Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Deux questions historiques et actuelles pour les communistes rompre avec le capitalisme, construire le socialisme

Pierre-Alain Millet intervient toujours pour tirer le processus le plus loin possible et il le fait à travers une lecture attentive du dernier livre de Jean-Claude Delaunay, toutes choses qui correspondent aux choix de ce blog qui a lui aussi choisi de prendre du champ avec la campagne au jour le jour de Fabien Roussel, pour mieux tenter de rester sur le but, le socialisme et la nécessité d’un parti communiste. Cet article correspond totalement à nos choix éditoriaux et politiques. Non l’exaspération face à Macron ne suffit pas elle peut même être fort mauvaise conseillère comme d’habitude et plus encore quand nous sommes confrontés à des enjeux historiques qui posent la question du socialisme comme la pandémie. (note de Danielle Bleitrach pour histoire et société)

Jeudi 5 août 2021, par  pam

Le dernier livre de Jean-claude Delaunay “rompre avec le capitalisme, construire le socialisme” est sorti en pleine crise sanitaire, en août 2020. Je ne l’ai lu que cet été, un an plus tard… J’invite tous les communistes à ne pas prendre plus de retard pour découvrir cette contribution qui aidera grandement à leurs efforts pour construire une candidature communiste utile à notre peuple, c’est à dire qui aide à répondre enfin à deux questions sur lesquelles bute tout le mouvement social et progressiste depuis des décennies, avec dureté et souffrance ces dernières années
- pourquoi et en quoi rompre avec le capitalisme ?
- pourquoi et comment construire une autre société ?

Le titre de ce livre est parfaitement choisi !
- Oui, il faut rompre avec le capitalisme, et pas seulement avec tel ou tel de ses effets ou apparences. On sent bien l’exaspération d’une partie du peuple face à Macron, mais on sait aussi d’expérience que l’exaspération contre Sarkozy qui montait partout en 2010 a produit le vote Hollande contre la finance… L’exaspération sur les effets du capitalisme ne suffit pas à construire un rapport de forces pour permettre une véritable rupture avec ce système injuste mais dirigé par de grandes forces économiques et sociales…
- Oui, il faut construire le socialisme ! Certes, le mot est tabou au PCF depuis des années, et ce silence sur ce qui définissait notre projet de société cache de plus en plus mal l’ambiguïté sur notre projet qui ne nous permet pas de reconquérir le monde du travail et les milieux populaires. Car voulons-nous seulement une “gestion de gauche” du système ? le communisme que nous voulons est-il “déjà-là” et suffit-il de le faire grandir ? Voulons-nous simplement revenir au projet du conseil national de la résistance ? ou au programme commun de l’union de la gauche ? En quoi notre projet de société est radicalement différent de ce qu’on connait ? Et le plus difficile tellement les communistes ont été habitués à se détacher de leur histoire, notre projet de société a-t-il quelque chose à voir avec l’histoire du mouvement communiste, l’URSS, Cuba, la Chine…? Et comment concevons-nous alors notre projet de société ? avec un marché capitaliste ? un capitalisme d’état ? un communisme sans plus aucun capitalisme ? un “marché socialiste” comme l’évoque ce livre ?

Jean-claude Delaunay nous donne des clés pour répondre à ces questions. Si son livre a une ambition bien plus profonde que la seule campagne des présidentielles, je suis convaincu qu’il peut armer de manière décisive les communistes pour transformer le lancement réussi de la campagne de Fabien Roussel en mouvement de masse pour exiger de rompre avec le capitalisme et pour construire le socialisme.

J’ai trouvé dans ce livre des réponses compréhensibles par tous à des questions qui secouent les idées communistes depuis longtemps. Il est un outil militant accessible pourvu que des communistes prennent le temps de lectures communes, de débats et de travail en lien avec leurs actions politiques, comme cela a commencé sur ce site [1].
Le livre fait certes près de 300 pages, mais il propose un résumé de 9 pages et chacun des 7 chapitres se termine aussi par un résumé court. Des réunions de communistes pourraient utilement commencer par la lecture commune d’un résumé de chapitre pour ouvrir une discussion surtout si l’un d’eux a déjà lu le livre et se prépare pour essayer d’apporter les réponses du livre aux questions du débat [2].

