Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Que savez-vous du Pérou ? par Javier Luis Heraud Perez Tellería, connaissez-vous ce poète communiste péruvien mort à 21 ans ?

Ce vendredi 20 janvier, les puissances alliées de l’Ukraine se sont réunies à Ramstein, en Allemagne, une des myriades de bases militaires que les Etats-Unis ont dans le monde, pour coordonner leur aide matérielle.  Quand après que la bande de sangsues qui forment l’OTAN se soit réunie, dans sa conférence de presse, le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin et Mark Milley, chef d’état-major américain a osé traiter la Russie en Ukraine d’envahisseur impérial, la planète entière en entendant pareil propos a été secouée d’un rire silencieux. L’Amérique latine en particulier avec ses veines ouvertes, et pas seulement Cuba, le Venezuela, mais toute l’Amérique latine, aujourd’hui au Perou entre autres… Le mépris général pour cette hypocrisie, même s’il y a encore la peur de ce dont est capable l’impérialisme US et ses vassaux dont la France : mort, tortures, hier comme aujourd’hui. Au Pérou, aujourd’hui, le capitalisme le plus sauvage, comme le Covid-19, les plaies d’Egypte s’abattant sur les plus pauvres, ont mis à nu l’état de la gestion publique, incapable de venir en aide aux travailleurs informels, aux populations indigènes rurales, durant les confinements. De même, 300.000 enfants et 70.000 étudiants ont dû se retirer du système scolaire faute d’avoir accès à une connexion internet qui leur permette de suivre les cours à distance. Le gouffre qui sépare les villes et les campagnes et principalement celui entre la capitale Lima (qui concentre 30% de la population) et le reste des régions est aussi important pour comprendre la violence de diverses guérillas, la manière dont ont été réunies les aspirations du monde intellectuel à celles des indiens, réforme agraire et éducation, un rêve interdit. Pedro Catillo le dirigeant destitué avec l’assentiment des Etats-Unis était un leader du syndicalisme enseignant, la révolte gronde dans ce pays si méconnu mais qui ne peut pas croire en notre droit de l’hommisme et en notre vertu occidentale, celle des USA et de nous, peuples vassalisés par notre colonialisme. Oui entre la Russie et nous leur cœur et leur intelligence n’hésite pas.

Connaissez-vous J.M.Arguedas ?

Peut être une image de une personne ou plus, personnes debout et plein air
Así es, lo escribio, J.M.Arguedas : “Al inmenso pueblo de los señores hemos llegado y lo estamos removiendo

Pour tenter de vous faire mesurer le gouffre de civilisation qui existe entre la manière dont l’occident se voit et le regard que l’on jette sur lui, je voudrais vous parler d’intellectuels péruviens dont vous ignorez tout… D’écrivain péruvien vous ne connaissez sans doute que Vargas Llosa, incontestablement un écrivain mais un réactionnaire plus proche de l’Europe que de son pays du moins dans sa dimension indienne, un pays où la scission a été entretenue dans sa population, ce dont est mort un autre écrivain : José Maria Arguedas … Et il y a ce poète péruvien communiste, une des victimes de ce colonialisme, de la forme la plus atroce de la lutte des classes, celle entre les races… les tentatives des intellectuels communistes devenus guerilleros, Javier Luis Heraud Perez Tellería: vous ignorez tout de lui…Il était communiste et il est mort à 21 ans assassiné par la police des complices des USA. Et dites-vous bien que sur ce continent martyrisé, comme sur tous les autres, la masse des victimes est considérable, bien des écrits, des musiques, sont tachés du sang de leurs auteurs assassinés par ceux qui se prétendent des démocraties…

Javier Luis Heraud Perez Tellería, connaissez-vous ce poète communiste péruvien mort à 21 ans ?

Javier Luis Heraud Perez Tellería


Né le 19 janvier 1942, dans le district de Miraflores à Lima, Javier Heraud est le troisième de six frères du couple formé par Jorge A. Heraud Cricet et Victoria Pérez Tellería de Heraud.

En 1958, il entre à la faculté de lettres de l’Université pontificale catholique du Pérou puis deux ans plus tard, il s’inscrit à l’Université nationale principale de San Marcos pour y étudier le droit. Entre 1960 et 1961, il publie les recueils de poésie La rivière et Le voyage.

En 1961, il rejoint les rangs du Mouvement social progressiste (MSP) de tendance social-démocrate. En juillet de la même année, il se rend à Moscou, invité par le Forum international de la jeunesse, les 15 jours qu’il passe en Russie déterminent le cours de sa vie. L’année suivante, il démissionne du MSP. Il reçoit une bourse pour étudier le cinéma à Cuba, avec des étudiants chiliens, là il rencontre notamment Fidel Castro. En 1963, il rejoint l’Armée de libération nationale sous le pseudonyme de Rodrigo Machado. Dans la nuit du 14 mai 1963, à Puerto Maldonado (chef-lieu de la région de Madre de Dios au Sud-Est du Pérou), Javier Heraud, avec six autres camarades, ont une altercation avec des membres de la police et sont emmenés au commissariat du secteur. Pendant le trajet l’un des détenus tire sur un agent. S’ensuit une poursuite jusqu’à ce qu’Heraud soit abattu de 19 balles dum-dum alors qu’il tentait de s’enfuir en canoë. Il n’avait que 21 ans au moment de sa mort. Javier Heraud remporte à titre posthume le Prix de la Poésie aux Jeux floraux de l’Université nationale principale de San Marcos avec son livre Estación Reunida (« Station réunie »).

