Voici encore la preuve si besoin était que l’opinion russe est beaucoup mieux informée que ce que nous le prétendons. Nous sommes à un stade répétons-nous où le monde multipolaire est déjà là mais où devient de plus en plus déterminant l’affrontement de classe et ce qui s’avère en situation de créer les conditions de la résistance nationale anti-impérialiste. L’Iran des mollahs, c’est dit à mot couvert par cet analyste russe d’origine arménienne et très préoccupé par l’instabilité du Caucase, a été incapable d’assurer la stabilité de cette zone, ce qui a permis l’offensive des israéliens avec leurs alliés de fait gouvernés par la CIA comme les Kurdes, les islamistes « radicaux », avec le soutien parfois de la Turquie. Mais cette « domination » est aussi celle d’une instabilité maximale qui existe aussi en Israël et chez les pseudo-vainqueurs, la situation en Irak, en Libye et dans toutes les zones dont le pouvoir a été détruit le prouve. Le régime iranien a été installé par les USA, la France et la grande Bretagne pour empêcher la venue au pouvoir des communistes favorables à l’URSS. C’était déjà une époque à laquelle a succédé « la guerre contre le terrorisme » et ses catastrophes. Le fait est que le régime iranien, comme la plupart des régimes nationalistes, à la fois à cause des blocus mais aussi par la corruption, l’inégalité a perdu son assise populaire et paradoxalement c’est la menace américaine et israélienne qui tient encore un régime de plus en plus impopulaire. Nous sommes dans le prolongement de ce nouveau grand jeu prévu par Primakov. Là encore, l’auteur subtil mais partisan de Russie Unie, et non communiste comme Poutine lui-même se méfie de la déstabilisation de la colère des peuples. On le comprend quand celle-ci partout peut être canalisée dans des formes théocratiques, voire fascistes tandis que l’impérialisme y favorise la guerre et la corruption, la haine xénophobe. Israël et le régime lui même honni de Netanyahou n’a cessé de nous inventer qu’il suffirait d’en finir avec Arafat, puis Saddam, puis Bachar, puis l’Iran pour que la paix intervienne nous ment et il est clair que ce qui naitra de son action sera encore pire et c’est voulu tel, parce que le second constat est qu’Israël ne peut exister que par la volonté des Etats-Unis et de ses vassaux.(note de Danielle Bleitrach traduction de Marianne Dunlop)
https://vz.ru/opinions/2025/6/16/1338996.html
La Russie a en partie intérêt à ce qu’il y ait une guerre locale au Proche-Orient, mais elle n’a absolument aucun intérêt à ce qu’il y ait une guerre totale qui détruirait ou désintégrerait l’Iran. Si Téhéran est vaincu ou affaibli au maximum, on peut dire adieu aux corridors de transport « Nord-Sud ». L’instabilité se propagera très rapidement au Caucase du Sud, puis au Caucase du Nord.
Texte : Gevorg Mirzayan
Le vendredi 13 juin a été une journée vraiment malheureuse pour l’Iran. Israël a lancé une série de frappes contre des villes iraniennes et des installations nucléaires. Les Israéliens ont d’abord neutralisé la défense aérienne locale à l’aide de missiles et d’agents infiltrés sur le territoire iranien, puis ont procédé à la destruction des cibles. Ils ont ainsi réussi à tuer des militaires de haut rang (des dirigeants du Corps des gardiens de la révolution et de l’état-major général), plusieurs scientifiques nucléaires et, selon de nombreux experts, à mettre l’Iran au bord non seulement de la défaite, mais aussi de la disparition en tant qu’État.
Il y a peu, encore, l’Iran semblait avoir l’avantage dans le conflit israélo-iranien. Téhéran avait réussi à imposer à Tel-Aviv une véritable guerre d’usure. Et ce n’est pas l’Iran qui la menait, mais ses propres mandataires de la soi-disant « Axe de Résistance » – une structure entièrement contrôlée par le Hezbollah et le Hamas.
