Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

La conférence de Berlin ou du cannibalisme européen…

L’ennui quand on écrit une livre, c’est que pour être compréhensible, on devrait y mettre tout ce que l’auteur a dans la tête.. A propos de l’expression péril jaune, et de la manière dont Marx voit le destin révolutionnaire de la Chine, j’ai déjà été obligée de parler de l’Allemagne, celle de Bismarck et de Guillaume II, le dernier empereur allemand. J’ai dû faire une rapide caricature de ce crétinissime empereur en train de réaliser l’unité de l’Allemagne par la militarisation culturelle de son peuple… C’est à ce Guillaume II à qui l’on attribue l’expression péril jaune. En fait, en matière de colonisation, les Allemands ne sont pas les pires, les Anglais sont de loin indépassables même par les Français, mais comme les Allemands sont arrivés les derniers ils mettent les bouchées doubles. En répondant à divers amis qui ignorent tout de l’histoire de la mondialisation coloniale et qui ont découvert grâce à moi tous ces abrutis, je me suis dit que malheureusement je ne pouvais pas tout raconter sur ces gens ni sur la manière dont ils ont inventé le péril jaune… hier comme aujourd’hui. Pourtant il y a 140 ans, nos ancêtres ont organisé le congrès de Berlin… et ça vaut le détour…

Dans la seconde moitié du XIXe siècle, moins de 15 ans après le massacre des Communards, dans le sillage des explorateurs et missionnaires, le contient africain fut le terrain des rivalités européennes pour s’y tailler des empires coloniaux. Cette compétition multipliait les conflits. Aussi Bismarck eut-il l’idée de régler les rivalités dans un Congrès où serait discuté sereinement le partage de l’Afrique. Les causes à de telles disputes sont multiples mais la principale est liée aux crises de surproduction, chaque puissance européenne veut avoir un maximum de territoire dans lequel écouler sa camelote en dépouillant ladite contrée soit de son or, son argent, soit de ses ressources. Il y a donc les territoires mais aussi la recherche des points stratégiques pour une conquête future de l’hinterland n’en est pas une moindre.

Au moment où Trump veut renouer avec les saines pratiques du marchandage des territoires, pour bloquer les Chinois dans l’arctique, il serait bon de se souvenir de la manière dont on a déjà pratiqué dans le vieux continent, ça peut donner des idées à notre rejeton étasunien…

I. Rivalités entre grandes puissances


Les principales rivalités mettent en prise la France, l’Angleterre, le Portugal, l’Allemagne et la Belgique. Chacune de ces puissances a sa propre utopie de grandeur souvent articulée sur le roman national et sa propre route. La grande Bretagne par exemple veut faire la liaison le Caire et le Cap. La France rêve de réunir sous sa possession l’ensemble des territoires compris entre la côte ouest (Dakar) à la cote est (Djibouti). C’est ainsi que des rivalités naquirent entre Français et Belges pour la possession du Congo. Entre Belges et Portugais car les Portugais ayant occupé l’Angola ferment l’accès à la mer aux Belges de Léopold II qui solidement s’installe sur les rivages du fleuve Congo.


Mais surtout entre l’Allemagne et les autres puissances. L’Allemagne a été la dernière puissance européenne à s’intéresser à la colonisation. La pression des grands commerçants d’Hambourg y est pour quelque chose. Ainsi l’Allemagne occupa plus de 1500 de côte le Tanganyika et les possessions françaises sur la côte orientale. Allemagne occupa ainsi la Namibie, le Togo et le Cameroun. Ce qui provoqua la colère des autres puissances car leur possibilité d’expansion sont désormais réduites. Ainsi pour éviter tout affrontement car la menace était réelle, Le chancelier d’Allemagne Bismarck tablant sur son art diplomatique convoqua un congrès à Berlin.

II. La conférence de Berlin

La conférence s’est tenue donc à Berlin la capitale de l’Empire allemand. Entre le 15 novembre 1884 et le 23 février 1885, seize nations européennes étaient présentes, les mêmes que celles qui se jetèrent plus tard après les quarante millions de morts de la première guerre mondiale, les 20 millions de morts chinois, sur la jeune URSS, sous le prétexte de la menace que le communisme faisait peser sur l’humanité.
Elles décidèrent tranquillement même si les débats ont été parfois houleux du partage de l’Afrique. Une Afrique considérée comme un immense gâteau à se partager sans embrouille. Ainsi plusieurs décisions sortirent de ce congrès. Sur le plan humanitaire, les européens s’engagent à supprimer l’esclavage pour permettre à l’Afrique de se repeupler. Sur le plan économique la liberté de navigation est proclamée sur tous les grands fleuves africains offrant ainsi aux commerçants de réelles perspectives de profit. Sur le plan politique, il est reconnu l’indépendance de l’état du Congo confié au roi des Belges Léopold II. Cependant, la France garde les territoires de la rive droite du fleuve Congo (Gabon, Congo Brazzaville) ; tandis que le Portugal garde l’enclave de Cabinda.
Enfin, il est décidé que toute puissance établie sur la côte a le droit de prolonger ses conquêtes dans l’hinterland jusqu’à ce qu’elle rencontre une autre puissance ; et tout traité signés avec un chef local doit être notifié aux autres puissances.

III-Les conséquences de la conférence de Berlin

Pour beaucoup d’historiens, les malheurs de l’Afrique commencent à partir de ce moment. Car des personnes venues d’ailleurs ont procédé au partage du continent. Un partage arbitraire fait au bon vouloir des puissances européennes et qui ne tient pas en compte les réalités géographiques, culturelles et ethniques de l’Afrique ; la balkanisation de l’Afrique y trouve son origine. Une colonisation sans complaisance allait s’en suivre et les états qui naîtront après les indépendances de cette colonisation en seront marqués à jamais (conflits frontières, guerres ethniques, revendication indépendantiste).

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1 Commentaire

  • Chabian
    Chabian

    Une très forte installation au Musée d’art Contemporain à Charleroi illustre cette conférence de Berlin et je vais essayer de joindre une photo (il y en a d’autres en cherchant sur le titre de l’oeuvre) : Scramble for Africa (La course à l’Afrique) de Yinka Shonibare (des africains à la tête coupée attablés autour d’une carte de l’Afrique).
    https://yinkashonibare.com/artwork/scramble-for-africa-2003/

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