Le Changement soudain en Syrie est un choc mondial, il peut aggraver le chaos au Moyen Orient, par Yang Sheng, Li Meng et Li Yawei

MONDE / MOYEN-ORIENT Voici l’analyse qui nous parait la plus pertinente, celle du tabloïd chinois Global Times. Elle est assortie de toute une série de « faits » et déclarations qui disent la nature explosive des tensions et « solutions hâtives » qui partout du Moyen Orient à la Corée du sud en passant par l’Europe sont en train d’être bricolées face à la passation des pouvoirs de l’imprévisible Trump confronté à ses promesses anti-inflationnistes et à une politique de tarifs douaniers qui ne peut qu’entrainer à la hausse. Comment au moins limiter les frais d’entretien des guerres alors que l’on a la menace à la bouche ? Les Russes jouent aux échecs et sont non seulement sur le terrain mais ont déplacé leurs pièces à travers des négociations serrées avec des partenaires plus ou moins fiables tout azimut. La déclaration du PCF a sur le fond un point de vue excellent : laisser les Syriens régler leur sort et refuser la désintégration des ingérences. Ce n’est pas seulement le respect du droit mais aussi vu l’imbroglio ce à quoi il est possible d’amener tout le monde à se ranger, comme pour le Liban ou un Etat palestinien. La Russie a aidé à enlever l’obstacle Bachar El Assad tout en à l’inverse des USA assurant sa sécurité et celle de sa famille et sans doute avec l’accord de la Chine, de l’Iran et même de la Turquie qui a mené la danse en assurant à chacun qu’il agissait en conformité avec ses intérêts, lui ne cherchant qu’à en finir avec la masse des réfugiés syriens et avec le problème Kurde. Ceux-ci sont une fois de plus les sacrifiés parce qu’ils ont fait confiance aux Etats-Unis et à Israël. Mais c’est comme pour les communistes iraniens, ces derniers d’ailleurs étant nettement plus conscients, qui peut donner des leçons à des peuples pris dans un tel bourbier ? La limite de la déclaration du PCF, qui sur le fond est juste c’est la manière dont (et là on reconnait la patte de Boulet) quand après avoir jugé que les Syriens devaient choisir, le texte prend position pour le FDS et dénonce « les théocraties ». Ce dont se gardent bien les Chinois dans cette analyse exemplaire. Mais le plus caricatural est Mélenchon, qui avec son entourage palestinien de choc opère un virage à 190° et sans même attendre de voir quels intérêts servent les turco-djihadistes se joint à ceux qui dansent pour manifester une joie qui n’est sans doute pas encore celle du peuple syrien ni celle du peuple palestinien. (note et traduction de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)

Cette photo aérienne montre de la fumée s’échappant d’un bâtiment à Damas, le 8 décembre 2024. Les rebelles ont déclaré avoir pris Damas le 8 décembre. Crédit photo : VCG

Le ministère chinois des Affaires étrangères a déclaré dimanche que la Chine suivait de près la situation en Syrie et espérait que la stabilité reviendrait dès que possible. La situation en Syrie a connu des changements spectaculaires et étonnants alors que les forces de l’opposition ont pris le contrôle des chaînes de télévision d’État dimanche pour annoncer ce qu’elles ont décrit comme la chute de Damas et la fin du gouvernement du président Bachar al-Assad.

La situation en Syrie a subi un changement soudain au cours du week-end. Dimanche, des rapports ont indiqué que les forces de l’opposition étaient entrées dans la capitale Damas et qu’Assad avait quitté le pays, bien qu’il n’y ait pas eu de confirmation officielle.

« Le gouvernement chinois aide activement les ressortissants chinois qui souhaitent quitter le pays à le faire de manière sûre et ordonnée, et reste en contact avec les Chinois encore en Syrie et leur offre des conseils sur la façon de rester en sécurité. Nous exhortons les parties concernées en Syrie à assurer la sûreté et la sécurité des institutions et du personnel chinois en Syrie. L’ambassade de Chine est toujours en activité et remplit son devoir en Syrie. Nous continuerons à apporter toute l’aide possible aux ressortissants chinois dans le besoin », a déclaré dimanche le ministère chinois des Affaires étrangères dans un communiqué.

L’évolution rapide de la situation a provoqué l’étonnement dans le monde entier, les pays de la région et les grandes puissances n’étant apparemment pas préparés au changement brutal en Syrie.

Au cours des derniers jours, la situation en Syrie a connu des changements rapides et spectaculaires. Dimanche, le ministère russe des Affaires étrangères a annoncé qu’à la suite de ses entretiens avec un certain nombre de participants au conflit armé en République arabe syrienne, Bachar al-Assad avait décidé de démissionner de son poste de président syrien et de quitter le pays, ordonnant au gouvernement de transférer le pouvoir pacifiquement, selon un communiqué du ministère russe des Affaires étrangères publié dimanche.

