Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Pourquoi les médias cachent-ils le vrai visage du leader de la droite vénézuélienne, Maria Machado?

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Investig Action publie cet article de José Antonio Egido, un camarade basque qui a longtemps enseigné au Venezuela comme professeur de sociologie. C’est un internationaliste qui a une connaissance théorico-pratique y compris individuelle de la répression impitoyable de la CIA et de ses agents en particulier dans le monde hispanique… Sa vie entière témoigne de ce combat acharné pour la liberté… et la justice sociale en tant que basque face à la permanence du franquisme, en tant que militant internationaliste en Amérique latine, il fut mon étudiant à Aix en Provence et il m’accueillit à Caracas … (note de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)

José Antonio Egido

Libération s’approche légèrement de son vrai profil lorsqu’il la qualifie d’ « ultralibérale ». Tout comme le journal Ouest France lorsqu’il l’appelle « la Margaret Thatcher vénézuélienne »

Pour le reste des médias, elle est une grande défenseure de la démocratie, des libertés et des droits humains. En 2005, le New York Times la présente comme « jeune femme à l’esprit vif… femme séduisante qui parle couramment l’anglais »; « défend les droits politiques des citoyens vénézuéliens». En juillet 2005, Christian Science Monitor la propose comme candidate de l’opposition : « Certains disent que Machado, éloquente et passionnée par ses idées, pourrait être la candidate qui unifierait et motiverait l’opposition ». En 2018, elle est nommée dans la liste de « 100 femmes » de la BBC en soulignant que « Maria est une dirigeante politique qui a fait campagne pour sauvegarder les processus démocratiques au Venezuela ». « Symbole de l’espoir pour des millions de vénézuéliens » dit le Washington Post, « Dame de fer portée par un mouvement populaire inédit » signale l’ExpressReuters publie que le gouvernement US exige que l’élection soit « compétitive et inclusive », ce qui veut dire pour ce gouvernement que la leader politique Machado la remporte car, en cas contraire, c’est une élection « frauduleuse » ou « profondément entachée d’irrégularités”.

Aussi elle est nommée « cheffe de l’opposition » par France24 et Le Figaro, en ignorant le fait qu’elle dirige en effet l’opposition la plus nombreuse, celle que cette dame et autres politiciens, avec le soutien des états-Unis, ont construit depuis le coup d’État échoué d’avril 2002. Mais pas de TOUTE l’opposition. Il y a aussi d’autres oppositions de droite, de centre et de gauche qui respectent l’ordre constitutionnel, reçoivent du soutien populaire mais pas des subventions de la part des institutions étasuniennes qui soutiennent Maria Machado depuis 2002. 

Pour connaître la réalité politique vénézuélienne et la réalité de la fraction de droite extrême dirigée par Madame Machado, il faut rappeler certains faits socio-historiques.

1. Elle est membre d’une famille de la vieille aristocratie blanche et esclavagiste, devenue élite pro US

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Henrique Machado Zuloaga, président de la principale compagnie sidérurgique privée et dirigeant des associations patronales, fils de vieille aristocratie esclavagiste, père de la « Margaret Thatcher » locale. 

Une des ancêtres de Madame Machado fut Maria Martinez de Villegas y Guevara, née en 1628, descendante, pour sa part, du « encomendero » (propriétaire d’exploitation esclavagiste) et maire de Valencia, Lorenzo Martinez de la Madriz au XVIe siècle et du conquérant espagnol de Caracas Juan Ladron de Guevara. Comme signale le chercheur Scott T. Patrick « le Vénézuéla colonial était caractérisé par un système d’encomienda produisant du tabac, du coton, de l’indigo et du cacao. Les peuples autochtones étaient essentiellement réduits en esclavage pour travailler dans d’immenses plantations pour le compte de seigneurs blancs ». « Notre » Maria Machado est aussi descendante de la saga des colonialistes basques Zuloaga depuis le XVIIIe siècle qui devinrent membre de l’oligarchie vénézuélienne au XXe siècle. Déjà ses parents appartiennent aux 20 grandes familles de l’oligarchie née de l’économie pétrolière néo coloniale du Vénézuéla, soumise aux USA. Le journal espagnol El Païs écrit qu’elle fréquenta un « pensionnat de Wellesley, dans le Massachusetts, les voyages en Europe… C’était une enfance protégée du contact avec la réalité », admet-elle ».