Ce livre me semble utile en effet à la fois pour répondre à des questions très actuelles, et pour reprendre le fil d’une réflexion marxiste des communistes que les années de “mutation” a fortement affaibli.

Le capitalisme est-il historiquement fini ?

D’abord pourquoi disons-nous (disions-nous !) que le capitalisme ne pouvait durer et serait remplacé par le socialisme ? Visiblement, les 50 dernières années ont plutôt montré l’incroyable dynamique du capitalisme, dans la violence et l’injustice certes, mais quand André Gérin écrivait en 2004 son livre “Et si le capitalisme avait fait son temps ?”, c’était en mode interrogatif ! Il appelait avec raison les utopistes à se lever, car après la chute de l’URSS, les multiples actions militaires des USA, la mondialisation apparemment triomphante, qui pouvait croire à son abolition annoncée en 1848 par le manifeste du parti communiste ?

Ce n’est pas (seulement) une question d’histoire pour les communistes, c’est une question très actuelle ! Avec les milliards des “plans de relance” en UE comme aux US, l’agressivité diplomatique, commerciale, technologique des USA pour reprendre la main sur la Chine, on a plutôt le sentiment que le capitalisme est sûr de lui et tient les manettes ! D’ailleurs, certains disent que la Chine ne serait qu’un autre capitalisme… bref, que ce système est indépassable… Et les défaites sociales et politiques de ces dernières années en France ne font que conforter ce sentiment populaire profond au cœur de l’abstention…

Jean-Claude Delaunay commence son livre par une analyse du capitalisme par grandes phases, quatre premiers chapitres montrant comment l’histoire du capitalisme répond à une logique profonde, du premier stade du capitalisme conduisant aux guerres mondiales, au développement du rôle de l’état après guerre dans la concurrence avec le socialisme pour devenir le “capitalisme monopoliste d’état” avant que la crise des années 60 ne conduise à une contre-offensive qui s’appuiera sur la défaite de l’URSS et sur la mondialisation. La logique derrière ces grandes ruptures est celle que Marx avait caractérisée dans le capital comme les deux lois de ce système, l’accumulation et la baisse tendancielle du taux de profit. Si j’ose un résumé militant, tout capitaliste veut devenir toujours plus gros, donc investit tant qu’il peut, mais plus il investit plus il a du mal à maintenir son taux de profit, et comme chaque capitaliste ne s’occupe que de son propre intérêt, il est prêt à tout pour être le gagnant, ce qui fait qu’au total, le système accumule de plus en plus et a de plus en plus de mal à en tirer suffisamment de profit… c’est pourquoi “le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée l’orage”, car il faut périodiquement détruire suffisamment de capital pour retrouver un taux de profit suffisamment alléchant [3].

Le livre propose d’identifier une phase nouvelle initiée dans la crise des années 60 et liée à ce qu’on a appelé la “contre-offensive de l’impérialisme” après la défaite retentissante des USA au Vietnam en 1975, la grande peur des bourgeoisies devant le niveau des luttes sociales en 1968, mais aussi les leçons de la réussite du coup d’état au Chili installant le modèle libéral qui allait se généraliser.

Pour cela, JCD résume les lois du capitalisme dans l’expression de “sur-accumulation durable du capital”, qui synthétise la loi de l’accumulation et la baisse tendancielle du taux de profit. Il caractérise alors les différentes phases du capitalisme. D’abord l’investissement privé qui produit l’industrialisation et le colonialisme jusqu’au partage du monde dans les guerres, avec l’apothéose de la première guerre mondiale. Mais l’énorme destruction de capital de cette grande guerre ne résout pas le problème et la crise frappe encore plus fort en 1929 dans le contexte en plus de l’existence de l’URSS ce qui produit le nazisme et la seconde guerre mondiale dont le capitalisme se relève dans l’affrontement mondial avec le socialisme conforté et les indépendances nationales.

Le capital fait alors le choix de l’intervention massive des états, du plan Marshall au gaullisme pour apporter l’activité qui permet de soutenir le taux de profit pour les capitalistes. Cela fonctionne un temps, mais Georges Marchais pointait dans un article célèbre la crise et notamment la baisse du taux de profit dès 1971.

