Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Le refus du seul ministre juif de la déclaration Balfour

Oui l’immense majorité des juifs comme Freud et d’autres ne voulaient pas de la création d’Israël telle que l’a mis en place Balfour. Il est vrai que ce que ne disent pas ceux qui publient ce texte, c’est que l’extermination par les Nazis a changé une partie de la donne et ceux qui se sont réfugiés étaient de pauvres gens en état de choc comme l’était la planète puisque le premier pays à avoir approuvé la création d’Israël était l’URSS. Il n’en demeure pas moins que pour des gens comme moi par exemple, la spécificité juive liant un fort patriotisme (français en l’occurrence) à un sentiment d’appartenance dans le temps et l’espace à l’internationalisme, à l’humanité entière, une liberté sans frontière, est quelque chose qui a été notre manière d’accéder à l’humanité et même au communisme, au socialisme. Mais en ce qui me concerne je n’ai jamais détesté ceux qui avaient fait l’autre choix après l’extermination. Ce que je condamne c’est la manière dont l’extrême-droite israélienne complice de l’impérialisme des Etats-Unis mène au massacre non seulement les Palestiniens, mais tous ceux qui vont accepter le choix de “solutions finales”. Pas plus que je n’ai condamné les “pieds noirs”, je ne condamne ceux qui sont en Israël c’est la storia… Je diffuse le combat des communistes israéliens parce qu’ils ont le courage là où ils sont de vaincre la peur, la haine et nous devons en faire autant là où nous sommes à ne jamais tolérer le fascisme et les haines racistes et de se battre contre sans complaisance au nom de ce que nous sommes contre ce que l’on cherche à faire de nous les complices des fascistes et des antisémites, des racistes. (note de Danielle Bleitrach histoireetsociete)

Publié par: Sheldon Richmanle: 07 décembre, 2023Dans: A La UneACCEUILActualitéActualité AfriqueActualité_AmeriquesActualité_MaghrebActualité_Moyen_OrientGéopolitiqueImprimerEmail

– En 1917, le cabinet britannique comptait un membre juif : Edwin Montagu. Il fut également le seul membre du cabinet à s’opposer à la déclaration Balfour de cette année-là, qui ouvrira la voie, 31 années tumultueuses plus tard, à la création autoproclamée de l’État d’Israël, le soi-disant État juif. Cela montre à quel point la création de l’entité sioniste en Palestine était d’abord un projet colonial. Photo DR

 Au cours de l’année fatidique 1917, le cabinet britannique comptait un membre juif : Edwin Montagu. Il fut également le seul membre du cabinet à s’opposer à la déclaration Balfour de cette année-là, qui ouvrira la voie, 31 années tumultueuses plus tard, à la création autoproclamée de l’État d’Israël, le soi-disant État juif.

Par Sheldon Richman

La déclaration était une brève lettre du ministre britannique des affaires étrangères Arthur Balfour à Lionel Walter Rothschild, l’un des leaders britanniques du projet sioniste, lancé à la fin du XIXe siècle par Theodor Herzl, visant à établir un État juif en Palestine. Balfour écrit :

« Le gouvernement de Sa Majesté voit d’un bon œil l’établissement en Palestine d’un foyer national pour le peuple juif et fera tout son possible pour faciliter la réalisation de cet objectif, étant clairement entendu que rien ne sera fait qui puisse porter atteinte aux droits civils et religieux des communautés non juives existant en Palestine, ou aux droits et au statut politique dont jouissent les juifs dans tout autre pays. » (The Balfour Declaration)

Montagu a répondu au cabinet dans un mémorandum qu’il avait intitulé : « L’antisémitisme du gouvernement actuel » (“The Anti-Semitism of the Present Government). Voici ce qu’on y lit:

« J’ai choisi le titre ci-dessus pour ce mémorandum, non pas dans un sens hostile, non pas du tout comme une querelle avec une opinion antisémite qui peut être défendue par mes collègues, non pas avec le désir de nier que l’antisémitisme peut être soutenu par des hommes rationnels, non pas même dans le but de suggérer que le gouvernement est délibérément antisémite ; mais je souhaite faire connaître mon point de vue selon lequel la politique du gouvernement de Sa Majesté est antisémite et, en conséquence, s’avérera un terrain de ralliement pour les antisémites dans tous les pays du monde.

