L’accord suicidaire qui va détruire l’économie industrielle pour tenter de sauver l’hégémonie US n’est pas imposé. Il est consenti. Nous avons exposé il y a quelques jours pourquoi il était illusoire d’attendre de l’ensemble des dirigeants des pays européens une quelconque résistance. Nous avons ensuite montré qu’il existait pourtant dans la perspective ouverte par les BRICS – sur ce terrain industriel, économique et commercial – porté particulièrement par la Chine socialiste et son Parti Communiste une alternative, la seule alternative. Comprendre comment les USA utilisent leur influence sur les systèmes politiques pour obtenir le consentement des dirigeants bourgeois de tant de pays à des politiques iniques, c’est comprendre comment les formes des guerres de dominations ont évolué. C’est essentiel pour sortir de l’enfermement et de l’impuissance. Cet article venu de Cuba nous en donne les clés. Cuba qui résiste depuis des décennies et qui reste la plateforme essentielle des politiques de changement de régime, le pays sur lequel tout a été essayé et tout a échoué. Cuba aussi a choisi la voie des BRICS pour vaincre le blocus et signe des accords de coopération concrets et pertinents (le dernier en date avec la Biélorussie) pour développer sa capacité de résistance, accélérer son développement autonome et vaincre le blocus. Une des clés de cette capacité de résistance, particulièrement opérante contre les opérations de déstabilisation économiques et psychologiques, est la capacité à appeler « chat » un chat, et notamment « agent étranger » un agent étranger. Nommer permet de donner sens, sens commun, porté par un parti communiste de masse, implanté dans toutes les couches de la population. Savoir qui parle, d’où et pourquoi il parle est primordial pour résister efficacement, c’est à dire pour vaincre. C’est la base qui organise réflexion, prise de conscience et action à cette échelle. (note de Franck Marsal pour Histoire&Société)
Rappelons que l’objectif central de cette variante de la guerre non conventionnelle est d’effrayer, de déstabiliser et de provoquer un choc. En résumé, il s’agit de semer le chaos et d’ouvrir la voie, avec un minimum de pertes, à l’intervention militaire. Cet article traduit par notre amie franco cubaine Gloria Gonzales Justo décrit comment après l’invention de « la fin de l’histoire », le choix des guerres multiformes non conventionnelles et la manipulation « cognitive » directe par un système simplifié par rapport à celui des ONG, des aides humanitaires contrôlées, y compris « les partis et associations de gauche », ce sont les monopoles financiarisés eux-mêmes qui prétendent manipuler la guerre dans les mentalités. D’accord, mais l’article sous-estime une autre tendance « cognitive », celle qui interdit la résistance collective, isole les individus dans une « immédiateté ». (note de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)
Auteur: Raul Antonio Capote | informacion@granmai.cu
11 juillet 2025 11:07:07
Illustration de Michel Moro
À l’heure actuelle, les dernières années du 20e siècle, durant lesquelles Francis Fukuyama a exposé sa thèse controversée, semblent lointaines : l’Histoire, comprise comme une lutte d’idéologies, avait pris fin et, par conséquent, le capitalisme représentait le dernier stade de l’évolution sociale.
C’était l’époque où Gene Sharp, fondateur de l’Institut Albert Einstein, consacré à la promotion de l’étude de l’action non violente, théorisait sur les révolutions de couleur. Pendant ce temps, l’Open Society Foundations (OSF), anciennement Open Society Institute, un réseau d’attribution de subventions fondé par le magnat George Soros, fusionnait en 1991 avec la Fondation pour une Entraide intellectuelle européenne, filiale du Congrès pour la liberté de la culture, créé en 1966 pour lutter contre le socialisme.
En 2004, Srdja Popovic et Slobodan Djinovic, deux des principaux dirigeants du mouvement Otpor en Serbie, fondèrent le « Centre pour l’action et la stratégie non violente appliquée » (Canvas). La même année, la CIA lançait le projet Genesis pour Cuba.
Or, le rêve de promouvoir le chaos, l’ingouvernabilité et le désordre à Cuba, au Venezuela et au Nicaragua, dans le but de provoquer un changement de système politique, fut un échec, malgré la mise à jour constante de la stratégie impérialiste.
CHANGEMENT DE STRATÉGIE : LES GUERRES MULTIFORMES
La nature de la guerre a radicalement changé. Bien que cela puisse sembler une affirmation catégorique, c’est une réalité définie par les conflits actuels, marqués par le développement vertigineux de la révolution technologique.
Les guerres multiformes de nature non conventionnelle consistent à planifier des actions visant à créer des conditions d’instabilité et de chaos dans un pays, favorisant ainsi la chute de son gouvernement. Ces actions se concentrent sur deux grands fronts : l’économie et le psychisme individuel et collectif.
