Pour dire la révolte qui secoue le peuple grec aujourd’hui devant la répression, les écrivains de Thessalonique prennent position sur l’invasion de l’Université d’Athènes avec ses poèmes. Mais qui est Manaolis Anagnostakis ?
Mort le 23 juin 2005 à Athènes, Manolis Anagnostakis fut l’un des derniers grands poètes grecs du XXe siècle. Né à Salonique en 1925, il rejoint début 1943 la section étudiante de l’E.P.O.N. (Organisation panhellénique unie des jeunes), qui combat l’occupation allemande. Il adhère aussi au Parti communiste grec, fer de lance de la résistance. De février à octobre 1944, il collabore à la revue littéraire résistante Xékinima et publie son premier recueil de poèmes, Époque, en 1945, à Salonique. Durant la guerre civile (1946-1949), le poète est arrêté le 23 octobre 1948 à cause de son appartenance au P.C. clandestin. Il venait de publier Époque 2. Condamné à mort l’année suivante, il n’est pas exécuté, grâce à la mobilisation du monde littéraire, et sera finalement libéré en 1951. Après des études de médecine à Salonique et à Vienne, il exerce la profession de radiologue de 1951 à 1978 également à Salonique, puis à Athènes jusqu’à sa retraite professionnelle. En 1954, il publie Époque 3. Le recueil Époque 1-2-3 sera édité à Athènes en 1956. De 1959 à 1961, il collabore à la revue salonicienne Kritiki. En 1962, il publie La Suite et en 1970 un recueil intitulé La Cible. Ses poèmes écrits de 1941 à 1971 sont rassemblés dans un seul volume en 1976, réédité en 1985 puis en 2000, sous le titre Les Poèmes. À la chute de la dictature des colonels en juillet 1974, il rejoint le Parti communiste grec de l’intérieur, composé de réformateurs qui ont été proches du Printemps de Prague. En 1979, il publie La Marge 1968-69, sur la période du début de la dictature des colonels, puis, en 1983, Post-Scriptum. En 1986, il reçoit le premier prix national de la poésie grecque. Outre ses poèmes, il a écrit de nombreux essais et des études critiques.
Mais quatre ans plus tard, il annonce qu’il arrête d’écrire car « l’époque ne l’intéresse plus ». Les querelles politiciennes et l’argent-roi lui imposent le silence. J’ai connu et vécu ce temps où les plus grands y compris ceux qui avaient vécu un début de dissidence à l’égard du socialisme avaient conscience de la fin de l’épopée et de ces longues décennies ou la contre révolution nous trainerait dans la fange de sa médiocrité. Je pense à Angelopoulos et à Heiner Muller, mais il en est tant d’autres, tous ceux que cette restauration empêchèrent d’être et il est juste que leurs mots saluent les révoltes d’aujourd’hui que les mêmes tentent d’étouffer par le silence. Mais vous pouvez faire ce que vous voulez, exercer votre censure imbécile, vous n’étoufferez pas plus la révolte des peuples devant l’injustice que les mots des poètes qui ont pris leur essor dans des cieux étrangers. (note et traduction de Danielle Bleitrach)
En invoquant Manolis Anagnostakis, le conseil d’administration de la Société littéraire de Thessalonique a pris position sur les événements de l’Université d’Athènes.
Et il voulait toujours…
Et il voulait encore beaucoup de lumière à l’aube.
Mais je n’ai pas admis le fait. Je pouvais voir maintenant combien d’objets de valeur cachés j’ai dû sauver combien de nids d’eau à préserver dans les flammes.
Vous parlez, vous avez l’air blessé dans les rues
Le tissu qui étrangle votre cœur dans un drapeau
La ville va tomber.
Là, soigneusement, dans un coin, je rassemble dans l’ordre, je ferme soigneusement mon dernier avant-poste de Kremos
couper les mains sur les murs,
décorer avec les crânes coupés les fenêtres,
tricoter avec les cheveux coupés mon filet et attendre.
J’ai raison, et je suis seul, et je t’attends.
Manolis Anagnostakis
De nos jours, nous n’avons pas le droit de rester silencieux et oisifs, alors nous nous déclarons présents avec les paroles du membre fondateur de notre Compagnie, le grand poète Manolis Anagnostakis. L’E.L.T. en tant qu’organisation spirituelle qui comprend dans ses rangs la majorité des écrivains et poètes de la ville déclare son horreur face à la profanation de l’asile du A.U.Th. par les forces de police.
Le Conseil d’administration de l’ELTH
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Epilogue / Επίλογος
(écrit dans la cellule où le poète attendait son exécution)
Ces vers seront peut-être les derniers Οι στίχοι αυτοί μπορεί και να ΄ναι οι τελευταίοι
Les tout derniers de ceux qui vont s’écrire Οι τελευταίοι στους τελευταίους που θα γραφτούν
Car les poètes du futur ont disparu Γιατί οι μελλούμενοι ποιητές δε θα ζούνε πια
Ceux qui pouvaient parler sont morts jeunes Αυτοί που θα μιλούσανε πέθαναν όλοι νέοι
Et leurs chants de douleur depuis sont des oiseaux Τα θλιβερά τραγούδια τους γενήκανε πουλιά
Dans un ciel étranger sous un autre soleil Σε κάποιον άλλον ουρανό που λάμπει ξένος ήλιος
Ou des fleuves violents qui courent à la mer Γενήκαν άγριοι ποταμοί και τρέχουνε στη θάλασσα
Où nous perdons la trace de leurs eaux Και τα νερά τους δε μπορείς να ξεχωρίσεις
Dans ces chants de douleur un lotus a grandi Στα θλιβερά τραγούδια τους φύτρωσε ένας λωτός
Nous en boirons la sève et renaîtrons plus jeunes. Να γεννηθούμε στο χυμό του εμείς πιο νέοι.
Traduction : Michel Volkovitch
Anthologie de la poésie grecque contemporaine 1945 – 2000
Ed. Poésie/Gallimard 2000.
Vues : 157
etoilerouge commune
poésie et musique de theodorakis un vaccin contre l’uniformité crade des atlantistes qui en grece comme en france pourrisent le coeur de la jeunesse avec une musique américanisée frelatée et corrompue.