Ce point de vue est motivé par la réception hier d’une correspondance entre Lord Rothschild et M. Balfour.

La lettre de Lord Rothschild est datée du 18 juillet et la réponse de M. Balfour doit être datée d’août 1917. Je crains que ma protestation n’arrive trop tard, et il se peut que le gouvernement ait été pratiquement engagé lorsque Lord Rothschild a écrit et avant que je ne devienne membre du gouvernement, car il y a manifestement eu une correspondance ou une conversation avant cette lettre. Mais j’estime qu’en tant que seul ministre juif du gouvernement, je peux être autorisé par mes collègues à exprimer des points de vue qui me sont peut-être propres, mais auxquels je tiens beaucoup et que je dois demander la permission d’exprimer lorsque l’occasion se présentera.

Je crois fermement que cette guerre [la Première Guerre mondiale] a porté un coup fatal à l’internationalisme et qu’elle a été l’occasion d’un renouveau du sens de la nationalité qui se relâchait, car non seulement la plupart des hommes d’État de la plupart des pays ont tacitement convenu que la redistribution des territoires résultant de la guerre devait se faire plus ou moins sur des bases nationales, mais nous avons appris à nous rendre compte que notre pays défend des principes, des objectifs, une civilisation qu’aucun autre pays ne défend dans la même mesure, et qu’à l’avenir, quel qu’ait pu être le cas dans le passé, nous devrons vivre et nous battre en paix et en guerre pour ces objectifs et ces aspirations, et équiper et réglementer nos vies et nos industries de manière à être prêts à tout moment et si jamais nous sommes mis au défi. Pour prendre un exemple, la science de l’économie politique, qui dans sa pureté ne connaît pas le nationalisme, sera dorénavant tempérée et considérée à la lumière de ce besoin national de défense et de sécurité. La guerre a en effet justifié le patriotisme en tant que motif principal de la pensée politique.

C’est dans cette atmosphère que le gouvernement propose d’approuver la formation d’une nouvelle nation avec un nouveau foyer en Palestine. Cette nation sera vraisemblablement formée de Russes juifs, d’Anglais juifs, de Roumains juifs, de Bulgares juifs et de citoyens juifs de toutes les nations – survivants ou parents de ceux qui ont combattu ou donné leur vie pour les différents pays que j’ai mentionnés, à un moment où les trois années qu’ils ont vécues ont uni leur vision et leur pensée plus étroitement que jamais avec les pays dont ils sont citoyens.

Le sionisme m’a toujours semblé être un credo politique malicieux, insoutenable pour tout citoyen patriote du Royaume-Uni. Si un Anglais juif pose ses yeux sur le Mont des Oliviers et aspire au jour où il secouera la terre britannique de ses chaussures et retournera à ses activités agricoles en Palestine, il m’a toujours semblé reconnaître des objectifs incompatibles avec la citoyenneté britannique et admettre qu’il n’est pas apte à participer à la vie publique en Grande-Bretagne, ni à être traité comme un Anglais. J’ai toujours compris que ceux qui se sont laissés aller à ce credo étaient en grande partie animés par les restrictions et le refus de liberté imposés aux Juifs en Russie. Mais au moment même où ces Juifs ont été reconnus comme des Russes juifs et ont bénéficié de toutes les libertés, il semble inconcevable que le sionisme soit officiellement reconnu par le gouvernement britannique et que M. Balfour soit autorisé à dire que la Palestine doit être reconstituée en tant que « foyer national du peuple juif ». Je ne sais pas ce que cela implique, mais je suppose que cela signifie que les Mahométans et les Chrétiens doivent laisser la place aux Juifs, que les Juifs doivent être placés dans toutes les positions de préférence et doivent être associés de manière particulière à la Palestine, de la même manière que l’Angleterre l’est avec les Anglais ou la France avec les Français, que les Turcs et autres Mahométans en Palestine seront considérés comme des étrangers, de la même manière que les Juifs seront dorénavant traités comme des étrangers dans tous les pays, sauf la Palestine. Peut-être aussi que la citoyenneté ne sera accordée qu’à l’issue d’un test religieux.

