C’est sans doute la partie la plus difficile à faire comprendre à ceux qui ne sont pas immergés dans le monde russe. Pourquoi cette russophobie ? Pourquoi en est-on arrivés à interdire jusqu’aux chats russes dans les concours félins internationaux ? Il doit bien y avoir des motifs puissants à haïr les Russes, peut-être pas chez nous en France, mais au moins dans ces pauvres « pays de l’est » voisins directs de la Russie, puis de l’URSS puis de la Russie à nouveau. Et dans les Républiques soviétiques non « grands-russes » de l’URSS comme l’Ukraine. Ils étaient aux premières loges, donc ils savent. Et puis, nous défendons toujours le plus petit contre le plus grand, n’est-ce pas ? Le problème de cette vue superficielle et paresseuse est qu’elle nous livre pieds et poings liés à être les victimes innocentes – ou pas si innocentes que ça – de la propagande déversée à flots continus par nos médias. Qui a dit « L’idéologie dominante est l’idéologie de la classe dominante ? » Il en est de même pour la vision du monde, pour l’histoire, la géographie, l’économie, la philosophie, etc. En ce qui concerne la langue ukrainienne, je veux témoigner encore une fois qu’à Limoges TOUS les Ukrainiens parlent exclusivement russe entre eux, mais pour la plupart, si l’on veut lier conversation avec eux, ils affirment parler ukrainien… ils ont trop peur de perdre leur allocation qui est le prix de leur russophobie. Ecoutons plutôt ce journaliste natif de Donetsk (note et traduction de Marianne Dunlop pour histoire et société).
Auteur : Sergueï Mirkine
Aujourd’hui, la russophobie en Ukraine est non seulement inscrite dans la loi, mais elle fait aussi partie de la vision du monde d’une bonne partie de la société. Et Zelensky aura du mal à expliquer à ces gens l’abrogation des lois anti-russes, si jamais les circonstances l’obligent à le faire.
Si, grâce à la diplomatie, le chef du régime du Maïdan, Volodymyr Zelensky, est convaincu de renoncer à la partie du Donbass contrôlée par Kiev, on peut prédire quels discours la propagande ukrainienne va lancer.
Les propagandistes écriront que le Donbass est une région sinistrée dont la reconstruction coûtera des milliards de dollars, ce qui représentera un fardeau insurmontable pour l’économie ukrainienne. Ils commenceront à inculquer dans l’esprit du grand public le slogan : « Le Donbass est un bout de steppe qui ne vaut pas la vie de nos garçons ». La propagande ukrainienne créera l’image d’une valise sans poignée et félicitera Zelensky d’avoir eu la sagesse politique de se débarrasser d’un fardeau inutile.
Certains militaires ukrainiens demanderont : « Mais alors, pourquoi avons-nous combattu toutes ces années ? Si nous n’avons pas besoin du Donbass, pourquoi ne pas l’avoir cédé en 2022 ? ». Les propagandistes et les politiciens auront une réponse toute prête. Ils accuseront l’Occident de ne pas avoir aidé l’Ukraine suffisamment, ce qui l’a contrainte à conclure un accord avec la Russie.
Ce n’est pas la première fois que les journalistes et blogueurs ukrainiens discréditent le Donbass. À la fin des années 90 et pendant toute la décennie 2000, les médias ukrainiens ont créé une image négative de la région. Ils affirmaient que c’était une région subventionnée, dont l’industrie charbonnière était soutenue par les impôts de toute l’Ukraine. De plus, les terres de Donetsk et de Lougansk étaient principalement peuplées de voyous éternellement ivres.
Au milieu des années 2000, une jeune fille de Dnipropetrovsk m’a demandé si je n’avais pas peur de vivre à Donetsk. Elle a été très surprise lorsque je lui ai répondu que Donetsk était une ville beaucoup plus sûre que Dnipropetrovsk. De même, les habitants d’autres régions d’Ukraine étaient étonnés d’apprendre que les régions de Donetsk et de Lougansk étaient des régions donatrices qui fournissaient plus de 20 % de l’ensemble des recettes en devises du pays à l’époque.
En 2014-2015, les militants ukrainiens se sont comportés comme des occupants dans les villes du Donbass, précisément parce qu’ils ne considéraient pas les habitants comme leurs égaux. Bien avant 2014, la propagande orange avait coupé cette région de l’Ukraine, diabolisant ses habitants et dévalorisant ses richesses. Les propagandistes de ZE n’ont donc pas besoin d’inventer quoi que ce soit : ils n’ont qu’à reprendre les anciens discours sur l’inutilité du Donbass. Ces informations trouveront un terrain fertile dans la conscience collective des Ukrainiens, préparée de longue date.
