Face à ce qui est au cœur des préoccupations de la majorité des Français aujourd’hui à savoir la manière dont ceux qui nous entraînent vers la guerre mondiale, le désastre nucléaire dans le même temps poursuivent leur œuvre de destruction de l’emploi, celui du tissu industriel comme des services publics et comment peut-on résister à une telle offensive antidémocratique… La réponse est dans les luttes mais celles-ci ont besoin de perspective politique qui ne peut pas ignorer l’architecture des relations internationales. A ce titre l’élection de Trump a été une révélation, non que l’élection d’un républicain grossier soit sur le fond différent d’une démocrate un peu plus policée, c’est bonnet blanc et blanc bonnet mais l’incapacité de nos gouvernants éclate au grand jour face à cet ordre mondial qu’ils prétendent défendre sans moyens. C’est dans ce contexte qu’il faut comprendre les BRICS, comme celui d’un cadre souple permettant de défendre un projet français, le socialisme à la française pour nous communistes, en négociant les coopérations indispensables et en refusant les conflits sans issues. L’analyse de Novikov montre qu’il s’agit du seul cadre réellement « progressiste » qui se présente au niveau international mais dans un contexte de « consensus » qui en limite la portée réelle… Donc pour compléter l’analyse de notre camarade communiste russe, ce cadre consensuel pour poursuivre sa dynamique a besoin du « socialisme » qui partirait de la réalité de chaque nation et de ses luttes. C’est exactement ce que nous suggérons aux communistes et progressistes français. (note de Danielle Bleitrach traduction de Marianne Dunlop)
L’évolution de l’architecture des relations internationales est de plus en plus au centre des événements mondiaux. Le rejet du diktat américain et le mouvement vers la multipolarité sont la marque de l’époque. Ce processus se manifeste déjà par une multitude de facteurs. L’un des plus importants est la création et le renforcement des BRICS. Le dernier sommet de cette organisation s’est tenu à Kazan du 22 au 24 octobre. Mais le succès de cette réunion n’efface pas un certain nombre de questions à l’ordre du jour, auxquelles il est important de répondre.
Oui, c’est une évidence : le monde est entré dans l’ère de la confrontation globale. Celle-ci devient de plus en plus aiguë. Les grands événements de notre temps sont de plus en plus examinés à travers son prisme. Dans ce contexte, chaque tendance significative de notre monde fait l’objet d’une mythologisation de part et d’autre des barricades idéologiques et politiques. Il s’agit d’un processus tout à fait naturel.
Le thème des BRICS est au centre de la lutte idéologique contemporaine. L’évaluation des perspectives de cette organisation dans un tel environnement implique la nécessité de débarrasser l’essence de la question de tout un « ballast ». Et les écueils sont nombreux. L’Occident attaque sans relâche cette organisation internationale en plein essor. Les sympathisants des BRICS l’idéalisent et exagèrent les résultats obtenus.
Dans une telle situation, l’analyse objective est une tâche extrêmement difficile. Mais sans ce travail, nous sommes condamnés à « nous égarer entre trois pins » et à tomber dans les pièges de la conjoncture politique. Je crois qu’il s’agit d’un de ces cas où la tâche d’une analyse complète, honnête et objective ne peut être accomplie que par nous, communistes, qui sommes armés du matérialisme historique et d’une approche de classe de l’étude de phénomènes vastes et complexes.
Commençons par un rappel simple mais important : près de deux décennies se sont écoulées depuis l’émergence des BRICS. Au cours de cette période, l’organisation est passée d’un « club » amorphe de quelques grands pays du monde en développement à un acteur important de la politique internationale. Les BRICS ont été lancés en 2006 par le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine. L’association est apparue sous le nom de BRIC. Cinq ans plus tard, l’Afrique du Sud a rejoint l’organisation. La lettre « S » a alors été ajoutée à l’abréviation de l’organisation. Récemment, les BRICS ont rapidement doublé de taille, mais il a été décidé de ne pas changer de nom.
