Il n’y a pas que la morue du « fish-and-chips » tradition de la gastronomie british qui soit considérée comme une victime collatérale de la guerre à la Russie, les trois économies, la britannique, la française et l’allemande sont en crise profonde économique mais aussi politique (vu le mépris profond de leur électorat) et ne voient pas d’issue, annoncer à grand bruit des coopérations entre ces éclopés qui prétendent néanmoins prendre le relais des Etats-Unis dans la guerre par procuration en Ukraine. Les Russes que l’on dit ignorants de la réalité du monde pour cause de désinformation, visiblement n’ignorent rien du nôtre (note de Danielle Bleitrach, traduction de Marianne Dunlop)
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« Réinitialisation du Brexit », « création d’une OTAN alternative », « préparation d’un traité possible seulement une fois par génération » – cette liste est loin d’être exhaustive des déclarations tapageuses de divers politiciens et experts qui tentent de caractériser le voyage en Europe du nouveau Premier ministre britannique Keir Starmer. Hier, il a rencontré le chancelier allemand Olaf Scholz à Berlin et aujourd’hui, il prévoit un petit-déjeuner de travail avec le président français Emmanuel Macron. En seulement huit semaines à la tête du gouvernement britannique, il s’agit de la cinquième rencontre avec son homologue allemand et de la quatrième avec le président français. Cela montre que M. Starmer souhaite vraiment renforcer la coopération avec l’Europe.
En principe, c’est compréhensible : les travaillistes britanniques ont activement lutté contre le retrait du pays de l’UE lors du référendum sur cette question et ont longtemps empêché sa mise en œuvre pratique. Et lors des élections, ils ont promis d’améliorer les relations avec l’UE, tout en excluant une annulation complète du Brexit, ce dont les conservateurs tentent aujourd’hui de les accuser.
Avant et pendant le voyage, Starmer a utilisé à plusieurs reprises le mot « reset » (réinitialisation) pour évoquer ses relations avec l’Europe. Cependant, il était difficile de comprendre ce que le Britannique entendait exactement par cette définition. Mercredi, lors d’une conférence de presse commune, lui et son homologue allemand se sont montrés très enthousiastes en évoquant un traité bilatéral « ambitieux » entre les deux pays, qui devrait être rédigé dans les six mois et porterait sur la défense, le commerce, l’immigration clandestine, la science, la technologie, les échanges de jeunes, etc.
Cependant, la presse sceptique s’est immédiatement empressée de démolir ces rêveurs. L’éditorial du Daily Telegraph a qualifié le plan de Starmer pour « réinitialiser le Brexit » d’imparfait et a expliqué son irréalité. « Les bonnes relations avec le plus grand pays et la plus grande économie d’Europe sont importantes pour l’Allemagne et le Royaume-Uni, mais l’idée que le chancelier Olaf Scholz soit en mesure de proposer quoi que ce soit de significatif sur des questions qui sont du ressort de l’UE dans son ensemble est fantaisiste. On ne peut que le persuader de demander aux autres États membres d’assouplir certains contrôles aux frontières après le Brexit », observe le journal de manière tout à fait raisonnable, en soulignant qui est le patron en Europe. Et ce n’est certainement pas Scholz ni Starmer.
Dans le même temps, de nombreux journaux anglais rappellent que l’état de l’économie allemande n’est pas meilleur, voire pire, que celui de l’économie britannique, et qu’il n’y a pas d’espoir de miracle économique à attendre de la coopération avec Berlin. Et c’est là que nous arrivons à la question la plus douloureuse pour ces pays. Le fait est que la situation économique et politique en Grande-Bretagne, en Allemagne et en France est déplorable.
La veille de sa visite à M. Scholz, M. Starmer avait annoncé que le pays serait confronté à un budget « douloureux » à l’automne, faisant directement allusion à un plan d’augmentation des impôts (les travaillistes ont catégoriquement nié une telle possibilité lors de la récente campagne électorale). La suppression des aides gouvernementales au chauffage hivernal pour les retraités a déjà été annoncée. Et compte tenu du coût incroyable de ce service, les personnes âgées britanniques seront placées dans une situation caractérisée par l’expression « Eat or heat (Manger ou se chauffer) » en hiver.
La hausse des prix en Grande-Bretagne a atteint un tel niveau que même le traditionnel « fish-and-chips » (morue en pâte à frirpannée avec des frites) a disparu de la catégorie des produits bon marché. Le plus drôle, c’est que les Britanniques expliquent ce phénomène par la guerre en Ukraine. Ils disent qu’« à cause de la guerre », le prix de la morue russe a augmenté ! Les lecteurs des journaux britanniques ne sont tout simplement pas informés que la raison en est l’imposition par Londres de droits de douane sur les produits de la mer russes. Il est vrai que cela a également choqué certains Britanniques, qui ont ainsi appris que, pendant tout ce temps, le plat anglais le plus traditionnel était en fait russe. Aujourd’hui, on les persuade de renoncer à la morue et de se tourner vers le hareng britannique. Ou les saucisses allemandes, puisqu’il est question de resserrer les liens avec l’Allemagne.
Mais en Allemagne même, les problèmes sont encore plus graves. Dimanche, des élections sont prévues dans les Länder de Saxe et de Thuringe, où les partis traditionnels, à en juger par les sondages, sont nettement distancés par l’opposition non systémique. Et cela aussi, tout le monde s’en rend compte, n’est pas de bonne augure.
Et la France développe rapidement sa propre crise interne, causée par le mépris flagrant de Macron pour les résultats des récentes élections, où son parti figurait également parmi les perdants – une fois encore, les électeurs ont exprimé un mécontentement clair à l’égard de la situation du pays. Après que le président français a refusé d’approuver la candidature au poste de premier ministre proposée par le bloc de gauche, qui est arrivé en tête, Macron est logiquement accusé d’usurper le pouvoir.
Ainsi, en substance, les réunions entre Starmer, Macron et Scholz sont une communication entre trois dirigeants dont les gouvernements sont dans un état de crise profonde. Et ces hommes, ne doutant de rien, disent au public comment ils sont « déterminés » à continuer à affronter la Russie et à soutenir l’Ukraine ! De nombreux analystes tentent même de présenter leur réunion comme la préparation d’une « OTAN alternative » pour combattre la Russie seule au cas où Donald Trump gagnerait aux États-Unis et où cette dernière se retirerait de la résolution des problèmes de Kiev.
Dans n’importe quel pays démocratique où règne la liberté d’expression, on pourrait légitimement se demander si les trous que les dirigeants européens trouvent dans leurs budgets sont liés à un trou géant appelé « Ukraine ». M. Starmer, par exemple, a mentionné le trou budgétaire de 22 milliards de livres laissé par les conservateurs lorsqu’il a déclaré que les Britanniques devaient se serrer la ceinture. Alors que Londres se targue d’avoir versé près de 13 milliards à l’Ukraine.
Il serait logique de supposer qu’une grande partie de ce trou dans les budgets de Londres, Berlin et Paris est due à leurs politiques aventureuses sur l’Ukraine, et que l’Europe pourrait résoudre bon nombre de ses problèmes domestiques (y compris les allocations de chauffage hivernal pour les retraités et une morue panée plus abordable) en revenant à la normalité dans ses relations avec la Russie, en abandonnant la rhétorique belliqueuse et les provocations. Mais voilà : les politiciens et les médias traditionnels ont peur de ne serait-ce qu’envisager une telle possibilité. Et ils s’étonnent ensuite que les partis non systémiques qui permettent de soulever la question de cette manière soient en tête des sondages.
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