Les combattants de l’opposition syrienne ont annoncé dimanche un couvre-feu à Damas, en vigueur de 16h00 (13h00 GMT) à 5h00 heure locale, après leur prise de la capitale syrienne qui a conduit à l’effondrement du gouvernement du président Bachar al-Assad, a rapporté l’agence de presse Xinhua.

Le sort de la Syrie relève de la seule responsabilité du peuple syrien et doit être poursuivi sans imposition étrangère ni intervention destructrice, a déclaré dimanche le ministère iranien des Affaires étrangères dans un communiqué, qui a également déclaré que les relations entre les deux nations de l’Iran et de la Syrie ont une longue histoire et ont toujours été amicales, et qu’il est prévu que ces relations se poursuivent, selon CCTV.

L’agence de presse officielle irakienne a rapporté que le bâtiment de l’ambassade irakienne dans la capitale syrienne a été évacué et que le personnel a été transféré au Liban. Cela survient après que l’Irak a fermé son passage frontalier avec la Syrie et que l’ambassade iranienne à Damas a été prise d’assaut par des membres du groupe rebelle Hayat Tahrir al-Sham (HTS), a rapporté Al-Jazeera.

La Russie, l’Iran, la Turquie, l’Irak, l’Égypte, la Jordanie, l’Arabie saoudite et le Qatar ont publié une déclaration commune appelant à une « solution politique » à la question syrienne dans la capitale du Qatar, Doha, a rapporté dimanche l’agence de presse Xinhua.

Samedi, les ministres des Affaires étrangères de la Russie, de la Turquie et de l’Iran se sont entretenus à Doha pour discuter de la Syrie, appelant à la fin de la guerre le plus rapidement possible. À l’issue de la réunion, les trois pays, en collaboration avec les cinq pays arabes ont publié une déclaration commune exprimant leur inquiétude face à la menace que la crise syrienne pourrait faire peser sur la région et la sécurité internationale.

Selon Al-Jazeera, HTS est le plus grand groupe combattant de l’opération de dissuasion de l’agression lancée par les rebelles en novembre. Anciennement Jabhat al-Nusra, puis Jabhat Fateh al-Sham, il s’agit d’un groupe de factions alliées, dont Jabhat Fateh al-Sham, Liwa al-Haqq, Jabhat Ansar al-Din et Jaysh al-Sunna.

Au début de la guerre en Syrie, Jabhat al-Nusra a été formé en 2012 par l’EIIL (ISIS), dont il s’est séparé un an plus tard et a déclaré son allégeance à al-Qaïda. Il a rompu ses liens avec Al-Qaïda et s’est joint à d’autres factions pour se rebaptiser HTS en 2017. HTS contrôle en effet Idlib et compterait jusqu’à 30 000 combattants, a rapporté Al-Jazeera.

Plusieurs médias ont rapporté qu’Assad avait déjà quitté le pays, citant les forces d’opposition. La présidence syrienne a déclaré samedi que M. Assad exerçait toujours ses fonctions constitutionnelles dans la capitale, a rapporté dimanche Xinhua. Les journalistes de Xinhua à Damas ont été témoins d’intenses coups de feu dans les rues, avec un trafic dense causé par les voitures quittant la capitale.

Une vidéo a montré le Premier ministre syrien Mohammad Ghazi Al-Jalali escorté par les forces de l’opposition à Damas dimanche, prétendument vers un hôtel pour remettre l’autorité gouvernementale, selon CNN.

Jalali a déclaré que le gouvernement était prêt à « tendre la main » à l’opposition et à remettre ses fonctions à un gouvernement de transition, a déclaré Associated Press.

Jalali avait précédemment déclaré à une chaîne d’information saoudienne lors d’un entretien téléphonique qu’il avait parlé pour la dernière fois avec Assad samedi, mais qu’il n’avait pas été en mesure de le joindre depuis. Les forces de l’opposition qui sont entrées à Damas ont déclaré qu’elles travailleraient avec Jalali.

Plus tôt dans la journée, deux sources syriennes ont déclaré à Reuters qu’Assad aurait été aperçu à bord d’un avion ayant décollé de l’aéroport de Damas au moment où il a été rapporté que la capitale avait été prise par les rebelles. L’avion a ensuite fait un demi-tour surprenant et a disparu de la carte. Il n’y a pas de confirmation officielle de l’information.

