S’il y a une urgence, un impératif c’est bien celui de la paix. Quand on mesure à quel point le monde qui agonise au milieu de celui qui est en train de naître a un besoin morbide de guerre et de conflit cela parait absolument évident. En revanche le monde qui nait a besoin de connaissance, de savoirs, d’efforts collectifs et de surmonter tous les antagonismes et les divisions de l’ancien. Nous établissons des calendriers de rencontre qui vont dans ce sens.
C’est vrai à tous les niveaux de la réalité, qu’il s’agisse de géopolitique ou des relations interpersonnelles dans la famille, le voisinage et dans les organisations, nous sommes en train d’aller jusqu’au bout de ce que l’exploitation capitaliste, “l’individualisme”, la concurrence, ont produit d'”anomie”. L’anomie (du grec ἀνομία / anomía, du préfixe ἀ- a- « absence de » et νόμος / nómos « loi, ordre, structure ») est un concept de poïétique(‘étude des processus de création et du rapport de l’auteur à l’œuvre). désignant l’état d’un être ou d’une société qui ne reconnaît plus de règles acceptées par tous, le terme est attaché à la problématique d’un sociologue Émile Durkheim qui l’a développée dans l’étude du suicide et de la division du travail social. « Si l’anomie est un mal, c’est avant tout parce que la société en souffre, ne pouvant se passer, pour vivre, de cohésion et de régularité. Une réglementation morale ou juridique exprime donc essentiellement des besoins sociaux que la société seule peut connaître ». Mais d’autres sociologues, comme l’américain Merton l’ont liée à la crise des années trente avec la dépolitisation de groupes qui n’ont plus les moyens d’atteindre leurs buts, ni même de les définir, avec des attentes informulées qui ne s’expriment que dans la violence.
Il suffit de considérer cette description de “l’anomie” de nos sociétés, pour voir à quel point l’état de cette société ne correspond en rien à ce que les marxistes et les communistes considèrent comme étant une situation révolutionnaire, cet état-là est celui des contrerévolutions, voire de ceux dont le fascisme a besoin pour imposer sa violence armée (1). Mais face à cette situation les marxistes ne se contentent pas de rêver d’un retour à un ordre ancien largement inventé dans son idéalisation, ils cherchent les moyens d’intervenir pour une nécessaire transformation dans le sens du progrès et de la vie.
On voit bien aujourd’hui où ce qui produit l’anomie, l’incapacité à penser et à agir devant l’insupportable, semble s’incarner dans le “terrorisme”, cette violence aveugle d’individus parfois isolés ou manipulés, pour mieux renforcer l’exploitation capitaliste et donc être utilisé pour nous faire accepter les guerres et les restrictions de nos libertés d’association syndicales et politiques. Restreindre notre droit à l’information et au débat public.
Ce qu’on appelle le terrorisme est à la fois une création idéologique de l’impérialisme contre l’URSS comme cela s’est passé en Afghanistan et partout, le prétexte à développement de guerre, de sanctions, de blocus, en priorité contre des civils, et des phénomènes qui reviennent en boomerang sur nos propres sociétés. Le terrorisme apparaît comme fournissant à ceux qui le choisissent comme une fausse identité qui ne recrée pas un collectif politique avec la possibilité d’expression des antagonismes de classe, mais la recherche illusoire du même et la destruction de “l’autre”.
Ce phénomène se retrouve donc à tous les niveaux de nos sociétés et il doit être combattu à tous les niveaux en recréant la politisation au sens le plus fondamental du terme.
Les conflits prolongés par lesquels l’hégémonie occidentale en crise profonde produisent des effets contradictoires que l’on mesure bien qu’il s’agisse de l’Ukraine ou de celui entre Israël et la Palestine, c’est qu’alors que l’impérialisme cherche à les attiser et les utiliser pour renforcer l’unité autour de son pouvoir, ces conflits après une courte période de consensus, y compris en occident, tendent à accroître les divisions à la fois à l’intérieur et entre les États-Unis et l’UE et ébranlent même la neutralité de ceux qui voulaient simplement se tenir à l’écart, il leur faut soit se retirer soit aller jusqu’à un point de danger inconnu tout en tentant de laisser un foyer ouvert de crise avec une répression des voix dissidentes de plus en plus larges.