▷ María Corina Machado, la mujer que va «hasta el final» en las primarias  #9Oct - El Impulso

Maria Corina embrasse pour les élections un peuple qu’elle ne côtoie pas et ne connait pas. https://www.elimpulso.com/2023/10/09/maria-corina-machado-la-mujer-que-va-hasta-el-final-en-las-primarias-9oct/

Maria Corina Machado-01-Fidel Ernesto Vasquez

En dehors de la comédie politicienne, c’est une militante dure, cruelle, inflexible, partisane de la guerre, des coups d’État, des dictatures et de la violence https://fidelernestovasquez.wordpress.com/2013/05/02/maria-corina-machado-gritaba-maldito-maldito-maldito-chavez-es-un-maldito-chavez-se-murio-y-esta-ya-podrido/ 

2. Elle entre en politique en soutenant personnellement le coup d’État du 11 avril 2002 contre Chavez

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Maria Corina Machado signe en bas de page le document de son soutien personnel, le 11 avril 2002, à la tentative pustchiste de prise du pouvoir politique par la bourgeoisie compradore, une fraction militaire, la conférence épiscopale, les partis bourgeois et les médias privés avec le soutien de Washington. La « défenseure de la démocratie » entre en politique en soutenant un coup d’État de la très réduite et riche oligarchie de Caracas, contre le président Chavez. Coup défait par l’action rapide des masses en union avec les militaires patriotes. L’esprit revanchard de l’oligarchie s’exprime dans le mot d’ordre habituel de Maria : « Llego la hora de cobrar » (il est temps d’être payé).

Los testigos de Puente Llaguno recuerdan y hablan | Clímax

Los testigos de Puente Llaguno recuerdan y hablan | Clímax

Des policiers putschistes soutenus par Machado tirent contre les chavistes, 1 avril 2002.

3. Elle est profondément associée aux plans de « change regime » du pouvoir étasunien.

En 2002, Maria Machado fonde l’ONG Sumate, décrit par la Maison Blanche en 2005 comme « groupe indépendant de la société civile démocratique du Venezuela, organisation non gouvernementale pour défendre les droits électoraux et constitutionnels de tous les citoyens vénézuéliens et pour surveiller et rendre compte de la performance des institutions électorales du Vénézuéla » avec du financement des États-Unis en compagnie d’autres dirigeants de droite, impliqués aussi dans le putsch de Carmona. The New York Times signale en 2005 : « Mme Machado ne cache pas ses liens étroits avec Washington, qui a fourni une aide financière à Súmate, l’organisation anti-Chávez de surveillance des élections qu’elle aide à diriger ».

Le président George W. Bush rencontre Maria Corina Machado dans le bureau ovale de la Maison Blanche, le mardi 31 mai 2005. Mme Machado est la fondatrice et directrice exécutive de Sumate, un groupe indépendant de la société civile démocratique au Venezuela. Photo de la Maison Blanche par Eric Draper

Photo de la Maison Blanche par Eric Draper

La visite en 2005 au Bureau Ovale où elle s’entretient avec le président Bush Jr. et donne avec lui une conférence de presse, signale le soutien public et officiel du pouvoir étasunien à cette dirigeante pour renverser la Révolution Bolivarienne et rétablir un régime néocolonial au Vénézuéla. En 2009, elle suit un cours du World Fellow Programs de l’Université de Yale. Il s’agit de la formation que donne le pouvoir des USA aux dirigeants étrangers pour qu’ils deviennent « décideurs » politiques chez eux, sous l’ombre de Washington. Comme signale le journaliste Ben Norton, elle devient la « figure clé du complot américain »

4. Elle dénonce une supposée fraude du gouvernement de Chavez en 2004 avec les mêmes arguments que ceux qu’elle emploie en 2024.

