Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Le président iranien est mort, mais l’impérialisme n’est pas au meilleur de sa forme… par Danielle Bleitrach

Il n’est pas besoin de se référer au contexte où l’assassinat des chefs d’Etat rime avec le bombardements des populations civiles, par des puissances étrangères dont les Etats-Unis sont le chef d’orchestre pour s’interroger sur les conditions d’une telle mort… La propagande occidentale a commencé à saluer comme une victoire cette mort, en l’appellant “le boucher de téhéran”(alors qu’il est interdit de qualifier Netanyoun, sous peine de perdre son emploi), bref l’ambiance habituelle. Il n’empêche quoiqu’ils en disent l’Iran a une constitution et doit la respecter alors voici le calendrier. De surcroit quelques réflexions sur la nature contradictoire du pouuvoir iranien, face auquel l’iimpérialisme aggrave sa propre instabilité et son suicide dans le crime devenu sa seule ressource. Cette analyse, j’en suis consciente rompt avec celles habituelles dans un sens ou dans un autre, mais elle est celle que devront bien faire les communistes pour agir sans ignorer l’adversaire principal : l’impérialisme, un système qui s’est identifié avec des nations qu’il détruit., cela crée des convergences avec des stratégies différentes mais qui prennent l’habitude de se comprendre et de négocier face à l’adversaire et sous la pression de leur peuple.

Mohammad Mokhbér, actuel vice-président du régime iranien, va assurer l'intérim, selon la Constitution. Via REUTERS/Wana/Majid Asgaripour

Mohammad Mokhbér, actuel vice-président du régime iranien, va assurer l’intérim, selon la Constitution. Via REUTERS/Wana/Majid Asgaripour© WANA NEWS AGENCY

La mort du président Ebrahim Raïssi est désormais confirmée : la République islamique d’Iran n’a aujourd’hui plus de président. Or ce dernier est aussi le chef du gouvernement, il détient ainsi tout le pouvoir exécutif. Dès ce lundi matin, le gouvernement iranien a tenu à rassurer, dans un pays aux 87 millions d’habitants, particulièrement divisés ces dernières années : le décès du président Raïssi n’entraînera pas « la moindre perturbation. 

« Le président du peuple iranien, travailleur et infatigable, (…) a sacrifié sa vie pour la nation », a réagi le gouvernement. « Nous assurons à la nation loyale que, avec l’aide de Dieu et le soutien du peuple, il n’y aura pas la moindre perturbation dans l’administration du pays », a-t-il ajouté. Le gouvernement tiendra ce lundi une « réunion d’urgence », a indiqué l’agence officielle Irna, sans donner de détails sur l’horaire et la teneur des discussions.

La Constitution iranienne prévoit la vacance du pouvoir, en son article 131, qui dispose qu’« en cas de décès, de révocation, de démission, d’absence ou de maladie de plus de deux mois du président de la République (…), le premier vice-président de la République prend en charge les pouvoirs et les responsabilités du président » par intérim. Évidemment, le Guide suprême doit donner son accord. Et le texte prévoit qu’une nouvelle élection soit organisée « au plus tard dans un délai de cinquante jours ».

Un vice-président, banquier de formation

Si le Guide de la révolution, actuellement l’ayatollah Ali Khamenei, chef de l’État iranien, donne son accord, c’est donc le premier vice-président de la République d’Iran qui sera chargé d’administrer le pays. Depuis 2021, Mohammad Mokhbér occupe la fonction. Âgé de 68 ans, comme Ebrahim Raïssi, l’ancien vice-gouverneur de la province de Khuzestan dans l’ouest du pays, banquier de formation, était auparavant à la tête du Setad, un fonds d’investissement lié au dirigeant suprême, dont il connaît toutes les arcanes financiers. Il ne s’agit donc pas d’un banquier ordinaire mais celui qui détient les clés de la majeure partie de la politique iranienne et sa part la plus contestable, celle d’un clergé qui joue avec un trésor de guerre suivant des intérêts qui sont parfois le talon d’Achille du pouvoir iranien. Comprendre le fonctionnement du clergé chiite iranien c’est se confronter aux contradictions de l’IRAN. C’est un clergé qui est à la fois lié à des formes démocratiques et à un fonctionnement occulte qui provoque autant sinon plus que le “conservatisme” des mœurs, la protestation des forces populaires et des travailleurs. Le tout dans un pays de grande culture avec un fort sentiment national.

De 2010 à 2012, Mokhbér figurait sur la liste européenne des personnes et entités sanctionnées pour leur implication présumée dans des « activités liées au nucléaire ou aux missiles balistiques ». En octobre dernier, le futur président par intérim conduisait une délégation de responsables iraniens qui s’est rendue à Moscou, qui selon l’agence Reuters, aurait accepté de fournir des missiles surface-surface et davantage de drones à l’armée russe.

Paradoxalement la principale force de ce pouvoir religieux réside dans l’intervention manifeste des USA et sans doute Israël, le patriotisme iranien qui face à l’ingérence des Etats-Unis, voire le retour du shah honni, crée les conditions de la difficulté d’une transformation réellement démocratique. L’année 2024 a déjà été marquée par deux élections, les élections législatives pour élire les 290 députés, et un vote pour renouveler l’Assemblée des experts, les 88 religieux, élus pour huit ans au suffrage universel direct, chargés de nommer le Guide suprême. L’occasion pour le pouvoir théocratique de confirmer son pouvoir. La population a répondu à ce dilemme par l’abstention : seuls 40 % des votants ont participé. Mais les USA, Israël et les occidentaux participent en fait puissamment et ce dès le début de l’installation des mollahs à ce que se perpétue un tel pouvoir plutôt que le socialisme. Ici comme ailleurs c’est avec la bénédiction de l’occident, voire le rôle actif de Giscard dans l’installation du “guide suprême” pour éviter une insurrection populaire des communistes proches de l’URSS.

Le paradoxe de la situation c’est que l’impérialisme a recréé les lignes forces de son opposition mais ce même impérialisme ici comme ailleurs s’inquiète de la chute des régimes en question en craignant que ce qui leur succède soit pire et que l’on ne puisse les tenir par des intérêts financiers. Mais toujours en proie de ses contradictions avec sa politique de sanction, sa militarisation du dollar, il crée les conditions de l’affaiblissement de ce lien financier quelle que soit l’oligarchie…

Une nouvelle élection en juillet ?

Alors que Raïssi a été élu en 2021, et que le mandat de quatre ans imposait qu’il brigue un renouvellement des urnes en 2025, une nouvelle élection présidentielle devrait avoir lieu début juillet. La Constitution iranienne, en ce même article 131, prévoit cinquante jours durant lesquels un conseil composé du premier vice-président, du président du Parlement et du chef du pouvoir judiciaire organise un scrutin pour remplacer le président défunt.

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