Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Le dénominateur commun à l’Ukraine et Gaza : Joe Biden

29 NOVEMBRE 2023

C’est peu dire qu’aux USA, dans les rangs républicains c’est connu, mais aussi et surtout dans ceux des démocrates, monte la colère contre le bellicisme de l’actuelle administration américaine. Ce qui se passe à Gaza est en train de nourrir le mouvement pacifiste en faveur de l’arrêt de l’envoi des armes en Ukraine et l’exigence de négociations. (note et traduction de Danielle Bleitrach)

PAR L. MICHAEL HAGERFacebook (en anglais seulementGazouillerSur RedditMessagerie électronique

Source de la photographie : Daniel Capilla – CC BY-SA 4.0

Et pourtant, l’Ukraine

La campagne de représailles menée par Israël pendant sept semaines pour le massacre du 7 octobre a tué des milliers de femmes et d’enfants palestiniens à Gaza. Elle a également détourné l’attention du monde de l’Ukraine, où la guerre des tranchées, qui dure depuis 22 mois, s’enlise dans une impasse sans fin en vue. Le dénominateur commun entre les deux guerres est le président Joe Biden, qui attise les deux conflits avec des armes offensives financées par les contribuables.

Maintenant que la guerre d’Israël présente une revendication concurrente pour le soutien militaire des États-Unis, l’Amérique sera-t-elle en mesure de soutenir les livraisons d’armes à l’Ukraine pendant le « temps qu’il faudra » promis ? Comment Biden peut-il satisfaire à la fois Zelensky et Netanyahu alors que les deux conflits pourraient durer encore de nombreux mois, voire des années ? Le nombre croissant de victimes dans les deux conflits appelle à un cessez-le-feu, tant en Israël qu’en Ukraine.

Lorsque Poutine a envoyé ses chars vers Kiev en février 2022, l’Ukraine était confrontée à une menace existentielle. L’aide en armement des États-Unis et de l’OTAN à l’Ukraine a soutenu l’autodéfense justifiée pour empêcher une prise de pouvoir par le gouvernement russe. Cette défense a réussi.

Lorsque la Russie a déplacé le champ de bataille vers les régions frontalières du sud et de l’est de l’Ukraine, le conflit est passé d’une guerre de survie nationale à une bataille continue pour un territoire longtemps disputé. Dans les régions contestées, les langues et les allégeances nationales sont mélangées. Cette « deuxième guerre » a porté à plus de 70 000 le nombre de morts de guerre ukrainiens (au 31 août). Un récent article du New York Times a fait état d’une augmentation des pertes ukrainiennes. Est-il moralement juste pour les États-Unis de continuer à mener une guerre par procuration contre la Russie de Poutine alors que ce sont les soldats ukrainiens qui meurent ?

Seul le président Zelensky décidera quand accepter la médiation d’un cessez-le-feu, première étape vers la négociation d’un accord de paix à long terme. À ce jour, cependant, il ne semble pas disposé à modifier ses principaux objectifs de guerre, à savoir l’expulsion des troupes russes des territoires contestés et la récupération de la Crimée. La fin du flux d’armes et de munitions pourrait inciter le dirigeant ukrainien à accepter qu’une bataille de David contre Goliath est impossible à gagner avec le temps.

Il est peu probable (et peut-être politiquement incapable) que Zelensky arrête les combats tant que les États-Unis et d’autres continuent de lui fournir les armes et les balles dont ses troupes ont désespérément besoin. La dépendance continue à l’égard de l’artillerie à longue portée et l’épuisement rapide des stocks de missiles l’ont forcé à collecter des fonds à plusieurs reprises pour des armes plus nombreuses (et plus sophistiquées). Combien de temps les amis de l’Ukraine vont-ils continuer à fournir des armes ?

Une coalition internationale pour la paix (300 personnes de 32 pays) s’est réunie à Vienne en juin dernier. Elle a appelé à un cessez-le-feu, à des négociations et à des journées d’actions internationales. Au fur et à mesure que le mouvement mondial pour la paix gagnera du soutien, il sera plus difficile pour les dirigeants occidentaux de maintenir le soutien public nécessaire au financement des armes ukrainiennes.

Il est temps de remettre en question la sagesse conventionnelle de notre politique d’approvisionnement en armes. La démocratie est peut-être menacée en Ukraine, mais pas plus que dans l’Amérique d’aujourd’hui et dans d’autres endroits (y compris Israël). Jusqu’à présent, le seul gagnant de la guerre en Ukraine est le complexe militaro-industriel, qui récolte désormais des milliards grâce aux contrats de défense.