Depuis le 1er janvier de cette année, l’Iran, l’Éthiopie, l’Égypte et les Émirats arabes unis ont rejoint l’association. La position de l’Arabie saoudite n’est pas toujours claire. Sa demande d’adhésion aux BRICS a été approuvée. Toutefois, la monarchie a déclaré qu’elle continuait à étudier la faisabilité de cette démarche. Lors du sommet de Kazan, Riyad n’a pas participé en tant que membre à part entière, mais a préféré des réunions dans le cadre des « BRICS Plus ».
La position de l’Argentine a également changé de manière spectaculaire. Tout est arrivé à cause du changement de pouvoir dans ce pays. Milei, un politicien fantasque et légèrement fou en apparence, s’est avéré être un homme politique ferme et cohérent – le chef d’orchestre de la politique néolibérale. Il est tout à fait naturel que, admirant les États-Unis, il ait refusé de rejoindre les BRICS.
Cependant, même en tenant compte des « refus », les ressources combinées des pays de l’association sont impressionnantes. Les BRICS représentent 34 % du territoire mondial et 45 % de sa population. Bien sûr que c’est impressionnant ! C’est 39 % de la production industrielle ! C’est 36 % du PIB mondial en parité de pouvoir d’achat ! En comparaison, les pays du G7 représentent moins de 30 % du PIB total et seulement 31 % de la production industrielle.
Et ce n’est pas tout. Trente-quatre pays ont annoncé leur volonté de rejoindre les BRICS. Parmi eux, l’Azerbaïdjan, la Biélorussie, le Venezuela, la Malaisie, la Tunisie, la Turquie, le Sri Lanka, le Venezuela et d’autres encore. Des représentants de la plupart d’entre eux étaient présents aux événements de Kazan. Selon Youri Ouchakov, assistant du président russe, un total de 36 délégations sont venues, dont 22 dirigées par des chefs d’État.
Il suffit de rappeler que le président chinois Xi Jinping, le premier ministre indien Narendra Modi, le président iranien Masoud Pezeshkian et le président turc Recep Tayyip Erdogan ont participé au sommet. L’autorité croissante des BRICS a été confirmée par la présence d’António Guterres au forum. Le secrétaire général des Nations unies a fait l’objet d’une attaque médiatique en Occident, mais ce n’était pas une surprise pour lui.
Le sommet a débouché sur l’adoption de la déclaration de Kazan. Il s’agit d’un document volumineux, composé de 134 points répartis sur 43 pages. En fait, il aborde tous les problèmes les plus importants de notre époque et tous les « points sensibles » de l’ordre mondial existant. Les membres des BRICS ont notamment exprimé leur inquiétude face à l’escalade de la situation au Moyen-Orient. Ils ont condamné Israël pour ses attaques contre la Palestine, le Liban et la Syrie, et ont soutenu l’adoption de l’État palestinien aux Nations unies dans les frontières de 1967. La nécessité pour toutes les parties de reprendre l’accord nucléaire avec l’Iran a été soulignée. Il a également été annoncé que les membres des BRICS accueillent favorablement les mesures visant à résoudre le conflit ukrainien.
Un groupe important de propositions concerne la mise en place d’un système financier et économique plus équitable. Les pays BRICS ont exprimé leur inquiétude quant à l’impact négatif des sanctions unilatérales. Ils ont appelé à une réforme des institutions de Bretton Woods en renforçant la contribution des pays en développement à l’économie mondiale. Cherchant à simplifier la procédure du commerce international sous le rôle central de l’OMC, les participants au sommet ont appelé à une plus grande ouverture, avec un traitement spécial pour les pays en développement. Il a été décidé de s’opposer conjointement aux mesures protectionnistes unilatérales qui ne sont pas conformes aux principes du commerce international.
Les BRICS entendent contribuer au processus d’élaboration d’un modèle plus équitable de commerce et d’interaction économique. À cet égard, la déclaration note la volonté d’avancer vers la création d’une nouvelle plateforme d’investissement sur la base de la nouvelle banque de développement, connue sous le nom de banque des BRICS. La déclaration soutient l’augmentation du nombre de pays actionnaires de la banque et sa transformation en un outil de développement efficace pour les « marchés émergents ».