Hugo Chávez: ¿un riesgo regional? – DW – 17/08/2004

Accusation fallacieuse d’une opposition de droite toujours défaite par la voie électorale https://www.dw.com/es/hugo-ch%C3%A1vez-un-riesgo-regional/a-1299493 

Maria Corina Machado, avec l’ensemble d’opposition de droite soutenue par Washington, dénonça une « fraude » au référendum révocatoire de 2004, qui donna comme résultat un renforcement du soutien populaire au président Chavez, même si les observateurs internationaux ont déclaré que Chávez avait remporté haut la main la victoire, reconnaît The New York Times. Le Conseil National Électoral confirma qu’aucune fraude ne fut commise. Même le Centre Carter confirma qu’il n’y avait pas eu de fraude. Les cercles de pouvoir US soutinrent sa démarche. Larry Birns, directeur du Council on Hemispheric Affairs à Washington, déclara que Sumate « a fait tout ce qu’on attend d’une campagne politique. Ils ont joué un rôle coordonné ». Vingt ans après, la même Machado à la tête du même secteur pro USA de l’opposition de droite, répète les mêmes accusations de «fraude » contre le résultat des élections présidentielles de juillet 2024, qui ont donné la victoire à Nicolas Maduro. 

5.- Bénéficiaire des fonds publics et privés étasuniens 

L’ONG reçoit 2 millions de dollars de l’USAID, section du State Deparment des États-Unis pour préparer le référendum révocatoire pour renverser le président Chavez, selon l’avocate Eva Golinger. En 2005 « le bureau du procureur général l’a accusée, ainsi que trois autres responsables de Súmate, de trahison et d’autres crimes pour avoir accepté un financement américain afin d’organiser l’année dernière un référendum demandant aux électeurs s’ils souhaitaient destituer M. Chávez de la présidence ». Le Département d’État US réagit le 8 juillet 2005 en offrant son soutien à Machado et autres inculpés : « Nous sommes très déçus par la décision du 7 juillet d’un juge vénézuélien de juger les quatre dirigeants de l’organisation civique non gouvernementale Súmate pour « complot » pour avoir accepté une subvention de 31 000 dollars du National Endowment for Democracy (NED) afin de mener des activités d’éducation électorale. Les accusations du gouvernement vénézuélien contre Maria Corina Machado, Alejandro Plaz, Luis Enrique Palacios et Ricardo Estévez sont sans fondement. Les activités soutenues par le NED visaient à renforcer la participation des citoyens aux processus démocratiques et constitutionnels de leur pays. Súmate est une organisation civique respectée au niveau international, engagée dans la promotion de processus électoraux libres et équitables et dans le respect des droits fondamentaux. Ces actions judiciaires font partie intégrante d’une campagne du gouvernement vénézuélien visant à intimider les membres de la société civile qui exercent leurs droits démocratiques ». C’est évident que Mme Machado a construit son parti politique « Vente Venezuela » avec des fonds publics et privés des USA. En 2024, l’ex-journaliste brésilienne de Fox News, Patricia de Oliveira, signale que le lobby étasunien, Howard Stir Holdings, a donné 3,2 millions de dollars à Maria Machado pour céder PDVSA (compagnie publique de pétrole) à Chevron.

6. Elle soutient les soulèvements sanglants anti-gouvernementaux.

Le président de l’Assemblée, Diosdado Cabello, l’a accusée en novembre de 2014 « d’incitation à la violence, qui a fait 41 morts parmi les manifestants et les policiers ». Elle soutient le mouvement violent dit « La Salida » (La sortie) promue par l’autre leader de l’oligarchie Leopoldo Lopez Mendoza.

