Composition du nouveau gouvernement russe : la Douma pourrait réserver une surprise à Michoustine en ne validant pas un certain nombre de candidatures

Cette analyse du nouveau gouvernement ne tient pas compte de la nouvelle la plus importante de ce remaniement surprise dimanche 12 mai au soir, Poutine a proposé de remplacer son ministre de la Défense Choïgou par Belousov. Mais il est question ici de ce dernier et ce qu’il en est dit éclaire la logique de ce remplacement. Non seulement Choigou était très contesté d’un point de vue militaire mais il paye pour des corruptions au sein de l’armée et on voit ici que c’est un civil, un technocrate et qu’il correspond au renforcement de l’industrie manufacturière au sein du gouvernement, ce qui renforce l’idée d’une économie de guerre et du retournement de tout l’appareil productif face aux “sanctions”. Toutes proportions gardées on peut considérer que c’est le choix de Staline dans l’équipe qui l’entoure, les Beria, les Kaganovitch, dont personne n’a pu mettre en doute la redoutable efficacité, la vraie question est l’idéologie de ce retour à un appareil d’Etat coordonné autour de la guerre mais aussi le renforcement de l’économie et de l’appareil productif. L’idéologie de ceux qui entourent Poutine n’est-elle pas comme celle de la ministre de la culture et celle du ministre de l’éducation, l’anticommunisme et l’antisoviétisme ? Et derrière cette idéologie, le poids de la cinquième colonne des oligarques, c’est en tous les cas comme me le signale Marianne à la lecture des débats sur tous les sites un tollé général : cela suffit ces corrompus… Ce qui selon l’article peut se traduire par des votes négatifs au sein de la Douma. Le président et le premier ministre donnent des orientations qui paraissent justes mais ceux qui sont chargés de les appliquer doivent être virés. (note de Danielle Bleitrach traduction de Marianne Dunlop)

Auteur : Mikhaïl Zoubov

https://svpressa.ru/politic/article/414768/

Le 11 mai à 14h05, Vladimir Poutine a signé un décret sur la nouvelle structure gouvernementale, et à 18h20, la Maison Blanche [russe !] a publié les noms des candidats aux postes de vice-premiers ministres et de ministres du nouveau gouvernement, que Mikhail Mishustin a soumis à l’examen de la Douma d’État. Les députés approuveront les vice-premiers ministres le 13 mai et les ministres le 14 mai.

Poutine n’a pas modifié la structure du gouvernement : Mishustin aura toujours 10 suppléants, dont l’un est le premier. Le nombre de ministres restera également inchangé : 21, dont cinq sont chargés de l’application de la loi, et la Douma n’en discutera pas.

La composition du cabinet proposée par Mishustin a démenti les prédictions de nombreux analystes, qui pensaient que l’ancien nouveau premier ministre n’apporterait que des changements minimes au gouvernement.

En fait, la Douma d’État se verra proposer cinq nouveaux ministres d’un coup. Mais le plus sensationnel a été l’information selon laquelle le premier vice-premier ministre Andrei Beloousov quittait le gouvernement. Denis Manturov deviendra premier vice-premier ministre, s’il est approuvé par la Douma d’État.

Konstantin Smirnov, observateur économique indépendant, était l’un des rares analystes à avoir prédit la démission de Beloousov du gouvernement, ainsi que les promotions de Mantourov et de Dmitry Patrushev, lors d’une conversation avec Svobodnaya Pressa. Nous lui avons demandé d’évaluer les propositions de Mishustin sur la composition du cabinet et de nous dire quelles surprises nous pouvons attendre de la Douma lors de l’approbation des vice-premiers ministres et des ministres.

“SP” : Konstantin Sergeyevich, discutons un peu plus en détail des surprises présentées par Mishustin. Quelles surprises pouvons-nous attendre de la Douma ? Parmi les candidats proposés, quels sont ceux que les députés vont rejeter ?

– Je ne m’attends pas à ce que l’approbation des vice-premiers ministres suscite des sensations. Le principal allergène pour les députés est Anton Siluanov, qui perd le statut de vice-premier ministre et devient ministre superviseur. Par conséquent, tout devrait se dérouler sans problème le 13 mai.

