Trois faits apparemment sans liens et qui disent une situation de plus en plus inquiétante:
1- Le premier fait : le limogeage du commandant supérieur en charge de Bakhmut et la décision de “tenir” cet endroit dont on ne cesse de nous dire qu’il n’a pas d’intérêt militaire ?
L’Ukraine a limogé l’un de ses plus importants commandants, sans la moindre explication. Le 26 février, Zelensky a limogé le commandant militaire supérieur qui était en grande partie responsable de la gestion de la situation actuelle dans les Oblasts de l’Est de l’Ukraine. “Eduard Mykhailovych MOSKALYOV a été démis de ses fonctions de commandant des forces conjointes”, selon une traduction d’Anastasia Pechenyuk de Ukraine Today. Ce limogeage d’un des plus hauts commandants militaires en charge de fait de Bakhmut et qui était considéré jusque là comme un héros et qui avait été nommé en mars 2022 s’est fait en une ligne sans la moindre explication. Moskalyov était responsable de nombreuses unités de combat “engagées dans les batailles dans la région du Donbass”, une zone qui inclut Bakhmut. “Le licenciement de Moskalyov est le dernier en date d’une série de changements au sein de l’armée ukrainienne dans le cadre d’un scandale de corruption qui a failli évincer le ministre de la Défense Oleksii Reznikov”, a écrit Lauren Sforza, le journaliste de the Hill, mais il n’est même pas sûr qu’il s’agisse de cela. Ce qui frappe c’est l’opacité de ces décisions et de leurs causes, le fait que cela puisse intervenir sans lien avec la défaite à Bakhmut et sans que les Etats-Unis n’aient participé à la décision. Pourtant cela aurait dû susciter la curiosité et les commentaires mais décidément nos journalistes sont peu curieux, beaucoup moins que les journalistes des USA ou d’Allemagne…
Quelle relation faut-il envisager entre ce limogeage et la décision de “tenir” à Bakhmut proclamée par Zelensky ? Si on interprète ce choix chez les soutiens occidentaux du régime de Kiev comme la nécessité de continuer à épuiser l’armée russe, la logique montre que c’est l’Ukraine qui s’épuise en hommes comme en matériel, dans une certaine mesure le choix parait non seulement de sacrifier les ukrainiens à Bakhmut, mais de sacrifier l’Ukraine elle-même. La seule justification qu’ait donnée Zelensky va dans ce sens : si on laisse Bakhmut, les Russes iront plus loin.
2) Sacrifier Bakhmut mais aussi sacrifier l’Ukraine parce que dans le cadre des futures élections aux Etats-Unis, des pressions s’exercent en faveur d’une extension du conflit …
Dans une interview publiée ce mardi 7 mars par CNN, le président ukrainien a alerté sur les conséquences d’une défaite de ses troupes à Bakhmout. Une victoire remobiliserait les troupes russes, qui “pourraient aller plus loin”, a analysé Volodymyr Zelensky. Donc il ne s’agit pas seulement d’une victoire “symbolique” que l’on aurait d’ailleurs rendue symbolique à force de s’acharner à “tenir, coûte que coûte”. Et il en côute énormément aux Russes mais surtout aux ukrainiens. Et d’ailleurs il dit bien qu’il s’agit d’un verrou “une défaite de l’Ukraine serait synonyme, dans les prochains jours, de la prise d’autres localités par l’armée russe.” “Nous comprenons qu’après Bakhmout, ils pourraient aller plus loin”, affirme Volodymyr Zelensky, citant Kramatorsk, une quarantaine de kilomètres au Nord-Ouest, et Sloviansk, dans la même zone. “Ce serait une ‘route ouverte’ pour les Russes après Bakhmout vers d’autres villes en Ukraine”, martèle Volodymyr Zelensky.
Car après l’enlisement d’une guerre sans fin et l’isolement diplomatique de Moscou, voir le “petit drapeau” russe flotter sur les toits restants de Bakhmout permettrait à Poutine de “mobiliser la société [russe] afin de créer l’idée qu’ils ont une armée puissante”, analyse Zelensky. C’est un peu court, simplement une fois de plus on nous a menti sur ce qui se jouait.
