Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Le charbon a façonné le caractère des habitants de Donetsk, par Serguei Mirkine

Où grâce à Marianne, pas seulement la traductrice mais celle qui connait au fond ce monde russe, nous découvrons que ce n’est pas un hasard si les “rebelles” du Donbass ont conservé le nom de la ville de Toretsk alors que les “ukrainiens” atlantisés l’ont débaptisée… C’est la mémoire de Thorez, la solidarité avec le parti communiste français mais aussi le mineur de fond du Pas-de-Calais… ce patriotisme qui s’est construit sur tant de migrations… Nous dédions cette analyse à notre camarade Hervé Poly et à tous les camarades du Pas-de-Calais et au journal Liberté qu’ils sont en train de créer, à leur préoccupation de la réindustrialisation de la France… (note de Danielle Bleitrach et traduction de Marianne Dunlop pour histoireetsociete)

https://vz.ru/opinions/2024/8/25/1283496.html

Le 25 août est doublement un jour férié à Donetsk. La journée du mineur et la journée de la ville sont célébrées ici en même temps, le dernier dimanche d’août, une tradition qui s’est établie depuis le milieu des années 1980. Le charbon a toujours joué un rôle crucial dans le développement de la ville, quel que soit son statut ou son nom. Donetsk est née de la colonie qui s’est développée autour de l’usine métallurgique fondée par le Britannique John Hughes, et en 2024, la ville a fêté son 155e anniversaire.

Cette date est à prendre au conditionnel, car avant la construction de l’usine, il existait sur le territoire de l’actuelle Donetsk de petites localités, Semenovka, Grigorievka, Aleksandrovka, Larinka, Krutoyarovka. Les habitants de ces régions extrayaient le charbon pour leurs besoins domestiques à l’aide de pelles ordinaires, là où les gisements se trouvaient presque à la surface. Les premières mines et les premiers puits sont apparus dans les années 40 du XIXe siècle : en 1841, la mine Alexandrovsky, en 1842, la mine Guryevskaya.

À la fin des années 20 du siècle dernier, le Donbass fournissait 30,7 millions de tonnes de houille sur les 40 millions de tonnes produites par l’ensemble de l’Union soviétique.

C’est pourquoi, dans les années 1920-1930, beaucoup de gens sont venus à Donetsk – les salaires dans les entreprises charbonnières étaient parmi les plus élevés du pays. Certains sont retournés dans leur pays d’origine après avoir gagné de l’argent, mais beaucoup sont restés, ont fondé des familles et se sont enracinés dans le Donbass. Par conséquent, lorsqu’on dit que le Donbass est une terre de migrants, c’est vrai. Et c’est la présence de personnes de différentes ethnies et de différentes régions qui a créé une ambiance culturelle unique dans le Donbass.

Pendant la Grande Guerre patriotique, les mines et les entreprises industrielles de la région qui n’ont pas été détruites pendant les combats l’ont été par les nazis allemands avant leur retraite. En 1943, le New York Times a publié un article dans lequel l’auteur, se référant à l’avis d’experts britanniques dans le domaine de l’exploitation minière, écrivait : « Le Donbass est perdu pour la Russie soviétique… Il faudra des décennies pour le restaurer… ». Mais les experts se sont trompés, les mines ont été restaurées à un rythme effréné.

Dans l’après-guerre, l’industrie charbonnière de la région s’est développée : de nouvelles mines ont été ouvertes, de nouveaux filons se sont développés. La situation a changé lorsque le Donbass est devenu une partie de l’Ukraine indépendante. L’idée populaire en Ukraine était de détruire complètement l’industrie du charbon. Ses partisans étaient convaincus qu’il serait moins coûteux d’acheter du charbon à l’étranger que de financer leurs propres mines.

L’attitude des autorités ukrainiennes à l’égard de l’industrie du charbon et du Donbass est bien illustrée par une histoire qui a fait le tour de la région dans les années 1990. Les directeurs des mines du Donbass ont fait appel au président ukrainien de l’époque, Leonid Koutchma, pour lui demander d’investir dans l’industrie du charbon afin de la moderniser. Le chef de l’État leur a répondu quelque chose comme : « Vous prospérez sur le charbon du Donbass et vous demandez encore de l’argent ».

Koutchma n’a peut-être pas dit une chose pareille, mais cette histoire reflète bien la façon dont les habitants du Donbass ont perçu l’attitude des autorités ukrainiennes à leur égard et à l’égard de leur région.

Après le coup d’État en Ukraine en 2014, l’industrie du charbon dans la DNR non reconnue a survécu tant bien que mal. Après la réunification du Donbass avec la Russie, l’espoir d’une nouvelle renaissance de l’industrie, comme cela avait été le cas après la Grande Guerre patriotique, s’est toutefois fait jour.

En 2023, le gouvernement russe a élaboré un concept de réforme de l’industrie du charbon dans la DNR et la LNR. Les investisseurs russes se tournent vers l’ industrie houillère de la DNR. Mais, bien sûr, une relance globale de l’industrie n’est possible qu’après notre victoire complète.

Un jour, j’ai discuté avec un ami des raisons pour lesquelles Donetsk, en 2014, a pu opposer une résistance décente au régime de Maïdan et lui résister, alors que Kharkiv, où vit davantage de monde, n’a pas pu le faire. Nous avons alors mis en évidence plusieurs facteurs.

L’un des principaux est le caractère de Donetsk, qui est inhérent aux habitants de la ville et qui est particulièrement évident lorsque notre peuple est forcé de se plier et d’accepter la volonté et les valeurs de quelqu’un d’autre.

Le caractère de Donetsk repose en grande partie sur la vie des mineurs : les personnes qui n’ont pas de « colonne vertébrale » n’ont rien à faire dans la mine – elles ne pourront pas travailler longtemps dans ces conditions. Un combattant de la milice de la DNR et ancien mineur portant l’indicatif « Katso » a parlé des mineurs qui ont rejoint la milice populaire : « Nous n’avons pas peur de la boue, nous n’avons pas peur de l’eau, nous sommes habitués à travailler dans l’eau jusqu’à la taille ou à rester debout dans la gadoue, dans la boue. Et nous pouvions travailler en deux équipes, alors que les gens qui sont arrivés pour la première foiss dans les tranchées, les fosses, la boue, beaucoup se sont sentis perdus. Ce n’est pas grave, les gens ont survécu, ils ont dépassé ce stade.

Donetsk et le charbon sont inextricablement liés, il est difficile d’imaginer la ville sans les mines et le Donbass sans l’exploitation du charbon. Le charbon a joué un rôle crucial non seulement dans le développement de Donetsk, mais aussi dans la formation de la vision du monde de ses habitants. Et j’aimerais croire que grâce à la Russie, l’industrie du charbon dans la région minière recevra un puissant élan de développement.

Mais pour cela, nous devons d’abord gagner.

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