UKRAINE : Les États-Unis se préparent à la faillite du projet Maidan, par Serguei Mirkin journaliste, Donetsk

Voici un article qui vient à point nommé pour compléter ce que nous tentons de dire aujourd’hui, à savoir qu’il faut dépasser les illusions, qui semblent être dressées entre nous et la réalité du monde par ces élections et plus généralement les préoccupations médiatico-politique d’une classe en déshérence ? La question est: est-ce que tout le cirque que l’occident déploie autour de la pseudo agression de Poutine et qui est sensée nous mobiliser avec l’OTAN les Etats-Unis et ses concubines favorites, la Pologne et l’Ukraine, ne seraient pas destinées à masquer l’impuissance du Sultan pour filer la métaphore, ou son incapacité à gérer les désastres qu’il produit comme en Afghanistan et ailleurs. Il ne s’agit pas de simples spéculations mais de faits dans lesquels comme partout la montée des prix en particulier de l’énergie autant que le peu de crédit accordé aux dirigeants peut transformer les “révolutions de couleur” en crises de plus en plus violentes . (Traduction de Marianne Dunlop et note de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)

              17 janvier 2022

https://vz.ru/opinions/2022/1/17/1138806.html

La sous-secrétaire d’État américaine Victoria Nuland a déclaré que la Russie déstabilisait la situation en Ukraine et a menacé Moscou de sanctions. Mais si l’on observe la situation en Ukraine, il ne fait aucun doute que la stabilité déjà chancelante de cet État est mise à mal par des membres de l’opposition et du gouvernement.

Le facteur potentiellement le plus déstabilisant pourrait être le retour de l’ancien président ukrainien Petro Porochenko le 17 janvier.  Il est susceptible d’être placé en détention dès son retour dans le pays. Il existe une ordonnance du tribunal à cet effet. Autre question : les forces de l’ordre ukrainiennes pourront-elles mettre l’ancien chef d’État en détention ?

Les partisans de Porochenko ne cachent pas qu’ils ont l’intention de défendre leur leader. Cela signifie que pour arrêter l’ex-président, la police devra se battre avec ses partisans. Ou bien Porochenko sera libéré du poste de police par une foule indignée si la détention a lieu. Et ces événements pourraient être l’étincelle à partir de laquelle un nouveau Maïdan s’enflammera.

En 2017, lorsque Mikhaïl Saakachvili, ex-gouverneur de la région d’Odessa (ancien président de la Géorgie par intérim), a franchi la frontière polonaise pour entrer en Ukraine, un « Mikhomaidan » a commencé dans le pays. Il s’agissait des protestations les plus graves sous le régime de Porochenko. Mais Saakashvili n’a jamais été chez lui en Ukraine, et les positions politiques de Porochenko étaient alors bien plus solides que celles du président actuel Vladimir Zelenski aujourd’hui.

Et on ne sait pas comment la police ukrainienne se comporterait en cas de nouveau Maidan à Kiev. Comme l’ont montré les événements au Kazakhstan, lorsque des manifestations graves dégénèrent en émeutes, la position des forces de sécurité joue un rôle essentiel. En Ukraine, de nombreux policiers ont aujourd’hui démissionné ou menacent de descendre dans la rue en raison du non-paiement de primes et d’indemnités Covid.  De plus, l’ancien ministre de l’Intérieur Arseniy Avakov, qui a toujours une influence considérable sur la police, est un opposant à Zelenski. Il est donc très probable qu’en cas de nouveau Maïdan, la police se retirera ou soutiendra les manifestants. L’actuel ministre de l’intérieur, Denys Monastyrsky, a promis d’augmenter de 10 % les salaires des forces de l’ordre. Mais c’est comme boucher les trous avec des chiffons dans un bateau qui coule.

Et c’est le même tableau partout en Ukraine. Le prix élevé de l’essence a rendu la nourriture, y compris le pain, plus chère dans le pays. Et ce n’est que maintenant que le gouvernement a pris des mesures pour offrir à certains producteurs des prix préférentiels pour le gaz. Seulement, comme le prétendent les chaînes de télégrammes ukrainiennes, seuls les hommes d’affaires proches du gouvernement auront accès au gaz bon marché. Et il est douteux que ces derniers rendent la nourriture plus accessible à la population.