Les Russes eux depuis le début ne disent rien d’autre: “Cette ville est un nœud important (des lignes) de défense des soldats ukrainiens dans le Donbass”, a expliqué Sergueï Choïgou, lors d’une réunion de cadres de son ministère, diffusée à la télévision. Et effectivement la poussée russe pourrait aller jusqu’au Dniepr, ce qui marquerait la fin de l’Ukraine pour bien des observateurs.
Le refus de négocier qui a toujours été du seul fait des Etats-Unis et de leur marionnette dont le premier mouvement tendrai plutôt dans le sens de la négociation mais qui est bien obligé de suivre on l’a vu dès le début de la guerre, par rapport au plan chinois.. Ce refus de négocier, -dans un contexte ou le dirigeant qu’ils manipulent et parfois démettent dans une révolution de palais- ne se comprend de la part de Etats-Unis et de l’OTAN que si le choix est l’extension de la guerre. Dans ce cas, ce choix d’élargissement concerne certes l’Europe vouée à une “ukrainisation” dans la guerre par procuration, mais le même choix est à l’œuvre en Asie centrale, en Asie où les Etats-Unis mobilisent ou tentent de mobiliser non seulement la Corée, le Japon mais aussi les pays de la zone pacifique en créant là aussi une implication de ses alliés de l’OTAN.
La Chine met en garde contre cette manière de choisir l’escalade dans une sorte de fuite en avant liée d’abord aux problèmes intérieurs des Etats-Unis, dans un article que nous publions aujourd’hui, il est question du néo-maccarthysme hystérique des Etats-Unis et celui qui établit ce diagnostic est le ministre des affaires étrangères qui a été jusqu’à une date récente ambassadeur de la Chine aux Etats-Unis.
De nombreuses voix aux États-Unis mêmes, en particulier dans le contexte des futures élections, s’élèvent contre un tel choix. Nous en donnons quelques exemples aujourd’hui.
3) Enfin que faut-il penser des révélations du New York Times relayé par die Welt sur l’implication directe de Kiev dans le sabotage de Nord Stream ?
Voici les faits, il y a eu, et nous avons publié son rapport, l’enquête de Semour Hirsh avec ses prolongements :
Comment l’Amérique a détruit le gazoduc Nord Stream | Histoire et société (histoireetsociete.com)
En septembre de l’année dernière, quatre fuites ont été découvertes dans les gazoducs Nord Stream 1 et 2 de la mer Baltique, qui avaient été construits pour fournir du gaz naturel de la Russie à l’Europe. À la suite de ces fuites, plusieurs responsables occidentaux, dont le président américain Joe Biden, les ont qualifiées d’« acte délibéré de sabotage ». L’Ukraine et la Pologne ont blâmé la Russie pour l’attaque, mais on ne voit pas l’intérêt d’un tel acte et Moscou a accusé l’Occident de mener l’opération. Les sites des explosions sont situés dans les eaux internationales du Danemark et de la Suède, qui sont sensées mener des enquêtes distinctes, ainsi que l’Allemagne.
L’enquête de Semour Hersh mettait en cause directement le gouvernement des Etats-Unis. L’attaque en mer Baltique avait été menée par un groupe de six personnes qui auraient apporté des explosifs sur la scène du crime et les y auraient plantés. La citoyenneté des saboteurs présumés n’est pas claire car ils ont probablement utilisé de faux documents. Ce seraient néanmoins des saboteurs professionnels, non directement dépendant de l’armée officielle des Etats-Unis ce qui aurait nécessité un accord du sénat.
Un “groupe pro-ukrainien” serait à l’origine du sabotage des gazoducs Nord Stream 1 et 2 en mer Baltique, rapporte mardi le New York Times sur la base d’informations consultées par le renseignement américain. Le journal ne détaille pas ce que seraient ces informations auxquelles le renseignement américain a eu accès, ni l’identité de ce “groupe pro-ukrainien”.
Les informations collectées par le renseignement américain suggèrent que les auteurs derrière le sabotage étaient des “adversaires du président russe Vladimir Poutine”, probablement des ressortissants ukrainiens ou russes, selon le New York Times.
