Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Les “brigades internationales” en Ukraine, un mercenariat de masse…

Cet article du journal Libération qui est pourtant de parti pris pour l’Ukraine contre la Russie, a le mérite de laisser entrevoir le mercenariat qui s’est développé en Ukraine, en fait la “légion étrangère” fait appel à toute l’extrême-droite mondiale et comme cela ne suffit pas il y a appel aux pays pauvres, à ceux qui comme la Colombie ici sortent de guerre et sse retrouvent avec une masse de chomeurs… Ce genre de recrutement qui a un coût très important et dont on se demande comment un Etat en faillite qui ne peut plus ses fonctionnaires et est systematiquement renfloué peut recourir de tels recrutements… Mais vu le refus massif des Ukrainiens à aller sur le Front, les désertions, les engagements forcés et au contraire les achats d’exemption pour une jeunesse dorée qui a pu jusqu’ici vivre en ignorant la guerre qui se déroule depuis 2014 dans l’est et le sud, des zones “pro-russes” dont on ne comptabilise par l’opinion dans les sondages en faveur de l’arrêt de la guerre alors quelles en payent le prix fort. (note de Danielle Bleitrach pour histoire et societe)

Une photo du militaire Jose Medina, chez lui à Popayán, en Colombie, le 13 septembre 2024.Une photo du militaire Jose Medina, chez lui à Popayán, en Colombie, le 13 septembre 2024.© Joaquim Sarmiento

«Mamita, je suis en route. Garde-moi de la soupe.» Voilà les mots d’Alexander Ante à sa mère lors de leur dernier appel téléphonique, juste avant qu’il disparaisse, le 18 juillet 2024, à Caracas. «Depuis ce jour, je n’ai plus eu de nouvelles de lui», se lamente auprès de l’AFP Otilia Ante, 78 ans. Il lui a fallu attendre plus d’un mois pour enfin apprendre que son fils était emprisonné à des milliers de kilomètres de là… en Russie. Le 28 août, Moscou annonce l’arrestation de deux Colombiens – Ante, 47 ans et son frère d’armes José Medina, 36 ans – accusés de «mercenariat» pour avoir combattu pendant des mois aux côtés des troupes ukrainiennes. Les deux hommes s’étaient engagés dans l’armée régulière, appâtés par un salaire important, et s’apprêtaient à rentrer chez eux.

Le 18 juillet, date de leur grand retour à la vie civile, ils ont fait l’erreur de prendre un vol avec escale à Caracas pour économiser quelques précieux dollars. Ce vol devait marquer la fin de leur engagement dans la guerre en Ukraine, après avoir passé respectivement huit et dix mois sur le front, dans les rangs du 49e bataillon d’infanterie «Karpatska Sitch». Ce fut le début d’un nouveau chemin du combattant : dès leur arrivée dans la capitale vénézuélienne, habillés en tenue de combat aux couleurs de l’Ukraine, ils ont été cueillis par les douaniers. Le Venezuela, fidèle allié de Vladimir Poutine, les a finalement déportés vers Moscou, où ils ont été placés au centre de détention de Lefortovo.

Depuis, leurs proches ne décolèrent pas. Arbey Ante, le frère d’Alexander, a l’impression qu’ils ont été «trompés», du début à la fin. «On ne leur avait jamais dit qu’ils devaient combattre la Russie, explique-t-il à Libération. Ils pensaient que leur mission était de sauver les civils, pas de combattre sur le champ de bataille.» La page X de leur bataillon laisse pourtant peu de doute quant à la nature de leurs missions : photos et vidéos de combattants en tenues de combat, d’essais et de réparations d’armes ou encore de chars d’assauts.

Sans protection du droit international humanitaire

Les deux hommes ont été accusés par Moscou de «mercenariat», un chef d’accusation passible de 15 ans d’enfermement maximum. Et qui les prive surtout de la protection du droit international humanitaire (DIH) : ni combattants ni civils, les mercenaires sont considérés comme des tueurs à gages, responsables individuellement de violations des droits humains et de crimes de guerre.

