui se prétendaient plus « sociétaux » que sociaux, sont restés sans véritable organisation et sous des allures de « radicalité » n’ont jamais eu autre chose qu’un « spontanéisme » autogestionnaire aussi rapidement démobilisé qu’enflé dans lequel les facteurs de division l’emportaient sur l’unité et qui a élu des dirigeants sociaux démocrates qui n’ont jamais imposé une politique socialiste mais opportuniste neolibérale et l’appel à l’armée de fait pour l’ordre. Une des manières parmi d’autres à l’échelle planétaire pour remettre en cause la « démocratie » occidentale et ses élections qui ne réussissent qu’à tenter de préserver le statu quo en laissant le quotidien se dégrader et en ouvrant les vannes aux « mouvements sécuritaires » parce que jamais n’est posée la question d’un Etat de la dictature du prolétariat , le socialisme. (noteettraduction de danielle Bleitrach pour histoireetsociete)
26 décembre 2025 00:01
L’année 2019 a été marquée par d’importantes et longues mobilisations populaires au Chili, en Colombie et en Équateur, susceptibles d’infléchir le cours néolibéral de la gestion politique. Six ans plus tard, force est de constater que rien de tout cela ne s’est produit et qu’au contraire, les mouvements populaires se sont affaiblis au point de ne plus représenter une menace pour les classes dirigeantes.
Au Chili, des millions de personnes ont manifesté dans les rues pour exiger la démission du président Sebastián Piñera, un mouvement d’une ampleur inédite dans le pays. Bien que les étudiants aient été à l’origine des protestations, celles-ci se sont rapidement propagées à tous les secteurs de la société, témoignant d’un rejet clair d’un système qui appauvrit, engendre des inégalités et nuit à l’environnement.
Au cœur des manifestations, plus de 200 assemblées territoriales se formèrent à Santiago, organisées en deux blocs principaux. Ces assemblées créèrent des espaces dédiés à la santé et à l’éducation, et mirent en place des achats collectifs, des jardins partagés et des échanges avec les producteurs ruraux, contournant ainsi les contrôles frontaliers. Le drapeau mapuche, plus visible que le drapeau chilien, était le symbole principal ; certains quartiers de la ville furent envahis par la foule et des dizaines de statues de conquistadors furent déboulonnées.
En Équateur, le soulèvement indigène s’est accompagné d’un mouvement sans précédent de jeunes urbains, la première génération de migrants kichwas andins. Pour la première fois, des quartiers entiers de Quito se sont ralliés aux membres de la communauté venus du sud et du nord, prenant le contrôle d’une ville que le président avait été contraint de fuir. Pendant près de deux semaines, de violents affrontements ont opposé la police aux manifestants dans le centre historique, entraînant l’arrestation de plus de 200 policiers par les groupes d’autodéfense.
Le mouvement a triomphé lorsque les mesures qui l’avaient déclenché ont été retirées. Plus significative encore fut la création du Parlement des mouvements autochtones et sociaux, qui a rassemblé 200 organisations et s’est présenté comme une solution à la crise de gouvernance. Le parlement a entamé ses sessions dans un climat d’enthousiasme collectif, encourageant la création d’instances similaires dans diverses régions du pays.
En Colombie, le soulèvement a d’abord pris la forme d’une grève, qui a duré jusqu’à trois mois dans certaines villes, comme Cali, où la population afro-colombienne pauvre et les classes moyennes ont créé 25 « points de résistance » pour garantir une coexistence pacifique durant la lutte, à l’abri de toute ingérence policière. La force du soulèvement colombien a contraint l’extrême droite militariste et paramilitaire, au pouvoir depuis des décennies, à se défendre.
Si l’Équateur a connu une douzaine de soulèvements indigènes depuis 1990, la Colombie et le Chili ont été le théâtre des plus importantes mobilisations de mémoire récente. Malheureusement, dans les trois cas, aucun changement réel n’a été obtenu et les organisations populaires de base se sont progressivement dissoutes face au retour en force des politiques néolibérales.
La normalisation au Chili s’est faite sous couvert d’une Assemblée constituante, assortie de promesses impossibles à tenir. La victoire électorale de l’extrême droite est, entre autres, le fruit de la démobilisation sociale et d’un gouvernement Boric qui a militarisé Wallmapu comme jamais auparavant. La victoire de l’extrême droite de Kast est le résultat de cinq années de démobilisation de la société et du glissement à droite du mouvement progressiste.
En Équateur, les parlements indigènes se sont dissous à l’approche des élections présidentielles. En Colombie, l’élan de changement s’est canalisé vers la candidature de Gustavo Petro et Francia Márquez.
Dans les trois cas, nous sommes confrontés à des situations complexes, mais prévisibles.
Le premier et le plus grave problème est la désorganisation du mouvement populaire, qui a perdu sa capacité d’action collective car il est submergé par l’agenda du système politique auquel il continue de faire confiance. C’est là le point crucial, car seule l’organisation collective permettra de faire entendre des voix capables de contrer la propagande du système.
Le problème, c’est qu’à l’heure actuelle, les mouvements progressistes coïncident avec les groupes de droite traditionnels, car les uns comme les autres sont gênés par les mouvements sociaux forts et mobilisés. Nous ne parvenons pas à enrayer la dynamique qui conduit de la rue aux urnes, de l’organisation et de la mobilisation à la confiance accordée aux politiciens, perçus comme un soutien essentiel et des gestionnaires des besoins populaires.
Le deuxième point est que les mouvements d’extrême droite et leurs agendas sécuritaires sont souvent sous-estimés. En Équateur, après la défaite face au mouvement indigène, la classe dirigeante a décidé de créer une situation sécuritaire intenable, en armant des groupes criminels pour semer la terreur au sein de la population. Si, au Chili et en Colombie, les gouvernements progressistes de Petro et Boric ont permis de reprendre le pouvoir, en Équateur, le terrorisme planifié a joué le même rôle. Dans tous les cas, l’objectif était de déloger les citoyens des rues et de désorganiser les mouvements populaires.
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