C’est bien là l’enjeu de ce monde nouveau qui est en train de se construire, et si l’on se contente de dénoncer ce qui ne va pas on a toute chance de le faire sur les bases de cette anomie d’une société en train de mourir.
C’est pour cela que partout il faut une autre démarche et c’est celle que nous tentons de mettre en œuvre dans ce blog mais également dans ce que nous tentons sur le terrain, enfin ceux qui ont compris la nouveauté de la période. Et il y a déjà un changement de perspective quand partout on guette les signes non pas de ce qui détruit, isole, mais au contraire de ce qui est déjà là de constructif. Comme je le signalais récemment : faites-en l’expérience quand vous dites qu’une nous sommes dans une autre civilisation, cela suscite le plus souvent assentiment, mais les solutions qui surgissent alors sont essentiellement locales, familiales, parce qu’il parait n’y avoir pas de prise sur quoi que ce soit d’autre. L’expérience de mobilisations qui paraissent n’avoir servi à rien pèse lourdement, comme ces guerres qui ont été décidées sans la moindre consultation. Ce n’est pas tant du désespoir que du sentiment confus de n’avoir pas la compréhension et les moyens d’agir. C’est pour cela que la bataille pour recréer du collectif doit s’ancrer dans les nécessités de la vie quotidienne mais ne peut pas exclure la formation, la réflexion.
C’est particulièrement vrai en ce qui nous concerne nous communistes qui, je le crois avons un rôle déterminant, dans cette capacité à recréer l’initiative citoyenne: on adhère au syndicat, à des associations pour se défendre, mais on adhère au parti communiste par soif de comprendre et il y a un besoin de formation, de connaissance, de culture, qui fait des militants, les intermédiaires, les médiateurs de cette reconstruction de l’action collective.
Je vous ai parlé de notre cercle des amis de Cuba à Marseille, et de la manière dont il était en train d’évoluer : en ce qui concerne nos buts, il s’avère que la dimension solidarité mais aussi paix s’impose. Ce qui permet aux associations comme France Cuba, d’enfin arrêter le processus de division et de concurrence subie en liaison avec des affrontements politiques qui n’avaient rien à voir avec Cuba.
La photo qui illustre cet article est celle d’une manifestation pour la paix organisée par le PCF le 13 octobre, nous avons pu discuter avec Jeremy Bacchi, secrétaire fédéral du PCF 13 des conditions d’une reconstruction de nos réflexions et actions en privilégiant les buts comme cela a été proposé au récent conseil national du PCF. Il s’agissait de sortir d’un modèle qui était celui de la NUPES avec ses coalitions et divisions, pour que chacun vienne sur ses bases propres enrichir l’action dans des projets collectifs.
Ce jour là, le 13 octobre, je suis venue dire au PCF, dont je demeure “sympathisante”, la nécessité de la paix, mais j’ai affirmé qu’il fallait mieux désigner les responsables de la guerre et pas seulement au nom des Palestiniens, mais au nom du peuple juif qui est condamné par le choix d’une politique qui n’a fort heureusement aucun avenir, pas plus que le blocus de Cuba celui de Gaza ne crée que du malheur, de la souffrance. Il faudra bien que le malheur succombe, le crime est déjà devenu inutile à ceux qui croient prolonger leur règne par ce moyen, il ne peut qu’accélérer la chute. Les communistes devraient en être les premiers conscients mais chacun détient une part de ce savoir, c’est une sorte de puzzle…
D’autres organisations sont prêtes à travailler ensemble. Nous avons ce 19 octobre à la maison des associations, 93 la Canebière, une réunion ouverte qui se donnera les moyens d’approfondir cette réflexion et d’entendre les diverses propositions.
