Marches de la paix en Allemagne

Un des dégâts collatéraux de la liquidation programmée du PCF en France a été incontestablement le mouvement de la paix. Comment peut-on en effet alerter un peuple sur les dangers de guerre quand les communistes ont renoncé à toute analyse internationale qui ne soit pas celle d’une social-démocratie inféodée aux États-Unis et à l’UE. Le pacifisme perd son sens quand il s’assortit d’une pression idéologique quasi unanime en faveur des interventions de l’OTAN sous couvert de lutte contre les “dictateurs”. Ce qui a été la ligne dominante et quasi exclusive en France depuis 2003. En revanche, en Allemagne, la lutte pour la paix, contre le militarisme allemand est resté à l’ordre du jour comme en témoigne cet article de notre ami Andrey Dultsev , correspondant de la Pravda pour l’Europe qui a bien voulu nous le confier pour publication. Il faut bien mesurer à quel point les Russes sont convaincus que l’occident veut la guerre mais nous y reviendrons (note de Danielle Bleitrach, traduction de Marianne Dunlop)

La Pravda N°37 (31097) 9 au 12 avril 2021

Auteur: Andrey DULTSEV, corr. “Pravda” en Europe occidentale.

Cette année, des marches de Pâques pour la paix, qui ont lieu chaque année en Allemagne pour protester contre les activités de l’OTAN, les guerres et l’utilisation des armes, ont été organisées dans plus de 100 villes du pays, et ce malgré les restrictions au droit de se réunir promulguées au prétexte de lutter contre le coronavirus…

L’association allemande pour la paix “Netzwerk Friedenskoop” a confirmé dans sa déclaration le “bilan positif” des marches de Pâques. Cette année, les manifestations ont été dominées par des appels visant à réduire les dépenses du gouvernement allemand en armements, à faire adhérer la République fédérale d’Allemagne au Traité des Nations Unies sur l’interdiction des armes nucléaires, à arrêter les exportations d’armes de l’Allemagne, à redistribuer le budget de l’État en faveur du secteur social, renforcer le système de santé et les services médicaux, et à rejeter la politique de menaces et de chantage contre la Russie et la Chine. Le Parti communiste allemand a participé activement à la préparation et à la conduite des marches pour la paix dans les villes allemandes.

Bon nombre des demandes formulées lors des marches de Pâques visent “un changement fondamental de politique en rapport avec les prochaines élections au Bundestag”, a déclaré Kristian Golla de l’association allemande pour la paix Netzwerk Friedenskoop. Il a souligné la demande de désarmement nucléaire. Golla a déclaré que le retrait des armes nucléaires d’Allemagne et son adhésion au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires se font attendre depuis longtemps. En fait, les quatre cinquièmes de la population allemande sont favorables à la fois à l’interdiction des armes nucléaires et au retrait des armes nucléaires de la base militaire américaine de Büchel. En témoigne une enquête représentative publiée récemment par les médias allemands, a rappelé Golla: “Une politique ne peut être menée contre la volonté de 80% de la population du pays”.

Le célèbre barde allemand Konstantin Wecker s’est adressé aux participants de la marche dans un message de bienvenue. Il a rappelé les souffrances de centaines de milliers d’enfants qui vivent dans des zones de guerre sans accès aux soins de santé ni à l’éducation. Beaucoup d’entre eux souffrent de malnutrition, sont victimes de blessures par balle et des centaines d’entre eux meurent. «Les Occidentaux sont gâtés – 75 ans se sont écoulés depuis qu’il n’y a pas eu de conflit militaire en Europe occidentale. Les impérialistes mènent des guerres à la périphérie, défendant leurs intérêts économiques, par avidité pour l’argent… Habitués à la paix comme une évidence, nous ne voyons pas la mort que nos gouvernements sèment dans d’autres pays », a déclaré Wecker, soutenant la demande d’interdire le financement des forces armées de la République fédérale d’Allemagne.

De nombreux organisateurs locaux de la Marche de la Paix de Pâques ont également signalé un grand nombre de participants. Plus de 1000 personnes ont rejoint la marche à Berlin, selon Jutta Kausch-Henken du bureau de coordination de l’Association pour la paix de Berlin. Dans son discours, Kausch-Henken a appelé à la paix avec la Russie, exigé des salaires décents pour le personnel médical et l’arrêt des subventions à l’OTAN et à la Bundeswehr.

«Au lieu d’exiger la fermeture des centres de commandement américains et des bases militaires en RFA, qui sont des points de préparation pour les attaques de drones, au lieu de négocier avec les États-Unis pour retirer les armes nucléaires américaines stationnées en Allemagne, le gouvernement allemand a acheté 45 nouveaux bombardiers afin que la Bundeswehr puisse frapper des cibles avec des bombes nucléaires américaines, pour que l’Allemagne continue d’être un partenaire nucléaire des États-Unis », a-t-elle déclaré.

Felix Ockentorp, porte-parole de l’Association allemande pour la paix de la région de la Ruhr, s’est également réjoui des actions engagées. Ici, la marche de Pâques pour la Paix est traditionnellement la plus importante en termes de nombre de participants. Malgré les conditions difficiles, la colonne de manifestants traversant différentes grandes villes entre le Rhin et la Ruhr a rassemblé plusieurs milliers de personnes. La marche de Pâques dans la région de la Ruhr s’est terminée dans la ville de Dortmund sur la place centrale de la Hansaplatz.

Le mouvement de la Marche de Pâques est né en Grande-Bretagne: les premières actions y ont eu lieu le week-end de Pâques en 1959 à l’initiative de l’organisation internationale “War opposants International” sous la houlette du philosophe et personnalité publique britannique Bertrand Russell. En Allemagne, les premières marches de Pâques ont eu lieu en avril 1960 à Hambourg, Hanovre, Brême, Braunschweig et Munich. La raison de ces marches était les rapports dans la presse allemande sur les essais au cours de ces années de missiles balistiques américains à propergol solide MGR-1 “Honest John” dans le voisinage immédiat de l’ancien camp de concentration de Bergen-Belsen.