Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Cuba et Elsa

En ce moment, la TV cubaine diffuse des informations en continu de toutes les provinces sur les préparatifs face à l’arrivée de la tempête tropicale Elsa. Difficile avec la pandémie mais mobilisation totale de la Défense civile

Il faut savoir ce qu’est l’arrivée d’une tempête tropicale et d’un cyclone à Cuba… Pour une Française elle peut éprouver à la fois de la curiosité, le sentiment de devenir réellement cubaine et osons l’avouer une trouille intense… Il y a une grande activité, si vous vivez dans une zone proche de la mer c’est un déménagement de la télé et autres meubles chez les voisins à l’abri.

Fidel était encore vivant mais il ne pouvait plus comme il le faisait jadis se rendre dans les points les plus périlleux de l’île pour y vérifier l’organisation et la sécurité de tous, il était à la télévision et commentait heure après heure l’arrivée de l’ouragan. Et tandis que j’assistais au déménagement, la télévision continuait et je me souviens d’un joyeux cubain qui transportait depuis des heures des paquets le regarder avec un mélange d’affection et de plaisanterie familière assez fréquent… il avait fait le signe de la main qui décrivait la barbe et il avait dit “Et il parle, il parle…” mais quand Fidel est mort cette parole leur a manqué dramatiquement et ils s’en plaignaient… Ils étaient comme les rameurs d’une barque qui avance tandis que le chef de rang debout scande l’effort… Raoul le leur a fait comprendre Fidel n’est plus là, il n’y aura pas un autre Fidel, il ne nous reste plus qu’à être Fidel tous ensemble…

Parce que, m’expliquait l’ami cubain, un cyclone c’est un peu comme la menace d’invasion des yankees, l’île rejoue sa mobilisation, met à l’abri, organise, simplement si c’était l’invasion chacun irait chercher une arme. Mais c’est aussi indispensable pour la fertilité de l’île. C’est la violence, la force, la sensualité du climat, il est des pluies qui vous entrainent vers la mer ou du moins vous avez l’impression de ne pouvoir résister alors imaginez un cyclone. L’orage ordinaire vous inonde, vous vous retrouvez quelquefois avec de l’eau à mi-cuisse et des torrents qui dévalent la pente, des gosses qui surfent et vous en train de vous accrocher à tout ce que vous pouvez saisir et cinq minutes après le soleil est si intense que vous séchez d’un coup, une sorte de rude ramonage, une bouffée de chaleur… Alors l’hurricane… Pourtant malgré cette violence attendue il y a une telle activité que la fourmilière vous rassure, la télévision aussi et la voix de Fidel était là… Fidel c’est la rationalité en même temps que le romantisme chevaleresque, il explique scientifiquement le phénomène et donne les moyens de l’affronter collectivement et c’est cet esprit-là qui règne à Cuba face à la pandémie, face au crime des USA qui ne cesse de tenter d’étrangler l’île … L’ennemi c’est l’obscurantisme et la panique…

Mais il y a un moment qui pour une française devient presque insupportable et qui fait la joie malicieuse des amis cubains qui vous guettent du coin de l’œil. J’ai tenu bon et quand m’a été décerné le brevet “Danielle brava”… j’étais fière mais flageolante… Tout à coup le silence se fait, il n’y a plus que des voitures avec des hauts parleurs qui vont dans les rues et invitent chacun à rentrer chez soi parce que la tempête est là… puis l’enfer commence… vous êtes dans une pièce obscure et vous attendez volets fermés, le souffle est si fort qu’il peut emporter comme un fétu de paille une voiture à l’arrêt… et vous avez l’impression que l’immeuble ne peut pas résister qu’il bouge… c’est une question de minutes, c’est sûr vous allez être emporté… j’ai vu un ami français couché sur un lit tandis que son épouse cubaine et sa belle-mère le berçaient comme un enfant apeuré… Et vous savez que pendant ce temps il y a des équipes d’électriciens, des gens de la défense civile qui agissent… Alors que dans les Caraïbes les cyclones se traduisent par un nombre trop lourd de morts et de disparus à Cuba celui-ci est limité par l’organisation collective et la confiance dans le gouvernement connait ces épreuves plusieurs fois dans la saison, le tout dans un blocus qui empêche d’agir, qui est un carcan qui rend tout deux fois, trois fois mille fois plus impossible…

Le lendemain il y a le bilan, la nécessité de reconstruire ce qu’on a déjà tant de mal à créer… et la disponibilité de tous… Je me souviens de ce terrible cyclone dont Fidel avait dit le lendemain que ses effets avaient été comparables à une bombe nucléaire, la zone de Pinar del Rio, de Matanzas et surtout de l’île de la jeunesse semblait effectivement le lendemain d’hiroshima, 20.000 maisons sur les 25.000 de l’île de la jeunesse étaient soit détruites soit ébranlées et cela intervenait dans une crise permanente du logement imputable au blocus … Mais alors que partout dans les Caraïbes dans les USA il y a des morts, Cuba n’en avait pas… Il faut dire que la défense civile au plus fort de la tempête continue à sauver des vies, à joindre les isolés… Cela aussi est différent de ce qui se voit aux Etats-Unis où les patrouilles policières défendaient les maisons de riches contre les pillards et parfois tiraient dans le tas…

C’est une expérience parmi d’autres qui vous fait comprendre ce qu’est être Cubain pourquoi c’est un honneur de combattre à leur côté…

Danielle Bleitrach

PS. N’oubliez pas de verser aux diverses souscriptions pour aider nos camarades cubains à faire face au blocus: Cuba linda pour les médicaments et Cuba coopération pour l’alimentaire…

Cuba coopération :

32rue Lénine Ivry 94200

Cuba linda

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9 rue Pablo Picasso
24750 BOULAZAC – FRANCE
Tél. : 05.53.08.96.66

Email : cubalinda@wanadoo.fr

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1 Commentaire

  • Chabian
    Chabian

    Il faut signaler aussi que les USA, en retenant des visas pourtant promis pour plusieurs joueurs, ont empêché l’équipe cubaine de football de rejoindre la Floride où elle devait jouer contre la Guyane Française. Laquelle est donc gagnante par forfait aux yeux de la Fédération. Cuba avait suggéré de déplacer le match dans un autre pays, mais la Fédération a refusé. Le blocus dans le sport, c’est particulièrement odieux, mais tout le blocus est odieux.

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