Le directeur de la CIA, William Burns, et d’autres experts de la Russie ont averti que Poutine pourrait recourir au déploiement de missiles nucléaires s’il commençait à se sentir menacé, en particulier en Crimée. Si l’on se souvient de l’humiliation infligée par l’Allemagne en 1919, il semble imprudent de diaboliser toute une nation pour les actes maléfiques de son dirigeant.

Alors que la Russie et l’Ukraine sont à court d’armes, Biden pourrait déjà se targuer d’avoir réussi à dégrader l’armée russe. Le moment est peut-être venu pour lui de lancer un effort diplomatique mondial pour mettre fin à la guerre. La Russie aurait manifesté son intérêt pour un cessez-le-feu négocié en tant que prélude à des pourparlers de paix à long terme. La Turquie et l’ONU ont réussi à négocier des accords céréaliers avec la Russie pendant la guerre. Aujourd’hui, la Chine et d’autres pays des BRICS ont le pouvoir de faire pression sur la Russie pour qu’elle retire ses troupes d’au moins certaines des zones qu’elle détient.

En tant qu’investisseur majeur dans la guerre en Ukraine, les États-Unis devraient encourager Zelensky à renoncer à ses objectifs de guerre maximalistes. Ni l’Ukraine ni la Russie n’ont grand-chose à gagner de victoires territoriales, car la plupart des terres en conflit seront inhabitables pendant des générations en raison de l’omniprésence des mines terrestres et des bombes à sous-munitions.

L’Amérique devrait cesser de financer la guerre en Ukraine. Au contraire, elle devrait aider les populations qui souffrent en leur fournissant davantage d’aide humanitaire et économique. Elle devrait appeler à une médiation internationale pour parvenir à un cessez-le-feu et à des pourparlers de paix. Car seule la diplomatie, et non plus de guerre, apportera la paix à l’Ukraine. La même chose pourrait être vraie pour Israël dans son conflit en cours avec les Palestiniens.

L. Michael Hager est cofondateur et ancien directeur général de l’Organisation internationale de droit du développement, à Rome.

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2 Commentaires

  • Vincent
    Vincent

    Cet article me choque car l’inculture de l’auteur n’a d’égale que sa naïveté insondable ! à moins bien entendu qu’il s’agisse d’une mauvaise foi et de mensonges parfaitement assumés.
    “Joe Biden” n’est le dénominateur commun de rien du tout, c’est une coquille vide accessoirement sénile, qui ne décide de rien. Les Démocrates comme les Républicains sont tous tenus par l’AIPAC et le CMI c’est à dire l’État profond, et aucun ne rattrape l’autre. On sait depuis au moins Nixon que l’alternance au pouvoir n’est qu’un jeu de dupes, bon sang !
    On se souviendra que Trump redevable l’AIPAC a tout de même déménagé l’ambassade US à Jérusalem et signé les accords d’Abraham qui sacrifiaient les palestiniens sur l’autel des intérêts US au M.O. Le même Trump, au passage, assassinait aussi Soleimani qui avait qualité de diplomate lors de son déplacement à Bagdad.
    Bref ; l’article enchaine les n’importe quoi :
    “L’aide en armement des États-Unis et de l’OTAN à l’Ukraine a soutenu l’autodéfense justifiée pour empêcher une prise de pouvoir par le gouvernement russe.” Mais bien sûr : Poutine n’a-t-il pas clairement indiqué que la prise de Kiev était son premier objectif ?!
    “70 000 morts ukrainiens au 31 août” Diantre : j’ignorais que la réalité alternative pouvait être si alternative à la réalité !
    “Zelensky décidera quand accepter la médiation d’un cessez le feu.” Mais oui : lui qui décrète l’impossibilité de négociations tant que Poutine dirige la Russie, et lui qui se vautre dans la guerre après les pressions subies par Boris Johnson pour refuser les accords d’Istanbul ;
    “la sagesse conventionnelle de notre politique d’approvisionnement en armes”. Celle-ci est magnifique et comme le Kiri, se passe de commentaires ;
    “Poutine pourrait recourir au déploiement de missiles nucléaires”. Et ceux que les E.U dispersent, par pure philanthropie et amour de notre sécurité, partout en Europe : on en parle ?!
    “La Russie aurait manifesté son intérêt pour un cessez-le-feu négocié en tant que prélude à des pourparlers de paix à long terme.” Non. La Russie sait et dit qu’on ne peut rien négocier avec des gens qui ne respectent aucun texte ou traité international. En l’occurrence les aveux de Merkel et Hollande sur la duperie des accords de Minsk sont suffisamment édifiants. L’OTAN pourrait même profiter d’une cessation des hostilités pour déclarer ipso facto l’intégration de l’Ukraine “en une heure et vingt minutes” comme le disait Biden.
    Avec des gens comme M. Hager pour assurer “la promotion de l’état de droit dans le monde”, je ne suis pas surpris de l’état de quasi destruction complète de ce dernier.