Jean-Claude Delaunay propose de caractériser la transformation du capitalisme après les “trente glorieuses” comme le choix de rompre avec l’état investisseur militaire et d’infrastructures et de lancer la course à la mondialisation pour chercher des taux de profits élevés dans les pays à faible coût… Il l’appelle le “capitalisme monopoliste financier” qui assure un développement fantastique des pays du sud tout en détruisant massivement du capital dans les pays développés, et permet une nouvelle phase de développement capitaliste sur lequel s’appuie… la Chine pour assurer son propre développement.

Mais là aussi, ce modèle entre en crise dès le début des années 2000 et notamment avec la grande crise de 2008. La désindustrialisation au nord produit des populations pauvres qui ne peuvent consommer que par une dette qui finit par exploser notamment aux USA, et la sur-accumulation durable reprend, parce-que le capitalisme est incapable de planifier globalement son développement. Il n’est “régulé” que par la concurrence entre les investisseurs. Le développement de “la finance” permet aux investisseurs de réduire leur risque individuels, pour ceux qui peuvent être du bon coté, mais sans inverser la tendance durable à la sur-accumulation.

Ajoutons (le livre n’en tient pas encore vraiment compte) que la réponse capitaliste à la crise de 2020 va se traduire par une accélération des efforts des capitalistes pour maintenir leur taux de profit individuel en faisant payer les états. On sait tous que les peuples vont payer à la fin ! Mais le livre nous aide à comprendre que c’est toujours la même incapacité du capitalisme à résister à la “sur-accumulation durable” qui en fait un système en crise d’autant plus forte que le niveau de sur-accumulation est élevé et donc que le “coût” d’une destruction massive de capital devient historiquement “too big to fail”, comme le disent les banquiers. Les cubains disent souvent “le socialisme ou la mort”, trop souvent compris comme un slogan désespéré, alors que c’est au contraire le refus de la mort que ne peut que provoquer le capitalisme destructeur.

La conclusion est claire. Bien sûr, les capitalistes se battent avec tous les moyens, y compris la guerre, pour maintenir leur pouvoir et leur taux de profit, mais ils sont incapables d’éviter la sur-accumulation durable de capital et donc les crises. Donc oui, le capitalisme est mortel à condition que des forces sociales suffisantes décident de rompre franchement avec la classe sociale qui dirige le capitalisme, la grande bourgeoisie !

JCD conclut le dernier chapitre sur le capitalisme en affirmant ainsi :

La fin de l’impérialisme est l’objectif de l’heure. Cela ne veut pas dire la fin du capitalisme qui survira ici et là. Cela veut dire la fin de la domination du capitalisme sur le monde.

Le système capitaliste apparaît de plus en plus clairement aujourd’hui comme étant un système de socialisation des pertes qu’il engendre et de privatisations des gains que les travailleurs lui procurent. Ces derniers ont à se convaincre dans leur masse que le socialisme est un système de socialisation des gains procurés par le travail et de réduction jusqu’à leur annulation des pertes engendrées par le capitalisme.

Évidemment, il faut lire le livre qui construit une argumentation rigoureuse à la fois sur l’équilibre global de chaque phase du capitalisme, mais aussi sur la place du marché et donc des marchandises, prenant en compte le développement des marchandises financières et proposant de différencier le marché capitaliste et le marché socialiste. Il s’interroge alors sur ce que deviennent les marchandises quand on s’attaque au capitalisme. Cela nous donne un angle d’attaque nouveau de questions très actuelles sur la société de consommation et donc sur la réponse aux besoin sociaux, qui pour lui est au cœur justement de la construction d’une autre société. C’est un enjeu essentiel dans un monde politique où dominent les idées de la sobriété, voire de la pauvreté choisie…

Qu’est-ce que ça veut dire de construire le socialisme ?

C’est là que le livre répond à la deuxième question, quelle société autre que le capitalisme ? La réponse est devant nous dans le monde et la connaissance de la Chine de Jean-Claude Delaunay qui y vit depuis des années lui permet de montrer que ce qui gagne dans la crise actuelle du “capitalisme monopoliste financier”, c’est le socialisme…. JCD fait un choix clair, le socialisme pour caractériser le projet d’une autre société, et pour cela il reprend la discussion sur ce qu’est le socialisme par rapport au communisme. Le PCF de la mutation des années 2000 avait rejeté le socialisme en considérant que la seule “visée” pertinente était le “communisme” lui-même, ce qui conduisait de manière surprenante à considérer que la “révolution” n’était plus nécessaire car le communisme étant le mouvement, il suffisait de le faire grandir… La violence du capitalisme du XXième siècle a évidemment refroidi ces idées du “communisme déjà là” et le 38eme congrès du PCF a réouvert le débat sans réutiliser pourtant le terme de socialisme.