Nous avons une tâche urgente qui doit nous réunir au-delà de toutes nos divergences c’est Cuba qui a besoin de nous, le reste est secondaire et cela commence à s’imposer ce qui est une preuve de la période nouvelle :
Le président Diaz-Canel accuse Washington d’«asphyxier» Cuba
Le président Miguel Diaz-Canel a reconnu les difficultés actuelles sur le plan économique de Cuba, mettant en cause notamment les États-Unis. Le président cubain Miguel Diaz-Canel a reconnu lundi que son pays traverse une « situation très complexe » sur le plan économique depuis la pandémie, accusant les États-Unis d’« asphyxier » l’île pour faire chuter le pouvoir communiste. « Ils nous ont mis dans une situation de pression maximale, d’asphyxie économique pour provoquer la chute de la révolution, pour fracturer l’unité entre les dirigeants et le peuple », a déclaré le chef de l’État lors d’un entretien accordé à la télévision d’État. « Cela se traduit par une persécution financière, un renforcement du blocus, une vaste campagne de subversion » des États-Unis sur les réseaux sociaux « pour discréditer la révolution », a accusé Miguel Diaz-Canel, qualifiant la situation économique et sociale du pays de 11 millions d’habitants de « très complexe ».
Cuba a besoin de nous et nous avons besoin de Cuba… Ce pays exemplaire qui a tant fait pour aider à l’apparition d’un autre monde et qui subit aujourd’hui l’asphyxie dont est capable l’ancien. Il faut que nous ayons conscience de cela et les signes montrent que c’est possible, notre réunion devrait le confirmer.
Une autre piste se dessine…
Qu’il me soit permis de dire que je suis d’autant plus heureuse de cette évolution qu’elle va peut-être me permettre de me consacrer à ce qui constitue l’originalité de ce blog, une réflexion et des initiatives de réflexion théorique, historique, autour de la compréhension de ce monde nouveau. Tout cela est encore confus mais si les associations qui ont Cuba comme point principal d’action daignent s’unir et entamer un travail commun, peut-être cela laissera-t-il la place pour un cercle d’étude proche de ce que réalise ce blog histoire et société, un lieu de rencontre tout entier axé sur la compréhension et les actions autour de ce qui est en train de naître …
Danielle Bleitrach
(1) Marx n’a pas la moindre sympathie pour les manifestations du lumpenprolétariat, même s’il voit dans la prolifération des voyous, un stade de l’accumulation qui engendre ce qu’il appelle les “invalides du capital” , il ne confond jamais leur violence avec celles du capital. Mais dans le même temps il dénonce l’hypocrisie de l’attitude morale des exploiteurs et de leurs “élites”. On retrouve le même refus dans la manière dont il dénonce les “Boxers” cette révolte chinoise qui massacre les Européens. Alors même qu’il voit dans la Chine humiliée, prolétarisée un avenir révolutionnaire comme dans le mir russe.
(1) L’anomie (du grec ἀνομία / anomía, du préfixe ἀ- a- « absence de » et νόμος / nómos « loi, ordre, structure ») est un concept de poïétique désignant l’état d’un être ou d’une société qui ne reconnaît plus de règles acceptées par tous, le terme est attaché à la problématique d’un sociologue, Émile Durkheim, qui l’a développé dans une étude sur le suicide et la division du travail social. « Si l’anomie est un mal, c’est avant tout parce que la société en souffre, ne pouvant se passer, pour vivre, de cohésion et de régularité. Une réglementation morale ou juridique exprime donc essentiellement des besoins sociaux que la société seule peut connaître » Mais d’autres sociologues, comme l’américain Merton l’ont lié à la crise des années trente avec la dépolitisation de groupes qui n’ont plus les moyens d’atteindre leurs buts, ni même de les définir, avec des attentes informulées qui ne s’expriment que dans la violence.
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