Sébastien Chenu la tête pensante du Rassemblement (sic) national et la “culture”

Lors de l’une des « interventions thématiques » du congrès du RN, samedi 3 juillet, Sébastien Chenu, député du Nord et l’un des porte-parole du parti d’extrême droite, a été chargé d’expliquer pourquoi il ne fallait « jamais abandonner l’enjeu culturel ». Quinze minutes d’introduction, où l’orateur s’est déclaré quasiment un disciple du dirigeant et philosophe communiste italien Antonio Gramsci : « le combat que nous menons est un combat culturel avant même d’être un combat politique ». Pauvre Gramsci victime de Mussolini qui l’a emprisonné avec mission de ne plus jamais le laisser s’exprimer : il en est mort, c’est terrible de voir un sebastien chenu salir sa vie en se l’appropriant… Mais l’effroi que l’on peut ressentir à l’écoute d’un tel discours est d’autant plus prenant que malheureusement en matière d’inculture, de négationnisme historique le parti d’extrême-droite se déplace sur un terrain politique beaucoup plus largement corrompu et dont la gauche “mitterrandienne” est largement responsable.

Le mal, pour Sébastien Chenu, remonte à Mai 68, et notamment à… Jean-Paul Sartre, dont il a dressé un portrait inédit qui vaut le détour . « Depuis 1968, la pensée de Jean-Paul Sartre a irrigué l’ensemble des intellectuels, les universitaires, les médias », a commencé le député. Le philosophe français (1905-1980) est pour lui « l’homme de toutes les erreurs, de tous les aveuglements », et non des moindres : « C’est celui qui détestait le peuple au moment du Front populaire, celui qui aimait les Allemands au moment de l’Occupation, il l’a écrit d’ailleurs avec Simone de Beauvoir, ils étaient fascinés par tout ça », a déclaré Sébastien Chenu.

On peut disserter longtemps sur l’attitude de Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir durant l’occupation et se convaincre qu’entre eux et Gabriel Péri, Politzer il y avait de la marge, mais on ne peut pas l’identifier à celle des fondateurs du Front National. Vous direz que ce congrès a dit le non retour en arrière vers le Front National de papa. Mais la filiation n’est pas désavouée même s’il faut bien changer un petit quelque chose pour que tout demeure comme hier.

Comme l’a rappelé encore lors d’un débat du deuxième tour des régionales Bardela, le second du RN, en disant à Fabien Roussel, il est fini le temps en 45 à la Libération où vous nous faisiez taire… On ne saurait plus clairement dire que l’on se réclame de Pétain et de la collaboration.

Sébastien Chenu poursuit dans le style si particulier de notre ‘époque où l’on peut à la fois se revendiquer gaulliste et suppôt de la collaboration, ceux qui ont soutenu la torture, les généraux félons et appuyé de fait les tentatives d’assassinat de De Gaulle durant la guerre d’Algérie sont-ils plus qualifiés pour en revendiquer l’héritage, oui s’il s’agit des aspects les plus sombres de De Gaulle, non s’il s’agit de la souveraineté nationale où ce dernier a toujours dû faire avec les communistes. Mais là encore la confusion a été introduite patiemment et aujourd’hui l’exemple vient de haut y compris des instances de l’UE… On oublie vite Hitler pour accabler ses vainqueurs et nier ce qu’on leur doit… il y a eu d’autres et non des moindres qui ont joué à ce petit jeu-là: après avoir été décoré de la francisque, d’avoir bénéficié d’un secrétariat d’Etat à Vichy, quand Mitterrand se proclame résistant et attaque en priorité les communistes, pour mieux rester jusqu’au bout l’ami fidèle de Bousquet, l’homme du Vel d’hiv… Est-ce un hasard si c’est le même Mitterrand qui a “inventé” le retour de le Pen, l’a fait monter dans les sondages dans une tactique qui est encore celle de Macron?

Il a fallu pourrir la gauche, l’atlantiser et sous couvert des droits de l’homme renouer avec les expéditions néo-coloniales pour offrir un tel champ à l’extrême-droite… Il a fallu transformer les intellectuels en courtisans et marginaliser la recherche scientifique au profit des éditorialistes au best-sellers d’une saison chargés de promouvoir les campagnes de la CIA livrées clés en main et ce au point d’en arriver à laisser un Sébastien Chenu dévoyer la souveraineté nationale, se prétendre héritier de De Gaulle et … Gramsci…

Tout a été sacrifié à ce blocage institutionnel favorisé par la Constitution inventée pour marginaliser les communistes comme le fonctionnement de l’UE et aujourd’hui nous en sommes là : double patte et patachon, l’énarque et sa courroie de transmission, le duo qui ne fait que traduire la faiblesse de l’offre politique et le silence imposé à celui qui s’étonne d’être si peu pris en compte…

Oui mais voilà à ce petit jeu-là même celui qui vote RN finit par s’apercevoir à qui il a affaire, et Sébastien Chenu est battu et ses sbires avec lui… alors il ne lui reste plus qu’à broder, imaginer, mentir s’inventer la légitimité de la culture dont parle Gramsci…

Sébastien Chenu décidément bien ingrat face à ce qu’il doit à Mitterrand et à son OPA sur la “gauche” a poursuivi sa charge contre Jean-Paul Sartre qui il est vrai dans son extrême-vieillesse a été entouré d’une bande de “cols maos passés depuis au Rotary club et au “Siècle”… “C’est celui qui détestait de Gaulle et qui préférait les dictateurs comme Mao, comme Staline. C’est celui qui fait voter Mitterrand en 1981, c’est celui qui est aux côtés de l’ayatollah Khomeyni lorsqu’il a été hébergé en France. On voit quand même que cet intellectuel s’est planté sur tout. »

En matière de culture malheureusement Sebastien Chenu n’est pas le seul à dire n’importe quoi… C’est effrayant le nombre de gens incultes qui à travers cette référence espèrent donner une aura à leur médiocrité, à leur mépris de fait du peuple, à leur nombrilisme et disons-le à leur monde réactionnaire et bourré d’apriori sans le moindre fondement… Mais là c’est le bouquet !!!

Danielle Bleitrach

Illustration la résistible ascension d’Arturo UI de Bertolt Brecht… dont je voudrais citer simplement cette description :

“Voici les sous-Goebbels, les speakers en peau d’âne qui cassent les oreilles et qui bourrent le crâne des auditeurs de la radio. Mais ils ne se fient pas au peuple un peu naïf, alors ils ont bien soin d’interposer leurs griffes entre la bouche et le micro”…