– Portrait d’Edwin Montagu et extrait de sa lettre écrite à lord Rothschild, le 2 novembre 1917. (British Library/Rue des Archives-Photo12)

Je pose avec insistance quatre principes :

  1. J’affirme qu’il n’existe pas de nation juive. Les membres de ma famille, par exemple, qui vivent dans ce pays depuis des générations, n’ont aucune sorte de communauté de vue ou de désir avec une famille juive d’un autre pays, si ce n’est qu’ils professent plus ou moins la même religion. Il n’est pas plus vrai de dire qu’un Anglais juif et un Maure juif sont de la même nation que de dire qu’un Anglais chrétien et un Français chrétien sont de la même nation : de la même race, peut-être, à travers les siècles – à travers les siècles de l’histoire d’une race particulièrement adaptable. Le Premier ministre et M. Briand sont, je suppose, apparentés à travers les âges, l’un en tant que Gallois et l’autre en tant que Breton, mais ils n’appartiennent certainement pas à la même nation.
  1. Quand on dira aux Juifs que la Palestine est leur foyer national, chaque pays voudra immédiatement se débarrasser de ses citoyens juifs, et vous trouverez en Palestine une population qui chassera ses habitants actuels, qui prendra tout ce qu’il y a de mieux dans le pays, qui viendra de tous les coins du globe, qui parlera toutes les langues de la terre, et qui sera incapable de communiquer entre elle autrement que par l’intermédiaire d’un interprète. J’ai toujours compris que c’était la conséquence de la construction de la Tour de Babel, si tant est qu’elle ait jamais été construite, et je ne suis certainement pas en désaccord avec l’opinion, communément partagée, comme je l’ai toujours compris, par les Juifs avant que le sionisme ne soit inventé, selon laquelle le retour des Juifs pour former une nation dans le pays d’où ils ont été dispersés nécessiterait une direction divine. Je n’ai jamais entendu dire, même par leurs plus fervents admirateurs, que M. Balfour ou Lord Rothschild s’avéreraient être le Messie. Je prétends que la vie que les Juifs britanniques ont menée, les objectifs qu’ils se sont fixés, le rôle qu’ils ont joué dans notre vie publique et nos institutions publiques, leur donnent le droit d’être considérés, non pas comme des Juifs britanniques, mais comme des Britanniques juifs. Je serais prêt à priver tous les sionistes de leur droit de vote. Je serais presque tenté de proscrire l’organisation sioniste comme étant illégale et contraire à l’intérêt national. Mais je demanderais à un gouvernement britannique suffisamment de tolérance pour refuser une conclusion qui fait de tous leurs concitoyens juifs des étrangers par implication, sinon immédiatement par la loi.
  1. Je nie que la Palestine soit aujourd’hui associée aux Juifs ou qu’elle puisse être considérée comme un endroit où ils pourraient vivre. Les dix commandements ont été remis aux Juifs sur le Sinaï. Il est tout à fait vrai que la Palestine joue un rôle important dans l’histoire juive, mais il en va de même dans l’histoire mahométane moderne et, après l’époque des Juifs, elle joue certainement un rôle plus important que n’importe quel autre pays dans l’histoire chrétienne. Le Temple était peut-être en Palestine, mais le Sermon sur la Montagne et la Crucifixion l’étaient aussi. Je ne refuserais pas aux Juifs de Palestine l’égalité des droits à la colonisation avec ceux qui professent d’autres religions, mais un test religieux de citoyenneté me semble être le seul admis par ceux qui adoptent une vision bigote et étroite d’une époque particulière de l’histoire de la Palestine, et revendiquent pour les Juifs une position à laquelle ils n’ont pas droit. Si ma mémoire est bonne, il y a trois fois plus de Juifs dans le monde qu’il ne serait possible d’en faire entrer en Palestine si l’on en chassait toute la population qui s’y trouve encore aujourd’hui. Par conséquent, un tiers seulement reviendra au maximum, et qu’adviendra-t-il du reste ?
  • Je comprends aisément que les rédacteurs du Morning Post et du New Witness soient des sionistes et je ne suis pas du tout surpris que les non-Juifs d’Angleterre puissent se réjouir de cette politique. J’ai toujours reconnu l’impopularité, bien plus grande que certains ne le pensent, de ma communauté. Nous avons obtenu une part bien plus importante des biens et des opportunités de ce pays que ce à quoi nous avons numériquement droit. Dans l’ensemble, nous atteignons la maturité plus tôt et, par conséquent, nous sommes en concurrence déloyale avec les personnes de notre âge. Beaucoup d’entre nous ont été exclusifs dans leurs amitiés et intolérants dans leur attitude, et je peux facilement comprendre que beaucoup de non-Juifs en Angleterre veuillent se débarrasser de nous. Mais de même qu’il n’y a pas de communauté de pensée et de mode de vie parmi les Anglais chrétiens, il n’y en a pas non plus parmi les Anglais juifs. De plus en plus, nous sommes éduqués dans les écoles publiques et les universités, et nous prenons part à la politique, à l’armée, à la fonction publique de notre pays. Et je suis heureux de penser que les préjugés contre les mariages mixtes sont en train de disparaître. Mais lorsque le Juif a un foyer national, il s’ensuit que l’élan visant à nous priver des droits de la citoyenneté britannique doit être considérablement accru. La Palestine deviendra le ghetto du monde. Pourquoi le Russe devrait-il accorder au Juif des droits égaux ? Son foyer national est la Palestine. Pourquoi Lord Rothschild attache-t-il tant d’importance à la différence entre les Juifs britanniques et les Juifs étrangers ? Tous les Juifs seront des Juifs étrangers, habitants du grand pays de Palestine. Je ne sais pas comment sera choisi l’heureux tiers, mais le Juif aura le choix, quel que soit le pays auquel il appartient, quel que soit le pays qu’il aime, quel que soit le pays dont il se considère comme partie intégrante, entre aller vivre avec des gens qui lui sont étrangers, mais auxquels ses compatriotes chrétiens lui ont dit qu’il devait appartenir, et rester comme un hôte indésirable dans le pays auquel il croyait appartenir.
  • Je ne suis pas surpris que le gouvernement prenne cette mesure après la formation d’un régiment juif, et j’attends d’apprendre que mon frère, qui a été blessé dans la division navale, ou mon neveu, qui est dans les Grenadier Guards, sera contraint par l’opinion publique ou par les règlements de l’armée de devenir officier dans un régiment qui sera principalement composé de personnes qui ne comprendront pas la seule langue qu’il parle – l’anglais. Je comprends très bien que lorsqu’il a été décidé, à juste titre, d’obliger les Juifs étrangers de ce pays à servir dans l’armée, il a été difficile de les placer dans des régiments britanniques en raison des difficultés linguistiques, mais c’était parce qu’ils étaient étrangers et non parce qu’ils étaient juifs, et une Légion étrangère me semble avoir été la bonne chose à faire.