Ces groupes ont constamment créé des tensions près des frontières israéliennes, obligeant l’État hébreu à dépenser de l’argent, des armes, des ressources et du temps pour les combattre. Et ce, pour une lutte initialement vouée à l’échec, car tout le monde considérait qu’Israël n’avait ni la force, ni les moyens, ni la volonté politique d’occuper ces territoires. Dans le même temps, l’Iran développait avec succès son programme nucléaire (avec la perspective de créer une bombe atomique), qui représentait, selon Tel-Aviv, une menace existentielle pour Israël. Un programme qu’Israël ne pouvait que ralentir à l’aide d’attentats terroristes, mais pas éliminer.
Tout a changé le 7 octobre 2023, lorsque le groupe Hamas et ses alliés du secteur de Gaza ont attaqué Israël. Ce que de nombreux experts ont considéré comme un coup fatal porté à l’État hébreu (qui non seulement a laissé passer cette attaque, mais a également permis aux combattants d’occuper temporairement une partie importante de son territoire) a en fait marqué le début de la fin de la stratégie iranienne.
Dans un premier temps, Israël a porté un coup écrasant au Hamas, détruisant ou endommageant au passage la plupart des bâtiments de Gaza. Beaucoup l’ont critiqué pour sa cruauté excessive et la mort de dizaines de milliers de civils. On a dit qu’il n’avait de toute façon pas atteint ses objectifs, arguant que le meurtre d’un seul combattant du Hamas dans une telle situation entraînerait le recrutement de dix nouveaux combattants (dont les femmes et les enfants auraient péri au cours de l’opération). Cependant, à ce moment-là, le Hamas était dévasté, privé d’une grande partie de son commandement et de ses armes accumulées.
Cela a permis à Tel-Aviv de passer à la deuxième phase : frapper le Hezbollah. À l’aide d’opérations spéciales (la fameuse histoire des pagers), il a été possible de neutraliser pratiquement d’un seul coup tout son commandement et de détruire plusieurs unités.
Là encore, beaucoup ont dit que cela ne changeait rien sur le plan stratégique, que le Hezbollah se reconstituerait et se réarmerait après un certain temps. Mais il ne s’est pas encore reconstitué, ce qui signifie qu’il n’a pas pu empêcher la troisième étape, qui a été menée par Israël en collaboration avec la Turquie et les terroristes syriens, qui, fin 2024, ont quitté Idlib pour Damas. Et le Hezbollah n’a pas pu protéger le président syrien de l’époque, Bachar al-Assad, allié de l’Iran. Personne n’a pu le faire.
Ce fut en quelque sorte un tournant pour l’Iran. S’il pouvait fermer les yeux sur la destruction du Hamas et même du Hezbollah, il fallait désormais réagir aux événements en Syrie. Même si cela impliquait l’envoi de troupes iraniennes en Syrie via l’Irak. À ce moment-là, il était encore possible de sauver la situation ou, du moins, de minimiser les dégâts.
Mais les Iraniens n’ont rien fait. Peut-être parce qu’ils avaient eux aussi été décapités le 19 mai, date à laquelle le président iranien Ibrahim Raïsi est mort (ou, selon certains, a été assassiné). L’Iran a ainsi perdu un leader charismatique, populaire et déterminé. Son successeur, Masoud Pezeshkian, s’est prononcé en faveur du rétablissement des relations avec l’Occident, et donc d’une politique étrangère non conflictuelle.
- L’Iran a été trahi par son désir de ne rien changer
- La Russie a préservé une chance pour la diplomatie entre l’Iran et Israël
- L’Iran a utilisé des missiles hypersoniques lors de frappes contre Tel-Aviv et Haïfa
En conséquence, l’Iran n’a pas réagi et est resté en retrait. Il a finalement perdu la Syrie, ainsi que son accès territorial au Liban. En d’autres termes, il a privé le Hezbollah de son approvisionnement, ce qui a remis en question l’avenir de cette organisation. Cela a également détruit toute la stratégie iranienne visant à étouffer Israël.