L’équipe Zelenski a également commencé à pratiquer des représailles extrajudiciaires, la Sécurité étant utilisée comme un organe pour imposer des sanctions économiques aux citoyens. En outre, il y a les oligarques Rinat Akhmetov, Ihor Kolomoisky et d’autres qui utilisent leur influence sur l’administration de l’État pour accroître leur richesse personnelle. Et ces individus déstabilisent l’Ukraine comme personne d’autre. Peut-être Nuland considère-t-elle que Porochenko, Zelenski, Avakov, Akhmetov et Kolomoisky sont des agents du Kremlin ?

Et si nous examinons la situation sans sarcasme, après la déclaration de Victoria Nuland, il y avait plusieurs autres messages de hauts responsables américains auxquels il fallait prêter attention. Par exemple, la sous-secrétaire d’État américaine Wendy Sherman a déclaré que la Russie subirait de graves conséquences économiques si elle envahissait l’Ukraine ou si, de quelque manière que ce soit, elle sapait la situation et imposait des changements que le peuple ukrainien n’avait pas demandés. Et l’assistant du président américain pour la sécurité nationale, Jake Sullivan, a déclaré que les États-Unis n’excluaient pas que le prétexte d’une invasion russe puisse être une tentative de coup d’État en Ukraine. Tout le monde est habitué à entendre parler d’une éventuelle attaque russe contre l’Ukraine. Cela fait un an qu’on en parle. Et ce sujet devient lassant. Mais les messages de Sherman sur un changement que le peuple n’a pas demandé et celui de Sullivan sur un coup d’État en Ukraine sont intéressants.

Cela signifie-t-il que les États-Unis prévoient de nouvelles manifestations massives en Ukraine ? C’est probablement le cas. Les États-Unis ne peuvent pas ne pas voir qu’il y a une guerre de tous contre tous dans la sphère politique en Ukraine, qui se superpose à la situation sociale désastreuse de la population et à l’incapacité des dirigeants ukrainiens à résoudre les problèmes. Les Américains, malgré toutes leurs tentatives, n’ont jamais réussi à chasser les oligarques de la vie politique. L’équipe Zelenski déclare seulement en paroles la dé-oligarchisation de l’Ukraine. Mais pendant les vacances du Nouvel An, Zelenski a séjourné dans le même hôtel que Kolomoisky, dans la station de Bukovel.

Ce n’est pas ce que voulaient les Américains lorsqu’ils ont organisé le coup d’État en Ukraine en 2014. Tout d’abord, l’OTAN n’a pas obtenu la Crimée. Deuxièmement, il ne suffisait pas aux Américains et à leurs alliés de faire de l’Ukraine une« anti-Russie ». Il semble que l’objectif était également de faire de l’Ukraine une “vitrine” du mode de développement européen, afin que le peuple russe voie à quel point on vit bien en Ukraine et veuille également avoir un Maidan dans son pays. Cependant, la réalité s’est avérée différente. Et l’exemple de l’Ukraine montre comment un Maidan et un coup d’État peuvent amener un pays relativement stable au bord du gouffre, et le peuple à la limite de la survie. Peut-être les États-Unis comprennent-ils qu’une explosion sociale est imminente en Ukraine, et qu’ensuite les processus dans le pays deviendront ingérables. En d’autres termes, le scénario afghan se répétera, mais avec des spécificités ukrainiennes.

Et les États-Unis se préparent déjà à une telle évolution et sont prêts à blâmer la Russie à l’avance. En d’autres termes, la Maison Blanche va sauver la face en disant que le Kremlin est responsable de la mort du projet Maidan en Ukraine. Ou peut-être que Washington prépare un nouveau Maidan en Ukraine. Et en cas d’échec ou si la situation devient incontrôlable – encore une fois, tout mettre sur le dos de la Russie. En d’autres termes, les États-Unis préparent à l’avance un écran d’information afin que la chute d’encore un autre régime pro-américain n’affecte pas la cote du président.