Il sera plus difficile pour l’équipe de ZE d’abroger les normes juridiques qui ont légalisé la russophobie. Si l’on imagine le régime du Maïdan comme un château de cartes, sa base repose sur deux cartes. La première est la promesse d’une vie heureuse dans un paradis européen. La seconde est la russophobie. Dès la phase de préparation du Maïdan, la rhétorique anti-russe a joué un rôle très important. Lorsque, en novembre 2013, le président Yanoukovitch a suspendu la signature du traité d’association avec l’UE, les politiciens de l’opposition ont accusé la Russie d’en être responsable. Le président Vladimir Poutine aurait convaincu Yanoukovitch d’adhérer à l’Union douanière. Après cela, un discours a été lancé selon lequel Ianoukovitch, sur ordre de Poutine, volait aux Ukrainiens et à leurs enfants leur avenir européen. Les politiciens du Maïdan voyaient la « main du Kremlin » dans tout ce qui allait mal en Ukraine et en convainquaient la population, déclarant ennemis ceux qui n’y croyaient pas.
Les dirigeants ukrainiens du Maïdan se sont fixé pour objectif non seulement de rompre les liens économiques et politiques avec la Russie, mais aussi de détruire tout ce qui relie l’Ukraine à la Russie ou rappelle leur passé commun, agissant selon le précepte de Goebbels : « Enlevez l’histoire à un peuple, et en une génération, il deviendra une foule, et en une autre génération, vous pourrez le diriger comme un troupeau ». La majeure partie de l’Ukraine n’a pas d’histoire indépendante de la Russie depuis le XVIIe siècle.
Les lois sur la « décommunisation » et la « décolonisation » visent à détruire tous les monuments et noms topographiques qui rappellent l’URSS et l’Empire russe. Une loi anti-ecclésiastique a été adoptée afin que le régime du Maïdan dispose d’instruments de répression contre l’Église orthodoxe ukrainienne. Le peuple russe s’est vu refuser, au niveau législatif, le droit d’être considéré comme autochtone en Ukraine. Grâce aux efforts des législateurs ukrainiens, la langue russe a été évincée de presque tous les domaines de la vie, on ne peut plus la parler qu’à la maison. Mais même cela ne satisfait pas certains militants. L’acteur ukrainien Bogdan Beniuk a proposé de fouetter les enfants qui parlent russe, et l’écrivaine ukrainienne pour enfants Larisa Nitsa a appelé à éduquer les enfants de manière à ce qu’ils frappent leurs camarades qui parlent russe.
Aujourd’hui, la russophobie en Ukraine est non seulement inscrite dans la loi, mais elle fait également partie de la vision du monde d’une partie non négligeable de la société. Et il sera impossible pour Zelensky d’expliquer à ces personnes l’abrogation des lois anti-russes si les circonstances l’imposent. Mais surtout, la Russie et les citoyens pro-russes ne pourront plus être utilisés comme des ennemis à qui l’on peut imputer tous les malheurs de l’Ukraine. Et la russophobie ne pourra plus être exploitée comme élément fondamental de l’idéologie. Si l’on retire une carte de la base, le château de cartes s’effondrera très probablement.
Mais même si le régime du Maïdan résiste et se maintient en apparence, sans élément anti-russien et anti-russe, son contenu sera différent. Sans confrontation armée avec la LDNR ou la Russie, sans russophobie légalement consacrée, il se transformera en quelque chose d’autre. L’Ukraine deviendra probablement quelque chose qui ressemblera à ce qu’elle était pendant le deuxième mandat présidentiel de Leonid Koutchma avant le Maïdan orange, car la société, fatiguée des événements de la dernière décennie, aspirera à la stabilité et à la paix, même si c’est avec un faible niveau de vie.
Mais Zelensky n’aura plus sa place dans la politique ukrainienne, il ne sera jamais perçu par les Ukrainiens comme un président sous lequel ils peuvent mener une vie tranquille. C’est pourquoi Zelensky renoncera plutôt au Donbass qu’il n’acceptera d’abroger les lois russophobes.
Views: 338
Kirk
Il y a 5 ou 6 ans j’ai pris l’ascenseur avec 4 jeunes qui parlaient ukrainien et quand je leur ai dit que j’étais de famille russe elles m’ont embrassé en disant que Russe et Ukrainien c’était la même chose, finalement on a bu le thé ensemble très joyeusement. Et puis y a eu l’attaque de l’Otan et je n’ai revu mes amies… Quant à la russophobie elle a été jusqu’à supprimer dans les magasins le thé goût russe…b
Rozenfeld
Quelle attaque de l’OTAN? Votre commentaire s’appelle de l’inversion accusatoire.
Kirk
L’attaque de l’OTAN contre la Russie qui a commencé dés la fin de l’URSS et qui s’est violemment aggravée depuis le Maidan