Une Légion juive rend plus difficile la position des Juifs dans les autres régiments et impose une nationalité à des gens qui n’ont rien en commun.

J’ai le sentiment que l’on demande au gouvernement d’être l’instrument de la réalisation des souhaits d’une organisation sioniste largement dirigée, d’après mes informations, en tout cas dans le passé, par des hommes d’origine ou de naissance ennemie, et qui, par ce moyen, ont porté un coup sévère aux libertés, à la position et aux possibilités de service de leurs compatriotes juifs. Je dirais à Lord Rothschild que le gouvernement est prêt à faire tout ce qui est en son pouvoir pour obtenir pour les Juifs de Palestine une liberté totale d’installation et de vie sur un pied d’égalité avec les habitants de ce pays qui professent d’autres croyances religieuses. Je demande au gouvernement de ne pas aller plus loin.

E.S.M., 23 août 1917

Sheldon Richman est le rédacteur en chef de l’Institut libertaire et un rédacteur collaborateur d’Antiwar.com. Il a été rédacteur en chef du Cato Institute et de l’Institute for Humane Studies, rédacteur en chef de The Freeman, publié par la Foundation for Economic Education, et vice-président de la Future of Freedom Foundation. Ses derniers ouvrages sont Coming to Palestine et What Social Animals Owe to Each Other.

Par Sheldon Richman

Publié le 5 décembre 2023

Traduit par Brahim Madaci

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1 Commentaire

  • Philippe, le belge
    Philippe, le belge

    Texte très intéressant et visionnaire! Je me demande pourquoi tu l’as mis en rubrique cinéma et pas en fondamental!

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