Il est important de noter que les États membres ont réaffirmé leur engagement à construire un ordre mondial multipolaire. Ils ont convenu de se coordonner pour renforcer le rôle du Sud. L’idée d’une réforme globale de l’ONU pour la rendre plus démocratique, plus représentative et plus efficace a été soutenue.
Malgré l’importance de la déclaration, il est difficile de ne pas remarquer que les participants des BRICS ont soigneusement évité les « angles vifs ». Il n’y a pas eu de percée sensationnelle au cours du sommet, dont l’intérêt a été alimenté « des deux côtés du front de la propagande ». Ainsi, aucune annonce n’a été faite concernant le lancement d’une monnaie des BRICS ou la création d’un système de paiement unique. Les parties ont seulement accepté d’explorer cette possibilité, en déclarant : « Nous reconnaissons l’importance d’explorer la possibilité d’interconnecter l’infrastructure du marché financier des BRICS. Nous avons accepté de discuter et d’explorer la possibilité d’établir une infrastructure de règlement et de dépôt transfrontalière indépendante ».
Il faut reconnaître que la grande majorité des points de la déclaration de Kazan ont été entendus sur les plateformes internationales – politiques et d’experts – depuis de nombreuses années. Par exemple, la création d’un État palestinien est régulièrement réclamée par la plupart des pays du monde lors des votes à l’Assemblée générale des Nations unies. Même l’Union européenne et le Parti démocrate des États-Unis sont formellement en faveur d’une telle décision.
À Kazan, les déclarations sur un ordre mondial multipolaire, sur la protection des intérêts du Sud, sur un système financier et économique équitable… Ces thèses sont devenues monnaie courante dans les différents débats de ces dernières années. Mais il y a une différence significative : aujourd’hui, ces demandes ne sont plus entendues uniquement par des forces politiques individuelles ou des groupes d’experts. Elles sont désormais exprimées, et conjointement, par les chefs d’États importants et influents.
Tout cela nous amène à la question la plus générale : les perspectives des BRICS. Certes, les indicateurs de l’organisation en termes de territoire, de population et de PIB de ses États sont impressionnants. Mais la synthèse de ces données n’a de sens que si les États eux-mêmes sont prêts à s’unir et à combiner leurs potentiels pour des activités communes. En d’autres termes, s’ils subordonnent leurs ressources à la réalisation d’un objectif commun et créent des mécanismes spéciaux, réellement opérationnels et efficaces à cette fin.
Peut-on dire que tout cela est déjà acquis pour les BRICS ? Ce serait une affirmation hasardeuse. Le rôle des BRICS n’est pas encore allé au-delà d’une plateforme consultative. Oui, important. Oui, progressif. Oui, ils influencent l’état d’esprit de nations entières et sont extrêmement prometteurs. Mais il manque encore beaucoup de choses. Il n’existe pas d’institutions systémiques d’interaction. Il n’y a pas de leviers pour la coordination quotidienne des positions. Il n’y a pas de définition d’objectifs communs. En conséquence, il n’y a pas d’orientation politique et économique commune. Tout cela n’est pas encore en place.
Sur le plan institutionnel, les BRICS n’atteignet pas le niveau non seulement àde l’Union européenne, mais aussi de structures d’intégration telles que l’ANASE, le Mercosur, la CDAA (Communauté de développement de l’Afrique australe). Ces associations ne doivent pas non plus être idéalisées, mais elles ont bien progressé sur de nombreux points. Elles disposent déjà d’instruments de marché communs. Elles ont mis au point des moyens de réagir ensemble aux catastrophes naturelles. D’autres mécanismes relatifs aux questions de sécurité ont été affinés.
Quels sont les atouts dont disposent malgré tout les BRICS ? En 2015, la Nouvelle banque de développement a été créée. Elle est désormais dirigée par Dilma Roussef, dont le mandat a été prolongé. À cet égard, je me souviens d’une rencontre avec elle il y a quelques années, avec une délégation du KPRF conduite par G.A. Ziouganov. Notre conversation a eu lieu à Moscou et a confirmé l’opinion selon laquelle Dilma est une personne qui vise à renforcer les BRICS de toutes les manières possibles. Et, bien sûr, cela exprime directement la vision du monde de Mme Rousseff, qu’elle poursuit en tant que femme politique de gauche.