Mais lors de la session plénière du 14 mai, au cours de laquelle les ministres seront discutés, les passions ne manqueront pas de s’enflammer et des désaccords avec certains candidats seront exprimés. Les premiers en lice sont les ministres de la santé, de l’éducation, de l’enseignement et des sciences. Et personnellement, je serai très surpris si Olga Lyubimova est approuvée comme ministre de la Culture.

“SP” : Quelles sont les accusations portées contre elle ?

– C’est clair : à la Galerie Tretiakov, au Musée Pouchkine, apparaissent des expositions étranges, qui ne sont pas typiques des dépositaires des perles du grand art. La galerie Tretiakov a acheté un bâton enveloppé de ruban adhésif à notre prétendu artiste contemporain pour une somme énorme et l’a accroché parmi de bonnes peintures.

Et le directeur du musée n’a été licencié qu’à l’expiration de son contrat. Le ministère de la culture ne met pas ces personnes à la porte, mais attend patiemment la fin du contrat de travail, que l’employé n’exécute pas normalement, mais n’en fait qu’à sa tête.

Le ministère de la culture et le Fonds du cinéma allouent de l’argent à la production de films historiques, mais la manière dont cet argent est dépensé n’est pas toujours claire, et les films sont réalisés avec un accent russophobe. Et ça continue.

Le nouveau film “Maître et Marguerite” a été réalisé par quelqu’un qui est parti en Amérique, beaucoup le traitent de traître, mais 800 millions du budget ont été alloués.

Je pense que Lyubimova ne peut être sauvée que par le fait qu’un seul jour – le 14 mai – sera dévolu à la discussion des seize ministres, et que le 15, la délégation du gouvernement devrait déjà s’envoler pour Pékin avec Poutine.

En raison de la pression du temps, les députés peuvent, comme dans l’émission “Quoi ? Où ? Quand ?” [l’équivalent russe de “Questions pour un champion”, NdT), esquiver la question de la méfiance à l’égard d’un tel ministre.

Sergueï Kravtsov sera certainement attaqué par les communistes et les SR [Russie juste] pour le fait que le ministère de l’éducation ne remettra pas en question l’examen d’État unifié [constitué principalement de QCM, ce qui lui est reproché, NdT], ou ne l’annulera pas. Avec Falkov, ils le critiqueront également pour ses manuels d’histoire. Poutine a pris un décret sur une seule ligne de manuels. Et le ministère de l’éducation et des sciences ne peut pas décider avec l’Académie des sciences comment procéder. Depuis plusieurs années, ils n’ont sorti qu’un seul manuel, ce qui suscite de nombreuses plaintes, mais nous avons besoin d’un manuel pour chaque classe, pour les universités.

Je pense que Kravtsov sera réprimandé mais finalement approuvé. Je ne suis pas sûr pour Falkov.

Le président de la Douma d’État, Viacheslav Volodin, a récemment formulé en quelques mots ses critiques au ministre de la santé Murashko : où sont les 30 000 médecins ? Falkov est également concerné.

En outre, il existe également un “ministre inconnu” du bloc social, qui ne répond pas aux appels des députés. On a parlé de lui lors de l’approbation de Mishustin, mais ils n’ont pas cité son nom. S’ils le voient à la Douma, ils s’en souviendront.

“SP” : Vous aviez prédit la démission de Belousov, pouvez-vous maintenant expliquer la logique qui sous-tend le remplacement du premier vice-premier ministre ?

– On se souvient que lors de l’approbation de Mikhail Mishustin par la Douma d’État, le député Valery Gartung, “au nom des industriels”, a demandé que le vice-premier ministre en charge de l’industrie soit nommé premier vice-premier ministre. Mikhail Mishustin a répondu : “Je consulterai le président”.

En fait, Andrei Belousov et Mikhail Mishustin sont des personnages équivalents. Ils n’ont pas besoin d’être dans le même gouvernement alors qu’il y a tant de postes à renforcer dans d’autres couloirs du pouvoir.

