Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Faire confiance aux médias occidentaux n’est pas seulement stupide, mais dangereux, par Irina Alknis

Cette réflexion sur l’évolution des médias occidentaux n’est pas seulement de bonne guerre de la part des Russes dont les occidentaux ne cessent d’inventer une soumission totale à une propagande de Poutine dont la seule ligne de conduite serait la malveillance, mais elle dit une vérité importante sur l’engourdissement de l’intellect qu’engendre la censure occidentale. Il suffit de suivre LCI, une manière de record dans le genre et qui pourtant donne le “la” à toute la presse, y compris l’Humanité de Kamenka… Être “objectif”, c’est sacrifier un peu à cet enfumage permanent et là il faudra bien mesurer l’influence que cette “objectivité” a eu et continue d’avoir y compris sur les formes de “radicalité” de l’opinion occidentale… Il y a eu des communistes prêts à voter des amendements qui sont de purs délires anticommunistes sur la Chine pour atteindre cette “objectivité” mediatico-politique… Non ! il faut une fois pour toutes revendiquer comme nous le faisons ici dans Histoireetsociete la volonté de construire ce que l’on sait de la réalité du monde, de la nôtre, les possibles et les obstacles à ce qui est notre but. Il faut impitoyablement dénoncer ce qui se prête à cet enfumage “informationnel” qui au meilleur des cas frappe d’inertie, au pire nous incite à la guerre. Je dois dire que je ne suis toujours pas revenue à ce titre de la prestation la plus ignare et pédante, celle de la “politiste” Clémentine Fauconnier qui a pu installer avec la bénédiction des organisateurs 45 minutes de LCI dans l’université du PCF en jouant comme il est dit ici apparemment sur “la distanciation prudente” et sur le niveau de partialité incompétente des études russes en France. C’est une véritable tragédie pour notre pays et qui malheureusement correspond à une attaque contre la recherche et l’enseignement en France avec des crédits de plus en plus sélectifs et raréfiés dominés par le consensus idéologique (note de Danielle Bleitrach, traduction de Marianne Dunlop)

https://vz.ru/opinions/2024/8/30/1284507.html

Dans l’affaire de Pavel Dourov, ou plutôt autour de cette affaire, il y a une circonstance curieuse : les médias occidentaux s’y intéressent très peu. Face au tsunami des réseaux sociaux, les médias traditionnels semblent profondément indifférents. Non, bien sûr, ils écrivent sur l’affaire, mais de plus en plus sous forme de notes sèches et quelque part en arrière-plan. Ni la détention, ni la libération conditionnelle avec la perspective d’une peine de dix ans de prison pour le créateur de cette messagerie archi populaire n’ont fait la une des principales publications de la planète. De manière caractéristique, le conflit de Dourov avec l’État russe il y a quelques années a fait l’objet d’une couverture beaucoup plus enthousiaste et active.

Ce comportement des médias a été remarqué par de nombreuses personnes, et différentes versions ont même été avancées pour expliquer pourquoi, en fait, le courant dominant des médias occidentaux n’ignore pas vraiment l’affaire Dourov, mais la couvre plutôt mollement. En général, il importe peu de savoir laquelle de ces hypothèses est la bonne, l’essentiel étant que tout le monde se rende compte que cette distanciation prudente est une mise en scène. Quelqu’un quelque part, pour quelque raison que ce soit, a décidé que les médias ne devaient pas trop couvrir ce sujet – et ils ont obéi.

L’engagement et la contrôlabilité des médias occidentaux n’est une révélation pour personne dans le monde d’aujourd’hui. L’époque où ils étaient perçus comme la voix libre de la vérité et de l’indépendance d’opinion est révolue depuis longtemps. Au cours de la dernière décennie, même les médias les plus respectés et faisant autorité sont devenus si ouvertement propagandistes qu’ils ont perdu la plus grande partie de leur ancienne influence. Non pas en Russie, mais auprès de leur propre public occidental.

Dans notre pays, cependant, l’attitude à l’égard des médias occidentaux reste ambivalente. D’une part, il est évident pour nous – par l’exemple de ce qu’ils écrivent habituellement sur la Russie – plus encore que pour les Occidentaux, qu’ils sont trompeurs et partiaux. Nous y lisons des calomnies si monstrueuses, des analyses si ridicules et des opinions tout simplement absurdes sur nous-mêmes que nous avons depuis longtemps perdu tout respect pour les médias de ces pays. Mais, d’un autre côté, nous nous fions encore largement à ce qui y est écrit – mais nous ne devrions pas le prendre pour argent comptant. Surtout dans les rares cas où la Russie y est louée ou, du moins, ses réussites reconnues. Dans de tels cas, de nombreuses personnes cessent immédiatement de faire preuve d’esprit critique et commencent à accepter ce qui est dit et écrit comme étant la vérité en dernière instance : le New York Times l’a écrit, et donc c’est vrai.

En même temps, un refus total de prendre connaissance de ce qui s’écrit en Occident – à la fois en général et à notre sujet en particulier – n’est pas non plus judicieux. Notre propre histoire nous rappelle les dangers du fruit défendu des médias. Les tentatives de la censure soviétique de couper complètement toutes les sources d’information occidentales n’ont fait qu’alimenter les efforts des citoyens soviétiques pour écouter les « voix » occidentales en leur faisant de plus en plus confiance. En fait, l’Occident suit aujourd’hui les traces de l’URSS : ayant perdu la course géopolitique et économique, il tente maintenant de couper purement et simplement toutes les sources d’information alternatives (cf Pavel Dourov et Telegram), dans l’espoir de pouvoir étouffer, par une propagande agressive, les questions et le mécontentement des personnes confrontées à une détérioration systémique de leurs conditions de vie.

En outre, le niveau catastrophiquement bas des études russes en occident aujourd’hui, y compris du journalisme, a eu dans de nombreux cas l’effet inverse sur la société russe, en renforçant le soutien à l’État et aux politiques des autorités. Mais il existe d’autres exemples où les publications des médias occidentaux sont utilisées en Russie à des fins ouvertement malveillantes et anti-étatiques.

La question qui se pose alors est la suivante : que devons-nous faire dans une telle situation ?

La réponse est simple : lorsque nous prenons connaissance des publications de la presse occidentale, n’oublions jamais que leur programme – du premier au dernier mot – ne vise que les intérêts et les objectifs de leurs clients. Et quels qu’ils soient, ils ne sont pas de ce côté-ci de la frontière.

C’est particulièrement vrai en ce qui concerne le conflit en Ukraine, tous ces innombrables rapports d’initiés sur le déroulement des hostilités, les négociations prévues et les accords prétendument déjà conclus. Et même s’il nous semble que ces informations jouent en faveur de la Russie, ce n’est qu’une illusion. L’information joue toujours en faveur des maîtres des médias, y compris dans les buts les plus malveillants, comme celui d’induire la société russe en erreur et de la pousser à des actions dangereuses pour le pays. Sans parler des publications que nous prenons pour notre propre compte, alors qu’il s’agit en fait d’intrigues de politique intérieure pour ce pays, et que la « carte russe » est jouée comme un atout.

L’Occident en est venu à croire en l’omnipotence de son quatrième pouvoir, en la capacité de ses médias à imposer n’importe quelle image au public, à implanter n’importe quelle attitude dans l’esprit des gens, à obtenir d’eux n’importe quel comportement désiré.

Cependant, il est possible et même facile de résister à cette approche. Il faut pour cela faire preuve de bon sens et d’un scepticisme sain. Nos concitoyens ne manquent pas de ces qualités.

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