Les familles, elles, rejettent cette étiquette, soulignant qu’Alexander et José ont été recrutés par l’armée ukrainienne et non par une entreprise privée, comme le stipule la définition faite par le DIH du «mercenariat». «La vérité, c’est qu’ils ne sont pas des mercenaires, car ils ont été incorporés directement par le gouvernement de l’Ukraine. D’après ce que je comprends, les mercenaires sont des civils qui sont engagés par des entreprises privées», se défend le frère d’Alexandre. Selon le droit international humanitaire, le terme «mercenaire» s’applique à toute personne «qui prend part aux hostilités essentiellement en vue d’obtenir […] une rémunération matérielle nettement supérieure à celle qui est promise ou payée à des combattants ayant un rang et une fonction analogues». Toutefois, les soldats recrutés en Colombie et les soldats ukrainiens semblent percevoir un salaire relativement similaire.

C’est d’ailleurs ce qui a motivé Alexander Ante et José Medina, comme d’autres Colombiens, à rejoindre les forces ukrainiennes. «C’est vraiment dur parce qu’ici en Colombie il n’y a pas d’emploi. On gagne un salaire minimum de 1 300 000 pesos [280 euros], et honnêtement, c’est très insuffisant, raconte Arbey Ante. Le gouvernement ukrainien offrait une prime de 3 000 dollars. Cela leur permettait d’assurer un meilleur avenir à leurs familles.» Après quatorze ans passés dans l’armée et quelques mois de chômage, il n’en fallait pas plus pour convaincre Alexander Ante de reprendre du service. José Medina quant à lui cherchait à rembourser un prêt.

L’affaire vient rappeler que des milliers de Colombiens – le chiffre reste flou – combattent, légalement ou illégalement, hors de leur pays, notamment en Ukraine. En 2021, l’assassinat du président haïtien Jovenel Moïse, par des mercenaires colombiens, avait exposé ce phénomène au grand jour.

La Colombie, en raison de son long conflit interne – près de soixante ans d’affrontements armés contre les guérillas et les gangs de narcotrafiquants –, dispose des forces armées les plus importantes et les plus réputées d’Amérique latine, avec environ 400 000 soldats. Le pays est aussi un vivier de jeunes vétérans : 16 384 militaires ont quitté l’institution entre août 2022 et avril 2024 après vingt ans de service ou à cause des conditions financières. Ils préfèrent parfois offrir leur expérience sur d’autres fronts. Quitte à y perdre la vie. Selon le ministère colombien des Affaires étrangères, une cinquantaine de Colombiens ont trouvé la mort depuis le début du conflit en Ukraine en février 2022.

Gel des relations avec Caracas

L’implication de soldats colombiens dans le conflit ukrainien pose également la question des relations diplomatiques entre la Colombie, la Russie et le Venezuela. L’incident intervient alors que le gouvernement colombien s’est montré critique vis-à-vis de l’invasion russe de l’Ukraine, et dans un moment de gel des relations avec Caracas. Gustavo Petro, le président colombien, autrefois proche de son homologue vénézuélien, appelle désormais Nicolás Maduro à montrer les preuves de sa victoire à la présidentielle de juillet – ce qu’il n’a toujours pas fait. Alors que Vladimir Poutine, son traditionnel allié, le félicitait pour sa réélection et le qualifiait de «bienvenu sur le sol russe». Autant de facteurs qui rendent complexe une éventuelle médiation pour libérer les deux anciens soldats.

Le 12 septembre 2024, le ministère des Affaires étrangères colombien a, pour la première fois, communiqué sur le sujet, indiquant avoir demandé à la Russie «des informations sur le statut juridique, la localisation et l’état de santé» de ses ressortissants, y compris d’un troisième détenu dont l’histoire n’avait jusqu’ici jamais été évoquée.

Parallèlement, la Colombie essaie de mettre en place des mesures pour éviter que ces concitoyens soient arrêtés pour «mercenariat». En plus d’un projet de loi, déposé par le ministre de la Défense, Iván Velásquez Gómez, le chef de la diplomatie, Luis Gilberto Murillo, a proposé au Congrès de la République d’approuver la Convention internationale contre le recrutement, l’utilisation, le financement et l’entraînement de mercenaires, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 4 décembre 1989 et à laquelle la Colombie n’avait pas adhéré.

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