A la suite de ces révélations, les enquêteurs allemands ont identifié un bateau qui aurait été utilisé pour saboter les gazoducs russes Nord Stream, suggérant qu’il avait été loué à une société appartenant à des Ukrainiens, selon une enquête conjointe des publications allemandes ARD, Kontraste, SWR et Die Zeit publiée le 7 mars. Les autorités ukrainiennes ont aussitôt nié l’implication présumée de l’Ukraine dans les explosions des oléoducs, qui ont eu lieu en septembre 2022. Comme elles ont nié leur implication dans le sabotage intervenu en Biélorussie. Est-ce que le limogeage correspond à la nécessité de trouver un fusible?
parce que les amértcains cherchent quelqu’un pour porter le chapeau à leur place, ils sont contraints d’encaisser le coup, ils peuvent tout au plus tenter de le dévier. Mais l’inconvénient de la parade c’est qu’elle met en lumière le fait que les Ulrainiens, voir les “dissidents” saboteurs russes sont leur créature, on le savait on a confirmation.
En effet, dans la foulée des révélations allemandes, toujours le 7 mars, le New York Times a rapporté, citant des responsables américains non identifiés qui ont examiné de nouveaux renseignements, qu’un « groupe pro-ukrainien » probablement composé de ressortissants russes et / ou ukrainiens pourrait avoir mené l’attaque contre les gazoducs Nord Stream. Les renseignements suggèrent que le groupe comprenait des opposants à Vladimir Poutine (l’idée du changement de régime est là encore au centre) mais comme le tuyau provient des services secrets américains et Allemands bien sur il n’y a aucune preuve de l’implication d’un gouvernement dans le sabotage. Les explosifs auraient été placés sur les pipelines Nord Stream par des plongeurs expérimentés qui ne travaillaient pas pour l’armée ou les services de renseignement, « mais il est possible que les auteurs aient reçu une formation spécialisée du gouvernement dans le passé », a écrit la publication.
Les sources du NYT ont refusé de divulguer la nature des renseignements, les méthodes pour les obtenir ou tout détail concernant le poids des preuves qu’ils contiennent, ajoutant qu’ils n’avaient pas de conclusions fermes concernant le sabotage des pipelines Nord Stream. Mykhailo Podoliak, conseiller de l’administration présidentielle ukrainienne, a répondu au rapport du New York Times en disant que le pays n’était pas impliqué dans les explosions sur les gazoducs russes et n’avait aucune information sur des agents pro-ukrainiens qui auraient pu le faire.
L’Allemagne et les États-Unis ont appelé à attendre les résultats officiels des enquêtes sur le sabotage de Nord Stream, a rapporté Reuters. « Nous croyons, et le président l’a dit, qu’il s’agit d’un acte de sabotage. Mais nous devons laisser ces enquêtes se terminer, et ce n’est qu’alors que nous devrions examiner quelles actions de suivi pourraient ou non être appropriées », a déclaré le porte-parole de la Maison Blanche, John Kirby.
On mesure bien à quel point il faut à nos médias la foi du charbonnier dans le “vertueux” Zelensky pour non seulement se garder de laisser filtrer la moindre interrogation sur cette série de faits. Ils nous forcent à voir que le régime que nous soutenons en Ukraine a en fait été sciemment placé là par un coup d’Etat. Zelensky élu parce qu’il promettait la paix a choisi de mener une guerre dont le but réel a toujours été de poursuivre les objectifs de faucons des Etats-Unis : le démembrement de la fédération de Russie, et en finir avec Poutine comme s’il s’agissait d’un Saddam Hussein ou d’un Kadhafi, alors qu’il s’agit d’une puissance nucléaire. Au-delà du sacrifice de l’Ukraine, ce qui est désormais à l’œuvre c’est bel et bien l’ukrainisation du continent européen et son implication y compris dans l’élargissement de cette politique des États-Unis à l’attaque de la Chine en prenant Taïwan comme la possibilité d’une ukrainisation de l’Asie.
Danielle Bleitrach
De plus en plus de gens s’aperçoivent y compris en France que l’enjeu n’est pas entre La Russie et l’Ukraine mais bien entre la Russie et l’OTAN, il est évident que l’on ne comprend rien à l’évenementiel si on ne le situe pas dans l’évolution de cette dimension de l’affrontement.
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