J’ai supposé que Belousov serait nommé à la tête de la Chambre des comptes. L’autre jour, Valentina Matvienko a soumis à Vladimir Poutine une liste de candidats à ce poste. Les noms de trois candidats, parmi lesquels Belousov ne figure pas sur la liste, ont été mis à la disposition des médias pour publication. Mais je n’ai pas vu la liste complète.

En outre, il serait peut-être opportun de rétablir le poste de chef adjoint de l’administration présidentielle (ou un deuxième “premier chef adjoint”), qui superviserait le travail du gouvernement. Ce poste de “premier ministre parallèle” a existé à certaines époques.

Il existe un autre poste, celui de la Banque centrale, qui fait l’objet de discussions depuis longtemps. Aujourd’hui, le conseil d’administration de la Banque de Russie est en fait dirigé par le directeur de la Banque centrale. Si le Conseil est présidé non pas par le directeur de la banque, mais par un autre économiste fort nommé par la Douma d’État (ce qui est tout à fait conforme à l’article 15 de la loi sur la Banque centrale), ce sera à la fois un soutien pour Nabiullina et une occasion d’avoir une discussion avec elle au nom du corps des députés. Les députés ne cessent de formuler des plaintes contre la Banque de Russie, ils pourront les exprimer à leur délégué auprès de la Banque centrale.

“SP” : Il est clair que Belousov ne perdra pas sans emploi, mais le nouveau corps des vice-premiers ministres ne sera-t-il pas moins efficace sans lui ?

– Le Président renforce le rôle des spécialistes de l’industrie manufacturière au sein du gouvernement. Il s’agit à la fois d’une exigence du Conseil des ministres et d’une simple nécessité du moment. La nomination de Manturov au premier poste après celui de premier ministre n’est donc pas surprenante. Il sera responsable de la production de ce qui est nécessaire en temps de guerre et en temps de paix. C’est la chose la plus importante aujourd’hui, et Anton Alikhanov est chargé du ministère de l’industrie et du commerce.

Ce jeune ministre, alors qu’il était le plus jeune gouverneur, a montré dans la région de Kaliningrad comment il était possible de créer de nouvelles entreprises de haute technologie dans différents secteurs : de l’industrie automobile à l’électronique. Les grands espoirs de Mishustin sont associés à cette combinaison : l’expérimenté Manturov et le jeune et énergique Alikhanov.

Quant à la fonction économique qu’exerçait Belousov, Manturov n’en sera pas surchargé, mais Alexandre Novak s’en chargera. Auparavant, il n’était responsable que du complexe énergétique et pétrolier, mais désormais, comme l’a expliqué l’attaché de presse du Premier ministre, Boris Belyakov, des mesures anti-sanctions et des mesures de soutien à l’économie y seront ajoutées. Le ministère du Développement économique dirigé par Reshentikov, que Mishustin propose de conserver, sera subordonné à Novak.

“SP” : Vous aviez prédit la démission du ministre de l’énergie Shulginov, le membre le plus haut placé du gouvernement. Elle a eu lieu, comment évaluez-vous son successeur ?

– Shulginov n’a pas joué un rôle particulier – Novak a personnellement résolu toutes les questions fondamentales, il s’est rendu aux sommets de l’OPEP, etc.

Le nouveau ministre de l’énergie (je ne doute pas qu’il sera approuvé) – le gouverneur par intérim de Kuzbass Sergey Tsivilyov – n’est pas un jeune homme non plus. Et il est peu probable qu’il s’occupe lui aussi des questions liées aux hydrocarbures. En revanche, c’est un grand spécialiste de l’industrie du charbon, de la logistique et des investissements.

Le charbon est condamné à mort en tant que vecteur énergétique, mais il est d’autant plus important d’en vendre le plus possible à la Chine, tant que ce combustible y est demandé.

Tsiviliev, je suppose, relancera la question de la construction de chemins de fer privés pour l’exportation du charbon.