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    • admin5319
      admin5319

      Il n’aura pas échappé à votre sagacité que nous publions ici des textes qui témoignent de l’évolution des opinions du camp “impérialiste” et il est clair qu’il y a évolution ce dont témoigne cet article. Comme d’ailleurs ceux encore plus contstables d’Asia Times. L’article dit en gros, nous avons été d’accord avec une aide à l’Ukraine puisqu’il y avait agression de Poutine (ce qui est déjà un problème)mais trop c’est trop. Mais l’article non seulement a le mérite de souligner ce retournement de tendance mais aussi mettre en évidence le fait que sans le soutien des USA et de l’OTAN la plupart des conflits de la planète s’arrêteraient. On aimerait que la conscience des Français en soit à ce niveau.

      je vous rappelle ce qui vient de se passer aujourd’hui et que relate la presse:

      Le contexte rend ce genre de prise de position tout à fait intéressante: Le jusqu’au boutisme de la déclaration ci-dessous de Dmytro Kuleba à l’OTAN est de plus en plus en porte à faux avec non seulement l’opinion des peuples européens et des USA mais également avec les décideurs. Il l’a faite à la presse en public, ce qui rappelle la manière dont Zelensky avait tenté le même chantage à un autre sommet avec Biden et s’était retouvé isolé. Si l’on en croit même l’aricle publié aujourd’hui avec la traduction de Marianne sur Johnson bouc émissaire on peut imaginer que le choix par un proche de Zelensky de dévoiler les pressions de Johnson (et donc de l’occident mais en utilisant un individu désavoué) sont une manière de semi-chantage, l’ensemble témoigne comme le dit l’article chinois que nous publions par ailleurs, l’OTAN et même l’UE sont une carotte agité devant un régime aux abois…

      Dmytro Kuleba, le ministre des Affaires étrangères de l’Ukraine lors du sommet de l’OTAN d’aujourd’hui a renouvelé son refus de négocier et sa volonté de econquéri tout le territoire y compris la Crimée, il a aussi rappelé que l’Ukraine ne demandait pas un engagement des Américains ou des Européens sur le champ de bataille, mais leur aide pour battre la Russie à savoir du fric massivement et des armes (tout aussi massivement): « Notre accord est très simple, vous nous donnez ce dont nous avons besoin, et nous on s’occupe de se battre. Nous ne vous demandons pas de sacrifier vos vies ». L’Ukraine réclame davantage d’armes et de munitions pour être en mesure de l’emporter sur le champ de bataille où les lignes de front n’ont pratiquement plus bougé depuis des semaines.

      Mais une aide supplémentaire des États-Unis est toujours bloquée au Congrès américain, en raison de réticences de certains élus républicains, et les Européens rechignent – de leur côté – à débourser davantage pour aider Kiev. M. Kuleba s’est toutefois dit confiant sur un feu vert du Congrès et a rappelé l’engagement des Alliés à aider l’Ukraine. « Je n’ai aucune raison de croire que l’Occident manque de volonté politique » pour aider l’Ukraine, a-t-il affirmé, interrogé sur ces blocages, en Europe ou aux États-Unis.

      Défendre l’Europe – sans inclure l’Ukraine – serait une « tâche futile », a également averti le ministre ukrainien, plaidant pour l’entrée de son pays dans l’Alliance ce qui est un voeux pieux. D’ailleurs, sans l’Ukraine, l’Otan se priverait de « l’armée la plus forte et la plus expérimentée sur le champ de bataille », a-t-il expliqué. À ceux qui suggèrent à l’Ukraine d’abandonner des territoires pour obtenir son entrée dans l’Otan et une garantie sur sa sécurité, le ministre ukrainien a opposé une fin de non-recevoir.

      Interrogé sur cette idée, avancée par certains face aux difficultés sur le terrain et dans le soutien militaire à Kiev, M. Kuleba a sèchement rejeté toute hypothèse en ce sens. Ceux qui ont de telles idées, « devraient suggérer à leurs gouvernements d’abandonner leur territoire, d’abandonner leur peuple et, s’ils le font, alors je suis prêt à écouter leurs arguments », a-t-il répondu.

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