Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

« Il faut garantir un travail pour tous avec un salaire à la hauteur » pourquoi ne pas dire le socialisme ?

Fabien Roussel

Certains camarades, qui à juste raison notent que ce que propose Fabien Roussel est le « socialisme » tel que les communistes l’ont toujours défini, se demandent pourquoi ce mot est devenu si difficile à prononcer. La réponse est contenue dans leur « critique » : parce que la France a été laissée en jachère depuis plus de trente ans et que Fabien Roussel est obligé de faire avec. Parce que certains camarades au lieu d’aller l’aider à avancer préfèrent ruminer leurs rancunes en espérant une réhabilitation alors que le parti est tel qu’il n’y a personne qui soit digne de prononcer une telle réhabilitation. Ce parti est à reconstruire avec ceux qui veulent bien se mettre à la tâche quel que soit leur passé récent. Ce que propose Fabien Roussel est la seule porte entrouverte et ce qui nous menace est tel que nous devons nous mettre au travail, vu la catastrophe imminente, le chômage, la guerre, la violence au quotidien, etc… Que les bouches s’ouvrent, pas de mannequins dans le parti : oui, mille fois oui, mais par rapport à la tâche et au bilan concret de nos actions pour juger de nos avancées théoriques. Fabien Roussel n’est pas « l’homme que nous aimons le plus », c’est un communiste honnête qui accepte de faire un travail et que nous devons aider à transformer le terrain, c’est déjà beaucoup plus que nous n’en avons eu depuis trente ans alors même qu’au plan international les planètes s’alignent. (note de danielle Bleitrach pour histoireetsociete)

par Philippe Allienne

Publié le 24 avril 2025 

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Dans le dernier livre qu’il vient de publier aux éditions du Cherche Midi, « Le parti pris du travail », le secrétaire national du PCF explique que le monde du travail, la production et la répartition des richesses doivent être au cœur du projet et du programme que défend le Parti communiste pour la France. Entretien.

Liberté Actus : Comment réagis-tu à l’annonce que vient de faire la direction d’ArcelorMittal France qui prévoit 636 suppressions d’emploi ?

Fabien Roussel : La direction d’ArcelorMittal déroule un plan que la CGT et le PCF ont dévoilé il y a plusieurs semaines. Elle repousse les investissements nécessaires pour décarboner. Elle est en train de préparer les esprits pour écrire les pires scénarios. Nous appelons le gouvernement à agir rapidement. 800 millions d’euros d’aide publique ont été mis sur la table pour accompagner le projet de décarbonation. Ou ArcelorMittal en met autant pour engager les travaux et garantir la pérennité du site, ou le gouvernement nationalise cet outil de production, comme le Parlement britannique l’a fait en autorisant le gouvernement à prendre le contrôle opérationnel de l’aciérie de British Steel à Scunthorpe. Dans la guerre économique qui se joue aujourd’hui, il ne faut pas trembler. Il faut tout mettre en œuvre pour préserver nos outils de production stratégique essentiels, et notamment ceux de la sidérurgie.

Les choix d’ArcelorMittal vont à l’inverse et désespèrent les salariés en fabriquant des centaines de chômeurs.

Je ne veux justement pas nourrir le désespoir et l’idée d’une France qui abandonne ses usines. Soyons combatifs et ambitieux. Malgré tout ce qui s’est passé ces dernières années, nous avons encore une industrie debout et des salariés, de l’ouvrier à l’ingénieur, remarquables et à la compétence reconnue. C’est notre principale richesse, c’est notre force. C’est un atout considérable qui s’additionne avec nos centrales nucléaires qui permettent de produire une énergie décarbonée et dont la sidérurgie a besoin. Nous avons toutes les cartes en main pour être compétitifs dans la guerre économique qui se mène aujourd’hui. Il ne faut pas hésiter à intervenir directement dans les choix stratégiques des groupes, à nationaliser si besoin, à subventionner nécessairement (la Chine et les États-Unis ne se gênent pas pour le faire).

« Dans une France divisée, j’appelle à l’union du peuple travailleur »

Dans ton livre, tu évoques une France plus divisée que jamais où l’on oppose ceux qui travaillent et ceux qui chôment, les Français et les étrangers, les fonctionnaires et les salariés du privé, les banlieues et la ruralité, les wokes et les anti-wokes, etc. Où se situe le vrai débat aujourd’hui ?

J’alerte en effet les Français sur le fait que tout est fait pour nous diviser. C’est très facile d’opposer la France des banlieues à celle des campagnes, d’opposer les salariés du public (je pense aux cheminots) à ceux du privé, ceux qui travaillent et ceux qui bénéficient du RSA. C’est trop facile d’opposer les travailleurs en fonction de leur couleur de peau ou de leur religion. Tous les jours, il y a des événements qui alimentent ces divisions avec la complicité de médias et de responsables politiques dont beaucoup d’extrême droite et de droite. Pendant ce temps, les banquiers et les financiers comptent leurs billets. Nous ne devons pas céder face à cette division et soyons unis pour résister au monde de la finance. Je regrette que parfois, les responsables de gauche alimentent les divisions. Pour ma part, je n’y céderai pas et j’appelle à l’union du peuple travailleur.

Mais quand tu dis vouloir combattre le principe du RSA au profit d’un travail pour tous, certains ne retiennent que la première partie de la proposition et cela provoque une polémique anti-Roussel.

Mais au contraire, je prends la défense, quelque part, des allocataires du RSA ! Non pas en leur disant, ne vous inquiétez pas, vous continuerez à toucher le RSA jusqu’à la fin de votre vie, ce n’est pas la société que nous défendons. On ne vit pas avec le RSA, on survit et on est obligé d’aller à la Banque alimentaire pour se nourrir. Le projet de société que portent les communistes, c’est une société où le RSA n’existe plus. Notre projet de société, c’est une société où chacun parvient à vivre avec un salaire en échange d’un travail, ou avec une formation avec un salaire comme base de moyen d’existence. Une formation à temps plein doit induire un salaire à temps plein.