Au cours de son existence, la Banque des BRICS a déjà financé une centaine de projets pour un montant total de 33 milliards de dollars. Mais est-ce beaucoup ou peu ? À titre de comparaison, on peut citer la Banque asiatique de développement, dont le siège se trouve à Tokyo. Rien que l’année dernière, elle a dépensé 24 milliards de dollars pour mener à bien ses missions.
L’indépendance de la banque des BRICS dans le système financier mondial soulève également quelques questions. Par exemple, en mars 2022, elle a suspendu toutes ses transactions avec la Russie. Cette décision a été expliquée par la nécessité de suivre des « principes bancaires sains ». Il est clair qu’il s’agissait de la menace de sanctions occidentales. Les fondateurs de la banque n’étaient pas prêts à ignorer ce danger.
En termes de fonctions, les BRICS ressemblent aujourd’hui le plus à une autre organisation internationale, le G20, qui est également apparu en réaction à un système de gouvernance mondiale insuffisamment équitable. Contrairement au G7, il comprend des pays tels que la Chine, l’Inde, la Russie, l’Afrique du Sud, le Brésil et la Turquie.
Les thèmes des sommets du G20 ne diffèrent pas beaucoup de l’ordre du jour des réunions des BRICS. On y parle aussi de la nécessité d’améliorer le système financier mondial, de réformer l’OMC et l’ONU, de lutter contre le protectionnisme… Ces déclarations du G20 n’ont pas de conséquences réelles. Le caractère décoratif du G20 apparaît de plus en plus clairement. Son rôle est essentiellement de donner l’illusion de l’égalité dans la politique mondiale, alors qu’en réalité elle est totalement absente.
À ce stade, les BRICS semblent plus convaincants et plus prometteurs. C’est exactement ce qu’indique la dynamique d’expansion de l’association. Mais pour l’essentiel, ils n’ont pas encore dépassé le rôle joué par le G20. Quel que soit l’angle sous lequel on les considère, les BRICS réunissent des États dont le système capitaliste est prédominant. En tant que tel, il est difficile de lutter de manière cohérente pour un monde juste.
Qu’est-ce qui attire donc les différents pays vers les BRICS ? Il convient de rappeler que les masses populaires et les travailleurs sont réellement intéressés par la formation de relations justes et équitables, tant au sein de leur pays que sur la scène mondiale. C’est ce que confirme les sondages dans différentes parties de la planète.
Chaque fois, les études montrent que la majorité absolue des peuples rejette l’hégémonie de l’Occident, le diktat du système du dollar, l’étranglement de la dette par le FMI, la politique des sanctions, les « interventions humanitaires » et tout la « panoplie démocratique » des impérialistes. Dans ces conditions, les dirigeants d’un certain nombre de pays capitalistes sont contraints de s’adapter aux exigences de l’opinion publique.
En outre, les dirigeants des États qui aspirent à rejoindre les BRICS ont leurs propres motivations. Par exemple, le désir d’étendre leur liberté d’action et de ne pas être si souvent dans les griffes des « demandes » et des « souhaits » de Washington. Ces hommes politiques savent ce qu’ils peuvent exploiter. En l’absence de règles internes strictes et d’engagements clairs, l’adhésion aux BRICS leur permet de faire monter les enchères dans les négociations avec l’Occident.
Le comportement de la Turquie à cet égard est tout à fait caractéristique. Presque simultanément à l’annonce de son intention de rejoindre les BRICS, le ministre des affaires étrangères Hakan Fidan assistait à une réunion des ministres des affaires étrangères de l’UE. Il y a confirmé que l’adhésion à l’UE restait l’objectif stratégique d’Ankara. « La relance des relations Turquie-UE est dans l’intérêt de tous. Il est nécessaire de reprendre les mécanismes de notre dialogue », a déclaré le diplomate.
La Turquie continue de développer sa coopération militaire et technique avec les États-Unis et l’Union européenne. Elle participe activement aux travaux de l’OTAN. N’oublions pas qu’Ankara fournit des armes au régime de Zelensky en Ukraine.
