Un enseignant égorgé pour avoir parlé en classe des caricatures du prophète! Qui n’est pas horrifié devant un tel crime? Et, en tant qu’enseignante, je partage la souffrance de ces enseignants devenus les fantassins du social, en première ligne face à toutes les conséquences d’une société en crise profonde, sans aide, sans reconnaissance et qui continuent à œuvrer pour des valeurs que tant d’autres abandonnent.
Hier encore, je décrivais ces enseignants du centre ville de Marseille tentant d’aider les enfants de leur quartier à vaincre les inégalités et faisant face pour cela y compris aux risques pour leur santé. C’est cette image du métier que je veux conserver face à la barbarie, celle d’enfants désireux d’apprendre comme la gratification du métier.
Je partage le souci des syndicats d’enseignants visant à éviter toute récupération étrangère à ce qui fait ce qu’il faut bien appeler une vocation.
Une telle barbarie ne leur est pas seulement étrangère à eux enseignants, elle est étrangère à l’humanité et je sais sans la moindre hésitation que les citoyens français de confession musulmane sont dans leur quasi totalité les premiers à ressentir une telle horreur. Je pense en particulier à ceux originaires d’Algérie à qui ce type de crime fasciste rappelle certainement les centaines de milliers de morts qu’il y a eu dans leur pays par les mêmes individus nés et entretenus par les conflits au Moyen-Orient, en Afghanistan, en Asie centrale.
L’homme était un Tchétchène, là encore cela nous fait souvenir d’une autre guerre provoquée à la frontière de l’URSS et entretenue pour que s’installe un régime d’oligarques. Les belles âmes qui ont refusé de voir ce qui se mettait en place pour finir de démanteler l’URSS.
Que ce soit un professeur d’histoire et géographie à qui le silence ait été imposé par cette horreur n’est pas un hasard… Je ne cesse de dénoncer le négationnisme de nos sociétés et j’ai créé ce blog pour l’affronter, un prolongement de cette vocation et de ce qui a poussé un certain nombre de jeunes gens à choisit cette discipline: comprendre toujours mieux le sens de l’humanité, de l’origine, à l’avenir, transmettre, éduquer chaque citoyen à gouverner.
Je parle souvent de ce que m’a appris Cuba, ce que j’ai découvert c’est la manière dont confronté à de terribles difficultés liées au blocus, le corps enseignant dont le salaire équivalait (en plus de la libretta) à l’achat d’un ananas apportait à tous les enfants une des meilleures formation qui soit, contribuait à l’éducation à la citoyenneté, mais aussi recevait tout l’appui moral et l’aide pédagogique nécessaire pour remplir une telle mission et il m’est arrivé de les envier. Si je suis restée communiste, si je me bats pour le socialisme c’est d’abord souvent en tant qu’enseignant chercheur rêvant d’une societé où ce que j’estime une vocation pourrait enfin s’épanouir dans cet échange entre un jeune et une personne dont le savoir est sans cesse questionné qui a nom le professeur. Provoquer ce questionnement à nos risques et péril est un des aspects les plus riches de notre métier, égorger, imposer le silence à cet échange est la preuve de la crise profonde de nos sociétés.
La lutte pour la paix et le droit à l’éducation, l’esprit de responsabilité, ces combats-là sont plus que jamais d’actualité et ils caractérisent le métier d’enseignant tel que je l’ai passionnément aimé. Je suis fière de savoir que des centaines de milliers d’enseignants chacun à leur manière tentent de faire face malgré le peu d’aide qu’ils reçoivent.
Danielle Bleitrach
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Rasolonjatovo Fidy
Chère Danielle, merci d’abord de votre effort merveilleux de partage avec ce site. Un professeur décédé dans ces conditions est bien entendu terrible. En préambule à mes propos à suivre, je tiens à préciser que suis un marxiste léniniste stalinien athée, et virulent à la limite du terrorisme rationnel sur ce dernier aspect 🙂
Cette épisode est révélateur pour moi de la balkanisation de l’enseignement et de sa destruction, derrière l’épouvantail cher au capital, la liberté, ici donc “la liberté d’enseignement”. Le socle commun un mot, un leurre, une chimère impossible sans une centralisation et une « standardisation de l’ enseignement et des programmes ». Mais cette situation est en outre très rentable pour les éditeurs historiques de manuels scolaires.
Je suis étonné que personne, de surcroît du parti, ne questionne la qualité de ce professeur décédé. « La liberté d’expression » est un thème abordé dans toutes les sections secondaires, et c’est un thème qui exige une pédagogie délicate auprès d’un public jeune, quelque soit sa provenance sociale.
Ce professeur s’est très mal pris pour présenter ce thème. Je suis professeur moi même, il est inadmissible de demander à des membres d’une classe « qui est musulman ? », « qui est juif » ou autre chose, et de demander aux personnes de cette appartenance de sortir de la classe s’ils craignent d’être choqué. On tient la une médiocrité abyssale en termes de pédagogie. En connaissance de cela et de la plainte des parents, on est en droit de se demander ce que le chef d’établissement et le recteur ont fait pour résoudre le problème rapidement autours d’une table ronde. Au vu de son indélicatesse, on aurait dû exiger de ce professeur des excuses pour manque de tact ou de discernement en conclave en face des parents et c’en était fini. En effet, dans une autre situation, vous imaginez bien le tsunami qu’une question « qui est juif dans la classe ? » aurait provoqué.
L’enquête le révélera probablement, mais cette faiblesse administrative a occasionné semble-t-il une plainte des parents, qui a occasionné une convocation devant les forces de l’ordre de l’enseignant. Cet enseignant aurait alors, scandaleusement osé et ce de toute évidence à tort (il a menti), porté plainte pour diffamation auprès de ces parents accusateurs.
Même si l’épilogue meurtrier hautement condamnable est ce qu’on retient, cette situation semble donc avant tout prendre ses racines dans un acte professoral délictueux, scandaleux, qui aurait probablement conduit à une mise à pied si sa question était « qui est juif dans la classe ? », mais aussi dans le manquement de l’administration pédagogique de l’établissement et de l’académie qui aurait dû prendre des mesures rapides de conciliations entre les partis.
Ne pointons pas juste le doigt au « monstre » islamiste. N’oublions pas la bête immonde capitaliste et sa destruction profonde de l’idée noble d’école de Robespierre.
Fidy Rasolonjatovo
Danielle Bleitrach
demain, je vais tenter de répondre sur le fond , en mon âme et conscience à ce qui est dit là. Je pense que dans ce domaine comme dans d’autres on a besoin d’un point de vue communiste et je vais essayer de préciser en quoi il consiste pour moi. Ce ne sera pas un point de vue dogmatique mais bien le fruit d’une expérience. A demain donc.
COTTY JEAN-LOUIS
Fidy Rasolonjatovo bonjour merci pour vos écrits respectables, l’athéisme serait-il devenu une tare, une anormalité? L’histoire est très variable en fonction des vaincus ou des vainqueurs!
Mais l’art consommé est de grossir l’évènement et ainsi faire oublier la réalité que vivent des millions d’humains face à une offensive sans précédent contre les conquis sociaux.