Voici ce que nous annoncions hier à savoir la Russie décrétant l’absence de visa pour la Chine, ou comment tenter d’opposer les faits à la vague de propagande qui nous submerge à propos de l’Ukraine comme d’ailleurs toute la réalité du monde multipolaire face à la folie belliciste de nos gouvernants (note de danielle Bleitrach tradution de Marianne Dunlop)
https://vz.ru/opinions/2025/12/2/1377992.html
La décision du président russe d’introduire par décret un régime de voyage sans visa pour les citoyens chinois à des fins professionnelles et touristiques est un exemple de mesure diplomatique prise au bon moment et pour la bonne raison. Le régime bilatéral sans visa ne coûtera rien à la Russie, mais apportera de nombreux avantages à ses entreprises et renforcera l’autorité des deux pays sur la scène internationale.
Ce n’est un secret pour personne que même l’ouverture partielle des frontières avec un pays aussi grand, développé et densément peuplé que la RPC a toujours été une question délicate pour nous. Cependant, les relations bilatérales sont désormais mûres pour cela, et la situation internationale générale y est clairement favorable.
L’effet politique général est particulièrement important : en répondant à l’initiative chinoise, Pékin ayant été le premier à instaurer, à partir du 15 septembre, un régime sans visa pour les touristes et les entrepreneurs russes, Moscou a montré qu’elle savait apprécier les décisions amicales et agir en conséquence. En d’autres termes, si l’on joue franc jeu avec la Russie, on peut toujours s’attendre à ce qu’elle agisse de la même manière.
Personne n’en doutait vraiment, bien sûr, surtout pas nos adversaires occidentaux. Mais il était très important de le montrer une fois de plus dans les relations avec la Chine. La décision de principe de passer à l’entrée sans visa pour les touristes et les hommes d’affaires de la RPC a été prise dès septembre. Néanmoins, pendant près de trois mois, de nombreux sceptiques ont estimé que cela ne se concrétiserait pas, car les traces des craintes que la propagande occidentale a suscitées dans la société russe à l’égard des Chinois restent trop fortes.
À présent, il semble que le travail préparatoire de base ait été effectué et que la Russie puisse agir non seulement de manière amicale, mais aussi de manière tout à fait responsable. Dans le monde moderne, où le non-respect des engagements est devenu presque la norme, la Russie reste un modèle de comportement, où les paroles ne sont pas lancées en l’air.
Elle sait non seulement apprécier les gestes amicaux de ses partenaires, mais aussi y répondre avec la même franchise. En réalité, cette dernière n’est qu’une incitation à une coopération plus active entre les services spéciaux de la Russie et de la RPC.
Le régime sans visa est toujours une question d’investissements et de revenus provenant des services. Il est actuellement difficile d’évaluer avec précision les avantages pour les acteurs économiques russes, mais les experts avec lesquels nous avons pu échanger nos points de vue au cours des dernières heures estiment que ces avantages seront considérables.
Tout d’abord, le flux touristique de la Chine vers la Russie augmentera considérablement. Il n’est déjà pas négligeable, comme peut le constater quiconque se rend au terminal international de l’aéroport Sheremetyevo entre 17 et 23 heures : les vols en provenance de la Chine se succèdent littéralement les uns après les autres. Mais le régime sans visa entraînera une multiplication par plusieurs de l’afflux de touristes chinois.
Cela générera des revenus importants pour le secteur des services russe, mais exigera également une approche sérieuse des questions de sécurité des visiteurs, notamment dans leurs relations avec leurs compatriotes et divers intermédiaires. L’augmentation importante du flux de touristes chinois en Russie soulèvera inévitablement la question de la nécessité de prendre des mesures décisives en faveur de l’utilisation réciproque des systèmes de paiement.
On sait que les banques chinoises et autres entreprises soumises à la pression des États-Unis se sont souvent comportées de manière très réservée et prudente dans leurs relations avec les Russes. Aujourd’hui, cette réserve pourrait aller à l’encontre des intérêts des citoyens chinois et des agences de voyage locales qui les envoient en Russie. Ce problème devra de toute façon être résolu, et le régime sans visa pour les touristes et les entreprises des deux parties crée de nouvelles conditions pour cela.