Pour évaluer le rôle des BRICS, un autre fait mérite d’être mentionné. En 2016-2022, les présidents brésiliens de droite Michel Temer et Jair Bolsonaro ont continué à participer aux sommets de cette organisation. Même en suivant ouvertement la politique de Washington, ils n’ont vu aucun problème à approuver les déclarations très évasives des BRICS. Rien de plus n’était exigé d’eux lors des sommets.
Imaginons maintenant que les différences de positions entre les États membres des BRICS aient été surmontées et que cette organisation internationale atteigne un haut degré de cohérence monolithique. Même dans ce cas, la question de son rôle mondial serait problématique.
Les BRICS peuvent-ils devenir la locomotive d’un mouvement vers un ordre mondial juste ? Oui, la tâche la plus importante, à savoir l’élimination de l’hégémon planétaire, peut être accomplie. Les BRICS peuvent jouer leur rôle historique à cet égard, et c’est la valeur incontestable de cette organisation.
Mais il faut voir plus loin. Le futur monde multipolaire sera-t-il juste et sûr ? Rappelons-nous les événements du début du XXe siècle. D’une certaine manière, le monde était déjà multipolaire à l’époque. Mais cela n’a pas épargné à l’humanité la tragédie de la Première Guerre mondiale !
Aujourd’hui, à Pékin, ce n’est pas un hasard si l’accent n’est pas mis sur un monde multipolaire, où un pôle serait remplacé par plusieurs centres de pouvoir. Les dirigeants chinois préfèrent parler d’un monde multilatéral. Pour le PCC, chaque nation et chaque pays a le droit de se développer de manière indépendante, et non de choisir sur quel prétendant hégémonique s’appuyer.
Hélas, tous les membres des BRICS n’expriment pas leur désir d’un monde juste aussi clairement que, par exemple, la Chine ou l’Iran. Il existe encore aujourd’hui sur la planète de nombreux régimes bourgeois qui ne voient pas d’inconvénient à profiter de l’exploitation et de l’expansion au même titre que les puissances occidentales. Sauf qu’il s’agit d’une échelle beaucoup plus petite, car leurs ressources sont incomparablement moindres que celles de l’OTAN.
Prenons par exemple la situation en Afrique du Sud. Ce pays possède un riche héritage de lutte contre l’apartheid. Les sentiments de gauche et anti-impérialistes sont largement répandus dans la société. À cet égard, les autorités sud-africaines soulèvent clairement des thèmes de justice sur la scène mondiale. Toutefois, les chiffres indiquent que l’Afrique du Sud elle-même se classe au premier rang mondial en termes d’ampleur des inégalités.
Et comment les choses se présentent-elles en Inde ? Au sein du gouvernement de ce pays siègent des personnes qui puisent volontiers dans les forces nationalistes les plus sombres et les plus dures. Prêts à provoquer des conflits sectaires, ils déclarent que les communistes indiens sont des « groupes de pression antinationaux ». Le cabinet Modi entretient des liens étroits avec les clans Adani, Ambani et d’autres oligarques. Ces familles se sont fabuleusement enrichies ces dernières années, alors que des millions d’Indiens vivent dans une pauvreté effrayante.
Les Émirats arabes unis sont un autre membre des BRICS. Un peu plus de 10 % de la population jouit de droits civils. Les autres, originaires de l’Inde, du Pakistan, du Bangladesh et d’autres pays, constituent une main-d’œuvre bon marché et privée de ses droits. Sa tâche est d’assurer la prospérité de la « monarchie pétrolière ». Des bases militaires américaines se trouvent sur le territoire des Émirats arabes unis. Les autorités du pays n’ont pas l’intention de rompre les relations diplomatiques avec Israël, malgré les crimes commis par l’État juif à l’encontre de plusieurs pays arabes.
En septembre, le président des Émirats arabes unis, Sheikh Mohammed bin Zayed Al Nahyan, s’est rendu aux États-Unis. Au cours des réunions, les deux parties ont convenu de renforcer l’accord de coopération en matière de défense conclu en 2017. Le département d’État a ensuite approuvé un accord de 1,2 milliard de dollars pour la vente aux Émirats de missiles ATACMS, de projectiles GMLRS et de systèmes connexes.
