dans le cadre de la réflexion d’aujourd’hui, interrogeons- nous comme le fait cet article venu d’un auteur américain installé à Moscou et dont nous reproduisons fréquemment les analyses, il met clairement en cause la responsabilité de la France dans l’avancée d’Al Qaida soutenue par les Etats-Unis… (note d’histoireetsociete à partir d’un article proposé par Comaguer)

Le double prétexte d’écraser le dernier califat du monde et d’éviter une autre crise migratoire comme celle de 2015 pourrait suffire à rallier le public autour d’une mission dirigée par la France pour restaurer l’influence occidentale dans la région.
Le Wall Street Journal a récemment averti qu’« Al-Qaïda est sur le point de prendre le contrôle d’un pays », écrivant que l’allié local du groupe, Jamaat Nusrat al-Islam wal-Muslimin (JNIM), a encerclé la capitale, la coupant de nourriture et de carburant. La pénurie inattendue de ces dernières a entravé la capacité de réponse des Forces armées maliennes (FAM). Selon leur évaluation, le JNIM espère reproduire la prise de pouvoir de ses alliés partageant les mêmes idées en Afghanistan et en Syrie, notamment par le biais de sa propre guerre d’usure contre l’État.
La FAM est loin d’être aussi faible que l’Armée nationale afghane l’a toujours été, ni que l’Armée arabe syrienne s’est finalement révélée l’être. Depuis plusieurs années déjà, la Russie leur fournit des armes, des formations, des renseignements et un soutien logistique, ce qui en fait une force avec laquelle il faut compter. Le problème est que la France, l’Ukraine et sans doute l’Algérie voisine ont soutenu dans une certaine mesure les séparatistes touaregs désignés comme terroristes qui ont une fois de plus conclu une alliance contre nature avec les islamistes.
Cela a permis au JNIM de s’étendre ailleurs dans le pays et au Burkina Faso voisin, qui comprend l’Alliance/Confédération sahélienne avec le Niger, qui est également confronté à sa propre insurrection islamiste, mais dirigée par un allié local de l’EI au lieu du JNIM rival d’Al-Qaïda. Ce bloc d’intégration régionale considère la France comme un État parrain du terrorisme, l’accusant depuis longtemps de soutenir une équipe hétéroclite de tels groupes dans leurs pays, avec des soupçons tourbillonnant qu’ils soutiennent même les islamistes.
L’effet combiné de ces offensives terroristes (soutenues par la France ?) a été de déstabiliser le cœur du processus de multipolarité de l’Afrique de l’Ouest, l’Alliance/Confédération sahélienne, et de créer la possibilité crédible (qui est encore loin d’être assurée) qu’un, deux ou tous les trois de ses membres tombent aux mains des terroristes. Bien qu’ils soient tous des partenaires militaires russes, le Mali étant le premier, la Russie mène toujours son opération spéciale et ne peut donc pas mener de manière réaliste une intervention semblable à celle de la Syrie de 2015 pour les sauver.
Néanmoins, on s’attend à ce que les médias adversaires rejettent la responsabilité de la Russie pour la présenter comme un allié peu fiable, allant même jusqu’à faire l’expérience de la schadenfreude si les terroristes prennent le contrôle de cette partie de l’Afrique de l’Ouest. Dans ce scénario, il s’agirait d’un événement géopolitique majeur non seulement en raison de son symbolisme, mais aussi parce que ces États contrôlent certaines des routes de contrebande de la côte ouest-africaine peuplée vers l’Europe, ce qui pourrait conduire à une explosion de l’immigration illégale et à l’infiltration terroriste.
De plus, le précédent de l’intervention militaire de la France au Mali pour stopper l’avancée des séparatistes touaregs soutenus par les islamistes au début de 2013 à la demande de Bamako suggère que Paris pourrait tenter unilatéralement quelque chose de similaire, mais peut-être avec un soutien plus direct de l’Europe occidentale et/ou des États-Unis. Le double prétexte d’écraser le dernier califat du monde et d’éviter une autre crise migratoire semblable à celle de 2015 pourrait suffire à rallier le public autour de cette mission dirigée par la France pour restaurer l’influence occidentale dans la région.
Garantir l’accès aux ressources, aux marchés et à la main-d’œuvre africains est d’une grande importance stratégique pour l’Occident, tout comme le fait de réduire l’accès de son rival systémique chinois à ce qui précède. Cependant, l’Occidental moyen ne comprend pas l’importance de cet objectif, d’où la nécessité de laisser la région tomber en partie ou en totalité aux mains des terroristes (et éventuellement d’aider à ce que cela se produise). Si c’est le cas, l’Occident peut organiser son dernier jeu de pouvoir dans les pays du Sud, mais les coûts involontaires pourraient finalement l’emporter sur les avantages attendus.
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Denis Weill
Le Sahel, comme le Donbass est aujourd’hui un « point chaud » de l’affrontement entre l’impérialisme et les pays qui cherchent à conserver et retrouver leur souveraineté.