« Il faut un choc d’investissement »

Du travail pour tout le monde plutôt que travailler plus ?

C’est pour cela que je réponds de la même manière au gouvernement et à son slogan « travailler plus » : travailler tous. Garantissons un travail à tous et commençons par les plus jeunes chez qui (pour les 18-25 ans) le taux de chômage est très élevé. Il faut garantir à chacun de nos enfants qui sortent de l’école d’avoir un travail correspondant à leurs compétences et à leurs diplômes avec un salaire adéquat. C’est l’ambition première que doit avoir un gouvernement.

Tu parles aussi dans ce livre des Ehpad et des conditions des soignants et des soignantes, tu évoques le monde paysan et le monde de la pêche artisanale. Dans ces différents domaines comme dans bien d’autres, les choses ne vont pas dans le bon sens.

Que ce soit le marin-pêcheur, l’agriculteur, l’aide-soignante dans un Ehpad, l’ouvrier sidérurgiste ou le professeur des écoles, etc. toutes les professions sont aujourd’hui dévalorisées. On contribue ainsi à construire une « petite France », celle des petits salaires, des petits boulots, des petits services publics, des petites industries. C’est tout l’inverse que l’on doit construire : une France forte, solide, avec une industrie forte, des services publics puissants et nombreux, des salaires élevés. Nous devons avoir une grande ambition pour le pays. La politique ne doit pas être de faire des économies dans le budget de l’État comme le propose le gouvernement avec 40 milliards d’euros de coupes supplémentaires, d’austérité. Au contraire, il faut libérer le capital.

Libérer le capital, c’est-à-dire ? Tu proposes quoi ?

Je propose un choc d’investissement important (environ 150 milliards par an) pour relancer l’industrie, baisser le coût de l’énergie, investir dans les infrastructures, etc. On parle toujours de réindustrialisation alors qu’on fait tout le contraire. Je le vis chez moi avec Outinord, à Saint-Amand, nous le voyons dans tous les secteurs d’activité avec ArcelorMittal, Vencorex, Atos, Thales, les pêcheurs bretons qui sont menacés, etc.

Tu réévoques la nécessité d’une banque publique, un sujet qui te tient à cœur. Peux-tu développer ?

En fait, elle existe. Le pôle public est constitué de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), la Banque postale et la Banque publique d’investissement (BPI). Ce pôle représente 1 300 milliards d’euros de dépôt. La politique de la Caisse des dépôts est définie par le Parlement, c’est donc sous contrôle public. Ces 1 300 milliards d’euros, c’est l’argent des Français. Ils doivent servir en priorité à financer nos besoins et c’est là que nous pouvons trouver les moyens de nous désengager des marchés financiers. Au lieu d’emprunter sur ces marchés à des taux parfois usuriers, faisons appel à ce pôle public pour financer les besoins de la France à taux zéro.

Le Parti pris du travail – Fabien Roussel – 158 pages – Ed Le Cherche Midi – 14 euros

je me permets d’ajouter un commentaire publié sur facebook par un camarade, que je partage sur le fond:

Mick Mac

Parlons clair pour que les enjeux soient posés hors la langue de bois pour grenouille interne !

Le Socialisme est mot tabou de ce PCF amnésique et complètement démissionnaire face à l’Histoire écrite par la bourgeoisie atlantiste des années 90.

Ce PCF alors brusquement renversé par la vague collaboratrice de 1987 sur fond de culpabilité inculte et d’opportunisme électoral lié à une stratégie prônant la délégation par les urnes.

Il aura fallu 40 ans pour qu’un secrétaire national du parti ose enfin décrire les contours d’une espérance de classe et inscrire la seule perspective de classe sur fond de renversement (dépassement…) du capitalisme dans sa phase impérialiste en déclin.

Mais le mot Socialisme reste encore un tabou faute d’avoir pris enfin le temps d’un débat éclairé par des matérialistes historiques sur l’Histoire des socialismes. Et singulièrement, bien sûr, le socialisme soviétique.

Tant qu’un réel débat contradictoire n’aura pas enfin permis d’élucider les limites, les spécificités, les enjeux du moments, les responsabilités prises, il n’y aura aucune possibilité pour le PCF (qui perd ses forces militantes de ce fait essentiel) :

– de reconnaître et accepter les démarches très diverses au Socialisme de nombreux pays actuellement, qu’elles correspondent ou non à notre conception originale,

– d’oser porter un Socialisme national, démocratique inscrit dans la réalité matérielle de notre Histoire comme de notre temps.

Les attaques permanentes insidieuses ou explicites de la part de prétendus communistes valets du réformisme toujours en lien avec des ex devenus de véritables renégats anti communistes par opportunisme electoraliste drivés par un fantoche manipulateur et beau parleur mais véritable diviseur trotskiste, reposent sur cette démission historique (outre quelques intérêts personnels bien petits et lamentables).

Attention : rien n’est joué, les taupes creusent toujours et minent considérablement la direction nationale, certaines fédérations, et visent un retour en arrière sur fond de temps électoral.

Ces forces internes et externes ont forgé la perte du siège de député de Fabien Roussel, le départ d’André Chassaigne remplacé par un petit Peu…

Elles visent à remplacer Fabien lors du prochain congrès par un opportuniste type Zamichel, sa Bidard de compagne ou un Boulet quelconque.

Ce livre de Fabien Roussel est une clarification des ambitions que portent les révolutionnaires dans le PCF, il vise à pousser la réflexion des communistes.

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