José Maria Arguedas Altamirano 

Il n’y a pas que lui, écoutez l’histoire de cet autre intellectuel sympathisant communiste qui lui s’est suicidé…

José Maria Arguedas naît à Andahuaylas, dans la montagne au Sud du Pérou; il est le fils naturel d’un avocat itinérant Victor Manuel Arguedas Arellano, cuzqueño (« cuzquénien ou habitant de la région du Cuzco, ancienne capitale de l’Empire Inca ») et de Doña Victoria Altamirano Navarro, femme métis et aristocrate de San Pedro en Andahuaylas. À la mort de sa mère, il a deux ans et il reste avec sa grand-mère paternelle ; son père se remarie avec une riche veuve qui a aussi des enfants. Il sera victime des mauvais traitements de sa marâtre. Celle-ci l’oblige à dormir avec les indiens. C’est auprès d’eux qu’il découvre la culture et la langue quechua. Ses études primaires se déroulent à San Juan de Lucanas, Puquio et Abancay, pour les études secondaires à Huancayo et Lima. En 1931, il commence des études de Lettres à l’université San Marcos ; il devient licencié en Littérature et étudie l’Ethnologie. Il milite pour la cause des républicains espagnols et contre la venue d’un émissaire de Mussolini. De 1937 à 1938, il passe près d’un an en prison pour avoir participé à une manifestation antifasciste. En 1941, il exerce le métier d’enseignant d’abord dans le primaire à Sicuani, Cusco, puis dans le secondaire à Lima aux collèges A.Guarte, G.et M.Melgar à partir de 1949.

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Arguedas était très proche des communistes, qu’il soutenait dans diverses tâches, comme la formation des cercles ouvriers. En 1948, la dictature de Manuel A. Odría le démet de sa fonction d’enseignant à l’école Mariano Melgar, l’accusant d’être un « communiste notoire ».

Il travaille aussi comme fonctionnaire au Ministère de l’Éducation, mettant en avant son intérêt pour préserver et promouvoir la culture péruvienne, et tout particulièrement la musique et les danses andines. Il devient Directeur de la Maison de la Culture entre 1963 et 1964 puis Directeur du Musée National d’Histoire de 1964 à 1966.

José María Arguedas a poursuivi une carrière d’ethnologue qu’il aborde par le biais du folklore et de la tradition orale. C’est ainsi qu’il recueille des chants populaires qu’il réécrit en quechua et en traduction espagnole Canto kechwa (1938). Il traduit en espagnol un classique de la tradition quechua sous le titre A nuestro padre creador Túpac Amaru (1962) et rédige de nombreux poèmes à la fois en quechua et en espagnol qui seront publiés à titre posthume sous le titre de Katatay y otros poemas (1972).

Son engagement le pousse à reprendre ses études universitaires. Il obtient en 1957 un diplôme en ethnologie et soutient en 1963 une thèse de doctorat consacrée à la comparaison entre les communautés précolombiennes du Pérou et celles d’Espagne. Celle-ci sera publiée sous le titre Las comunidades de España y el Perú (1968). Élève de l’historien et anthropologue indigéniste Luis E. Valcárcel, Arguedas a souvent été classé dans cette tendance politique et littéraire, bien qu’il en ait lui-même récusé l’étiquette. Dans la mesure où Arguedas écrit directement en quechua et, même dans ses œuvres en castillan, dans une perspective quechua, on peut dire qu’il a dépassé l’indigénisme traditionnel.

Au cœur de l’œuvre de José María Arguedas se trouvent trois romans : Yawar Fiesta, 1941 (traduction française Yawar Fiesta : La fête du sang, 2001) ; Los ríos profundos, 1958 (traduction française Les Fleuves profonds, 1966), Todas las sangres, 1964 (traduction française Tous sangs mêlés, 1970) et un roman posthume El Zorro de arriba y el Zorro de abajo, 1971, (traduction française Le Renard d’en haut et le Renard d’en bas).

José María Arguedas est aussi l’auteur de poèmes, de contes et de récits : La agonía de Rasu Ñiti (1962) et Amor mundo (1967). Deux de ses contes ont également été traduits en français : La amante de la culebra et La amante del cóndor, 1949 (traduction française L’amante de la couleuvre et L’amante du condor, 1966). Son expérience de la prison fournira le thème d’un roman, El sexto (1961).

Toute l’œuvre de José María Arguedas est marquée par la dualité linguistique et culturelle entre l’espagnol et le quechua. Toujours fidèle à la tradition quechua de son enfance, il a vécu l’expérience du Pérou divisé entre monde andin indien et dominé et monde côtier hispanophone et dominant. N’étant jamais tout à fait parvenu à surmonter ce déchirement culturel, malgré sa réussite professionnelle et souffrant de dépression nerveuse, il se suicide en 1969. Sa fin tragique en a fait le symbole à la fois de tous les clivages de la société péruvienne et de la nécessaire réconciliation qu’il a prônée dans son œuvre, mais si difficilement vécue dans sa chair.

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