Je pense qu’il s’occupera également du développement des exportations d’hélium, qui est essentiel pour la microélectronique. Actuellement, nous ne produisons que 5 % du marché mondial de ce gaz inerte, mais nous pouvons occuper la première place mondiale. Le gaz naturel des gisements d’Extrême-Orient contient jusqu’à 1 % d’hélium, et l’usine de traitement du gaz de l’Amour, actuellement en construction, est adaptée pour séparer le combustible naturel en méthane pur, hélium pur, éthane (pour les plastiques), propane et butane.

“SP : De l’économie à la finance. Anton Siluanov, comme on peut le comprendre des explications de Belyakov, ne sera plus un maître à part entière de la finance tout en restant ministre. Qui sera désormais le financier en chef ?

– Le vice-Premier ministre Dmitry Grigorenko sera en charge des finances, y compris du ministère des Finances de Siluanov, et il conservera ses fonctions de chef du personnel gouvernemental. En outre, la transformation numérique, l’industrie des technologies de l’information et les communications (qui étaient auparavant supervisées par Dmitry Chernyshenko), ainsi que la politique antimonopole, y compris le Service fédéral antimonopole (FAS), relèveront de sa coordination.

M. Grigorenko est la personne la plus proche de Mishustin au sein du gouvernement. Ce dernier l’a fait entrer au gouvernement et étend progressivement ses pouvoirs. Bien sûr, l’influence de Manturov et de Novak au sein du cabinet est encore plus grande, mais Grigorenko devient également un poids lourd.

“SP” : Vous envisagiez une promotion au poste de vice-premier ministre de Dmitri Patrouchev, en parlant de rajeunissement du sommet du gouvernement, mais finalement la promotion semble formelle : comme il était ministre de l’Agriculture, il continuera à superviser ce secteur.

– Il sera également chargé de l’écologie et de la résolution du problème des déchets – un dossier dont s’occupait Victoria Abramchenko, qui quitte le gouvernement. Les amendes pour les dégâts causés à la nature et la réforme des déchets représentent beaucoup d’argent.

Mais une autre chose est plus importante. La place de M. Patrushev à la tête du ministère de l’agriculture sera occupée par Oksana Lut. Cette belle blonde est une excellente spécialiste qui connaît parfaitement le secteur et les nouvelles approches. En tant que vice-ministre Patrushev, elle a par exemple attiré des physiciens nucléaires pour résoudre les problèmes de production de semences.

Elle connaît tout de l’agriculture, et avec Patrushev, qui gère habilement les flux financiers de l’industrie, elles forment un bon tandem. En sa personne, nous avons un ministre de l’agriculture très fort et très fiable.

“SP” : Sur les cinq nouveaux ministres, nous n’avons pas encore parlé de deux autres.

– L’ancien ministre des transports Vitaly Savelyev a été promu vice-premier ministre, et il est remplacé par le gouverneur de la région de Koursk, Roman Starovoit. Il a été à la tête de Rosavtodor et vice-ministre des transports.

Les transporteurs routiers réclament depuis longtemps leur propre ministre. Ils l’ont désormais. Starovoit s’occupera des routes et des transports motorisés, et Savelyev de tout le reste.

Mikhaïl Degtyaryov passe du poste de gouverneur du kraï de Khabarovsk à celui de ministre des sports.

“SP” : N’est-ce pas une rétrogradation pour lui ?

– Pas dans la situation actuelle. Le ministère des sports est aujourd’hui confronté aux tâches les plus ambitieuses, qui ne sont pas à la portée de tout le monde. Nous devons construire un sport mondial parallèle. Les Jeux olympiques et les championnats du monde, qui sont contrôlés par l’Occident, qui nous est hostile et où nous ne sommes pas autorisés, seront remplacés par les différents jeux des BRICS.

Nous avons besoin d’organisation et de prix importants pour que les athlètes étrangers viennent chez nous pour gagner non seulement des médailles, mais aussi de l’argent. Il faut de la pression, ce que Matytsin n’avait pas. Et Degtyaryov a été proposé pour ce poste par la Douma d’État lorsqu’elle a approuvé Mishustin : Slutsky d’abord, puis Volodin l’ont immédiatement soutenu. Par conséquent, ce ministère sera soutenu par le corps parlementaire.