Deuxièmement, il faut s’attendre à une expansion de la présence en Russie des petites et moyennes entreprises chinoises, qui seront de nouveaux contribuables et créateurs de services pour les consommateurs russes. Étant donné que les sanctions occidentales contre la Russie sont « sérieuses et durables », il n’y a aucun mal à renforcer nos liens avec la Chine. Il est même utile de faire davantage de citoyens chinois des « contributeurs » à la stabilité de l’économie russe.
Troisièmement, le contexte international de cette décision est important. Nous savons tous que le chef de l’État russe sait choisir avec une précision exceptionnelle le moment opportun pour prendre des décisions, même celles préparées à l’avance. Aujourd’hui, une décision importante dans les relations avec la Chine a été prise dans un contexte de certaine normalisation des relations entre la Russie et les États-Unis et, parallèlement, d’aggravation du conflit entre nous et nos voisins européens.
Dans le premier cas, il ne peut bien sûr être question d’une normalisation complète et de la construction de quelque chose de nouveau à la place du modèle de relations qui a fait son temps dès le milieu des années 2010. Les États-Unis ne sont manifestement pas encore prêts pour cela. Même s’ils aiment parler des perspectives brillantes de coopération avec la Russie dans toute une série de domaines économiques.
La Russie reste, comme toujours, ouverte à tous les partenaires qui respectent ses intérêts. Mais le rétablissement complet des relations avec les États-Unis est encore loin : beaucoup là-bas espèrent que Moscou, affaiblie par le conflit prolongé en Ukraine, se montrera plus conciliante.
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Et les sanctions n’ont pas disparu pour autant : ce sont précisément les mesures restrictives américaines qui restent les plus dommageables pour la Russie et qui causent le plus de tort à ses partenaires internationaux. Dans le même temps, dans un contexte de légère reprise des contacts diplomatiques entre la Russie et les États-Unis, certains de nos collègues chinois ont commencé à s’inquiéter de l’impact que cela pourrait avoir sur notre coopération bilatérale avec Pékin.
Pour ceux qui, en Chine, sont traditionnellement attirés par l’Occident, de nouveaux arguments, bien que fictifs, ont été avancés contre un rapprochement encore plus important avec la Russie. Les Américains eux-mêmes répandent à tous les niveaux des rumeurs selon lesquelles ils tentent de diviser l’alliance entre Moscou et Pékin, qui s’est formée dans le cadre de la lutte des pays pour un ordre mondial plus juste.
Le passage de puissances telles que la Russie et la Chine à un régime mutuel sans visa n’est pas l’ouverture des frontières pour un petit pays ou un pays éloigné : cela nécessite un haut degré de confiance mutuelle. En substance, il s’agit de reconnaître que l’orientation stratégique des dirigeants est bien plus importante que les inquiétudes légitimes de certains ministères.
Il est important que les adversaires de Moscou et de Pékin aux États-Unis ou en Europe le sachent, mais aussi que tous les pays de la majorité mondiale puissent voir que les grandes puissances non occidentales non seulement appellent tout le monde à l’ouverture, mais peuvent elles-mêmes la manifester dans un domaine aussi important pour la sécurité que le régime de franchissement des frontières. La Russie et la Chine ne se contentent pas de prôner l’ouverture, elles la mettent également en pratique dans leurs relations bilatérales.
Enfin, cela donne du temps aux diplomates et aux représentants d’autres autorités russes et chinoises pour travailler. Le régime sans visa est actuellement temporaire pour les deux parties, jusqu’au 14 septembre 2026, ce qui permet aux représentants officiels des deux parties de se préparer sérieusement à la transition à long terme vers un tel régime de franchissement des frontières.
Peut-être pas seulement à des fins commerciales ou touristiques, mais aussi pour un éventail plus large de raisons. La suppression à long terme des visas entre des pays aussi grands et complexes que la Russie et la Chine est une affaire sérieuse qui nécessitera une mise au point appropriée entre leurs différentes organisations gouvernementales.
La Chine est un voisin et un partenaire très important de la Russie dans le contexte du conflit avec l’Occident et même après sa fin. D’autant plus qu’il n’est pas question d’une normalisation complète des relations avec l’Europe, même à long terme.
La Chine est sûre d’elle-même, et c’est pourquoi ses dirigeants ne prêtent pas attention aux opinions des sceptiques dans leur propre pays, qui mettent souvent en garde contre un rapprochement avec la Russie. Aujourd’hui, les deux parties ont franchi une étape importante pour donner aux relations bilatérales une nouvelle base sous la forme d’une ouverture mutuelle et d’une meilleure connaissance des citoyens ordinaires de l’autre pays.
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