JCD s’inscrit clairement dans le choix du socialisme comme une société de transition en rupture avec le capitalisme qui ne doit plus “diriger le monde”. C’est le cadre nouveau dans lequel on peut engager la construction d’une société radicalement différente, le communisme avec un mode de production qui mette fin à toute exploitation et qui finisse par supprimer tout marché capitaliste, ce qui prendra du temps, mais pas une éternité dit JCD. Ce qui est sûr, c’est que personne ne construira de communisme dans une société capitaliste, c’est à dire dirigée par les oligarchies capitalistes !

Si en 1900, une autre société que le capitalisme relevait de l’utopie, personne ne peut croire que nous sommes dans la même situation en 2021 ! On ne peut pas faire l’autruche sur ce qu’ont été l’URSS, les pays de l’Est, la Yougoslavie, sur ce qu’est Cuba, tout comme on ne peut pas ignorer que des communistes dirigent le plus grand pays du monde devenu une puissance équivalente aux USA au plan économique, même si elle en est très loin au plan militaire.

La première leçon de l’histoire du socialisme, ce sont les grandes différences entre toutes les expériences socialistes, du passé comme du présent. C’est ce qui conduit JCD à considérer que s’il faut parler du socialisme comme transition entre capitalisme et communisme, il faut aussi parler des socialismes, au pluriel, pour caractériser différentes situations liées aux différents pays, aux différentes modèles économiques au moment de la rupture avec le capitalisme [4]. On sait que les marxistes jusqu’en 1917 considéraient que le socialisme arriverait dans un pays très développé. Or, il s’est construit dans des pays avec une classe ouvrière encore très faible, et dans le cas de la Chine dans un pays très peu développé et très massivement paysan. Cela conduit JCD à tenter de caractériser deux types de socialismes, un socialisme du développement et un socialisme de la maturité.

JCD insiste sur une différentiation essentielle des sociétés, la rareté ou l’abondance. Chacun comprend qu’une société qui connait encore la grande famine a comme premier objectif le développement agricole pour nourrir la population. C’était le cas de la Chine socialiste naissante. Mais elle doit aussi pour cela construire une industrie… ne serait-ce que pour augmenter la productivité agricole. Et la leçon de l’histoire du socialisme est bien qu’une période de développement accéléré a besoin du marché avec des investisseurs privés, donc du “capitalisme”, de la NEP de Lénine, au 6eme congrès des communistes cubains introduisant les commerces privés, et bien sûr avec le “marché socialiste” chinois. JCD resitue ce débat avec une citation utile de 1952 de Staline dans “Les problèmes économiques du socialisme en URSS” qui considère que l’économie soviétique “reste fortement marqué par la production marchande”. Certains opposent le socialisme chinois faisant place au marché, au socialisme stalinien dont le refus du marché après le NEP serait l’origine de son “autoritarisme” et la source de son échec [5]. D’autres à l’inverse considèrent le socialisme chinois comme un “capitalisme d’état” autoritaire, oubliant que l’union européenne qui ne se trompe jamais en matière de marché capitaliste a justement refusé en 2016 de reconnaître la Chine comme une “économie de marché” ! JCD en conclut que les capitalistes ne peuvent pas accepter l’idée d’un marché socialiste, car cela signifie la fin du capitalisme !

JCD propose une définition du socialisme qui permet de tenir compte des diversités de socialismes existants, URSS et Chine compris.

