Un article tout à fait fondamental de notre correspondant de la Pravda en Europe de l’ouest. Il nous propose une vision décapante de la réalité de cette UE qui dans la logique de l’OTAN qui est la sienne est en train de faire le choix de la guerre. Cette adhésion au néo-libéralisme et l’OTAN font tomber le masque des Verts, nous ne sommes pas très éloignés des dérives amorcées en France et qui rend plus urgent que jamais l’existence d’un parti communiste français (note de Danielle Bleitrach, traduction de Marianne Dunlop)
par Andrey DOULTSEV, correspondant de la Pravda en Europe occidentale.
https://gazeta-pravda.ru/issue/60-31120-10-iyunya-2021-/nemetskie-zelyenye-novye-korichnevye/
photo: laguerre d’otto Dix, tableau qui rappelle le tryptique de Grunewald
En 1998, lorsque le tout nouveau ministre des affaires étrangères Josef Fischer, des Verts, et le chancelier Gerhard Schröder, du SPD, ont assuré l’administration américaine de l’époque du soutien de l’Allemagne à l’agression militaire contre la Yougoslavie, la campagne électorale était terminée et la “real politique” de soutien inconditionnel au militarisme de l’OTAN pouvait passer des appels préélectoraux à la paix. C’étaient les mœurs d’une époque révolue où la participation de la RFA à des aventures militaires était encore un tabou dans l’esprit de la plupart des Allemands, qui avaient été contraints à la paix par leurs anciens alliés de la coalition anti-Hitler pendant plus de quatre décennies.
Vingt ans plus tard, le tableau est différent : il n’y a aucun signe de honte allemande, et l’actuel leader des Verts et peut-être futur ministre des affaires étrangères Robert Habeck (selon les derniers sondages, les Verts obtiennent 23 à 25 % des voix et sont en concurrence avec les conservateurs de la CDU/CSU pour la première place), contrairement à son prédécesseur, ne veut pas attendre les résultats des élections. Dans le feu de la campagne électorale, il exhorte son parti à se débarrasser enfin de l’héritage de la politique “pacifiste”, et donc à appeler les Allemands à la guerre. Comme pour ses ancêtres en 1941, pour Habeck l’objectif est simple et clair : l’ennemi est à l’est.
Tout d’abord, Robert Habeck a bloqué die Linke, qui voulait former une coalition sociale-progressiste avec les Verts et les sociaux-démocrates, et a exigé que la participation de tout parti à la formation du gouvernement allemand présuppose l’engagement de cette force politique en faveur des “valeurs de l’OTAN”. Et deuxièmement, peu après, Habeck a publié une déclaration selon laquelle “la demande d’armes défensives pour l’Ukraine est justifiée.”
Outre le fait que les armes “défensives” et “offensives” sont difficiles à distinguer les unes des autres, comme même le chef du parti des Verts devrait s’en douter, sa demande constitue en fait une violation des directives du gouvernement allemand actuel en matière d’exportation d’armes, qui interdisent les exportations vers les zones de combat. Même le “manifeste” des Verts de novembre dernier déclarait : “L’exportation d’armes et de munitions vers des dictatures, des régimes qui violent les droits de l’homme et des zones de guerre est interdite”.
Au moins une partie de la direction des Verts ne veut plus entendre parler de “politique de paix”. Ils ne se soucient pas plus de cette politique que de l’exigence du parti, dans les années 1980, d’un retrait immédiat des armes nucléaires américaines stockées en Allemagne dans le cadre de “l’échange nucléaire”. Ce principe, formellement maintenu dans le programme du parti (comme appât pour quelques électeurs naïfs), selon l'”expert” du parti sur le budget de la défense Tobias Lindner, ne peut être mis en œuvre avant au moins 2030-2035. Une collègue de parti de Lindner, Ellen Uberscher, membre du conseil d’administration de la Fondation Heinrich Böll, dans son article pathétique “Partenariat transatlantique ? Allons-y !”, contrairement à son camarade de parti, plus réservé, a ouvertement déclaré : L’OTAN est “le cœur flamboyant de l’Occident”. Selon l’article, l’alliance doit être renforcée, il est nécessaire de “renforcer le rôle de l’Allemagne sans chercher à retirer les capacités nucléaires américaines de la RFA.” “Cela ne peut se faire que par le biais d’un accord ambitieux qui consacrera une chose : les pays européens de l’OTAN – avec l’Allemagne à la barre – doivent être habilités à augmenter de manière significative leurs capacités de défense. Cela soulagerait les États-Unis en Europe et leur permettrait de se concentrer sur la région Indo-Pacifique, en y défendant les intérêts des démocraties libérales. En retour, les Etats-Unis devraient réaffirmer leur engagement en faveur d’une défense commune de l’OTAN et la soutenir par la promesse d’une protection nucléaire ainsi que d’une présence militaire permanente en Europe”, rêve Uberscher.
Les déclarations d’Uberscher ne sont qu’un exemple parmi tant d’autres qui prouvent à quel point le parti des Verts, qui a été assemblé à partir d’organisations antisoviétiques ouest-allemandes pour affaiblir les communistes allemands, est maintenant prêt pour la guerre –il n’y a rien de surprenant au fait que les principales cibles de ces “gardiens des valeurs libérales” soient la RPC, la Russie et Cuba. L’entrée de ce parti, dont les membres et l’électorat sont principalement des fonctionnaires et des entrepreneurs aisés ayant un niveau d’éducation supérieur à la moyenne, dans le gouvernement de l’Allemagne de l’Ouest après les élections de septembre menace à la fois de saper définitivement le statut de politique étrangère partiellement neutre de l’Allemagne et d’amener de nouvelles expériences antisociales : il y a 20 ans, les Verts et leurs partenaires du SPD ont amené le système social de l’Allemagne de l’Ouest au bord du gouffre et sont devenus les principaux agents du néolibéralisme.
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