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Represion Protestas en Venezuela GNB (9)

7. Elle demande l’intervention militaire contre son propre pays, le Vénézuéla

Le sociologue argentin, Atilio Boron, signale : « En mars 2014, au moment où se déroulait la première des sanglantes guarimbas organisées par la droite vénézuélienne, Machado est apparue sur la scène internationale comme un inhabituel « ambassadeur suppléant » du Panama lors de la session du Conseil permanent de l’Organisation des États américains, utilisant cette tribune pour attaquer le gouvernement du président Nicolás Maduro. Machado était alors députée à l’Assemblée nationale de la République bolivarienne du Venezuela et, dans un acte de trahison flagrante, elle a ouvertement demandé, devant le Conseil permanent de l’OEA, que cette organisation ordonne une intervention militaire étrangère pour renverser le président Nicolás Maduro… tout au long de ces années, elle n’a cessé de demander l’intervention de forces étrangères pour renverser le gouvernement légitime de son pays ». Le quotidien espagnol El Pais reconnait que « pendant des années, elle a été en faveur d’une fin brutale du chavisme, avec l’aide des États-Unis. La dame dit en 2023 que la Révolution Bolivarienne « s’est installée comme un kyste dans la chair de notre nation, causant d’énormes dégâts ». Une façon de demander des solutions de violence contre le gouvernement de Maduro, les forces armées et le secteur de la population qui se pose aux côtés du gouvernement. 

8. Elle réclame publiquement des sanctions qui ont ravagé le Venezuela

Déjà en février 2015, Machado demande sur Voice of America, organisme de communication du Départment d’État, des sanctions économiques contre son supposé pays, le Vénézuéla. Le 1er novembre 2018, Machado, lorsque le pays est proche du collapse économique, demande encore plus de sanctions des USA contre l’économie vénézuélienne. Elle dit qu‘« il n’y a pas une crise mais un conflit contre un ordre criminel ». Comme signale le journaliste Carlos Fazio « Elle a également soutenu le pillage par des millionnaires, de richesses et d’entreprises publiques (telles que Citgo Holding Inc, Citgo PetroleumCorporation et MonómerosColombo Venezolanos, SA), ainsi que la saisie et le vol de 31 tonnes de lingots d’or vénézuéliens par la Banque d’Angleterre ».

9. Elle est complice active du coup d’État de 2019, lancé par Trump et Pompeo, dit « opération Guaidó »

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Un article du Wall Street Journal a identifié Machado comme l’un des quatre dirigeants du complot de coup d’État soutenu par les États-Unis, visant à renverser Maduro et à installer le « président par intérim » nommé par Trump, Juan Guaidó.

Ben Norton écrit : « C’était le moment de se lancer », a déclaré Machado au journal, qui la décrit avec euphémisme comme « l’une des leaders de l’opposition les plus intrépides ». Elle a déclaré qu’elle était l’une des membres de la cabale putschiste qui « avait une position plus rapide ».

10. Elle demande de privatiser PDVSA pour la livrer aux pétroliers US

 El Pais écrit : « La candidate à la présidence a proposé de privatiser l’entreprise pétrolière publique, Petróleos de Venezuela (PDVSA)… Cela inclut également Siderúrgica Venezolana, une entreprise dont son père (décédé cette année) était le président, avant qu’elle ne soit saisie ». Et de réduire la politique publique pour combattre la pauvreté et l’extrême pauvreté, l’analphabétisme et les maladies, et offrir des services sociaux de santé, logement, eau, électricité et communication, aux masses populaires : « Machado propose de réduire le filet de sécurité sociale » souligne aussi El Pais. Caractéristique de la haine traditionnelle de l’élite coloniale envers les noirs, métis, mulâtres et indigènes appauvris ?

11. Des rapports extrêmement étroits avec Israël.

En 2024, un document de Machado de 2018 fait surface, il demande au premier ministre d’Israël et au président argentin Macri, d’appliquer la force pour renverser le président Maduro.

En 2019, María Corina Machado a adressé un message spécial sur Twitter, à l’occasion du 71e anniversaire de l’indépendance d’Israël. Dans son message, Machado a commencé par exprimer sa « reconnaissance au peuple juif pour avoir réussi à construire une nation moderne, prospère et libre…» ; la leader de l’opposition a ainsi souligné que « la lutte du Vénézuéla est la lutte d’Israël ». 

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En juillet 2024, dans un entretien avec une TV israélienne, elle promet d’installer l’ambassade du Venezuela à Jérusalem, revendication sioniste.Amérique Latine

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