La description de ces liens étroits entre hommes d’affaire du Texas (l’état républicain par excellence, à l’inverse de celui de Californie) et de l’Utah (mormons également républicains) et cartels de la drogue, témoignent de l’imbrication étroite entre les flux pétroliers, ceux des armes et de la drogue de l’hégémonie des Etats-Unis. La répression de « l’immigration » clandestine et de ses gangs de voyous, s’attaquant en priorité aux travailleurs et même aux syndicats. L’intégration de fait qui s’est opérée entre les économies mexicaine, canadienne et étasunienne, repose en grande partie sur ces flux, et l’état de Californie en tire le fait d’être la quatrième économie mondiale, mais d’autres États comme le Texas et l’Utah sont aussi impliqués… De ce point de vue, il serait temps de voir à quel point la France désindustrialisée ressemble aux USA. (note et traduction de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)
Jim Cason et David Brooks, correspondants
19 mai 2025 07:13
L’arrestation de membres de familles dans l’Utah et le Texas accusés d’avoir fait passer en contrebande plus de 300 millions de dollars de pétrole en 2 881 cargaisons distinctes en collaboration avec les cartels de la drogue mexicains offre une autre perspective sur la façon dont les individus aux États-Unis travaillent avec le crime organisé pour générer des millions de profits par le biais d’activités illicites et blanchir ces fonds avant qu’ils ne soient renvoyés au Mexique.
James Jensen a conspiré avec sa femme, Kelly Jensen, et deux de leurs fils, Maxwell et Zachary Jensen, pour blanchir le produit de la vente de pétrole brut importé illégalement, selon l’acte d’accusation et le mandat d’arrêt dans l’affaire obtenus par ABC News dans l’Utah. Les paiements pour ce pétrole brut ont été envoyés à des entreprises au Mexique qui n’opèrent qu’avec l’autorisation d’organisations criminelles mexicaines. James Jensen savait que les paiements qu’il effectuait parvenaient à ces groupes criminels.
Dans une alerte envoyée aux banques américaines ce mois-ci, le Financial Crimes Enforcement Network (Fincen) a rapporté que « le gouvernement mexicain a signalé la perte de milliards de dollars de revenus à la suite du huachicol ». Cette agence du département du Trésor (l’équivalent de la Cellule de renseignement financier du Mexique) a expliqué que les huachicoleros utilisent diverses méthodes pour voler du carburant à Petróleos Mexicanos (Pemex), notamment en soudoyant des employés corrompus de la compagnie pétrolière, en menaçant d’autres personnes, ainsi qu’en forant des robinets dans les oléoducs, en cambriolant des raffineries et en détournant des camions-citernes.
L’acte d’accusation contre les Jensen n’identifie pas de cartels spécifiques, mais Fincen a alerté les banques américaines le 2 mai pour qu’elles renforcent la surveillance afin de « détecter, identifier et signaler les activités suspectes liées à la contrebande de pétrole brut volé au Mexique à travers la frontière sud-ouest vers les États-Unis par les cartels Jalisco New Generation, de Sinaloa, du Golfe et d’autres organisations criminelles transnationales basées au Mexique.
L’alerte Fincen précise que le pétrole brut est généralement transporté dans des camions-citernes à travers la frontière sud-ouest et identifié de manière trompeuse comme de l’huile usée ou d’autres matières dangereuses liées au processus de raffinage du pétrole et du gaz naturel dans le but d’éviter les inspections, les taxes et les réglementations. Les importateurs américains complices de ces stratagèmes dirigent souvent d’autres entreprises légitimes à la frontière.
Selon les estimations des agences de sécurité publique, les importateurs américains peuvent gagner plus de 5 millions de dollars pour chaque navire de pétrole brut en provenance des États-Unis et de juridictions étrangères, et avoir plusieurs navires en route chaque mois.
C’est précisément ce dont la famille Jensen est accusée : avoir effectué et tenté d’effectuer des transactions financières avec le produit d’une activité illégale par le biais de manœuvres destinées à dissimuler l’origine et la nature de ces fonds. L’acte d’accusation affirme que cette activité illicite de vente de pétrole volé et de blanchiment d’argent a commencé le 10 mai 2021 et s’est poursuivie tout au long de cette année.
Le gouvernement américain accuse le pétrole illicite d’être expédié du Mexique au Texas sur des barges. Le brut arrive dans une installation appartenant à Jensen appelée Arroyo Terminals, une société d’achat de pétrole à Rio Hondo, une ville au nord de Brownsville, au Texas. Les autorités fédérales ont arrêté Jensen et sa femme dans l’Utah, ainsi que leurs deux enfants au Texas, et ont également perquisitionné les bureaux d’Arroyo Terminals le même jour. Les Jensen ont plaidé non coupables des accusations.
Bien qu’aucun détail de l’affaire Jensen ne soit connu, Fincen décrit le processus général de blanchiment d’argent dans ces cas : après avoir vendu le pétrole brut volé sur les marchés américains et mondiaux de l’énergie, les importateurs américains reçoivent des virements électroniques nationaux et internationaux d’intermédiaires tiers, y compris des transferts acheminés sur plusieurs comptes et juridictions. en paiement du pétrole brut volé.
« Le vol de carburant et la contrebande de pétrole sont des sources de liquidités pour l’activité narcoterroriste de CJNG, qui est une source de revenus lucrative pour le groupe et lui permet de faire des ravages au Mexique et aux États-Unis », a déclaré le secrétaire au Trésor Scott Bessent. Le département du Trésor, a-t-il dit, continuera d’utiliser tous les outils disponibles pour attaquer sans relâche les cartels de la drogue et les organisations terroristes étrangères afin de rendre l’Amérique à nouveau sûre.
Cependant, selon les rapports et les alertes publiés ce mois-ci, le gouvernement américain devra également faire plus pour s’en prendre aux particuliers, aux entreprises et aux institutions financières de son propre pays.
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