Il s’avère que Marianne a été la collègue du professeur d’Arras assassiné, elle me dit de lui ce qu’on lit dans la presse, un homme charmant, un vrai prof faisant son boulot avec conscience, un homme pétri des valeurs de gauche et républicaine. Elle est choquée. De surcroît elle a rencontré le père de l’assassin. En fait comme elle est traductrice assermentée elle a rencontré à Arras la plupart des tchétchènes et elle s’étonnait parce que le seul “radicalisé” et assez odieux était pour elle un Ingouche (1), un arrogant personnage qui était le père de l’assassin. Ses sentiments dans cette affaire m’a-t-elle dit son assez proche de ce qu’exprime Gilles Questiaux dans cet article. Si on lui avait demandé son avis avant de se lancer dans un soutien à ce personnage, elle aurait dit “Non!” Il est vrai que sous l’influence de bourgeois proches des dames patronnesses y compris le PCF des “Insoumis”, et les services de Manuel Valls alors ministre de l’intérieur, la gauche a défendu y compris des gens qui ne craignaient pas en France comme dans leurs pays de les égorger. Cela va avec un certain aveuglement en géopolitique qui vous fait croire que vous combattez au nom de la liberté et des droits de l’homme alors que vous soutenez de vrais nazis (note de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)
Le passeport Nansen, inventé dans les années 1920 pour protéger les Russes blancs
Les militants d’extrême-gauche sont presque toujours des inconditionnels du droit d’asile qu’ils estiment hors de discussion. Sur cette question, comme sur beaucoup d’autres mettant en cause l’idéologie bourgeoise des droits de l’homme, ils se trompent.
Qui sont les réfugiés politiques qui bénéficient du droit d’asile aujourd’hui en France? sachant que les réfugiés climatiques n’existent pas et que les réfugiés de guerre restent en général près de chez eux, dans l’espoir de pouvoir y retourner ?
Le droit d’asile a été détourné pour servir de justification à l’importation de main d’œuvre corvéable. Sur les dizaines de milliers de demandeurs d’asile annuels, acceptés ou déboutés, très peu peuvent être qualifiés de réfugiés politiques, et ceux qui le sont, sont en général de droite et militent pour imposer dans leur pays d’origine des principes et des politiques que les militants en question ne voudraient pas voir appliquer ici, à les entendre.
Les quelques réfugiés légitimes parvenus jusqu’en Occident à partir de zones de guerre (Irak, Syrie, Afghanistan, et, en partie, les Ukrainiens) n’auraient pas eu à fuir leur pays si nous-mêmes n’y avions pas provoqué la guerre par nos ingérences impérialistes – et que les militants en question n’ont pas su empêcher, ou qu’ils ont même approuvé. Les guerres sponsorisées par l’Occident et la Turquie en Libye et en Syrie en livrant ces pays et les zones maritimes qui les bordent aux terroristes et à tous les trafics d’êtres humains sont à l’origine directe des milliers de morts annuels en Méditerranée, au large de l’Italie, de l’Espagne et de la Grèce.
En ce qui concerne les réfugiés politiques proprement dits, cela fait bien longtemps qu’il n’y a plus guère de réfugiés de gauche. Les derniers en date sont les militants persécutés en Amérique latine des années 1970 ; la persécution politique n’a certainement pas cessé depuis ce temps-là mais le flux s’est mystérieusement tari d’un coup dans les années 1980. Et les réfugiés italiens des années de plomb, dont le statut vient d’être une nouvelle fois brutalement remis en question. Et, dans une certaine mesure, les Kurdes.
Les réfugiés politiques ou soi-disant tels au XXIème siècle sont majoritairement des individus qui à l’instar des parents de l’assassin de Conflans ont quitté leur pays d’origine où ils se sont rendu indésirables parce qu’ils relèvent du terrorisme, du fascisme, du fondamentalisme religieux, du séparatisme ethnique ou de l’ultralibéralisme – sans parler de la corruption. Soutenir de tels réfugiés est en fait un acte d’hostilité envers leurs pays d’origine (Cuba, Russie, Chine, Venezuela, Syrie, etc.), et les raisons humanitaires qui sont invoquées ne sont que des prétextes à l’intention de ceux qui veulent bien se laisser tromper.
Depuis la fin des années 1980, ceux qui combattent le capitalisme ne bénéficient jamais de ce statut, et il est remis en cause pour ceux qui l’avaient obtenu auparavant. Même les sociaux démocrates libéraux laïcs algériens l’obtenaient difficilement les années 1990. Mais il est vrai que la plupart de ceux qui sollicitent le statut aujourd’hui n’a tout simplement jamais eu aucune activité politique.
Le droit d’asile tel qu’il est pratiqué aujourd’hui est une pure tartufferie. Le monde occidental est rempli de réfugiés du genre des oligarques voleurs russes ou ukrainiens en fuite ou des parasites sociaux vénézuéliens grassement entretenus avec l’argent volé à leur pays par ses gouvernements et ses institutions financières, et les défenseurs des droits de l’homme colombiens, situés sur le spectre politique à peine plus à gauche que le PS français ont été assassinés chaque jour pendant des décennies dans l’indifférence absolue de leurs collègues patentés de ce coté-ci de l’océan.