– La guerre économique : elle vise à plonger les populations dans un état de désespoir tel qu’elles en perdent leur capacité à raisonner avec lucidité, tandis que les promoteurs de l’assassinat de caractère (par diffamation) agissent sur les réseaux sociaux.
– Les attaques psychiques : elles tirent parti des effets des agressions économiques et du bombardement communicationnel.
Les Opérations de soutien de renseignements militaires (MISO) sont un élément clé : elles visent à influencer les audiences « ennemies », leurs émotions, leurs comportements et leurs motivations. Ce terme, défini par le Pentagone, a remplacé en 2010 celui de PSYOP, utilisé depuis la Seconde Guerre mondiale.
Selon la CIA, la nature virale d’Internet a le potentiel d’affecter et même de changer le caractère d’une personne en quelques secondes, indépendamment de son identité ou de son expérience de vie. Chaque plateforme de réseau social et chaque site web sont conçus pour être addictifs et déclencher des débordements émotionnels.
Ces stratégies ont pour but de :
– Susciter la haine et créer des perceptions négatives.
– Agir sur des faiblesses, des automatismes, des peurs et des stéréotypes identifiés.
– Maîtriser les stéréotypes afin que le manipulateur contrôle son auditoire à partir de ressorts subjectifs.
GUERRE COGNITIVE ET NOUVELLES VARIABLES
La Guerre cognitive (CW) est un autre élément fondamental de la guerre multiforme : elle comprend des activités visant à influencer, modifier ou contrôler des perceptions, des émotions, des attitudes, des comportements et des processus décisionnels d’individus ou de groupes, dans le but d’altérer leurs capacités cognitives. Il s’agit d’une évolution des conflits contemporains, où les batailles se déroulent non seulement sur les champs physiques ou numériques, mais aussi dans l’esprit humain.
Les opérations ont deux objectifs principaux :
– Générer chez les individus un style cognitif résistant à tout argument qui contredit leurs propres perceptions et opinions, en les amenant à ignorer le contexte et à se concentrer uniquement sur certains aspects, tout en niant les aspects contradictoires.
– D’autres variables en Amérique latine incluent le recours au paramilitarisme, aux groupes criminels, au trafic de drogue, à la guerre judiciaire, au néo-pentecôtisme radical et à l’émigration induite.
Cependant, cette stratégie sur le terrain n’a pas atteint ses objectifs. Un changement s’imposait et la manne cessa de couler des coffres de l’Oncle Sam.
CHANGEMENT DE POLITIQUE ?
Ne nous leurrons pas : ce à quoi nous assistons aujourd’hui est une refonte de cette stratégie. Pour eux, il est beaucoup plus rentable et efficace d’utiliser les grands conglomérats médiatiques et technologiques.
– Pourquoi dépenser des millions dans des organisations, des institutions et des milliers d’ONG qui n’ont pas obtenu les résultats escomptés ? Plus besoin d’intermédiaires ; ils ont suffisamment d’expérience. Pendant des années, ils ont utilisé efficacement la grande industrie du divertissement, y compris Hollywood, pour mener leur guerre culturelle.
– De nos jours, ils opèrent directement par l’intermédiaire des grandes plateformes technologiques. Des militants promoteurs de la « démocratie » et d’autres, conscients ou non de ce qui se passe, travaillent pour Apple, Microsoft, Alphabet et Meta, somme toute, au service des intérêts du pouvoir des États-Unis.
– Ces conglomérats favorisent leurs « élus » en leur offrant de la visibilité, en leur fournissant des abonnés et des réseaux botnets [ordinateurs infectés et contrôlés], tout en manipulant les algorithmes à leur convenance.
Il s’agit d’un commerce lucratif dans lequel les entreprises gagnent de l’argent et les influenceurs monétisent des contenus pré-élaborés dans les laboratoires de la subversion. L’objectif est de maximiser le contrôle des flux financiers consacrés à la guerre hybride, tout en exerçant une pression économique et financière sans précédent sur les ennemis de Washington.
Parallèlement, ils cherchent à fermer les voies d’émigration légale et illégale, créant ainsi au sein des pays « ennemis » une « cocotte-minute » qui provoquera des protestations massives et une ingouvernabilité qui justifiera l’« aide humanitaire ».
Rappelons que l’objectif central de cette variante de la guerre non conventionnelle est d’effrayer, de déstabiliser et de provoquer un choc. En résumé, il s’agit de semer le chaos et d’ouvrir la voie, avec un minimum de pertes, à l’intervention militaire.
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