Abou Mohammad al-Julani, chef du groupe rebelle HTS, a interdit à ses forces de s’approcher des institutions publiques, affirmant qu’elles resteront sous la supervision du Premier ministre du pays jusqu’à ce qu’elles soient officiellement remises, selon un communiqué publié sur les médias sociaux du groupe, a rapporté Xinhua. Il interdit également à ses hommes d’ouvrir le feu en l’air.

Plus tard dimanche, les forces de l’opposition en Syrie ont pris le contrôle des chaînes de télévision d’État pour annoncer ce qu’elles ont décrit comme la chute de Damas et la fin du gouvernement d’Assad. Un homme en treillis militaire, flanqué de combattants armés, a lu la déclaration à l’antenne, l’appelant « Déclaration n° 1 ». Il a affirmé que des unités rebelles avaient capturé Damas, selon Xinhua.

Xue Dan, un journaliste du Global Times qui a évacué la Syrie samedi, a déclaré que la situation s’était aggravée à partir de jeudi, l’ambassade de Chine ayant informé d’urgence les ressortissants chinois de quitter le pays. « Samedi matin, deux journalistes chinois et moi-même sommes partis d’un hôtel à Damas », a déclaré Xue. Ils se sont tous dirigés vers le Liban.

L’ordre dans la capitale syrienne était normal et Xue a dit qu’il avait vu ce qui semblait être des véhicules militaires étrangers sur les routes, et des gens faisant la queue au port.

« Les habitants de Damas sont profondément préoccupés par le fait que la situation devienne incontrôlable, que la monnaie se dévalue fortement et que les gens se précipitent sur les marchés pour acheter de la nourriture et d’autres matériaux pour la vie quotidienne », a noté M. Xue.

Que va-t-il se passer ensuite ?

Li Xinggang, chercheur à l’Institut d’études sur le pourtour méditerranéen de l’Université d’études internationales du Zhejiang, a déclaré dimanche au Global Times que la Syrie risquait très probablement de sombrer dans des troubles à long terme à l’avenir. « Parce que les différentes forces armées régionales ont des objectifs et des exigences différents dans la question très complexe de la Syrie. Le gouvernement d’Assad ne peut pas résister au changement actuel, et aucune puissance ne peut construire un nouvel ordre ou créer un nouvel équilibre des pouvoirs immédiatement », a-t-il déclaré.

Depuis longtemps, de nombreuses forces étrangères soutiennent les forces antigouvernementales syriennes pour affaiblir et combattre le régime d’Assad, les troupes américaines occupant toujours des champs pétroliers et des voies de transport clés, ce qui a gravement endommagé le processus de reconstruction et l’économie de la Syrie, a noté M. Li.

Wang Jin, professeur agrégé à l’Institut d’études du Moyen-Orient de l’Université du Nord-Ouest à Xi’an, a déclaré dimanche au Global Times que « les problèmes économiques sont la raison fondamentale. La Syrie disposait de forces militaires fiables pour s’assurer que la situation restait essentiellement sous contrôle, mais les problèmes économiques ont sapé la capacité du pays à maintenir sa force militaire, c’est pourquoi les forces gouvernementales ont fui ou se sont rendues rapidement ».

« Depuis l’éclatement de la dernière série de conflits israélo-palestiniens l’année dernière et le conflit russo-ukrainien, ainsi que le récent conflit entre le Hezbollah et Israël, les principaux alliés d’Assad ont tous été sapés et ne sont pas en mesure de fournir un soutien suffisant pour défendre le régime, ce qui a permis aux forces d’opposition de s’emparer des grandes villes en si peu de temps » a déclaré Li.

L’avenir sera très imprévisible, car cela dépend de la mesure dans laquelle les groupes armés à l’intérieur du pays peuvent s’entendre sur une solution politique. S’ils échouent, il pourrait y avoir une nouvelle guerre civile. La coordination et la communication entre les troupes militaires étrangères des grandes puissances et les puissances régionales comme les Etats-Unis, la Russie, l’Iran et la Turquie sont également importantes, a déclaré M. Wang, ajoutant que les forces kurdes et Israël pourraient influencer les résultats.

Song Zhongping, expert militaire chinois et commentateur télévisé, a déclaré : « Un autre problème préoccupant est qu’il pourrait y avoir des terroristes et des extrémistes qui pêchent dans les eaux troubles du pays, et maintenant ils auront des armes et des ressources laissées par les forces gouvernementales syriennes, ce qui leur permettra potentiellement de mener davantage d’attaques à l’intérieur et à l’extérieur de la région. La situation a désespérément besoin d’efforts et de consensus, non seulement dans le pays, mais aussi au sein de la communauté internationale pour rétablir la paix et l’ordre ».