Il devrait être clair pour les militants en question que défendre le droit d’asile des fascistes, des intégristes, ou simplement des admirateurs inconditionnels du libéralisme est complètement à coté de la plaque (aux États-Unis de tels « réfugiés » iraniens ou tibétains ont participé avec enthousiasme à la tentative de putsch du Capitole de janvier 2021). Cela ne témoigne pas comme le croient ceux qui le font de leur grandeur d’âme, mais de leur narcissisme moral, couplé à une certaine hypocrisie politique : si on veut protéger les séditieux de Hong Kong, c’est qu’au fond on n’a rien à dire contre leur désir de capitalisme occidentalisé.
Qu’on ne vienne pas dire avec un air outragé qu’on défend dans le cas de ces pseudo-réfugiés « la liberté » en soi. La liberté politique en termes absolus n’existe pas. La liberté des fascistes, et des agents de l’impérialisme, c’est notre mort, et notre liberté, c’est les fascistes, les pro-impérialistes, et surtout les patrons qui les financent, en prison !
Et quant à la démocratie, il faut avoir un sacré culot pour prétendre qu’on vit ici en démocratie, et que c’est la démocratie que les militants stipendiés des “révolutions de couleurs” que nos gouvernements protègent, à l’instar du notoire Navalny, ou du clown Zelensky, cherchent à instaurer dans leurs pays !
Rosa Luxembourg que les militants en question admirent beaucoup sans l’avoir lu avait dit « la liberté c’est la liberté de ceux qui ne pensent pas comme moi » et on la félicite grandement dans la sphère libérale (et libertaire) pour ces bons principes qui finalement ne lui ont pas porté bonheur, ni au peuple allemand,, puisque ceux qui ne pensaient pas comme elle l’ont tuée.
GQ, 20 mai 2021, revu le 3 septembre 2023
PS Si Rosa Luxembourg avait été moins tolérante et si elle avait conduit la dictature du prolétariat au pouvoir en Allemagne dans les années 1920, la bohème berlinoise aurait sans doute été moins libre de s’envoyer en l’air, mais le IIIème Reich n’aurait pas pris la suite de la République de Weimar en 1933, et les futurs nazis auraient été rééduqués. Sauf bien sûr ceux qui se seraient réfugiés à l’étranger qui auraient bénéficié comme leurs congénères russes du passeport Nansen (qui fut par contre refusé dans la réalité historique aux juifs allemands).
PPS :
Quelques centaines de réfugiés afghans ont été accueilli en France en 2021 à la suite de l’effondrement de l’État fantoche qui était maintenu à bout de bras par l’occupation occidentale. Ils étaient manifestement en grand danger dans leur pays, mais l’arbre ne doit pas cacher la forêt ! Le problème des réfugiés ne doit pas cacher la question essentielle : les armées françaises n’ont strictement aucun droit de mener des opérations en Afrique ou en Asie, loin des frontières de la France, au nom d’un peuple français qui n’est jamais consulté sur la question.
(1) Ingouches et Tchétchènes sont deux peuples très proches, descendant de tribus communes des montagnes du Caucase. Ils se convertissent à l’islam au XVIe siècle. Au XVIIIe les tribus se séparent en deux groupes : les Tchétchènes (nahche) et les Ingouches (galgay). En 1810 la Russie impose son autorité aux Ingouches. Les essais de restauration d’un christianisme russe se révèlent infructueux. En retour, on assiste à une islamisation, principalement contre la présence russe, qui fédère certains peuples caucasiens (1870-1920), avec un polythéisme archaïque. La Russie en 1924 réunit Tchétchènes et Ingouches dans la République socialiste soviétique autonome de Tchétchénie-Ingouchie et cela se passe bien jusqu’à la IIe guerre mondiale,, les Ingouches et une partie des Tchétchènes, comme les Tatars de Crimée sont accusés d’avoir collaboré avec les nazis et la population ingouche, moitié pour les punir, moitié pour les mettre à l’abri de la vengeance des voisins, est déplacée de Ciscaucasie au Kazakhstan et en Sibérie. le 9e département du MGB désigna les Ingouches et Tchétchènes comme étant le peuple le plus « incorrigible qui soit » contaminé par l’oisiveté, le banditisme et le fanatisme panislamique. Se fondant sur le rapport du MGB qui concluait qu’« une seconde déportation ne résoudrait pas le problème », les hauts responsables soviétiques jugèrent « inappropriée et inutile » la proposition en juin 1952 du ministère de l’Intérieur kazakh de « déporter les Ciscaucasiens encore plus loin, vers les zones les plus isolées du Kazakhstan » et tout parut se calmer. Une partie des Ingouches retourna sous Gorbatchev, comme les tatars de Crimée déplacés pour les mêmes raisons vers leur pays d’origine, mais comme les Ossètes (le peuple d’origine de Staline) était installé là à partir de la montée des nationalismes post soviétiques ils furent un ferment des conflits en Ossétie, Géorgie.
Vues : 204