  1. D’abord tenant compte que le socialisme ne peut pas supprimer le marché d’un coup de baguette magique, il y a nécessairement du marché dans le socialisme, tout le problème étant que ce ne doit pas être un marché capitaliste servant le besoin de profits des capitalistes, mais un marché socialiste dirigé pour répondre aux besoins populaires. Ce qui conduit JCD a affirmer la nécessité de ce que les Chinois nomment la “dictature démocratique du peuple”, une formule plus riche que la “dictature du prolétariat”, ce qui sera l’objet du dernier chapitre du livre.
  2. La réponse aux besoins populaires selon le développement des forces productives. C’est un sujet de débat des communistes russes sur les causes de la défaite soviétique. D’un coté, ils considèrent que l’envie populaire d’un monde de consommation à l’occidentale n’était pas réaliste au niveau de développement soviétique, mais aussi que la pression militaire conduisait à détourner les capacités productives de la réponse aux besoins. C’est sans doute le premier défi de tout socialisme, répondre aux besoins populaires. Cuba est un bon exemple qui ne peut évidemment pas assurer un niveau de vie à l’occidentale, mais qui assure la santé, l’éducation, le sport, la musique, et qui se bat pour construire une indépendance alimentaire qui est un défi gigantesque dans une petite île sous blocus US !
  3. Le “guidage” économique par le taux de profit moyen dans la société, c’est à dire que ce n’est plus le profit individuel qui décide seul des investissements, mais la planification globale qui doit notamment fixer la part des investissements et de la consommation donc des salaires, enjeu essentiel d’une politique économique socialiste.
  4. Le socialisme se construit dans une nation. C’est bien sûr un fait historique, mais c’est surtout pour JCD une exigence pour que la réponse aux besoins populaires et les choix économiques soient bien le choix d’un peuple acteur. Il faut lire les arguments détaillés de JCD qui montre que la mondialisation technologique et industrielle ne remet pas en cause au contraire la nécessité du cadre national. On voit bien par exemple en France que sans bataille nationale pour la réindustrialisation, il n’y a pas de réponse possibles aux besoins populaires !
  5. les services collectifs au cœur de la production socialiste moderne, dans un socialisme de la maturité dont les infrastructures sont déjà développées [6]
  6. les forces productives humaines dominent les forces productives matérielles. C’est un aspect très actuel pour la France après toutes les lois capitalistes qui précarisent et soumettent le travail aux capitalistes et à leurs investissements. Les communistes doivent absolument lire ces quelques pages qui montrent la logique capitaliste de la précarité du travail et la réponse socialiste de la stabilité des qualifications.
  7. Le socialisme est une société favorable à l’environnement. Si les premières phases de développement de la Chine n’ont pas tenu compte de l’impact environnemental, la Chine est devenue un pays en pointe pour l’action pour le climat et la biodiversité. [7]. JCD donne trois raisons de l’avantage du socialisme pour l’écologie, la réponse aux besoins populaires comme seul objectif, la place de l’état pour mettre en œuvre réellement les décisions pour l’environnement, quitte à s’opposer aux intérêts marchands justement, enfin sans doute le plus important, l’idée que la réponse aux besoins n’est pas qu’individuelle, mais aussi collective ce qui conduit à l’idée d’une “valeur d’usage social” qui conduit par exemple à prioriser le transport en commun sur le véhicule individuel.

Ces définitions éclairent en quoi le programme commun de gouvernement nous plaçait dans une impasse que l’histoire a confirmée, et pour tous ceux qui veulent tirer les leçons de l’échec de l’union de la gauche, c’est une idée fondamentale.

Le programme commun fut une construction économique et politique qui prolongeait et étendait le capitalisme monopoliste d’état de l’après-guerre. Il augmentait le nombre et l’ampleur des nationalisations. Il énonçait tout un ensemble de principes novateurs de gestion de la société, de fonctionnement de ses institutions et pourtant il a échoué.

Cette solution n’avait pas les moyens économiques et politiques de son aboutissement. Elle reposait sur l’illusion d’une dynamique qui ne pouvait être que tendanciellement socialiste.

Un socialisme en transition vers le communisme

Dans le 6eme chapitre, JCD esquisse une classification des socialismes selon le niveau de développement qui doit atteindre “une société d’abondance” condition du communisme. Il précise le rôle de l’état, des entreprises, de l’impôt, des échanges extérieurs. Il décrit de manière convaincante le processus qui permet au socialisme de combattre la sur-accumulation durable du capital que ne pouvait inverser le capitalisme et d’être ainsi réellement une société de transition vers le communisme. Une dimension intéressante et très actuelle pour lui est que ce processus repose sur plus de sciences et de technologies pour que l’investissement soit de plus en plus productif et ainsi pouvoir être réduit tout en développant le travail et la réponse aux besoins.

avec le socialisme, le travail de tous est mis au service de tous. Il reste ensuite à mettre en œuvre les mécanismes conduisant à ce qu’existe une certaine équivalence entre ce que chacun donne à la société et reçoit de la société. Cela dit, au fur et à mesure que se développe la productivité du travail, la liaison entre ce que chacune reçoit et donne perd de son importance pratique.