Les Émirats arabes unis n’utilisent pas leurs capacités militaires uniquement à des fins de défense. Leur gouvernement est intervenu dans le conflit au Yémen, luttant contre le mouvement Houthi. En outre, les Émirats ont soutenu l’une des parties dans la sanglante guerre civile au Soudan.
L’Arabie saoudite recevra encore plus d’armes des États-Unis dans un avenir proche. La coopération militaro-technique entre ces deux États se poursuit.
Ajoutons à ce tableau général la situation de l’Égypte. Ce pays est un autre membre des BRICS. Dans le même temps, il est le deuxième bénéficiaire d’une aide militaire à grande échelle de la part des États-Unis, après Israël.
Comme on le sait, Washington n’a cessé de construire ses blocs anti-Chine ces dernières années. Avec le Japon, l’Australie, les Philippines et la Corée du Sud, il cherche à entraîner l’Inde dans ce processus. Hélas, aujourd’hui, on ne peut pas dire que New Delhi oppose toujours un « non » ferme à toutes ces tentatives.
Deux membres des BRICS, l’Égypte et l’Éthiopie, sont au bord d’un conflit armé. Cela s’explique notamment par leur refus de s’entendre sur la question des ressources en eau. Une autre pierre d’achoppement est la division des sphères d’influence dans la Corne de l’Afrique.
Ainsi, aux yeux des autorités d’un certain nombre de pays, la multipolarité est une bonne occasion d’obtenir leur propre sphère d’influence, même si elle est très localisée. Bien entendu, les groupes de pouvoir ne comptent pas utiliser cette sphère d’influence pour affirmer le principe de l’amitié des peuples dans la politique mondiale. Leur objectif est leur propre enrichissement.
Il est compréhensible et tout à fait naturel que les activités des BRICS suscitent des questions. Les dirigeants de l’association s’efforcent de répondre à certaines de ces questions. Par exemple, ils soulignent que les BRICS n’en sont qu’à leurs débuts, que l’organisation ne s’oppose à personne, pas même aux États-Unis, et que les États membres sont en faveur d’un monde regroupé autour de l’ONU. Il ne fait aucun doute que ces approches ont un sens profond. Mais cela n’enlève rien au droit et même à la nécessité de soulever des questions sur le sort des BRICS. Y compris des questions complexes et aiguës.
Phénomène très utile, les BRICS peuvent résoudre un certain nombre de tâches internationales importantes. Comme l’a montré le sommet de Kazan, c’est déjà le cas. Le reste doit être mesuré à l’aune des objectifs. Si l’objectif principal est un système juste de relations internationales, il ne sera pas facile d’accomplir cette tâche avec le « matériel disponible ». La possibilité de créer un monde vraiment juste n’apparaîtra que lorsque les régimes bourgeois seront remplacés par le pouvoir aux travailleurs.
Cela ne signifie pas que les communistes doivent renoncer à l’avenir des BRICS et les enterrer avant l’heure. Au contraire, les partisans du socialisme devraient aider l’association à réaliser son énorme potentiel.
Le 26 octobre, lors du plénum du comité central du KPRF, G.A. Zyuganov a souligné : « Avec l’aide des communistes, les peuples du monde doivent prendre conscience de la profondeur des problèmes créés par la réaction impérialiste. Le danger d’une guerre mondiale avec l’utilisation d’armes nucléaires est une menace pour toute l’humanité, pour toute vie sur notre planète. Le capitalisme est dangereux et il faut s’en débarrasser ! ». Telle est en effet la nature des menaces qui pèsent aujourd’hui sur le monde.
Tout ce qui peut contribuer à limiter les pires scénarios pour l’humanité doit être soutenu par la gauche. Nous soutiendrons les activités des BRICS, de l’OCS, de l’ANASE, de l’OTSC et d’autres organisations visant à assurer la sécurité collective, la coopération économique et le développement social. En même temps, l’essentiel pour nous, communistes, est de toujours voir l’objectif général. Cet objectif est la transformation socialiste de la société.
D.G. NOVIKOV,
Vice-président du comité central du KPRF,
Premier vice-président de la commission des affaires internationales de la Douma d’État
Views: 0