Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

𝐋’𝐡𝐨𝐧𝐧𝐞̂𝐭𝐞𝐭𝐞́ : 𝐜𝐞 𝐥𝐮𝐱𝐞 𝐪𝐮𝐞 𝐥𝐞 𝐩𝐨𝐮𝐯𝐨𝐢𝐫 𝐧𝐞 𝐩𝐞𝐮𝐭 𝐬’𝐨𝐟𝐟𝐫𝐢𝐫, par Tarak Amira…

Dans le fond, cet article touche à une question fondamentale de « méthode » pour l’analyse des faits historiques mais nous y reviendrons. En effet, on parle souvent de dialectique nécessaire, mais la dialectique n’est rien d’autre qu’un affrontement « politique » entre philosophes dans laquelle ce qui l’emporte n’est pas nécessairement la « vérité » mais l’art de convaincre, qui peut approcher la vérité mais aussi s’en éloigner… C’est pourquoi la dialectique matérialiste ajoute le critère déterminant, la « praxis » (la pratique) le passage à l’action pour transformer. Sans ce « passage à la pratique » on peut avec habileté raconter n’importe quoi ou même agiter des rumeurs imbéciles qui sans aucune « dialectique » cette fois pourront faire « foule »… Il faut encore ajouter par rapport à l’habileté dialectique des « idéalistes », qu’il arrive un moment où les discours les plus « habiles », les plus répétés comme une évidence, se heurtent à ce que vivent les « masses », ce qui se crée un « ébranlement », un scepticisme, mais il ne deviennent jamais spontanément une « vérité » sur la situation, de celles qui justement permettent l’action collective. Le politique bourgeois pratique, non seulement par son habileté propre mais parce que tous les moyens lui en sont offerts, l’art d’avoir toujours raison, et il doit créer sans cesse les conditions de sa « crédibilité » à travers de multiples appareils sur lesquels il a la haute main, alors que « le prolétaire » en est dépouillé. L’honnêteté, ce terme renvoie justement à celui qui cherche à agir pour le bien de tous comme du sien propre et donc travaille son entendement, sa conscience en ce sens… Chacun le fait à partir de sa pratique, de ses connaissances… et il est vrai qu’en ce moment il est plus difficile de rester « honnête » à tous les sens du terme pour un politicien que pour un riche chameau de passer par le trou d’une église (note de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)

Pourquoi les politiques ne reconnaissent-ils jamais les faits qu’on leur reproche ?

Peut-être que reconnaître, c’est renoncer, non pas à l’erreur, mais à l’illusion d’infaillibilité.

Et cette illusion, chez certains, vaut plus que la vérité.

Et en politique, la vérité n’est pas un devoir : c’est un risque.

Reconnaître, c’est offrir sa gorge à la meute.

Dire « j’ai eu tort », c’est tendre la main au bourreau médiatique.

Ils le savent : un aveu ne sauve pas, il condamne. Alors ils s’accrochent à leurs dénégations comme à une bouée dans une mer de journalistes.

Ils nient, non par cynisme, mais par réflexe vital.

Le mensonge, c’est leur oxygène. Le doute, leur poison.

Car dans leur monde, l’erreur n’est pas humaine, elle est fatale.

Et puis, il y a le costume.

Une fois qu’on l’enfile, on n’a plus le droit de transpirer, ni de trembler. Le pouvoir exige une peau sans faille. Alors ils maquillent les fautes, repeignent les échecs, travestissent les chiffres. Ils ne parlent plus, ils orchestrent.

Et parfois — c’est le plus tragique — ils finissent par croire à leurs propres fables. Le mensonge devient refuge, le discours, abri. L’homme disparaît derrière la fonction, comme un acteur qui aurait oublié qu’il joue.

Ils ne mentent plus au peuple — ils se mentent à eux-mêmes.

Et quand, parfois, un sursaut d’humanité les traverse, il est déjà trop tard :

la vérité, en politique, ne pardonne pas les sincères.

Reconnaître ses fautes, c’est redevenir humain.

Mais la politique, hélas, n’aime pas les humains : elle préfère les statues.

L’exemple le plus récent, c’est l’incarcération de Sarkozy — symbole éclatant d’une République où même les puissants finissent par répondre de leurs ombres.

Il conteste sa peine — déni, mensonge ou simple amnésie de ses propres fautes ? Peut-être un peu des trois. Mais après tout, c’est son droit de justiciable.

En revanche, ce qui me tue, ce n’est pas tant son discours de contestation de ses délits que la foule qui s’y abreuve — avide, crédule, transformant l’imposture en courage et la faute en légende. Cette foule qui s’indigne de sa condamnation comme si la justice était l’ennemie du peuple, qui piétine l’indépendance des juges au nom d’une fidélité aveugle. Elle le suit comme on suit une lumière fausse au fond d’un marécage — fascinée, hypnotisée, prête à s’enliser pour un mirage.

Ce qui mérite condamnation, ce n’est pas qu’un ancien chef d’État croupisse derrière les barreaux — c’est la chaîne d’actes, de mensonges et de trahisons qui l’y ont traîné, comme un cadavre politique ramené à la surface. C’est qu’on le voit passer du Panthéon à l’Élysée, puis de l’Élysée à la Santé — trajet parfait d’un destin qui se prenait pour l’Histoire et finit en fait divers. Reçu par l’actuel chef de l’État, visité par le ministre de la Justice, on assiste à une solidarité malsaine entre hommes de pouvoir — un club fermé où la faute s’excuse à condition qu’elle soit commise en costume.

Tarak Amira

22/10/2025

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