L’économie de marché socialiste, ce n’est donc pas une économie de marché capitaliste qui serait guidée et dirigée à l’aide d’une “trique” socialiste. C’est l’amorce profondément contradictoire d’une forme de production accomplissant le dépassement partiel de la valeur marchande, préparant ainsi son dépassement total et le dépassement complet du marché.

Démocratie bourgeoise et démocratie populaire

Dans son dernier chapitre, JCD aborde de front une notion historique du marxisme que le PCF avait abandonnée en 1976, la célèbre dictature du prolétariat, et il le fait en montrant le lien étroit entre la démocratie bourgeoisie et la production marchande capitaliste. La démocratie à l’occidentale, c’est la séparation entre l’espace politique, où tout citoyen est supposé égal, et le monde économique où domine la surbordination du salarié au capitaliste. Seuls les bourgeois peuvent ainsi faire le lien entre politique et économie et le lobbying en est l’expression !

C’est une question décisive à plusieurs titres
- d’abord le niveau d’abstention populaire porte une véritable crise de légitimité de la démocratie électorale occidentale. Les repères qui donnaient du sens à un “parti pris” politique dans les batailles électorales ont disparu, tout le monde peut dire à peu près n’importe quoi de gauche et de droite, y compris l’extrême-droite, et les électeurs qui restent sont de plus en plus sensibles à des campagnes médiatiques de type publicitaires mettant en avant les personnes et les “narratifs” des communicants au détriment de toute référence sociale.
- ensuite le socialisme a été dans la bataille idéologique associé à la dictature, et c’est une des raisons qui ont conduit les communistes dans les années 70 à chercher comment affirmer leur choix de la liberté en abandonnant le mot “dictature”. Mais ils n’ont pas dit comment alors imposer à la bourgeoisie des réformes qui la mettent en cause ! Peut-on espérer que les grandes oligarchies respectent le choix majoritaire ? Ils ont montré en 2005 qu’ils avaient tous les moyens pour imposer leur choix, et le coup d’état chilien en 1973 avait montré jusqu’où une bourgeoisie est prête à aller.
- enfin, personne ne peut espérer qu’un changement de société radical se fasse dans le consensus et donc qu’il devra faire face à des oppositions, y compris au sein du peuple, et aussi bien sûr au plan international ! Ferons-nous comme Tsipras en Grèce devant renier le vote populaire ? Mais alors, comment imposer la volonté majoritaire populaire à des minorités organisées, financées et acceptant la violence ?

A l’évidence, il faut affirmer que la volonté populaire majoritaire doit être respectée et que le système politique doit avoir les moyens de le faire. C’est pourquoi une démocratie populaire ne peut séparer politique et économie. JCD propose de lier deux dimensions, la place du monde du travail qui doit devenir réellement dirigeant pour orienter la transformation socialiste, et la place du peuple qui doit devenir acteur dans les contradictions qu’utiliseront les forces capitalistes toujours présentes.

C’est peut-être la contribution la plus forte de ce livre en nous aidant à dépasser la contradiction entre rupture avec le capitalisme et démocratie sur laquelle le PCF a buté depuis les années 70.

conclusion

J’espère que Jean-claude ne me fera pas trop de reproches de cette lecture très partielle, mais l’objectif est vraiment de pousser les communistes qui cherchent comment être utiles à notre peuple divisé par les crises successives et notamment cette crise du COVID à se coltiner collectivement à ces deux questions décisives, rompre avec le capitalisme et construire le socialisme. C’est un défi pour proposer en 2022 quelque chose de radicalement nouveau aux abstentionnistes du monde du travail et des quartiers populaires… Je propose à Jean-Claude de publier un fascicule avec le résumé de chaque chapitre et le résumé du livre comme support de formation à la disposition des communistes. Et peut-être pourrait-il enregistrer une courte vidéo par chapitre pour aider à l’organisation pratique ?

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