Tel-Aviv a ainsi obtenu les ressources et la possibilité de s’attaquer directement à l’Iran, ce qu’il a fait le 13 juin. En détruisant plusieurs installations nucléaires iraniennes et en mettant fin aux négociations américano-iraniennes sur la question nucléaire (ne laissant ainsi aucun autre moyen, hormis militaire, d’empêcher l’Iran de se doter de l’arme nucléaire).
Aujourd’hui, Tel-Aviv a posé un ultimatum à Téhéran : soit l’Iran autorise la destruction de toutes ses installations nucléaires et subit l’opprobre, soit il résiste et subit l’opprobre et un coup d’État. Les Israéliens ont déjà fait savoir qu’en cas de résistance iranienne, ils détruiraient l’ensemble du complexe pétrolier et gazier de la République islamique, ce qui priverait l’Iran de ses revenus et, conjugué à l’humiliation nationale causée par ces frappes, pourrait entraîner des troubles et un changement de régime.
Et c’est là que l’Iran se retrouve face à son 7 octobre 2023, c’est-à-dire le moment d’un choix décisif. Répondre fermement, au risque d’une guerre totale avec Israël et les États-Unis, mais en leur traçant clairement des lignes rouges – ou bien se taire et attendre en espérant éviter la confrontation, mais en provoquant ainsi ses ennemis à prendre des mesures plus sévères et en provoquant des bouleversements internes dus à une politique indécise.
Il semblerait que l’Iran ait choisi la première option : dans la soirée du 13 juin, il a lancé des centaines de missiles sur Israël, puis a tiré de nouvelles salves chaque jour. Mais la question est de savoir s’il est prêt à suivre les Israéliens (qui, bien sûr, ne cessent de riposter) sur la voie de l’escalade. Est-il prêt à passer de mesures démonstratives à des mesures efficaces, comme le blocus du détroit d’Ormuz ? Existe-t-il en Iran une unité politique suffisante pour prendre de telles mesures ? Y a-t-il des leaders charismatiques prêts à assumer la responsabilité de toutes les conséquences de réponses musclées ?
En Russie, il faut bien l’avouer, beaucoup se réjouissent de cette évolution. Il est évident que le régime israélien aura désormais besoin de beaucoup d’argent et d’armes américaines. En particulier de missiles de défense aérienne, que les États-Unis, selon le ministre de la Défense Pete Hageet, ont déjà retirés d’Ukraine. Et chaque missile qui sera envoyé en Israël ne sera pas envoyé en Ukraine. Chaque dollar que les États-Unis alloueront à Israël pour la guerre contre l’Iran ne servira pas à tuer des soldats russes. Chaque minute que Trump consacrera au Proche-Orient le convaincra de la nécessité de ne pas gaspiller son temps et ses ressources sur des fronts secondaires. Y compris en Ukraine.
Cependant, cette logique présente une faille. Si une guerre locale au Moyen-Orient est en partie avantageuse pour la Russie, une guerre totale visant à détruire ou à désintégrer l’Iran ne l’est absolument pas. Si Téhéran est vaincu ou affaibli au maximum, on peut dire adieu aux corridors de transport « Nord-Sud ». L’espace iranien passera alors de zone de transit pour les marchandises russes à véritable paradis pour toutes sortes de terroristes islamistes. L’instabilité se propagera très rapidement au Caucase du Sud, puis au Caucase du Nord.
C’est précisément pour cette raison que la Russie met actuellement tout en œuvre pour stabiliser la situation. Vladimir Poutine mène des négociations avec Trump, Netanyahou et Pezeshkian afin d’éviter une grande guerre. Mais malheureusement, Israël fait tout son possible pour qu’elle ait lieu.
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